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Chapitre I. Fondements conceptuels et principes directeurs

4. Définition d’une palette élargie d’indicateurs du bien-être

4.2. Répartition des revenus

79. Il est difficile de fonder une évaluation pertinente de l’amélioration du bien-être matériel sur le revenu moyen ou médian, et il vaudrait mieux prendre en compte sa répartition. Ainsi, la 4ème recommandation du rap-port de la Commission Stiglitz-Sen-Fitoussi consiste à accorder davantage d’importance à la répartition des revenus, une requête d’autant plus urgente dans un monde où les inégalités ont tendance à se creuser. De manière spécifique, certaines études ont révélé que la majeure partie de la crois-sance des revenus enregistrée ces dernières années aux États-Unis est reve-nue à une poignée de ménages aux revenus les plus élevés. En France et en Allemagne, la situation semble plus complexe car les individus les moins bien rémunérés ont également bénéficié d’importants mécanismes de re-distribution des richesses par le biais d’impôts et subventions. En consé-quence, la classe moyenne a été comprimée par ces altérations survenant simultanément aux deux extrémités de la répartition des revenus.

80. Depuis quelques années, des données à un niveau individuel sont disponibles en France et en Allemagne, avec des données détaillées sur les transferts fiscaux et sociaux, ce qui permet une analyse fine de la répar-tition des revenus. En particulier, il est devenu possible de comparer la répartition des revenus avant et après ces transferts. Une étude réalisée ré-cemment en France tient même compte des services en nature pour chaque

Source : Eurostat.

4. Part des dépenses de consommation finale privée et publique (2009)

quintile de revenu, ce qui permet d’avoir un aperçu très détaillé de la situation.

Entre les revenus primaires et les revenus disponibles ajustés (c’est-à-dire qui tiennent compte des services en nature), environ 10 % des revenus pri-maires sont redistribués des deux quintiles les plus aisés au profit des deux quintiles les plus nécessiteux. Une large part de cette redistribution se fait par le biais des services en nature (tableau 3).

Bien qu’il puisse être très intéressant de réaliser ces analyses en vue de permettre des comparaisons internationales, il est assez difficile d’identi-fier un indicateur statistique harmoniséentre de nombreux pays. Au niveau de l’Union européenne, une enquête communautaire est menée auprès d’un panel de ménages et fournit des informations comparables (EU-SILC). En raison de sa taille (vaste, mais pas suffisamment), il est possible au mieux de procéder à des calculs sur les quintiles de population. Pour le moment, il convient de traiter les résultats tirés de cette analyse avec la plus grande prudence, notamment s’il s’agit de faire des comparaisons entre pays.

81. Si l’évaluation exhaustive de la répartition des revenus représente un défi important, le choix d’un indicateur qui en capture l’essence en est un autre. En fait, il existe de nombreuses manières de synthétiser la répar-tition des revenus :

• la plus générale est celle du coefficient de Gini car elle s’applique à la répartition globale. Dans la majorité des cas toutefois, le calcul de ce coef-ficient n’est pas facilement compris et il nécessite des informations dé-taillées et complètes sur l’ensemble de la répartition, y compris les revenus les plus élevés. Il permet de comparer la répartition réelle des revenus à une répartition hypothétique dans laquelle tout le monde perçoit le même re-venu : dans ce cas, le coefficient de Gini est de zéro. À l’autre extrême, si tous les revenus sont détenus par un seul individu, le coefficient est de 1 ;

3. Répartition des revenus des ménages en France (2003)

Lecture : Le cinquième quintile possède 42 % du total des revenus primaires.

Note : (*) Ménages ordinaires résidant en France métropolitaine, hors SIFIM.

Source : INSEE.

Quintile 1 Quintile 2 Quintile 3 Quintile 4 Quintile 5 Total (en milliards d’euros)

Revenu primaire(*) 5 12 17 24 42 1 140,2

Revenu disponible [1] 8 13 17 22 40 993,4

Transferts en nature [2] 25 21 19 18 18 229,5 Catégorie

x santé 21 22 21 18 19 97,8

x éducation 28 20 19 18 15 75,1

x logement 70 23 5 1 1 10,2

Revenu disponible ajusté [1] + [2] 11 15 17 21 36 1 222,9 En %

Portugal Grèce Royaume-Uni Espagne Italie UE 27 Zone euro Irlande Belgique Pays-Bas Finlande Autriche Norvège Danemark SuèdeAllemagne France 0

1 2 3 4 5 6 7 0 1 2 3 4 5 6 7

1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008

Royaume-Uni Italie France Allemagne

5. Inégalités de répartition des revenus : rapport interquintile de revenu (S80/20)

Source : Eurostat.

b. Niveau en 2008 a. Tendance

• le taux de pauvreté est souvent utilisé pour qualifier les disparités de répartition des revenus, mais il ne fournit des informations que sur les indi-vidus aux revenus les plus modestes. Cet indicateur est défini comme le pourcentage d’individus percevant un revenu disponible équivalent infé-rieur au seuil de risque de pauvreté, lui-même souvent fixé à 60 % du re-venu disponible national médian équivalent (après transferts sociaux). Il est destiné exclusivement à la quantification des risques de pauvreté, et ne nous dit rien sur la tranche supérieure de répartition des revenus ;

• l’indicateur le plus facile à calculer et à comprendre est le ratio de revenu entre les x % d’individus percevant les revenus les plus élevés et les x % d’individus percevant les revenus les plus faibles. Lorsque x est de 20 %, ce ratio est appelé S80/S20. Eurostat calcule régulièrement ce ratio du revenu total perçu par le quintile supérieur sur celui perçu par le quintile inférieur. Dans ce cas également, il faut comprendre « revenu » comme revenu disponible équivalent (graphique 5). Nous proposons d’inclure le ratio S80/S20 dans notre tableau de bord car c’est le plus facile à obtenir et à communiquer auprès du grand public.

82. Dans toutes ces analyses, la définition de revenu de référence est importante. De nombreuses études sur l’inégalité portent uniquement sur les salaires car ce sont les statistiques les plus faciles à obtenir. Pour nos besoins toutefois, il est nécessaire d’avoir un aperçu nettement plus large en incluant toutes les autres sources de revenu en plus du revenu du travail, de préférence sur la base de données exhaustives comme les statistiques fiscales. Pour passer du ménage à l’individu, il faut calculer les revenus par unité de consommation à l’aide d’un barème d’équivalence approprié (par exemple, 1 pour le premier adulte, 0,5 pour les autres adultes et les enfants de plus de 14 ans, et 0,3 pour les autres enfants) afin d’inclure toutes les économies d’échelle associées à la formation des ménages. On parle alors de revenu « équivalent ».

Dans l’Union européenne, les instituts de statistiques mettent en œuvre ensemble une enquête spécifique qui collecte déjà des informations sur la répartition (EU-SILC). En raison des différences de taille d’échantillon entre les pays dans EU-SILC, seule la répartition du quintile peut être déterminée de manière suffisamment fiable. À l’aide de ces données, on peut par exemple calculer le ratio S80/S20. En conséquence, nous suggérons d’inclure le rapport interquintile de revenu d’Eurostat dans notre tableau de bord (graphi-que 5). Dans tous les cas, il existe un besoin évident d’investir dans des enquêtes plus vastes et dans l’utilisation de sources fiscales afin d’améliorer ces données et d’être en mesure de calculer une répartition bien plus précise du revenu par habitant dans chaque pays de l’Union européenne.

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