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Rémunération des dirigeants et non-exécutifs

à travers deux illustrations : l’indépendance des administrateurs et la rémunération des dirigeants et des non-exécutifs

2. Rémunération des dirigeants et non-exécutifs

Un bref rappel de terminologie s’impose au préalable :

- dirigeants (« mandataires sociaux exécutifs ») : président du conseil d’administration (unicité des fonctions), directeur général et directeur général délégué, membre du directoire et son président

- non-exécutifs (« mandataires sociaux non-exécutifs ») : administrateur (en France : pas de mandataire social, mais dirigeant de droit, il peut être exécutif), président du conseil d’administration (dissociation des fonctions), membre du conseil de surveillance et son président

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La rémunération est devenue aujourd’hui un sujet très important et sensible dans la vie des sociétés, en particulier dans les grandes sociétés cotées. L’annexe 4 en présente les grands principes dans les différents codes de notre échantillon.

Traditionnellement, les règles de rémunération prévues dans les codes sont rédigées en termes très généraux. Est ainsi exigé, par exemple, que la rémunération soit « adéquate ». La crise financière et économique a conduit cependant à édicter davantage de règles sur la rémunération, dans les lois (rarement) et surtout dans les codes. Aujourd’hui, ces règles y sont de plus en plus détaillées, et variables. Elles concernent aussi bien l’organe compétent pour fixer la rémunération que les composantes et le montant de celle-ci.

2.1. Organe compétent

La rémunération des dirigeants est généralement fixée par le conseil d’administration/board ou le conseil de surveillance (règle imposée par le droit des sociétés,

i.e. la loi lato sensu), souvent assistés d’un comité des rémunérations. Ce dernier est fortement

recommandé par la plupart des codes étudiés (Hong Kong, Indonésie, Maroc, Russie, Suède, etc.), car il permet d’éviter les dérives. Ce comité des rémunérations est aussi souvent présidé par un administrateur indépendant, pour être plus objectif et plus crédible.

La rémunération des non-exécutifs relève quant à elle de la responsabilité des actionnaires réunis en assemblée générale (règle très souvent imposée par la loi au sens large). Il est pourtant souvent demandé aux actionnaires de se prononcer également sur les rémunérations de leurs dirigeants. Faut-il légiférer ici ou miser sur une autorégulation « exigeante » ? Les réponses varient selon les différents pays/codes, en ayant recours à des formules très diverses et variables. Certains codes (Taiwan, Liban) soumettent la détermination de la rémunération des administrateurs au schéma suivant : recommandation du comité de rémunération puis décision du conseil soumis à l’approbation de l’assemblée générale.

Dans des pays de plus en plus nombreux, le conseil d’adminis tration doit présenter à l’assemblée générale ordinaire annuelle les différents éléments de la rémunération des dirigeants. Cette présentation est souvent suivie d’un vote des actionnaires. C’est la règle dite

say on pay, qui est aujourd’hui appliquée dans beaucoup de pays (Afrique du Sud, Qatar ; le

premier pays à avoir prévu cette règle a été le Royaume-Uni), pour certaines composantes de la rémunération ou parfois pour tous les éléments de la rémunération, suivant des modalités variables, avec un vote tantôt contraignant, tantôt simplement consultatif. Si l’assemblée émet un avis négatif, le conseil doit souvent délibérer sur ce sujet, après avis du comité des rémunérations, et publier un communiqué mentionnant les suites qu’il entend donner aux

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critiques exprimées par les actionnaires.

2.2. Composantes de la rémunération

2.2.1. DES DIRIGEANTS

Les rémunérations peuvent comporter notamment :

- une rémunération fixe déterminée sur une base annuelle,

- une rémunération variable en fonction de critères quantitatifs ou qualitatifs, - des avantages en nature,

- une rémunération en titres de la société, - un régime de retraite supplémentaire, - des indemnités de fin de mandat,

- des avantages à l’arrivée pour les nouveaux dirigeants, etc.

La loi et les codes (Brésil, Suisse) tentent d’équilibrer les composantes variables et non variables de la rémunération. Ils recherchent des modes de rémunération incitatifs, permettant d’aligner les intérêts des dirigeants sur ceux des actionnaires et de la société. Les procédés sont souvent très complexes, et les dispositions (des différents codes) en la matière très techniques et assez détaillées. Celles-ci viennent souvent des États-Unis.

Les codes définissent très souvent des critères de performance en vue de la création de la valeur à long terme. Plus précisément, les critères choisis pour conditionner la rémunération variable sont, dans beaucoup de codes (Inde, Italie, Corée du Sud), des critères quantitatifs (critères internes, comme le chiffre d’affaires, et critères externes comme le cours de bourse) et qualitatifs (réalisation d’objectifs stratégiques, etc.) qui permettent de mesurer la performance. La réalisation de ces critères s’apprécie souvent sur une base annuelle, même si la tendance aujourd’hui à la mise en place des programmes d’évaluation sur plusieurs années (long terme).

La loi et les codes tentent aussi de différer une partie importante de la composante variable pendant un certain laps de temps, d’instaurer des dispositions contractuelles permettant de modifier les composantes variables et de limiter les indemnités de révocation dans certaines circonstances (Russie).

43 2.2.2. DES NON-EXECUTIFS

Cette question soulève un peu moins de controverses.

La rémunération n’étant pas obligatoirement liée à la présence, elle est souvent la contrepartie de la responsabilité du mandat social et non de l’assiduité du bénéficiaire. Il s’agit souvent d’une somme fixe (jetons de présence) répartie par le conseil entre ses membres.

Il est parfois recommandé dans les codes (Australie, Suisse), ou même imposé par la loi, que la rémunération des non-exécutifs ne comporte pas de part variable (en excluant par exemple des options d’achat d’actions), même si la majorité des codes l’autorisent (Brésil, Algérie, Corée du Sud). Autrement dit, certains codes écartent toute possibilité de rémunération variable pour ces personnes, d’autres autorisent au contraire cette forme de rémunération.

Si les rémunérations constituent un sujet sensible, quasiment la moitié n’abordent cependant pas la question qu’ils passent sous silence, complètement ou partiellement. Par exemple, le code de conduite indien est prolixe sur la rémunération des administrateurs, mais demeure silencieux sur celle des dirigeants. La différence est saisissante avec le code singapourien qui propose un schéma exactement inverse. Enfin, les codes de certains pays tels le Liban et le Maroc n’abordent même pas la question des rémunérations. Notons toutefois que c’est la loi qui intervient parfois pour régler cette question.

2.3. Montant des rémunérations

Il n’y a jamais de montant maximal assigné à la rémunération des dirigeants. En vertu d’un principe de cohérence, il est parfois précisé que « la rémunération du dirigeant mandataire social doit être déterminée en cohérence avec celle des autres dirigeants et celle des salariés de l’entreprise » (Code Middlenext).

En définitive, on peut observer une certaine convergence des grands principes en matière d’indépendance des administrateurs et de rémunération des dirigeants et des non- exécutifs, qui sont retranscrits dans différents codes nationaux. Mais dans les détails, ceux-ci varient encore de manière non négligeable. Comment ces différences peuvent-elles être expliquées ?

Chaque code dépend notamment des traditions financière, sociale, culturelle, politique, etc. propres à chaque pays (path dependency ou « dépendance au chemin emprunté ») ; les caractéristiques des sociétés et de leur actionnariat (dispersion ou non, par exemple) ainsi que des marchés financiers (développement, profondeur, etc.) varient

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également d’un pays à l’autre. Les codes nationaux traduisent nécessairement ces différences, ce qui explique pour partie la diversité des réponses apportées aux questions de la rémunération et de l’indépendance.

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Chapitre 2 - The Corporate Governance Codes in Germany and

France

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Katrin Deckert (Université Paris Nanterre, CEDCACE) Nicolas Rontchevsky (Université de Strasbourg)

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