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4. d. 1. Les PMEIs :

Les PMEIs ne sont pas seulement trouvés dans la PRO-région des PMEs mais existent aussi en protéines libres. Ces PMEIs pourraient donc inhiber aussi la dé-méthyl-estérification des HGs par les PMEs du groupe I qui ne possèdent pas la PRO-région. Ainsi, les PMEIs seraient capables de se fixer aux PMEs et inhiberaient ainsi leur activité de manière réversible. S'il est clair que le pH influence la formation et la stabilité du complexe PME-PMEI, il est aussi évident que cet effet est plus ou moins marqué en fonction du couple PME-PMEI considéré. Chez A. thaliana, les PMEs et PMEIs constituent des familles multigéniques de 66 et 76 membres putatifs, et des combinaisons spécifiques PME-PMEI pourraient donc exister selon les tissus et stades de développement considérés. Plusieurs analyses transcriptomiques montrent que des gènes codant des PMEs et des PMEIs sont co-exprimés au cours du développement chez

A. thaliana (Ko et al., 2004 ; Pina et al., 2005 ; Zhao et al., 2005 ; Peaucelle et al., 2008 ;

Minic et al., 2009; Wolf et al., 2009a ; Pelletier et al., 2010). Une analyse non-exhaustive de l'expression des gènes codant des PMEs et PMEIs au cours du développement, à partir des données publiques de transcriptomique, a permis de mettre en évidence cinq clusters d'expression distincts, dont chacun regroupe plusieurs gènes PMEs et PMEIs (Wolf et al., 2009a).

Le premier PMEI découvert et caractérisé a été isolé dans les fruits de kiwi (Actinidia deliciosa) (Balestrieri et al., 1990 ; Giovane et al., 1994, 2004). Ce PMEI de kiwi

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est capable d'inhiber l'activité des PMEs d'A. thaliana, in-vitro et in-vivo (Balestrieri et al., 1990). Ce n'est que plus tardivement que les PMEIs d'A. thaliana ont été caractérisés (Wolf et al., 2003 ; Raiola et al., 2004). Lorsque l'on compare la structure tridimensionnelle du PMEI de Kiwi avec le PMEI1 d'A. thaliana, on observe que celle-ci est constituée de 4 hélices α formant un faisceau central, et est également constituée d'hélices α en N-terminal (Figure 27).

Figure 27 : Structures tridimensionnelles des PMEIs de kiwi et d’A. thaliana.

(A) Structure tridimensionnelle de l’AcPMEI. Les hélices α formant le faisceau de quatre hélices α sont annotées α1, α2, α3 et α4 alors que les hélices α constituant la région N-term sont appelées αa, αb et αc (Di Matteo et al., 2005). (B) Structure tridimensionnelle de l’AtPMEI1 cristallisée sous forme dimérique. Les hélices α constituant la partie N-term sont annotées α1 et

α2, tandis que celles formant le faisceau de quatre hélices α sont appelées α4, α5, α6 et α7

(D'après Hothorn et al., 2004b).

Ces PMEIs sont capables de former un complexe stable avec les PMEs (Figure 28), permettant ainsi l'inhibition des PMEs in-vitro et in-vivo (Wolf et al., 2003 ; Raiola et

al., 2004 ; Lionetti et al., 2007). Lors de l’interaction entre la PME de tomate et le PMEI

de kiwi, cinquante acides aminés (23 sur la PME et 27 sur le PMEI) permettent d'établir le contact entre les deux protéines (Figure 28). Vingt deux acides aminés sont liés par des liaisons hydrogènes et quatre forment des ponts salins (Di Matteo et al., 2005). Les résidus impliqués dans le site catalytique et dans la stabilisation des intermédiaires catalytiques n'interagissent pas avec le PMEI alors que trois acides aminés aromatiques (Phe80, Tyr135 et Trp223), impliqués dans la liaison de la PME à son substrat, établissent un contact avec le PMEI, notamment au niveau de cinq acides aminés conservés (Thr73, Glu76, Asn77, Thr113 et Asp116). Ce dernier, en interagissant avec la PME, recouvre le sillon peu profond de l’enzyme où se trouve le site actif. Plus

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précisément, les hélices α2, α3 et α4 du PMEI se lient avec l’enzyme à proximité du site actif (Figure 28). De cette façon, le PMEI empêche la PME de se lier à son substrat.

Figure 28 : Structure du complexe PME de tomate (bleu-vert) -PMEI de kiwi (D'après Di Matteo

et al., 2005).

PB : feuillets-β pouvant être impliqués dans le complexe PME-PMEI. αa, αb, et αc sont les hélices-α de la région N-term, tandis que les 4 autres hélices-hélices-α de la PME sont numérotées de 1 à 4.

En fonction du PMEI et du modèle de développement considéré, les rôles des PMEIs semblent relativement complexes. L'implication des PMEIs dans le contrôle de la forme ainsi que dans la plasticité cellulaire lors de l'élongation a été étudiée via le méristème caulinaire apical. En effet, plusieurs études ont montré que la modification des pectines était un élément crucial dans la formation des organes. Plus précisément, le DM des HGs joue un rôle essentiel dans la formation des primordiaux floraux au niveau du méristème apical caulinaire (Peaucelle et al., 2008 ; Peaucelle et al., 2011 ; Braybrook et Peaucelle, 2013).

La surexpression chez A. thaliana des gènes AtPMEI1 et AtPMEI2 conduit à une diminution de l’activité PME et une augmentation du DM des HGs, stimulant l’allongement des cellules racinaires dans la zone d’élongation (Lionetti et al., 2007). La surexpression du gène AtPMEI3 chez A. thaliana conduit à l'inhibition de la formation des primordiaux, résultant d'une diminution de la dé-méthyl-estérification des HGs et d’une modification des propriétés physiques des parois (Peaucelle et al., 2008). De même, la surexpression de l’AtPMEI4 provoque un retard de croissance de l’hypocotyle étiolé, associé à des modifications du DM des HGs (Pelletier et al., 2010). Les mêmes conséquences phénotypiques (diminution de la croissance de l’hypocotyle à l’obscurité et de la racine principale) sont observées lorsque le gène AtPMEI5 est surexprimé chez

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particulier d’AtPMEI5 et d’AtPMEI6 dans la germination et la libération du mucilage chez

A. thaliana. Lorsqu’AtPMEI5 est surexprimé, il inhibe l’activité PME et augmente le

contenu en méthyl-ester dans la paroi (Müller et al., 2013). L’activité PME jouerait ainsi un rôle dans la régulation de l’émergence de la radicule en modifiant localement les propriétés mécaniques de la paroi entre la poussée de la radicule et les forces de résistance de l’endosperme. AtPMEI6 serait quant à lui impliqué dans l’excrétion du mucilage. En effet, le mutant pmei6-1 présente une augmentation d’activité PME totale, entraînant des modifications de la structure de la paroi qui affecte la libération du mucilage. Ceci est confirmé avec la complémentation du mutant pmei6-1 qui présente une libération du mucilage semblable à celle du sauvage (Saez-Aguayo et al., 2013). PMEI6 jouerait ainsi un rôle dans le contrôle du DM des pectines des parois des cellules à mucilage, ayant des conséquences sur la rupture de la paroi et la libération du mucilage.

4. d. 2. Les PMEIs / Inhibiteurs d'invertases :

Tout comme le domaine PRO des PMEs du groupe II, les PMEIs présentent aussi les mêmes similarités de séquences avec les inhibiteurs d'invertases, protéines localisées dans l’apoplasme et la vacuole. Les protéines sont de tailles similaires à celles des PMEIs mais inhibent spécifiquement les invertases qui interviennent dans le métabolisme du saccharose chez les plantes supérieures (Hothorn et al., 2004a ; Rausch et Greiner, 2004 ; Link et al., 2004 ; Hothorn et al., 2010). Si le pourcentage de similarité entre les PMEIs et les inhibiteurs d’invertases est relativement peu élevé (25 à 30 %), les quatre résidus Cys nécessaires à la formation des ponts disulfures sont hautement conservés (Scognamiglio et al., 2003 ; Giovane et al., 2004). Le cinquième résidu Cys porteur du groupement thiol libre, présent chez la majorité des PMEIs (Woriedh et al., 2013), est en revanche absent de toutes les séquences des Inhibiteurs d'invertases identifiées jusqu’alors (Scognamiglio et al., 2003). Ce cinquième résidu Cys pourrait de ce fait être un élément déterminant dans l’interaction spécifique PME-PMEI.

La cristallisation de l’AcPMEI (Di Matteo et al., 2005), d’un PMEI d’A. thaliana

AtPMEI1 (Hothorn et al., 2004b) et d’un Inhibiteur d’invertases (CIF) de tabac Nt-CIF

(Hothorn et al., 2003; Hothorn et al., 2004a) a permis de mieux appréhender les spécificités et différences de structures, existant entre les PMEIs et les inhibiteurs d’invertases (Hothorn et al., 2004b). L’AcPMEI est composé majoritairement d’hélice α.

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L’inhibition de l’activité PME se produit grâce à la formation d’un complexe inactif et stœchiométrique 1:1 entre la PME et le PMEI (Giovane et al., 2004 ; Jolie et al., 2010).

La cristallisation et la résolution de la structure tridimensionnelle du Nt-CIF ont permis de mettre en évidence un état monomérique de cet inhibiteur. Il présente le même type de structure tridimensionnelle que l’AtPMEI1, avec une structure très conservée au niveau du domaine central et des différences dans la région N-term (Hothorn et al., 2004b). L’affinité PME-PMEI et invertases-CIF serait liée à des différences observées dans l’extension N-term (Hothorn et al., 2004b). Une version tronquée de l’AtPMEI1, ne présentant plus l’extension N-term, inhibe l’activité PME seulement pour des doses très élevées, comparé au PMEI natif. Par ailleurs, une version chimère constituée de l’extension N-term du PMEI fusionnée au domaine central du CIF (XPMEI-CIF) inhibe l’activité PME, alors qu’une version du domaine central du PMEI fusionné à l’extension N-term du CIF (XCIF-PMEI) est incapable d’inhiber les activités PME et invertases dans les mêmes conditions (Hothorn et al., 2004b). L’extension N-term du PMEI fusionnée à un domaine central de quatre hélices α (structure hautement conservée entre PMEI et CIF) est donc suffisante pour inhiber l’activité PME. Au contraire l’inactivation de l’activité invertase par les CIFs est dépendante du domaine central. Cela suggère que les PMEIs et les inhibiteurs d’invertases ont développé des mécanismes d’inactivation différents et spécifiques, malgré leurs fortes similarités structurales.

I. 4. e. Implication des PMEs et des PMEIs dans le remodelage des