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Les pectines sont avec les XyGs, les polysaccharides complexes les plus abondants de la paroi primaire. Elles constituent 40 % de la paroi primaire chez A.

thaliana (Liepman et al., 2010). Les pectines sont majoritairement retrouvées dans la

lamelle moyenne, assurant ainsi la cohésion entre les cellules végétales, et dans la paroi primaire. Plusieurs polymères composent cette famille (Figure 17).

Chez A. thaliana, il avait été caractérisé trois domaines distincts : les homogalacturonanes (HG), les rhamnogalacturonanes de type I et II (respectivement RG-I et RG-II) (Zablackis et al., 1995). Mais ce n'est que bien plus tard que le xylogalacturonane (XG) a été identifié chez A. thaliana (Zandleven et al., 2007). Par la suite, d'autres composés pectiques ont été caractérisés chez la lentille d’eau comme l'apiogalacturonane (Schols et al., 1995 ; Hart et Kindel, 1970).

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Figure 17 : Structure des principaux constituants des parois de type I et vue de détail des polysaccharides pectiques majeurs.

Représentation schématique des xyloglucanes (XyG), des rhamnogalacturonanes de type I et II (RG-I et RG-II), des homogalacturonanes (HG) et des xylogalacturonanes (XG), d’après Wolf et al.

(2012a).

De nombreuses revues récentes décrivent la composition, la biosynthèse et les fonctions des pectines (Scheller et al., 2007 ; Mohnen, 2008 ; Caffal et Mohnen, 2009 ; Harholt et al., 2010 ; Fry, 2011) notamment lors de la morphogénèse des plantes (Palin et Geitmann, 2012). On estime que pas moins de 67 glycosyl-, méthyl- et acétyltransférases sont nécessaires pour l'élaboration des structures pectiques (Mohnen, 2008 ; Atmodjo et al., 2013) en plus des transporteurs et des enzymes d'interconversion de nucléotides sucres (Sandhu et al., 2009 ; Folley-Gueye et al., 2012). Leurs biosynthèses sont effectuées dans tous les compartiments de l'appareil de Golgi (cis, median et trans) puis ceux-ci sont sécrétés via des vésicules de sécrétions golgiennes (Driouich et al., 1993 ; Staehelin et Moore, 1995 ; Caffall et Mohnen, 2009 ; Chevalier et al., 2010 ; Driouich et al., 2012).

3. e. 1. Le rhamnogalacturonane de type I (RG-I) :

Le RG-I consiste en une chaîne principale du motif répété [α-(1-4)-GalA-α-(1-2)-Rha] sur laquelle des ramifications de chaînes α-(1-5)-arabinanes, β-(1-4)-galactanes et/ou arabinogalactanes de type I peuvent être trouvées en position C-4 des résidus rhamnoses (Figure 17) (Harholt et al., 2010). Le RG-I semble participer à la rigidification de la paroi. En effet, une paroi riche en chaînes galactanes sera deux fois plus rigide qu'une paroi dépourvue de ces chaînes (McCartney et al., 2000).

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Le RG-I est également présent dans la paroi cellulaire des tubes polliniques. Le marquage avec les anticorps LM6 et/ou LM13, reconnaissant des épitopes associés aux arabinanes (Willats et al., 1998), et LM5 reconnaissant des épitopes associés aux galactanes (Jones et al., 1997), est réparti uniformément le long de l'ensemble du tube pollinique chez A. thaliana (Dardelle et al., 2010), A. deliciosa (Abreu et Oliveira, 2004) et chez P. wilsonii (Chen et al., 2008). Deux autres anticorps monoclonaux (INRA-RU1 et RU2-INRA) ont été mis en évidence comme étant spécifiques de la chaine principale du RG-I (Ralet et al., 2010). En microscopie électronique, les arabinanes sont principalement détectés dans la couche externe de la paroi cellulaire des tubes polliniques chez A. thaliana (Dardelle et al., 2010). De plus, l'analyse biochimique de la paroi cellulaire des tubes polliniques d’A. thaliana a révélé une teneur importante en résidus arabinose (43%) provenant essentiellement des α-(1-5)-L-arabinanes des RG-I. Des compositions similaires ont été observées dans la paroi des tubes polliniques de N.

alata (Lampugnani et al., 2013).

La raison de l’abondance des arabinanes dans la paroi des tubes polliniques n’est pas connue. Cependant, chez A. thaliana, un double mutant KO (knock-out) pour deux RGPs (REVERSIBLY GLYCOSYLATED PEPTIDEs) (RGP1 et RGP2) présente une forte altération de l'intine et une létalité du pollen (Drakakaki et al., 2006). Ces RGPs présentent une forte homologie (~80%) avec la séquence protéique d'une UDP-arabinopyranose mutase chez le riz impliquée dans l'interconversion de l'UDP-Arap et de l'UDP-Araf (Konishi et al., 2007 ; Rautengarten et al., 2011). Bien que l’analyse de la paroi des grains de pollen n’ait pas été entreprise afin de vérifier que les arabinanes des RG-I étaient affectés, les résultats suggèrent que RGP1 et RGP2 agissent de façon redondante durant le développement du pollen et pourraient être impliquées dans la synthèse des arabinanes lors de la maturation du pollen (Drakakaki et al., 2006).

3. e. 2. Le rhamnogalacturonane de type II (RG-II) :

Le RG-II ne contient pas de rhamnose sur sa chaine principale. Il s'agit en fait d'un squelette d'acide homogalacturonique sur lequel vient se substituer cinq chaînes latérales notées A à E. Ces oligosaccharides sont composés de 12 monosaccharides différents dont certains sont rares tels que l'apiose (Api), l'acide 3-déoxy-D-lyso-heptulosarique (Dha), l'acide 3-déoxy-D-manno-octulosonique (Kdo) ou encore l'acide

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acérique (Ace) (Figure 17) (Whitcombe et al., 1995 ; Pérez et al., 2003 ; Dumont et al., 2014).

L'un de ces monosaccharides, l'apiose de la chaine A, permet au RG-II de former des dimères par l'intermédiaire d'un pont diester de borate (Kobayashi et al., 1996 ; O'Neill et al., 1996 ; Vidal et al., 2001; Matsunaga et al., 2004) qui contribuerait à la rigidification de la paroi. Chez le mutant mur1-1 (murus1-1) et gme (GDP-d-mannose 3, 5-epimérase), l'absence respective de fucose ou de L-galactose provoque une diminution de cette dimérisation et induit un phénotype nain (O'Neill et al., 1996, 2001, 2004 ; Voxeur et al., 2011). Dans les deux cas, la complémentation de ces mutants avec du bore restaure le phénotype sauvage suggérant que le développement de la plante dépend de l'organisation du réseau pectique et de la dimérisation du RG-II (O'Neill et al., 2001 ; Voxeur et al., 2011 ; 2012). De même, l'absence d'acide glucuronique sur la chaîne A du RG-II altère la dimérisation et entraine une perte d'adhésion des cellules en suspension chez le tabac (Iwai et al., 2002).

Des immunomarquages utilisant un anticorps reconnaissant les formes monomérique et dimérique du RG-II semblent indiquer que le RG-II est présent dans la paroi des tubes polliniques du lys (Matoh et al., 1998), de la tomate, du tabac et d’A.

thaliana (Dumont et al., 2014). La détection par GC-MS d’un des sucres à 8 carbones

spécifiques du RG-II, le Kdo, dans un extrait pariétal de tubes polliniques d’A. thaliana a été la première preuve biochimique de la présence de ce motif pectique dans la paroi des tubes polliniques (Dumont et al., 2014). Cependant, aucune évidence ne permet de déterminer s’il se trouve sous forme monomérique ou dimérique.

L'étude de l'implication hypothétique du RG-II dans la croissance des tubes polliniques est très récente. En 2006, il a été démontré chez le tabac, que la mutation de

NpGUT1 (Nicotiana plumbaginifolia GLUCURONOSYLTRANSFERASE1) induit une

inhibition de l'élongation du tube pollinique, probablement due à un dépôt anormal de RG-II et du bore dans la paroi (Iwai et al., 2006). Cependant, ces résultats sont controversés puisque des résultats ultérieurs ont montré chez A. thaliana que les protéines IRX10 (IRREGULAR XYLEM 10) et IRX10-L (IRREGULAR XYLEM 10-LIKE) qui sont très proches de NpGUT1 joueraient un rôle primordial dans la synthèse des glucuronoxylanes et non du RG-II (Wu et al., 2009 ; Brown et al., 2009).

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Chez A. thaliana, 5 autres gènes impliqués dans la biosynthèse du RG-II ont permis de démontrer que ce motif était important pour l’élongation du tube pollinique. Les KDO-8-P SYNTHASEs (AtKDSA1 et AtKDSA2) seraient impliquées dans la synthèse du Kdo. Le double mutant Atkdsa1 et Atkdsa2 présente des grains de pollen incapables d'avoir une élongation convenable de leurs tubes polliniques et qui de ce fait ne peuvent permettre la fécondation (Delmas et al., 2008). L’étude du mutant dont le gène coderait pour la CTP:Kdo cytidylyltransferase (CMP:Kdo Synthetase, CKS) mitochondriale, responsable de l’activation du Kdo comme un sucre nucléotidique avant son incorporation dans le RG-II, n’a pas permis d’obtenir des lignées homozygotes (Kobayashi et al., 2011). Chez le mutant hétérozygote, il est observé une inhibition de l'élongation des tubes polliniques qui rend la plante stérile (Kobayashi et al., 2011). Finalement, l'étude de deux mutants mgp (male gametophyte defective) et d’un mutant

sia2 (sialyltransferase-like2) a permis de conforter l’idée que l’altération de la

biosynthèse du RG-II dans le pollen impacte la croissance du tube pollinique. Le mgp4, mutant KO pour une xylosyltransferase du RG-II (Liu et al., 2011) ainsi que le mgp2, mutant KO pour une sialyltransferase-like 1 (Deng et al., 2010) et sia2+/- (Dumont et al., 2014) présentent des phénotypes similaires avec une forte inhibition de la germination du pollen ainsi qu'un retard de croissance des tubes polliniques in-vitro et in-vivo comparé au sauvage. Ces SIAs seraient responsables du transfert de sucres de structure proche de l’acide sialique, le Kdo et/ou le Dha.

L’ensemble de ces données semble indiquer que le RG-II joue un rôle primordial dans la croissance du tube pollinique. Néanmoins, il est à noter dans ces études, l’absence d’analyse biochimique montrant que la structure du RG-II était affectée.

3. e. 3. Le xylogalacturonane :

Le xylogalacturonane possède une chaîne principale du type HG où des résidus xyloses sont substitués en position C-3 de certains acides galacturoniques (Figure 17).

Une étude immunocytochimique avec l'anticorps LM8, spécifique des épitopes associés aux xylogalacturonanes (Willats et al., 2004), a permis la mise en évidence de ce motif pectique chez les tubes polliniques d'A. thaliana (Dardelle et al., 2010). Chez A.

thaliana, le gène At5g33290 serait impliqué dans la synthèse du xylogalacturonane, mais

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niveau de son grain de pollen ou de ses tubes polliniques (Jensen et al., 2008). Ceci suggère que d'autres gènes sont impliqués dans la biosynthèse du XG dans le pollen, mais ils n’ont pas encore été caractérisés.

3. e. 4. Les homogalacturonanes :

Les homogalacturonanes se composent de chaînes d'acides galacturoniques (GalA) liés en α-(1-4). Cette famille est la plus abondante car elle représente environ 65 % des pectines totales. Ce polymère peut être méthyl-estérifié sur le carbone 6 et O-acétylé en position 0-2 et 0-3 (Figure 17). D'ailleurs, c'est sous la forme fortement méthyl-estérifiée que les HGs sont synthétisés dans l'appareil de Golgi, où seraient localisées des protéines possédant un domaine méthyltransférase putative (Mouille et

al., 2007). Dans la paroi, ces groupements méthyles peuvent être éliminés sous l'action

de pectines méthyl-estérases (PMEs) pour aboutir à la formation de groupements carboxyliques sur le C-6.

Selon les conditions de pH et la régulation ionique, les pectines vont subir, soit une dé-méthyl-estérification partielle et aléatoire, soit en bloc. Dans le premier cas, les HGs seraient alors sensibles aux endo-polygalacturonases, favorisant un relâchement de la paroi. Dans le second cas, les charges négatives contigües établies par les groupements carboxyles (COO⁻) pourront réagir avec des ions Ca²⁺ (Ralet et al., 2008) permettant l'association de plusieurs chaines HGs (Figure 18). Cette association établit la structure dite "boîte à œufs" (Jarvis et al., 2003 ; Micheli, 2001 ; Pelloux et al., 2007). En établissant des structures "boîte à œufs", les HGs se lient entre eux et rigidifient la paroi (Micheli, 2001 ; Pelloux et al., 2007).

Figure 18 : Représentation schématique de la structure "boîte-à-œufs" ; plusieurs chaines d'HGs peuvent interagir par des ions Ca²⁺ (Vincken et al., 2003).

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Des études d’immunomarquages sur les tubes polliniques avec des MAbs reconnaissant des épitopes associés aux HGs faiblement méthyl-estérifiés (JIM5) ou fortement méthyl-estérifiés (JIM7) montrent que ces pectines ont une distribution spatiale caractéristique chez de nombreuses espèces (Li et al., 1994), avec les HGs fortement méthyl-estérifiés localisés principalement dans la zone apicale (lieu de sécrétion des HGs, Figure 19) et les HGs faiblement méthyl-estérifiés en arrière (Figure 19) suggérant l’action de PMEs (Bosch et Hepler, 2005 ; Dardelle et al., 2010 ; Lehner et

al., 2010, Chebli et al., 2012 ; Mollet et al., 2013 ).

Figure 19 : Immunomarquages de tubes polliniques d'A.thaliana cultivés in-vitro durant 6 h. Les épitopes de la paroi du tube pollinique ont été marqués avec des anticorps monoclonaux

anti-pectine JIM7 et JIM5. Ceux-ci sont spécifiques des HGs fortement et faiblement méthyl-estérifiés, respectivement (Dardelle et al., 2010). pg : Grain de pollen, flèche : apex du tube

pollinique.

La synthèse des HGs nécessite des enzymes telles que les GAUTs (GALACTURONOSYL TRANSFERASES). GAUT1 a été la première identifiée chez A.

thaliana (Bacic, 2006 ; Sterling et al., 2006). Celle-ci est une protéine membranaire de

type II localisée dans l'appareil de Golgi, et permet l'élongation des oligogalacturonides dans la configuration α-1,4 (Sterling et al., 2006). Outre les GAUTs, il y a également les GATLs (GALACTURONOSYL TRANSFERASE-LIKE) qui sont impliquées dans la synthèse des pectines. Le génome d’A. thaliana contiendrait 13 GAUTs et 8 GATLs exprimés dans les inflorescences d'A. thaliana (Caffall et Mohnen, 2009 ; Kong et al., 2011).

L'inactivation de QUASIMODO1/GAUT8 induit une réduction des épitopes associés aux HGs, une diminution de la quantité de GalA dans la paroi des cellules végétatives et un phénotype stérile partiel (Bouton et al., 2002). En accord avec les données de transcriptomique, seulement deux GAUTs (GAUT13 et GAUT14) et deux

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GATLs (GATL4 et GATL7) sont exprimées dans les tubes polliniques (Qin et al., 2009 ;

Kong et al., 2011 ; revue par Mollet et al., 2013). L'expression de GATL4 semble être spécifique du pollen et des tubes polliniques d'A. thaliana, ce qui suggère l'implication de ce gène dans la synthèse des HGs dans les tubes polliniques (Kong et al., 2011). Cependant des études fonctionnelles sont nécessaires pour prouver le rôle de ce gène dans la biosynthèse des HGs. Wang et al., (2013) ont fait la caractérisation fonctionnelle chez A. thaliana des deux gènes putatifs GAUT13 et GAUT14. Les mutants d'insertion d'ADN-T, gaut13 et gaut14, ne présentent pas de défauts observables, mais les doubles mutants gaut13/gaut14 montrent des défauts importants lors de la croissance des tubes polliniques. 35,2 à 37,3 % des tubes polliniques des doubles mutants hétérozygotes étaient enflés et ne présentaient pas de croissance. En outre, la distribution des HGs marqués avec JIM5 et JIM7 dans la paroi du tube pollinique du double mutant était modifiée de façon significative par rapport au type sauvage (Wang et al., 2013). Ces résultats suggèrent que GAUT13 et GAUT14 fonctionnent de façon redondante lors de la croissance du tube pollinique et pourraient participer à la synthèse des HGs de la paroi du tube pollinique (Wang et al., 2013). Néanmoins, des analyses biochimiques complémentaires sont nécessaires afin de déterminer chez les doubles mutants si le contenu en HG est réduit.