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CHAPITRE I : INTRODUCTION

2 LES LONGS ARNs NON CODANTS

2.2 ARNs non codants

2.3.5 Fonctions moléculaires des lncRNAs

2.3.5.2 Fonctions régulatrices des lncRNAs

2.3.5.2.1 Régulation au niveau épigénétique

Les lncRNAs contrôlent l’expression des gènes via la régulation de la chromatine. La plupart des lncRNAs sont des répresseurs transcriptionnels (HOTAIR, ANRIL, Xist, H19, AIR) mais certains sont des activateurs de la transcription (HOTTIP).

2.3.5.2.1.1 Expression allélique

2.3.5.2.1.1.1 Inactivation du chromosome X

L’inactivation d’un des chromosomes X chez la femme via le centre d’inactivation du X (Xic), conduit à une expression génique équilibrée du chromosome X entre les 2 sexes (Brown et al., 1992). Xist est transcrit à partir du Xic et peut couvrir l’ensemble du chromosome X inactif (Xi). Il inactive l’expression des gènes sur le Xi en recrutant les complexes de remodelage de la chromatine dont PRC2 et en induisant la triméthylation H3K27 des histones et la méthylation des ilots CpG (Payer and Lee, 2008 ; Kanduri et al., 2009 ; Leeb et al., 2009). D’autres lncRNAs sont produits à partir du Xic : Tsix est un antisens de Xist qui l’antagonise par compétition pour PRC2 avec RepA. RepA recrute PRC2 et permet la transcription de Xist (Marahrens et al., 1997 ; Lee et al., 1999). Xite agit comme un enhancer de Tsix. Jpx est un activateur de Xist (Tian et al., 2010). XACT est produit par les cellules pluripotentes humaines et peut couvrir le chromosome X actif en l’absence d’expression de Xist.

2.3.5.2.1.1.2 Empreinte génomique parentale

L’empreinte parentale est le processus par lequel la copie d’un gène héritée de l’un des parents est épigénétiquement réprimée (Wood and Oakey, 2006). Ainsi, certains gènes présentent une activation transcriptionnelle de l’allèle paternel et une inactivation de l’allèle maternel, tandis que d’autres possèdent un profil d’expression opposé. L’ICR (Imprinting

Control Region) coordonne l’empreinte génomique des locus concernés (Bartolomei et al.,

2009). Les régions soumises à l’empreinte parentale contiennent une large proportion de gènes d’ARNs non codants qui favorisent l’inactivation génique via divers mécanismes, dont le remodelage chromatinien et la compétition avec les enhancers (Wan and Bartolomei, 2008). Le dépôt des marques épigénétiques d’inactivation est guidé par des lncRNAs

nombreux lncRNAs sont impliqués dans le processus de l’empreinte parentale par divers mécanismes incluant en particulier le remodelage de la chromatine (PRC1 et PRC2) et l’activation des promoteurs. H19 participe au contrôle des gènes sous empreinte parentale impliqués dans la croissance chez l'embryon en recrutant la protéine MBD1 (Methyl-CpG–

Binding Domain protein 1) et en formant un complexe qui réprime 5 gènes du réseau de

l'empreinte parentale, dont IGF2 (Bartolomei et al., 1991 ; Ripoche et al., 1997). Pour assurer la régulation du gène IGF2, les loci H19 et IGF2 partagent le même enhancer, mais IGF2 est exprimé uniquement à partir de l’allèle paternel et H19 à partir de l’allèle maternel. Sur l’allèle maternel, le facteur de transcription CTCF (CCCTC-binding factor) se fixe sur l’ICR non méthylé, empéchant l’enhancer d’interagir avec IGF2 et permettant à H19 d’accéder à l’enhancer. Sur l’allèle paternel, la méthylation de l’ICR s’étend au promoteur de H19, qui inactive l’expression de H19 et prévient la fixation du CTCF sur l’ICR. De plus, H19 est le précursseur du miRNA miR-675 qui assure la régulation de la croissance placentaire (Monnier et al., 2013). KCNQ1OT1 est exprimé au sein du locus du gène KCNQ1 sur le chromosome paternel et est réprimé sur le chromosome maternel via la méthylation de l’ICR et de son promoteur (Mohammad et al., 2008). L'expression de KCNQ1OT1 par le chromosome paternel conduit à la répression d'une dizaine de gènes dans un locus KCNQ1de 1 Mb via son interaction avec EZH2 et SUZ12 appartenant au complexe PRC2 et avec l'histone méthyl-transférase G9a (Nakano et al., 2006 ; Pandey et al., 2008 ; Wagschal et al., 2008 ; Kanduri, 2011). AIR est impliqué dans l'empreinte génomique parentale du domaine

IGF2R. Dans ce dernier, IGF2R et le locus produisant le lncRNA AIR sont transcrits selon des

directions opposées. L’ICR est situé dans le 2° intron d’IGFR2, qui contient le promoteur d’AIR. L’ICR est non méthylé sur l’allèle paternel, conduisant à l’expression du locus AIR par évacuation de la RNA Polymérase II du promoteur (Braidotti et al., 2004). Le transcrit AIR couvre le promoteur de IGFR2, inhibant ainsi son expression. Sur l’allèle maternel la méthylation de l’ICR inhibe la transcription d’AIR et permet l’expression d’IGF2R (Sleutels et al., 2002 ; Nagano et al., 2008).

2.3.5.2.1.2 Positionnement des nucléosomes

Les nucléosomes peuvent être déstabilisés et restructurés par des complexes de remodelage appartenant à 4 familles (SWI/SNF, ISWI, CHD et INO80) (Yen et al., 2012). Le positionnement des nucléosomes et leur remodelage régulent l'expression génique en

perturbant l'accessibilité des séquences régulatrices d'ADN par des facteurs de transcription et de la machinerie de transcription. Le lncRNA SChLAP1 interagit avec la sous-unité SNF5 du complexe SWI/SNF et inhibe sa fixation à la chromatine, entrainant une large dérépression de l’activité génique. De même, Myheart se lie à la sous-unité BRG1 du complexe SWI/SNF et prévient le remodelage chromatinien. A l’opposé, Evf2 favorise la fixation du complexe SWI/SNF au niveau des enhancers des gènes Dlx5 et Dlx6.

2.3.5.2.1.3 Méthylation de l’ADN

Durant le développement embryonnaire, l’établissement et le maintien de la méthylation de l’ADN au niveau des ilots CpG des promoteurs conduit à la modification de l’expression des gènes. Khps1a se liant à des sites CC (A/T) GG, réduit la méthylation de ses ilots CpG et conduit à l’expression du gène Sphk1 (sphingosine kinase 1) (Mattick, 2009). EcCEBP se lie à l’ADN méthyltransférase 1 et inhibe la méthylation du locus CEBPA (di Ruscio et al., 2013). Les lncRNAs peuvent modifier la méthylation de l’ADN en interagissant directement avec divers membres de la famille des DNA méthyltransférases (DNMTs) : (i) DNMT1 en cis (extra-coding CEBPA, ecCEBP) ou en trans (Dali) et (ii) DNMT1, DNMT3a et DNMT3b (developmental pluripotency-associated 2 Dppa2, Dum). Des lncRNAs (lincRNA-p21) peuvent également interagir indirectement sur la méthylation de l’ADN via des interactions avec des protéines liant l’ARN (hnRNPk) qui servent de plateformes à divers méthyltransférases (SETDB1 et DNMT1) (Zhao et al., 2016).

2.3.5.2.1.4 Modification du code histone

Les lncRNAs constituent un réseau de modulateurs épigénétiques permettant un remodelage chromatinien. Ils agissent comme des guides, signaux et plateformes pouvant recruter des protéines régulant la chromatine et les guider vers les gènes cibles et constituer des plateformes multimoléculaires pour des complexes protéiques ne possédant pas habituellement d’interactions proteine-protéine. Leurs sous-unités catalytiques interagissent en modifiant le code histone et le profil de méthylation avec comme conséquence une activation ou plus fréquemment une inactivation de l’expression des gènes cibles (Khalil et al., 2009). ANRIL recrute les complexes répresseurs polycomb PRC1 et PRC2 et induit l’inactivation des gènes du locus INK4B-ARF-INK4A et plus particulièrement de p15 via

SUZ12 de PRC2 (Mattick and Gagen, 2001 ; Mattick, 2009 ; Margueron and Reinberg, 2011 ; Wan et al., 2013a). HOTAIR recrute et sert de plateforme d’échafaudage pour les 2 complexes PRC2 et LSD1, entrainant simultanément le dépôt de la marque répressive H3K27me3 et le retrait de la marque activatrice au niveau du locus des gènes HOXD (Shi et al., 2005 ; Rinn et al., 2007 ; Tsai et al., 2010). MISTRAL et HOTTIP faciliteraient l’expression des gènes HOXA en recrutant le complexe épigénétique activateur WDR5/MLL, qui induit le dépôt de la marque épigénétique d’activation H3K4me3 au niveau des gènes cibles (Schuettengruber et al., 2007 ; Bertani et al., 2011 ; Wang et al., 2011b). De même,

KCNQ1OT1 se lie à G9a et PRC2, TUG1 et Fendrr à PRC2.