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L’ubiquitination et la dégradation protéasomique de la CTNNB1 constitue un mécanisme crucial de régulation de la signalisation WNT/CTNNB1. La principale caractéristique de cette signalisation est le contrôle rigoureux des niveaux protéiques de la CTNNB1 en absence d’une stimulation WNT. Cette régulation médiée par la phosphorylation de la CTNNB1 par CK1 et GSK3β mène à son ciblage par le complexe ubiquitin ligase SKP1/CULLIN1/F-box/β-TrCP (SCFβ-TrCP). Il s’en suit l’attachement des chaînes de poly-ubiquitin de type K48 aux résidus lys19 et lys49 causant la dégradation de la CTNNB1 par le protéasome [343]. Comme décrit plus haut, il y a plusieurs contextes cellulaires qui peuvent interférer avec la stabilisation de la CTNNB1 d’une façon dépendante ou indépendante des WNTs. Ainsi, il n’est pas surprenant que différents systèmes de E3 ligases sont impliqués dans la dégradation de la CTNNB1 pour une régulation optimale de son activité. Parmi les systèmes indépendants de WNT décrits, on trouve la E3 ligase SIAH-1 (Seven in absentia homolog-1) qui est induite par p53 en réponse à divers stimuli (comme arrêt de cycle cellulaire, suppression de tumeur, apoptose etc) [378].

L’activation de SIAH-1 mène à la formation d'un complexe unique de type SCF composé de SIP (SIAH-1 Interacting Protein), SKP1, TBL1 (Transducin β-like 1) et APC [344, 345]. Ce complexe induit la dégradation de la CTNNB1 indépendamment de la phosphorylation médiée par GSK3β et de la dégradation par β-TrCP. La signification physiologique de la dégradation ciblée par Siah-1 de la CTNNB1 a été appuyée par la découverte que cette voie est directement ciblée par l’oncoprotéine (LMP1) du virus oncogène EBV (Epstein–Barr virus) afin d’induire la signalisation CTNNB1 et transformer des cellules B en repos en cellules lymphoblastoïdes

prolifératives [379]. Par la suite, une étude a identifié l'isoreserpine, comme molécule atténuant la fonction de la CTNNB1 via l’activation de SIAH-1 et la dégradation protéasomique subséquente de la CTNNB1[380].

Parmi les mécanismes de la dégradation de la CTNNB1 qui dépendent de la stimulation WNT mais se distinguent du système β-TrCP on trouve : JADE1 [346], c-CBL [347, 348], TRIM33[349] et récemment MULE [381]

JADE- 1 qui est une composante de la E3 ligase pVHL (Von Hippel–Lindau protein), est capable d’interagir et d’ubiquitiner la CTNNB1. Contrairement à β-TrCP qui régule la CTNNB1 en absence de la stimulation WNT, JADE-1 peut déstabiliser les niveaux protéiques de la CTNNB1 avant et après la stimulation par les WNTs. De plus, comme JADE-1 est un gène suppresseur de tumeur de rein, cette étude a fait le lien entre une voie spécifique de contrôle négatif de la tumorigenèse du rein médiée par pVHL, et la voie WNT/CTNNB1, fournissant des cibles thérapeutiques contre le cancer du rein [346].

Par ailleurs, la protéine C-CBL (Casitas B-lineage Lymphoma) qui, suite à une stimulation par les WNTs, est phosphorylée puis transloquée dans le noyau où elle se lie avec la CTNNB1 active afin d’induire sa dégradation [348] . Une étude subséquente a démontré que l’activité de C-CBL sur la CTNNB1 inhibe les gènes pro-angiogéniques qui sont induits par les WNTs comme l’IL-8 et VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) ce qui souligne un nouveau niveau de régulation de l’angiogenèse et la tumorigenèse [347, 348]. D’une façon similaire, TRIM33 (TRIpartite Motif-containing protein 33) a été décrite comme réduisant aussi l’abondance de la CTNNB1 active au niveau du noyau. Cette régulation nécessite la phosphorylation préalable de la

CTNNB1 au niveau de la Ser715 par PKC. De plus, TRIM33 est désignée comme un suppresseur de tumeur dont les niveaux sont inversement corrélés avec ceux de la CTNNB1 dans certaines tumeurs du cerveau [349]. Plus récemment, un rapport a démontré que la E3 ligase MULE (Mcl-1 Ubiquitin Ligase E3) peut se lier directement à la CTNNB1 afin de médier sa dégradation dans les conditions d’hyperprolifération cellulaire [350]. Ces conditions se produisent par exemple lorsque des mutations au niveau d’APC inactivent le complexe de destruction, entrainant la stabilisation de la CTNNB1 et l’activation constitutive de la signalisation WNT. Ces résultats soulignent l’importance de Mule comme un suppresseur de tumeur qui prévient le cancer de colon caractérisé par une hyperactivation de la signalisation WNT.

Outre la polyubiqutination menant à la dégradation de la CTNNB1, EDD, Rad6B, FANCL et Ube2s sont toutes des facteurs qui augmentent la stabilité de la CNNB1 en y attachant des chaînes de polyubiquitines autres que celles menant à la dégradation par le protéasome. Plus en détail, la E3 ligase EDD modifie la CTNNB1 avec les chaînes de polyubiquitines de type K29 ou K11 pour améliorer son accumulation cellulaire [351]. Deux autres études ont montré que la E2 Rad6B permet l’attachement des chaînes de polyubiquitnes de type K63 au niveau du résidu Lys394 de la CTNNB1 pour augmenter sa stabilité dans les cellules du cancer de sein [352, 353]. La E3 ligase FANCL modifie la CTNNB1 dans des résidus Lys autres que Lys19 ou 49 avec une chaîne de polyubiquitinede type K11 ou K63 pour augmenter son accumulation et son activité dans les cellules souches hématopoïétiques [354]. Plus récemment, Ube2s est identifiée comme une E3 ligase qui attache des chaînes de polyubiquitines de type K11 au niveau du résidu Lys19

de la CTNNB1 [353]. Cette modification a eu pour résultat un effet antagoniste contre le CD et la dégradation de la CTNNB1 médiée par β-TrCP. En conséquence, la stabilité de la CTNNB1 a été renforcée, favorisant ainsi son accumulation cellulaire. Curieusement, la manipulation du niveau d'expression d'Ube2s seul semble être suffisante pour contrôler la prolifération et la métastase des cellules de cancers colorectaux (CCR). Ainsi, cette étude suggère Ube2s comme une cible potentielle pour un futur traitement des CCRs [355].