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C) Quels sont les dangers ?

6) Une réglementation qui demeure flou

Même si des contrôles qualités ont été mis en place, de nombreux scandales liés aux huiles essentielles dans l’industrie cosmétique perdurent. De nombreuses études ont montré l’efficacité des huiles essentielles, mais aussi des effets indésirables potentiels. Cela pourrait être limité par la mise en place d’une réglementation précise, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Les huiles essentielles sont considérées comme des “préparations” à base de plantes selon l’Article R5121-1alinéa 11 du Code de la Santé Publique (CSP). Selon la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), l'huile essentielle est "une substance odorante volatile extraite

principalement par distillation à la vapeur d'eau, à partir de plantes".

Selon leurs utilisations et leurs allégations, les huiles essentielles sont soumises à différentes réglementations : des cosmétiques, des compléments alimentaires, des biocides (pour les sprays assainissant) ou des médicaments à base de plantes.

On va déterminer la réglementation à laquelle une huile essentielle ou un mélange d’huile essentielle est associée en fonction de son utilisation et notamment des allégations associées aux produits6465.

a) Les huiles essentielles et la réglementation des produits cosmétiques.

La réglementation Française n’est pas spécifique dans l’utilisation des huiles essentielles dans les cosmétiques. Il existe cependant une liste de substances interdites dans les produits cosmétiques (en annexe 1). L’IFRA (International Fragrance Association) ont également publié des recommandations concernant les produits naturels, notamment sur certains constituants qui font l’objet de restrictions quantitatives exprimées en pourcentage dans le produit cosmétique.

Avec l’engouement des produits naturels, de plus en plus de cosmétiques sont fabriqués à partir de préparations à base de plantes et contiennent des huiles essentielles. Or, le Comité d’experts des produits cosmétiques du comité de santé publique du Conseil de l’Europe précise que l’utilisation des produits naturels n’est pas sans risques. Ces substances présentent une grande activité et peuvent donc avoir des effets aussi bien positifs que négatifs pour le consommateur.

L’étiquetage pour les produits cosmétiques Arrêté du 17 novembre 2004

L’article R.5131-4 9° du code de la santé publique précise que le récipient et l’emballage de chaque unité de produits cosmétiques doivent mentionner :

- La liste des ingrédients dans l’ordre décroissant de leur importance pondérale au moment de leur incorporation, précédé du mot “ingrédient”.

- Que les ingrédients cités au 8° doivent être déclarés sous leur dénomination commune établie par les instances de la Commission Européenne ou, à défaut, leur dénomination chimique INCI, leur dénomination CTFA, leur dénomination figurant dans la Pharmacopée Européenne, leur dénomination commune internationale de l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), leurs numéros EINECS, IUPAC, CAS et colour index.

- Les produits cosmétiques non rincés qui contiennent plus de 10 ppm de l’une de ces 26 substances

- Les produits cosmétiques rincés qui contiennent plus de 100 ppm de l’une de ces 26 substances

- Pour les parfums et les compositions parfumantes et aromatiques, et leurs matières premières, il faut mentionner le mot “parfum” ou “aroma”.

- Le numéro du lot de fabrication - Le pays d’origine

- Le nom et adresse de la personne responsable - La date de fabrication

- Le poids net

- Les recommandations pour la conservation

- Si ce sont des produits bio : le numéro de certification

b) Les huiles essentielles en pharmacie comme médicament à base de plantes

Les huiles essentielles à finalité thérapeutique répondent à la définition du médicament à base de plantes : « Les médicaments à base de plantes sont des médicaments dont les principes actifs sont exclusivement des drogues végétales et/ou des préparations à base de drogue(s) végétale(s) ».

Tous les médicaments à base d’huiles essentielles doivent être conformes à la réglementation et doivent faire l’objet d’un enregistrement des médicaments à base de plantes.

Le Code de la Santé Publique précise dans l’article L.4211-1 6° que « la vente au détail et toute dispensation au public des huiles essentielles dont la liste est fixée par décret, ainsi que leurs dilutions et préparations ne constituant ni des produits cosmétiques, ni des produits à usage ménager, ni des denrées ou boissons alimentaires appartiennent au monopole pharmaceutique » (annexe 2).

Les huiles essentielles à visée thérapeutique et exclusivement à base de plantes n’ont pas besoin d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) contrairement aux médicaments. Néanmoins, elles doivent subir un enregistrement auprès de l’Agence national de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

Directive 2004/24/CE du 31 mars 2004 du Parlement Européen et du Conseil du 31 mars 2004 modifiant, en ce qui concerne les médicaments traditionnels à base de plantes, la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.

Les huiles essentielles qui ont démontré leur innocuité et qui ont une efficacité plausible du fait de leur usage et de leur longue expérience, sont concernées par cette directive. Ceci va leur permettre d’avoir des dispositions particulières pour l’obtention d’une procédure d’enregistrement simplifiée pour leur mise sur le marché en tant que médicaments traditionnels à base de plantes.

En termes d’allégations, la réglementation est formelle : elles ne doivent pas revendiquer d’indications thérapeutiques si leur composition n’est pas garantie au regard de leur effet thérapeutique potentiel. Ce qui signifie que des études scientifiques doivent être réalisées et qu’elles soient concluantes au vu de l’indication thérapeutique

Concernant la distribution, il existe une liste d’huiles essentielles dont la vente est réservée aux pharmaciens en raison de leurs propriétés neurotoxiques, irritantes, phototoxiques ou cancérigènes. Les huiles essentielles qui ne relèvent pas du monopole pharmaceutique peuvent être vendues librement et distribuées via différents circuits tels que les pharmacies, magasins spécialisés, grandes surfaces mais aussi en e- commerce66.

c) Les huiles essentielles et la réglementation des compléments alimentaires

La réglementation des compléments alimentaires est encadrée aussi bien au niveau Français qu'Européen par différents textes :

- Les textes concernant les matières premières agricoles

- Les textes relatifs à l’alimentation (obligations de sécurité et d’information)

Le plus souvent, les huiles essentielles sont utilisées comme arômes dans l’alimentation et sont donc concernées par la directive 88/388/CEE du 22 juin 1988 modifiée par le Règlement 1882/2003.

Elle définit :

• Les différentes catégories d'agents d'aromatisation

• Les règles d'étiquetage des arômes et en particulier l'emploi du terme « naturel » • Les critères généraux de pureté 67

- Les textes spécifiques aux compléments alimentaires

Les compléments alimentaires suivent la Directive 2002/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 juin 2002, aussi appelée « Directive Cadre des compléments alimentaires ».

“On entend par compléments alimentaires les denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés, commercialisés sous forme de doses, à savoir les formes de présentation telles que les gélules, les pastilles, les comprimés, les pilules et autres formes similaires, ainsi que les sachets de poudre, les ampoules de liquide, les flacons munis d’un compte- gouttes et les autres formes analogues de préparations liquides ou en poudre destinées à être prises en unités mesurées de faible quantité.” 68

Cette directive va également donner des informations sur l’étiquetage et la mise sur le marché des compléments alimentaires.

Pour les compléments alimentaires biologiques, il y a des réglementations supplémentaires et bien spécifiques à respecter notamment concernant le régime

66 « EUR-Lex - 32004L0024 - FR ».

67 « Recommandations relativesaux critères de qualité deshuiles essentielles ». 68 « R%C3%A.pdf ».

d’importation, la production biologique, l’étiquetage et les contrôles69.

Les producteurs des huiles essentielles dont la bande de tonnage est au moins de 1 tonne par an doivent quant à eux respecter la législation CLP, sur les produits chimiques, et doivent les enregistrer sous REACH “Enregistrement, Évaluation, Autorisation et Restriction des substances chimiques” auprès de l’ECHA (le dossier devra contenir des propriétés physico-chimiques, les effets sur la santé, l’environnement de la substance). En effet ce type de réglementation est mis en place lorsque le produit n’est associé à aucune allégation.

Un client peut légalement réclamer des informations relatives aux huiles essentielles pour vérifier :

⚫ Fiche technique du produit comportant le numéro CAS. Pour les nouvelles huiles, les exportateurs doivent déposer une demande d’attribution de numéro CAS

⚫ Certificat d’analyse ⚫ Certificat OGM (si requis) ⚫ Certificat d’origine

⚫ Fiche de production du produit ⚫ Déclaration d’allergènes

⚫ Certificat des Bonnes Pratiques de Fabrication

⚫ Certificat de produits issus de l’agriculture biologique ou équitable ⚫ Certificat IFRA70

La réglementation des huiles essentielles est complexe car il n’y a pas de textes réglementaires spécifiques existants. Selon le mode d’application de l’huile essentielle, le distributeur devra respecter la réglementation adéquate. C’est un véritable problème car cela oblige les distributeurs à choisir une réglementation qui ne peut pas correspondre à la réelle utilisation de l’huile essentielle car elle peut avoir plusieurs modes d’applications. Il faudrait qu’elle respecte les normes de chaque réglementation, ce qui n’est pas envisageable au vu du nombre d’huiles essentielles qui sont présentent sur le marché.

Cela peut entraîner la distribution de produits dangereux, car le choix d’un statut réglementaire va donc se faire en fonction des contraintes d’étiquetage et de la TVA des produits.

Le renforcement de la réglementation des huiles essentielles permettrait de sécuriser leurs utilisations et de limiter le nombre d’accidents.

Le système actuel fait face à une situation aberrante. La non existence de cette réglementation encourage le consommateur à faire du « do it yourself » sur un produit qui est dangereux s’il est mal utilisé.

Le distributeur se dédouane de toute responsabilité en suivant les recommandations existantes. De plus, n’ayant pas le droit d’écrire les différentes indications pour lesquelles une huile essentielle peut servir, il va induire le consommateur en erreur. Cela va également biaiser la perception de l’utilisateur qui voit les huiles essentielles comme des substances inoffensives, ce qui entraîne une minimisation des dangers potentiels liés à leurs effets.

Il y a également peu de remontées sur les huiles essentielles et les compléments alimentaires à cause du manque de sensibilisation auprès des professionnels de la santé sur l’importance des déclarations. Les informations sont gardées par les industriels. Le problème est que cela peut avoir de graves conséquences. Il existe des huiles essentielles qui sont connues pour être abortives, or ce n’est pas forcément indiqué sur le packaging à cause des allégations !

Résultat : le risque ne pèse plus sur le distributeur mais il est supporté par le consommateur.

Il est nécessaire dans les prochaines années d’écrire une réglementation spécifique aux huiles essentielles qu’elles soient utilisées à but thérapeutique, pour le bien-être ou dans des produits cosmétiques71.

d) L’émergence d’industriels indélicats ?

De cette réglementation inachevée associée à l’engouement des huiles essentielles et à leur démocratisation, les acteurs présents sur le secteur de l’aromathérapie se sont multipliés.

Entre les entreprises déjà ancrées sur le marché, les magasins spécialisés florissants et l’industrie de la cosmétique qui utilise largement des huiles essentielles dans leurs produits, ils sont nombreux à se bousculer dans un secteur de plus en plus concurrentiel. Pourtant, ils vont devoir faire preuve d’innovation pour séduire le consommateur. Pendant que certains se concentrent sur leur image de marque, d’autres vont proposer un panel varié d’huiles essentielles vendues pures ou en mélanges prêts à l’emploi, ou encore des diffuseurs ou des accessoires en lien avec les huiles essentielles.

Pour continuer l’innovation et la diversification de leurs offres, de nombreux industriels investissent largement dans la recherche et le développement. Malgré des

recherches encore expérimentales, la complexité et les propriétés thérapeutiques des huiles essentielles traduisent l’avenir et la richesse de cette filière.

C’est pourquoi le secteur de la cosmétique est de plus en plus friand à l’utilisation des huiles essentielles. En cosmétique, elles sont souvent utilisées à un pourcentage minime afin d’éviter les effets indésirables. Cela va permettre aux distributeurs de les utiliser comme arguments marketings en minimisant les risques, mais y a-t’il un vrai bénéfice pour l’utilisateur ?

Face à l’émergence de ces opportunistes qui usent de plus en plus de techniques marketings, il faut rester vigilant quant à la réglementation adoptée par l’entreprise. On pourrait comparer les arguments marketings du marché de l’aromathérapie à ceux du marché du bio. En effet, pour faire décoller le marché, les acteurs du bio ont choisi de cibler la femme enceinte car c’est une cible sensible. Ils ont choisi des arguments et un vocabulaire pour s’adresser directement à elle car la femme enceinte est particulièrement attentive à son alimentation pendant la grossesse pour protéger son bébé. Or la même stratégie pour le marché des huiles essentielles pourrait être dramatique7273.

e) Sanction via l’ANSM et la DGCCRF

L’ANSM et L’OMS ont publié des référentiels pour l’emploi des plantes médicinales et des huiles essentielles. Cependant, les acteurs qui ne connaissent pas le secteur vont parfois se baser sur de la littérature qui n’est pas toujours pertinente. C’est pour cela que des mesures de sécurité ont été mises en place, afin de limiter le risque pour le consommateur.

Pour limiter les accidents dus aux huiles essentielles, l’ANSM et la DGCCRF mettent en place des sanctions envers les distributeurs concernés.

L’ANSM peut prendre des mesures de police sanitaire s’il y a un risque pour la santé publique à la suite d’un produit mis sur le marché (soumis ou non à autorisation ou enregistrement). Les sanctions peuvent être de tous types : suspension de mise sur le marché, suspension de fabrication, suspension de distribution, restriction.

Si l’ANSM juge que le produit n’a pas la réglementation qui lui correspond, il y aura une injonction par les inspecteurs de l’ANSM. On peut prendre l’exemple des laboratoires Ineldea qui ont mis sur le marché un dispositif médical et deux produits cosmétiques, tous à base d’huiles essentielles. L’ensemble de ces produits, pour l’ANSM, sont plus proches de la réglementation des médicaments que des cosmétiques ou des dispositifs médicaux. L’ANSM considère que la dose en huiles essentielles est

trop importante et que les propriétés qu’elles véhiculent à ces concentrations, sont des propriétés pharmacologiques : antiseptiques, décongestionnantes et anti- inflammatoires.

Au vu du non-respect de la réglementation, l’ANSM a stoppé l’ensemble des activités (distribution, production etc…) des laboratoires Ineldea jusqu’à la mise en conformité de la réglementation des produits du laboratoire74757677.

Ces injonctions montrent que la réglementation tend à être de plus en plus rigide. Mais la mise en place va être longue car il faut rédiger des textes et des normes spécifiques aux huiles essentielles. Or seuls les experts en aromathérapie ont les connaissances et le savoir scientifique pour rédiger des textes qui permettent d’assurer la sécurité de l’utilisateur.

Face à l’ensemble de ces complications, il me semblait évident de développer un outil afin de faciliter l’utilisation des huiles essentielles et surtout de sécuriser leurs applications.

Aujourd’hui, les huiles essentielles se sont clairement démocratisées. Malheureusement, pour être un utilisateur averti, cela passe par l’éducation auprès d’expert, ce qui n’est pas accessible au plus grand nombre. De plus, avec la multiplication des articles de presse sur internet et du nombre de livres publiés sur les huiles essentielles, l’utilisateur ne sait plus comment discerner l’ensemble de ces informations.

L’outil de personnalisation en aromathérapie va réellement sécuriser et simplifier l’expérience en aromathérapie.

74 « MI Développement de l’herboristerie : compte rendu de la semaine du 21 mai 2018 ». 75 Rédaction, « Marché des huiles essentielles ».

76 « Ce DM qui n’en était pas un ».

77 « Injonctions, décisions de police sanitaire, interdictions de publicité - Décisions de police sanitaire - ANSM : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ».

Deuxième

partie

: Développement d’un outil de

personnalisation pour une pratique de l’aromathérapie plus

simplifiée et sécurisée

1) Présentation de la base de données

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