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C’est dans le cadre d’un appel à projet lancé par la CPAM, sous l’impulsion du réseau AddictLim, réseau d’addictologie du Limousin, et de l’URPS pharmacien de la région, qu’ont été mis en place les premiers entretiens d’aide à l’arrêt du tabac en officine sur le territoire français, en guise d’expérimentation.

La convention de financement a été signée avec la CPAM le 20 septembre 2016 et la première phase du projet a débuté par une soirée de formation des pharmaciens le 6 octobre à la Faculté de pharmacie de Limoges afin de présenter aux pharmaciens le projet. Les entretiens ont débuté le 1er Novembre jusqu’au 30 Novembre 2016, dans le cadre du premier mois sans tabac. Au total, 80 pharmacies ont signé la convention de la CPAM soit 55% des pharmacies de la Haute Vienne, pour un nombre total de patients inclus dans le projet s’élevant à 345. Ce nombre

correspond aux patients ayant suivi au moins le premier entretien d’aide à l’arrêt du tabac, correspondant à l’entretien initial d’évaluation de la consommation.

La rémunération, assurée par le réseau AddicLim, grâce au financement de la CPAM, était calculé selon le critère de 15 € par entretien, sous réserve du remplissage et de l’envoi des fiches de recueil de données à AddictLim pour permettre leur évaluation dans le cadre de la thèse d’un étudiant en Pharmacie.

Le réseau mettait à disposition des pharmacies incluses dans le projet un kit pour les aider dans leur démarche, à l’image de ce qui s’est fait pour le projet EOL : une affiche au format A3 pour attirer l’attention des fumeurs, des flyers, une feuille d’adhésion au projet en signant la convention de partenariat, un protocole d’action, un ensemble de fiches de suivi en guise de recueil de données, un ensemble d’outils pour aider le pharmacien dans sa démarche et des questionnaires destinés aux patients pour estimer leur niveau de satisfaction.

Le projet avait pour cible l’ensemble des fumeurs du territoire, avec une inclusion finale très variable avec des âges allant de 16 à 83 ans et un âge moyen de 46 ans. L’étude proposait un plan d’action aux pharmaciens en trois étapes :

 Une première étape d’ouverture du dialogue avec les patients fumeurs des différentes pharmacies du département concernées par l’action, avec l’utilisation d’une intervention brève pour l’inclusion des patients aux projets d’entretiens.

 Une deuxième étape avec la mise en place d’un entretien nommé entretien initial d’évaluation, basé sur les principes de l’entretien motivationnel (cf. partie III) avec l’emploi de divers questionnaires-type pour finir si possible par la mise en place d’objectifs avec les patients.

 Une troisième et dernière étape qui correspond aux entretiens de suivi qui vise à accompagner les patients qui ont décidé d’arrêter ou à continuer à motiver les patients qui éprouvent encore des freins à l’arrêt. Durant ces entretiens de suivi, les pharmaciens évaluaient également les patients sur la réalisation ou non des objectifs qu’ils s’étaient donnés durant la deuxième étape du projet.

L’évaluation du projet s’est basé sur trois éléments :

 La fiche de recueil des données des pharmaciens pour les 345 patients inclus

 Un questionnaire d’évaluation professionnelle rempli par les pharmaciens en guise de retour d’expérience

On note un faible taux de participation avec seulement 47 pharmacies ayant inclus au moins un patient sur les 80 pharmacies signataires de la convention, soit seulement 59% de participation. Sur les 345 patients ayant participé au premier entretien, seul 62% ont accepté de participer à un entretien de suivi, avec une baisse d’assiduité progressive, pour passer à seulement 44% de patients ayant participé au dernier entretien de suivi du mois de Novembre.

Les points positifs sont pourtant conséquents. En effet, sur les 214 patients ayant participé à au moins un entretien de suivi on observe une tendance croissante à l’arrêt de la consommation et à la diminution de la consommation pour atteindre à la fin du mois de novembre un total de 104 personnes ayant arrêté le tabac (soit 48,6%) et 73 à avoir diminué leur consommation (soit 34,1%). Ces données sont à nuancer du fait de l’absence de suivi post-étude ce qui ne permet pas de savoir combien de patients ont rechuté à 3, 6 ou 12 mois, néanmoins 32 patients ont arrêté de fumer au moins 4 semaines, correspondant au seuil où les symptômes de sevrage sont sensés diminuer et 51 personnes au moins 3 semaines.

Bien que la grande majorité des patients qui ont répondu au questionnaire d’évaluation aient donné des réponses très favorables concernant l’expérience, le très faible taux de réponse (seulement 18%) ne permet pas d’avoir de certitude quant à l’opinion de l’ensemble des patients ayant participé au projet et d’autres expériences restent à mener pour prouver l’impact que pourrait avoir la mise en place d’entretiens d’aide à l’arrêt du tabac à l’échelle nationale. Il y a plus de certitude sur les difficultés qu’ont rencontré les pharmaciens impliqués dans le projet avec 40 sur 47 à avoir répondu au questionnaire d’évaluation professionnel, soit plus de 85%. La première difficulté rencontrée concerne la façon d’aborder avec les patients la question du tabagisme et la possibilité de suivre le programme d’entretien d’aide à l’arrêt, projet inhabituel en officine. Sur une échelle de 0 à 10, la difficulté moyenne rencontrée pour surmonter cet obstacle a été évaluée à 3,8/10. Les raisons évoquées pour expliquer ces difficultés comprenaient notamment le faible niveau de formation de l’équipe officinale avec notamment la crainte d’aborder le sujet du tabagisme pour certains, le manque d’outils à disposition des pharmaciens et des organisations mal adaptées aux seins des officines.

Des difficultés ont également été évoquées pour mener à bien l’accompagnement des patients avec, au premier plan, de nouveau les questions de formations, avec un exercice jugé inhabituel par les pharmaciens, avouant avoir eu peu d’aisance à mener ces entretiens, ce qui a entrainé un désintérêt des patients à la poursuite de l’expérience et un désengagement progressif de ces

derniers pour atteindre seulement 94 participants au dernier entretien de suivi sur les 345 patients ayant accepté de participer à l’entretien initial, soit seulement 27,2%.

Malgré ces difficultés, la grande majorité des pharmaciens qui ont participé à cette expérience ont souhaité son renouvellement. Mais ils ont également pointé du doigt de nombreux points à améliorer dont :

 La communication et l’anticipation du projet 2 à 3 mois avant son exécution  La formation et les documents à disposition des pharmaciens

 Le suivi des patients qui serait à allonger dans le temps (86)

Ces premières expérimentations d’entretien d’aide à l’arrêt du tabac, bien qu’encore peu abouties, laissent présager un avenir où les pharmaciens prendront de plus en plus d’importance dans le suivi des patients fumeurs, en adéquation avec le « rôle clef » qu’ils tiennent dans le programme national de réduction du tabagisme et leur formation se doit donc d’évoluer en adéquation avec cela.

2. Les devoirs constitutifs du métier de pharmacien en

rapport avec le tabagisme et/ou le suivi des patients en