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Chapitre II : Matériel et méthodes général

3. Régimes thermiques

3.1. Cas des régimes constants (Chapitre III)

La première approche développée au cours de cette thèse et présentée dans le Chapitre III fait intervenir des régimes thermiques constants de température moyenne égale à 22, 25 ou 28°C. Ces températures sont choisies car représentatives de la

variabilité de températures mensuelles moyennes que peut rencontrer L. botrana

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de son aire de distribution en France (Perpignan : 42°69′N ; 2°90′E) (www.meteofrance.com). En accord avec les objectifs fixés dans ce chapitre, l’utilisation de régimes constants se révèle comme une méthode conceptuellement simple et intuitive pour caractériser les réponses de différents traits des chenilles à une augmentation réaliste de la température moyenne dans le contexte du réchauffement climatique.

3.2. Cas des régimes fluctuants (Chapitre IV)

Un degré de réalisme écologique et climatique supplémentaire est incorporé dans le Chapitre IV, via l’intégration de patterns réalistes de fluctuations thermiques journalières et leur altération par le réchauffement climatique. L’approche développée

dans ce chapitre consiste à comparer la performance des chenilles et adultes de L.

botrana entre deux régimes thermiques fluctuants, représentatifs des conditions actuelles et futures dans les vignobles bourguignons pendant la période estivale (15 Juillet-15 Août), durant laquelle l’espèce (alors à sa deuxième génération annuelle) est particulièrement active (Barnay et al., 2001; Martín-Vertedor et al., 2010).

Le régime simulant une journée estivale « moyenne » actuellement observée en Bourgogne (station météorologique Longvic-Dijon : 47,27°N; 5,09°E) est établi à

partir de données de températures horaires, collectées in situ durant 20 années

consécutives (entre 1995 et 2014). Dans le but de retranscrire avec une certaine fidélité les variations de température se produisant à l’échelle d’une journée, ce régime

« actuel » est décomposé en six paliers de température d’une durée de 4 heures

chacun. La température de chaque segment est calculée comme la valeur moyenne sur les 30 jours (15 Juillet-15 Août) et les 20 années (1995-2014) de données

thermiques in situ.

Le régime actuel est comparé à un régime « futur », cherchant, au travers de la modélisation climatique, à simuler l’impact local du changement climatique sur les environnements thermiques des vignobles bourguignons. Ce régime futur a été établi en sollicitant l’expertise de climatologistes. Il est défini de manière à reproduire les conditions thermiques pouvant être rencontrées d’ici la fin de ce siècle (horizon 2081-2100), au cours d’une journée estivale future « moyenne ». À l’instar du régime actuel, le régime futur est constitué par un cycle thermique journalier comprenant six paliers

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de température d’une durée de 4 heures chacun. Le régime futur est défini comme la moyenne de six simulations climatiques de haute résolution spatiale (8 km de largeur de maille), en sélectionnant le scénario d’émissions de gaz à effet de serre le plus pessimiste (RCP 8.5). Ce scénario socio-économique prédit la plus grande valeur de forçage radiatif à la surface de la terre (c’est-à-dire une différence entre rayonnement absorbé et rayonnement réfléchi à la surface de la Terre très largement positive), en lien avec d’importantes concentrations atmosphériques futures en gaz à effet de serre (IPCC, 2014). Les six simulations réalisées diffèrent par le couple de modèles climatiques qu’elles mettent en jeu. En effet, chacune implique un modèle de circulation général dont les prédictions sont recalculées à une échelle spatiale plus fine à l’aide d’un modèle climatique régional de maille spatiale inférieure (méthode de « dynamical downscaling ») (Harris et al., 2014; Jacob et al., 2014; Taylor et al., 2012) (Fig.16). D’après cette méthode de modélisation du climat à une échelle locale, le réchauffement climatique pourrait se traduire, dans les vignobles bourguignons, par une augmentation de température moyenne et une légère augmentation de la variabilité thermique intra-journalière. En effet, les régimes actuel et future diffèrent à la fois par leur température moyenne (actuel : 20.5°C, futur : 25.8°C) et leur amplitude

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Figure 16 : Principe de la modélisation climatique avec méthode de « dynamical downscaling » utilisée

pour conjecturer l’évolution des climats à une échelle régionale/locale. Les projections climatiques sont dérivées de modèles qui partitionnent l’atmosphère en cubes adjacents et superposés appelés voxels. Chaque voxel est défini par les valeurs d’un certain nombre de paramètres physiques de l’air (température, hygrométrie, pression atmosphérique…). Ce sont les différences de ces caractéristiques physiques entre voxels qui vont régir, au travers d’équations physiques, les échanges de masses d’air entre voxels et donc la dynamique d’évolution du climat dans le temps. Les caractéristiques des voxels sont donc dynamiques dans le temps, et permettent aux modèles de tourner en totale autonomie. Il existe plusieurs catégories de modèles climatiques, qui diffèrent notamment par la résolution spatiale de leur maillage et donc le volume des voxels. La méthode de « dynamical downscaling » consiste à partir de projections climatiques fournies par des modèles de circulation généraux (maillage jaune), utiles pour prédire l’évolution du climat à une échelle spatiale relativement grossière (avec une largeur de maille de l’ordre de plusieurs centaines de kilomètres). Les projections données par ces modèles de circulation généraux sont recalculées en étant intégrées dans des modèles climatiques régionaux (maillage vert), d’une résolution spatiale beaucoup plus fine (largeur de maille de l’ordre de quelques kilomètres). Ainsi, les modèles climatiques régionaux permettent d’intégrer la manière dont des processus climatiques perceptibles uniquement à une faible échelle spatiale et reliés aux facteurs locaux (topographie, végétation, hydrographie…) peuvent modeler le climat et son évolution à cette échelle fine, fournissant des projections climatiques pertinentes pour les études en écologie.

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Figure 17 : Cycles thermiques journaliers des deux régimes fluctuants utilisés dans le Chapitre IV : le

régime représentatif des conditions thermiques estivales actuelles en Bourgogne (bleu), et le régime simulant les conditions thermiques estivales futures prédites pour la fin du siècle (rouge), sous le postulat du scénario socio-économique RCP 8.5 et d’après six simulations climatiques.

3.3. Cas d’une vague de chaleur (Chapitre V)

Le Chapitre V porte sur la réponse des chenilles d’eudémis à une vague de chaleur survenant à différentes étapes du développement larvaire. Cet événement thermique extrême est simulé au laboratoire via une augmentation ponctuelle (durant deux jours consécutifs) de 5°C de la température moyenne, sans modification de l’amplitude des fluctuations thermiques, par rapport au régime futur décrit dans la section 3.2. (voir le paragraphe ci-dessus) et choisi comme témoin. Ainsi, le régime thermique associé à la vague de chaleur présente une température moyenne de 30.8°C et une amplitude thermique journalière de 9.1°C. Cette méthode d’imitation expérimentale d’une vague de chaleur s’accorde avec des définitions climatologiques et écologiques précédemment utilisées pour caractériser un tel phénomène météorologique. D’un point de vue climatique, elle remplit le critère d’une « période d’au moins un jour durant lequel la température maximale dépasse 35°C », puisque le cycle journalier du régime associé à la vague de chaleur atteint une température maximale de 35.5°C pendant les quatre heures les plus chaudes de la journée (Anderson and Bell, 2011; Tan et al., 2006). D’un point de vue écologique, une hausse temporaire de 5°C de la température

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moyenne a déjà été choisie comme manière de mimer une vague de chaleur dans des études précédentes (Beetge and Krüger, 2019; Chiu et al., 2015). De plus, la vague de chaleur ainsi simulée devrait avoir des incidences profondes sur la performance des chenilles d’eudémis, puisque les conditions thermiques rencontrées durant cet épisode de chaleur excèdent l’optimum thermique pour plusieurs fonctions biologiques chez cette espèce (en particulier pour une population de laboratoire), comme le développement larvaire (28-30°C) et la survie larvaire (20-25°C) (Gutierrez et al., 2012).

4. MESURES DES TRAITS D’HISTOIRE DE VIE DU RAVAGEUR