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3 LES SYNERGIES AUTONOMES

3.4 Étude de cas de démarches d’EIT autonomes

3.4.5 Réflexion sur les études de cas des synergies autonomes

Malgré leurs différences, les trois cas d’étude présentés ont aussi plusieurs points en communs, qui méritent une attention particulière.

Premièrement, ils ont chacun des statuts historiques différents. Les cas n°1 et n°2 sont plus anciens alors que le dernier est très récent. Ainsi, on peut observer une évolution des anciennes activités industrielles à travers le temps. Par exemple, Séché Environnement a commencé dans le stockage du déchet, puis s’est diversifié dans la valorisation matière et énergétique. Au complexe agroindustriel des Sohettes, la sucrerie représentait l’activité historique principale. Aujourd’hui, l’IEB cherche davantage à faire rayonner son expertise en bioraffinerie, au niveau européen.

Ces deux cas d’étude sont aussi caractérisés par une certaine ouverture vers le monde extérieur. En effet, la communication sur leurs activités industrielles permet de valoriser les bonnes pratiques auprès du public et des autres entreprises. Ils agissent ainsi en tant qu’acteurs modèles dans leur domaine. De plus, on observe aussi que ces projets initiés par des industriels se tournent de plus en plus vers des acteurs publics pour développer de nouveaux projets. La proximité de l’IEB avec des acteurs académiques et le projet de réseaux de chaleur urbain de Séché Environnement avec la ville de Laval illustrent bien cette tendance. En Poitou-Charentes, les acteurs territoriaux ont été sollicités dès l’ébauche du projet de méthanisation centralisée.

Les cas d’étude présentés représentent des activités industrielles différentes. Toutefois il est intéressant de noter que les trois projets ont un lien particulier avec le territoire agricole, et plus spécifiquement avec des activités agroalimentaires. Ce secteur industriel se distingue notamment des autres à travers son aspect non délocalisable. En effet, le lieu d’implantation des entreprises de cette filière est fortement influencé par la proximité avec les gisements de matières premières. Il existe donc un intérêt particulier de cohésion avec les fournisseurs afin d’assurer l’ancrage territorial et la pérennité des activités économiques.

La présence de coopératives agricoles est un point commun sur les trois territoires étudiés. Cette forme d’organisation permet de regrouper les acteurs agricoles autour d’un projet collectif. Elle permet notamment de mutualiser l’apport en matières premières afin de capter des grosses quantités de ressources. La mise en place de synergies entre les acteurs permet ainsi d’optimiser l’utilisation de l’ensemble des ressources du territoire et de renforcer la compétitivité des activités, de manière collective. Les coopératives permettent aussi d’impliquer financièrement l’ensemble des acteurs autour d’une activité centrale. L’implication des différents acteurs est ainsi réalisée via leur actionnariat pour un projet commun. Ceci permet le partage des investissements initiaux, ainsi que la maximisation partagée des gains réalisés. De plus, le fait que les entreprises soient financièrement engagées dans les projets favorise la sécurité d’un approvisionnement local en ressources sur le long terme. En effet, il est dans l’intérêt des parties prenantes de contribuer à l’apport en matières premières, nécessaire à la pérennité du projet.

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« L’empathie entre les acteurs industriels qui viennent du milieu agricole via, notamment, les coopératives a été déterminante. Elle crée une très forte « psychologie » d’attachement au territoire (« à la terre »). Cette même structuration coopérative créée une grande attente du même milieu agricole, les outils de transformation appartenant, par les coopératives, aux agriculteurs. » (CATEI, 2014b)

Le déploiement de filiales permet aussi aux industriels de bénéficier des gains apportés par les synergies. C’est notamment le cas de Cristal Union, qui a créé la filiale Cristanol, afin de valoriser les déchets organiques du site.

Le montage de projets d’EIT d’ampleur nécessite du temps. Sur le complexe agroindustriel des Sohettes, les synergies se sont développées sur des dizaines d’années. Pour l’unité de méthanisation centralisée, une longue période de sensibilisation des acteurs a été nécessaire avant la création de l’ABBT. Les projets mis en place nécessitent aussi des longues périodes de retour sur investissement. Pour cela, certains leviers financiers publics, comme notamment les subventions ou les tarifs de rachat de l’électricité, peuvent rendre les projets davantage intéressants pour les actionnaires. Le fait que les acteurs aient un attachement particulier au territoire, fait aussi en sorte qu’ils soient plus aptes à supporter des investissements sur le long terme. Plus particulièrement, le cas de Séché Environnement illustre bien la volonté d’une entreprise locale familiale de pérenniser ses activités sur le territoire. Cette intention est notamment renforcée par le désir du fondateur de transmettre l’entreprise aux générations suivantes. Dans cet exemple, les membres du groupe font aussi preuve d’une réelle sensibilité environnementale et accordent une grande importance à l’aspect humain dans le travail.

Différentes formes de contractualisation permettent de coordonner les synergies entre les acteurs. Toutefois, les cas présentés révèlent surtout l’établissement de liens à partir d’une dynamique collaborative. En effet, les relations de bonne entente et de confiance favorisent une communication transparente entre les parties prenantes. Ceci leur permet par la suite de formaliser les accords, de manière à obtenir un consensus. De plus, plusieurs réunions annuelles permettent de prévenir les risques de dysfonctionnements et de conflits. Pour l’IEB et Tiper Méthanisation, le cadre non commercial des échanges respectifs d’eau et de digestat met l’ensemble des acteurs dans une situation de type gagnant-gagnant. Ainsi, malgré les différences de gouvernance des projets, le bien commun, le bon sens et l’esprit de coopération entre les acteurs privés permettent de structurer les échanges (CATEI, 2014b). Aussi, les synergies mises en place font l’objet d’une planification collective bien approfondie, en amont des projets. Par exemple, ceci a permis que les activités de Tiper Méthanisation soient cohérentes avec celles des agriculteurs, qui exigent la récupération d’un digestat de qualité. La création de l’ABBT a permis de fédérer l’ensemble des acteurs pouvant bénéficier du projet. Ainsi, cette association a permis d’assurer la participation et l’implication des parties prenantes.

Ce dernier exemple est intéressant car il se rapproche davantage d’un cas de synergie organisée par un tiers acteur. En effet, l’entreprise Méthanéo a réussi à mobiliser un nombre important d’acteurs autour de son projet. Elle a ainsi coordonné l’ensemble des actions nécessaire à la concrétisation de synergies entre les différentes parties prenantes impliquées.

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