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La réduction dissimilatrice consiste pour l’organisme qui la réalise, à récupérer directement l’énergie produite par la réduction des nitrates pour son fonctionnement (respiration) ou des réactions biogéochimiques (oxydo-réduction). Suivant l’utilisation qui sera faite de cette énergie on peut distinguer deux types de réduction :

2.2.2.1 – La DNRA (Dissimilatory Nitrate Reduction to Ammonium)

La réduction dissimilatrice des nitrates en ammonium n’est pas considérée réellement comme de la dénitrification (Knowles, 1982). Dans un premier temps cette réaction apparaît comme un puits d’électrons ne permettant pas de production d’énergie pour la cellule (Fazzolari et al., 1990) bien que le couplage d’enzyme permettant la DNRA et la production d’ATP ait pu être mis en évidence (Brunet and Garcia-Gil, 1996). Cette réaction, tout comme l’assimilation, ne permet pas non plus de perte réelle d’azote pour le milieu (Lefebvre, 2003). Cette réaction nécessite une absence permanente d’oxygène et a été étudiée en milieu côtier ou estuarien (Cole and Brown, 1980; Bonnin et al., 1998; Soonmo and Gardner, 2002) mais aussi dans des aquifères (Brunet and Garcia-Gil, 1996; Schürmann et al., 2003; Revsbech et al., 2005). Il peut être difficile de faire la part entre cette réduction dissimilatrice et l’hydrolyse des protéines qui produit aussi de l’ammonium dans le milieu.

2.2.2.2 – La respiration azotée ou dénitrification s.s.

La dénitrification ou respiration azotée permet aux bactéries de « respirer » c’est-à-dire de produire l’énergie nécessaire (ATP) au fonctionnement de leurs cellules lorsque l’oxygène vient à manquer (Knowles, 1982; Tiedje, 1988; Seitzinger et al., 1993). La dénitrification

conduit à une perte réelle d’azote dans le milieu sous forme gazeuse (N2) et est donc le

mécanisme qui doit être favorisé pour la préservation du milieu (Strebel et al., 1990). La dénitrification dissimilatrice est un ensemble de réactions où les nitrates sont réduits par étapes (NO2, NO puis N2O et N2). Le N2O (protoxyde d’azote) et le NO (monoxyde d’azote),

composés intermédiaires de la réaction, sont de puissants gaz à effet de serre. L’enjeu actuel de l’optimisation des processus de dénitrification industriels ou naturels est de limiter la production, ou tout du moins la libération, de ces composés vers l’atmosphère. L’ensemble des réactions qui ont lieu pour aboutir à la formation d’azote atmosphérique (N2) peut être résumé à une simple équation bilan d’oxydo-réduction où les différentes étapes sont omises. Dans un milieu où l’oxygène est présent, c’est cette molécule qui présente le plus fort pouvoir oxydant, l’oxydation par les nitrates d’un composé ne peut donc avoir lieu que dans des conditions anaérobies (pauvres voire sans oxygène). L’oxygène étant un fort oxydant, les réactions d’oxydo-réduction avec les nitrates comme oxydant (dénitrification), ne peuvent donc avoir lieu que dans les milieux à faible concentration en oxygène (Mariotti, 1986; Bennet et al., 2000). Suivant la molécule oxydée dans la réaction (organique ou minérale) deux sous-types de dénitrifications dissimilatrices peuvent être décrits :

• la dénitrification hétérotrophe : les nitrates oxydent directement la matière organique à la place de l’oxygène absent : c’est la respiration azotée type (Équation 1) réalisée chez certaines bactéries telles que Pseudomonas sp., Agrobacterium sp.,

Alcaligenes sp., … (Gamble et al., 1977). Les études récentes tendent à montrer que le

gène permettant la dénitrification est largement répandu dans les populations bactériennes en milieu naturel (Gamble et al., 1977; Tiedje, 1988; Philippot and Hallin, 2005). Cette réaction nécessitant des conditions anaérobies et la présence de matière organique, est courante dans les milieux hydromorphes tels que les fonds de vallées, les tourbières et dans certaines nappes phréatiques, riches en carbone organique, captives ou profondes.

O

H

N

CO

H

NO

O

CH

2

+

45 3

+

45 +

2

+

25 2

+

75 2 Équation 2

• la dénitrification autotrophe : en absence de matière organique, certaines phases minérales, comme les sulfures, peuvent être oxydées par les nitrates par simple réaction chimique d’oxydo-réduction. Bien que thermodynamiquement viable c’est un processus lent sans la présence d’un catalyseur biologique (Reyes-Avila et al., 2004). Ainsi certaines espèces de bactéries telles que Thiobacillus denitrificans en conditions anaérobies catalysent la réaction de réduction de nitrates par l’oxydation du soufre de la pyrite (FeS2) de façon à récupérer l’énergie de la réaction (Équation 6- Kölle et al., 1985). Ces phases sulfurées sont souvent des minéraux accessoires présents en grande

quantité dans les fractures des roches cristallines telle que le schiste et le granite. L’évolution des concentrations en nitrates et sulfates observée dans de tels milieux est souvent attribuée à ce processus biogéochimique (Mariotti, 1986; Postma et al., 1991; Korom, 1992; Böhlke and Denver, 1995; Pauwels et al., 1998; Pauwels et al., 2000; Puckett and Cowdery, 2002; Grimaldi et al., 2004)

+ +

+

+

+

+

+

2 2 2 4 2 3

2

14NO 4H 7N 10SO 2H O 5Fe

5FeS

Équation 6

Le fer ferreux (Fe2+) en solution (tel que produit lors de l’oxydation de la pyrite ou issu d’autres réactions de dissolution,…) peut, lui aussi, être réduit par les nitrates selon les termes de l’Équation 7. Les bactéries permettant la catalyse de cette oxydo-réduction sont peu connues (Straub et al., 1996; Weber et al., 2001).

+

+

+2NO +24H O→10Fe(OH) +N +18H

10Fe

2 3 2 3 2

Équation 7

Communément c’est le soufre des sulfures qui est considéré comme réducteur des nitrates or dans le cas de la pyrite (FeS2) le fer est lui aussi potentiellement réducteur. Accélérée par la présence de bactéries quelque peu différentes de celles qui oxydent le soufre (Thiobacillus ferooxidans et Leptospirillum sp), la réduction des nitrates est accompagnée par une augmentation de la teneur en sulfates (proportions quasi identiques) du milieu et la précipitation du fer. Contrairement à l’oxydation du soufre, l’oxydation du fer conduit à une acidification du milieu par production de protons (Équation 8- Nordstrom and Southam, 1997; Moncaster et al., 2000)

+

+

+

+

+

+30NO 20H O 10Fe(OH) 20SO 15N 10H

10FeS

2 2 4 3 2 3 2 Équation 8

Enfin le fer à valence zéro (Fe0) semble lui aussi pouvoir être un réducteur important des nitrates (Devlin et al., 2000; Yang and Lee, 2005). Actuellement en cours d’étude, la réaction globale, les possibles étapes, une éventuelle influence biologique et sa possible existence en milieu naturel ne sont pas encore complètement contraintes.

Chapitre III – Hydrobiogéochimie des aquifères