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La réactivité dans les états excités

Dans le document Etude QM/MM de systèmes bioluminescents (Page 60-69)

Les mécanismes réactionnels faisant intervenir un ou plusieurs états excités

sont communs dans la chimie luminescente. Les réactions de chimiluminescence

et bioluminescence sont par définition des réactions faisant intervenir les états

excités. En effet, l’état excité émetteur est obtenu suite à une réaction chimique.

De nombreuses molécules photoluminescences émettent suite à une cascade de

réactions chimiques dans les états excités, le passage d’un état singulet à un état

triplet étant un exemple concret (voir Figure 5.1).

La difficulté de la réactivité dans les états excités est double. Dans un premier

temps, il faut considérer une surface d’énergie potentielle pour chaque état

électro-nique inclus dans le mécanisme réactionnel. Il est alors beaucoup plus compliqué et

long d’obtenir un scan détaillé de toutes ces surfaces, réduisant la précision quand

au mécanisme réactionnel. Dans un second temps comme on tient compte de

plu-sieurs états électroniques il existe des intersections permettant de passer de l’un à

l’autre. Outre le fait que ces intersections sont très difficiles à représenter et à étudier,

connaître les probabilités de passages d’un état à l’autre est un facteur clef afin de

comprendre ces mécanismes. Certaines réactions photochimiques possèdent 4 ou

5 intersections donnant des produits finaux complètement différents ; estimer le

chemin réactionnel emprunté devient alors une tâche ardue.

Ainsi deux états électroniques peuvent être dégénérés à certains endroits de la

surface d’énergie potentielle. On appelle une intersection conique ce croisement

entre deux états de même spin. Parmi les mécanismes photoluminescents, la

pré-sence d’une intersection conique accroit la possibilité d’une transition non radiative

et donc une perte d’émission de lumière. Cependant le passage d’un état excité par

une intersection conique peut conduire à un nouveau produit de réaction.

Dans les réactions chimiluminescentes et bioluminescentes, la présence d’une

intersection conique permet d’atteindre le premier état excité et permet au système

d’accéder à l’état électronique responsable de l’émission de lumière.

C

HAPITRE

5 : M

ODÉLISER DES CHEMINS RÉACTIONNELS

FIGURE 5.1 – Schéma des principales réactions photochimiques sur une surface

d’énergie potentielle.

Deuxième partie

La luminescence

Chapitre 6

Les différentes sortes de luminescence

La luminescence est un mécanisme physique donnant lieu à une émission de

lumière. Cette émission correspond à la perte d’énergie ou désexcitation d’un état

électronique dit excité vers un état de plus basse énergie. L’énergie est libérée sous

forme d’un photon lumineux avec une longueur d’onde d’émission correspondant à

la différence d’énergie entre les deux états électroniques considérés.

La luminescence s’oppose à l’incandescence où l’émission de lumière provient

du chauffage du système.

La première étape du mécanisme de la luminescence permet l’excitation du

système c’est à dire que le système gagne suffisamment d’énergie afin d’atteindre un

état dit excité. Il existe différentes façons d’exciter le système selon la source initiale

d’énergie. Ainsi on peut parler de :

- Mécanoluminescence : l’état excité est obtenu par action mécanique sur un

solide. On peut citer comme exemple la piézoluminescence ou la sonoluminescence.

Ce type de luminescence peut également se retrouver chez des espèces vivantes

comme la crevette pistolet. Cette crevette chasse on faisant imploser des bulles

formées par la fermeture rapide de sa pince. L’effondrement de cette bulle, à des

conditions de pression et de température extrêmes produit des flashs de lumière

peu intense et invisible à l’œil nu. En conséquence ce type de mécanoluminescence

à été nommé shrimpoluminescence80.

- Electroluminescence : l’état excité est obtenu suite au passage d’un courant

électrique ou en la présence d’un champ électrique fort. L’électroluminescence est

fortement implantée dans notre vie quotidienne, les LEDs (diodes

électrolumines-centes)81présentes dans les appareils électroniques utilisent ce type de mécanisme

ainsi que certains types de laser ou de solides semi-conducteurs.

- Photoluminescence : l’état excité est obtenu suite à l’absorption d’un photon.

Il existe deux types de photoluminescence, la fluorescence et la phosphorescence.

La fluorescence est très utilisée dans le domaine médical comme dans le cas des

fluorophores. La phosphorescence est quand à elle utilisée comme émission de

lumière retardée dans des peintures ou objets. Les OLED (diode électroluminescente

organique)82 émettent le plus souvent par phosphorescence. Ces deux types de

photoluminescences seront étudiés en détails ci-après.

- Chimiluminescence : l’état excité est obtenu suite à une réaction chimique.

Il existe peu de molécules dites chimiluminescentes, notons cependant comme

exemple le luminol (dans les tubes lumineux) et les 2-coumaranones.

- Bioluminescence : l’état excité est obtenu suite à une réaction chimique dans

un site catalytique d’une espèce vivante. De nombreux organismes vivants utilisent

la bioluminescence comme moyen de défense, de communication, attraction... La

bioluminescence est également utilisée dans le domaine biomédical. La

biolumi-nescence sera étudiée plus en détails dans une section suivante.

Dans le reste de ce chapitre, on va approfondir les mécanismes de luminescence

utilisés dans cette thèse. On détaillera aussi certains outils employés en chimie

théo-rique afin de modéliser ces luminescences.

6.1 La photoluminescence

Comme indiqué dans la partie précédente la photoluminescence est la branche

de la luminescence où l’obtention de l’état excité se fait par absorption d’un photon,

c’est à dire d’un rayonnement lumineux possédant une énergie définie. Lors du

pro-cessus d’émission, la perte d’énergie peut se faire selon deux propro-cessus différents, un

processus radiatif et un processus non-radiatif. Le diagramme de Perrin-Jablonski

permet d’avoir un point de vue global sur ces deux processus.

Dans ce diagramme (voir figure 6.11), l’état fondamental du système est noté S0,

les états excités singulets Sn et les états excités triplet Tn. En outre, chaque état

élec-tronique du système est composé de niveaux vibrationnels qui participent aux

pro-cessus radiatifs. Lors de l’absorption d’un photon d’énergiehν, un électron va être

promu vers un des niveaux vibrationnels de l’un des états excités singulets. L’énergie

du photon absorbée doit être au minimum égale à la différence d’énergie entre l’état

fondamental et l’état excité. On dit d’une transition qu’elle est verticale si celle est

suffisamment rapide pour qu’il n’y est pas de réorganisation des noyaux du système

excité. On considère également que lors de cette transition verticale il n’y a pas de

réorganisation de l’environnement lié au système.

Puis, dans un second temps, le système excité va perdre de l’énergie de telle sorte

à repeupler l’état fondamental S0. L’énergie peut être perdue sous forme de chaleur

comme dans le cas de la relaxation vibrationnelle ou de la conversion interne (CI).

Ces deux relaxations appartiennent aux processus non-radiatif. La relaxation

vibra-tionnelle permet au système de se relaxer afin de retourner à l’état vibrationnel le

1. 1. Figure adaptée de celle créée par Germain Salvato-Vallverdu dont le code source est

dispo-nible à l’adresse http ://www.texample.net/tikz/examples/the-perrin-jablonski-diagram/

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6 : L

ES DIFFÉRENTES SORTES DE LUMINESCENCE

Etat Fondamental S0

T1

S1

S2

A

bs

o

rpt

io

n

Flu

o

res

cenc

e

P

ho

sph

o

resc

ence

CI

CI

CIS

CIS

R

V

R

V

R

V

R

V

L´egende

CI

Conversion Interne, Si −→Sj transition non radiative.

CIS

Croisement Inter-syst`eme, Si −→Tj transition non radiative.

RV

Relaxation Vibrationnelle.

Figure 6.1 – Le diagramme de Perrin-Jablonski.

plus bas en énergie de l’état électronique considéré. La conversion interne permet

la transition entre deux états électroniques de même spin vers l’état le plus bas en

énergie.

Le processus radiatif se traduit par l’émission d’un photon lors de la

désexcita-tion. Si l’émission de ce photon a lieu suite à une perte d’énergie entre deux états

singulets on parle de fluorescence. L’émission peut également avoir lieu entre un

état triplet et l’état fondamental singulet, c’est la phosphorescence. Cette dernière

est possible grâce au croisement inter-système (CIS) permettant la transition d’un

électron entre deux états de multiplicité de spins différents (dans notre cas singulet

et triplet). Comme dans le cas de l’absorption, la fluorescence et la phosphorescence

sont assimilées à des transitions verticales.

Outre le spin de l’état électrique de départ, il est possible de discriminer la

fluo-rescence de la phosphofluo-rescence selon le temps de vie de l’état excité. En effet, la

fluorescence est un phénomène rapide de l’ordre de la nanoseconde alors que le

temps de vie de la phosphorescence est de l’ordre de la seconde.

Dans la majorité des molécules organiques, la fluorescence et la

phosphores-cence ont lieu entre le 1er état excité, respectivement S1 ou T1 et l’état fondamental

S0. Il est également important de noter que ces deux processus radiatifs sont en

concurrence avec la conversion interne pour la transition entre S1 et S0. On définit

alors la notion de rendement quantique, noté Φ, correspondant au nombre de

photons émis sur le nombre de photons absorbés par le système. Il est alors possible

de rendre compte de l’efficacité des processus radiatifs en calculant ce rendement

quantique.

Les molécules pouvant émettre des photons par photoluminescence sont

appe-lées chromophores. Dans les chromophores on s’intéresse plus particulièrement à

deux orbitales moléculaires, l’orbitale moléculaire la plus haute occupée (HOMO) et

l’orbitale moléculaire la plus basse vacante (LUMO). En effet, la transition entre les

états électroniques S1 et S0 est majoritairement issue d’une transition entre la HOMO

et la LUMO. Dans le cas des molécules organiques, la présence d’une alternance

de simple et doubles liaisons (molécule conjuguée) permet d’expliquer l’absorption

puis l’émission de photons dans le visible. Cette conjugaison se traduit par une

délo-calisation des électronsπsur l’ensemble des atomes participant à cette conjugaison.

La HOMO et la LUMO sont alors majoritairement constituées d’orbitales

orthogo-nales au plan moyen de la molécule et localisées sur différentes parties du système.

La notion de transfert de charge correspond au déplacement de la densité

électro-nique entre la HOMO et la LUMO. Ce transfert de charge est nécessaire afin de

pou-voir émettre dans le visible, plus celui-ci est important plus l’émission est déplacée

vers les longueurs d’ondes rouges. Enfin, selon les atomes appartenant à la HOMO

ou la LUMO et la nature de la transition électronique, la photoluminescence peut

induire des transformations chimiques comme par exemple des isomérisations.

Plusieurs facteurs peuvent modifier l’écart énergétique et ainsi la longueur

d’onde d’émission. Par exemple, la présence de groupements auxochromes permet

de stabiliser ou déstabiliser les deux orbitales frontières HOMO et LUMO. Ces

grou-pements sont dits électroaccepteurs si ils induisent un déplacement de la densité

électronique dans leur direction comme pour le groupement carbonyle C=O. Les

groupements électrodonneurs induisent quand à eux un déplacement de la densité

électronique vers les autres atomes de la molécule participant à la conjugaison.

Le deuxième facteur prépondérant dans la modification de la longueur d’onde

d’émission fait intervenir l’environnement extérieur de la molécule. La présence

d’un solvant, plus ou moins polaire ou d’autres molécules (protéines, chimie

hôte-invité) permet également le déplacement de la longueur d’onde d’émission.

Il est alors primordial de décrire précisément ces effets environnementaux afin

de bien reproduire le phénomène de photoluminescence. La prise en compte de

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HAPITRE

6 : L

ES DIFFÉRENTES SORTES DE LUMINESCENCE

l’environnement dans le calcul des énergies des états électroniques a été développée

dans le chapitre 4.

Enfin, on appelle un déplacement hypsochrome quand l’écart énergétique entre

la HOMO et la LUMO augmente (la HOMO est stabilisée et/ou la LUMO est

désta-bilisée) et un déplacement bathochrome quand ce dernier diminue (la HOMO est

déstabilisée et/ou la LUMO est stabilisée).

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