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2-6 Réactions avec d’autres réactifs organométalliques

Chapitre 2 : Synthèse de biaryles

I- 2-6 Réactions avec d’autres réactifs organométalliques

Cahiez a été le premier à démontrer que la réaction entre un chlorure d’arylmanganèse et un bromure ou un iodure d’aryle était efficace en présence de palladium.265 La réaction se fait en seulement 30 minutes. Les biaryles sont obtenus avec d’excellents rendements généralement, à partir de bromures ou d’iodures d’aryle ayant des groupements électro-attracteurs ou électro-donneurs (Schéma 99). Les triflates d’aryle peuvent être également utilisés mais ils donnent des rendements légèrement inférieurs. Les chlorures d’aryle manganèses sont synthétisés à partir des chlorures d’arylmagnésiens correspondants. L’étendue de cette réaction a été continuée quelques années plus tard.266

Schéma 99. Synthèse de biaryles par couplage entre un chlorure d’arylmanganèse et un halogénure d’aryle

Simultanément, Rieke a reporté le couplage entre un iodure d’aryle et un dérivé de bromure de 3- thiophènemanganèse.267 Ces derniers sont obtenus par insertion directe de manganèse activé dans la liaison C-Br du 3-bromothiophène. De bons à très bons rendements sont obtenus, même si peu d’exemples

264

G. A. Molander, L. Iannazzo, J. Org. Chem. 2011, 76, 9182-9187.

265

E. Riguet, M. Alami, G. Cahiez, Tetrahedron Lett. 1997, 38, 4397-4400.

266 E. Riguet, M. Alami, G. Cahiez, J. Organomet. Chem. 2001, 624, 376-379. 267 R. D. Rieke, S. H. Kim, X. Wu, J. Org. Chem. 1997, 62, 6921-6927.

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ont été réalisés (Schéma 100). Il faut noter que l’insertion du manganèse ne se fait, dans ces conditions, que sur l’un des deux atomes de brome présent sur le thiophène. Dans ces mêmes conditions, la réaction a été généralisée à d’autres hétéroarylmanganèses.268

Schéma 100. Réaction entre un bromure de 3-thiophènemanganèse avec un iodure d’aryle

Schneider a ensuite développé la réaction entre un chlorure d’arylmanganèse et un bromure d’aryle par catalyse au nickel en utilisant un ligand carbène.269

b) Avec des arylcuivres

Outre leurs utilités dans le couplage d’Ullmann, les dérivés de cuivre peuvent être utilisés en couplage croisé avec un halogénure d’aryle par catalyse au palladium. En effet, Shimizu a montré qu’à partir d’un dérivé du 2-nitro-bromobenzène et d’un iodure de pyridine, en présence d’un excès de cuivre et d’une quantité catalytique de palladium, les 2-nitro-bromobènzenes deviennent des arylcuivres qui transmétallent avec un intermédiaire iode-palladium-pyridine.270 De très bons à excellents rendements sont généralement obtenus, mais la réaction reste limitée à la présence d’un groupement nitro en ortho du brome (Schéma 101).

Schéma 101. Couplage entre un iodure de pyridine et un 2-nitroarylcuivre formé in situ

268

R. D. Rieke, Y. S. Suh, S. H. Kim, Tetrahedron Lett. 2005, 46, 5961-5964.

269 A. Leleu, Y. Fort, R. Schneider, Adv. Synth. Catal. 2006, 348, 1086-1092.

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Lipshutz a de son côté obtenu des biaryles dissymétriques par oxydation de biarylcuprates, sans catalyseur.271 Ces biarylcuprates sont obtenus par réaction d’un aryllithien avec un arylcuprate, préalablement obtenu à partir de CuCN et de l’aryllithien correspondant (Schéma 102). De bons à excellents rendements sont obtenus, même avec des hétéroaryllithiens ou des lithiens polycycliques. Cependant, la présence de groupements fonctionnels sensibles n’est pas possible avec cette méthode en raison de la forte réactivité du lithien.

Schéma 102. Synthèse de biaryles par oxydation de biarylcuprates

Knochel a quant à lui couplé des iodures d’aryle avec des arylcuivres en présence d’un catalyseur de fer.272 Les arylcuivres sont obtenus par fonctionnalisation d’arylmagnésiens. De bons à excellents rendements sont obtenus à partir d’iodures d’aryle appauvris en électrons (Schéma 103). Cette réaction a par la suite été étendue à des couplages avec des fluorures, bromures ou tosylates d’aryle par catalyse au cobalt, mais la présence d’un groupement électro-attracteur sur ceux-ci est toujours nécessaire.273

Schéma 103. Réaction entre un iodure d’aryle et un arylcuivre par catalyse au fer

c) Avec des arylbismuths

En raison de leur faible réactivité, les arylbismuths n’ont pas beaucoup été étudiés. Barton a été le premier à décrire l’homocouplage d’arylbismuths en 1988.274 Une quantité stœchiométrique de palladium est nécessaire à partir de tri-arylbismuths, alors que cette quantité est catalytique à partir de (di)chlorures

271

B. H. Lipshutz, K. Siegmann, E. Garcia, F. Kayser, J. Am. Chem. Soc. 1993, 115, 9276-9282.

272

I. Sapountzis, W. Lin, C. K. Kofink, C. Despotopoulou, P. Knochel, Angew. Chem. Int. Ed, 2005, 44, 1654-1657.

273

(a) T. J. Korn, P. Knochel, Angew. Chem. Int. Ed, 2005, 44, 2947-2951. (b) T. J. Korn, M. A. Shade, S. Wirth, P. Knochel, Org. Lett. 2006, 8, 725-728.

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de mono- ou bi-arylbismuths. De bons à excellents rendements en biaryles symétriques sont ainsi obtenus dans des conditions douces.

Tanaka a été le premier à reporter le couplage croisé catalysé au palladium entre des triflates d’aryle et un dialkoxide de phénylbismuth possédant un motif pyridine chélatant.275 Des rendements très bons à excellents sont obtenus à partir de triflates d’aryle appauvris en électrons (Schéma 104). Il faut noter que la réaction ne se fait pas à partir de substituants électro-donneurs présents sur le triflate d’aryle. Le même groupe a ensuite publié le couplage entre des triarylbismuths, plus facilement synthétisés mais moins réactifs, avec des bromures, iodures ou triflates d’aryle.276 Une large gamme de biaryles a ainsi été obtenue.

Schéma 104. Couplage entre des triflates d’aryle et un dialkoxide de phénylbismuth

d) Avec des arylindiums

La synthèse de biaryles à partir de dérivés d’indium a été étudiée récemment. Sarandeses a été le premier à décrire en 1999 le couplage entre un iodure ou un triflate d’aryle avec le triphénylindium.277 D’excellents rendements sont obtenus à partir d’arènes enrichis ou appauvris en électrons (Schéma 105). Le même groupe a développé cette réaction quelques années plus tard à partir de différents triarylindiums

ortho et meta substitués. De très bons rendements sont obtenus, même avec des bromures

d’hétérocycles.278

Schéma 105. Synthèse de biaryles à partir de triphénylindium

275

M. L. N. Rao, S. Shimada, M. Tanaka, Org. Lett. 1999, 1, 1271-1273.

276

M. L. N. Rao, O. Yamazaki, S. Shimada, T. Tanaka, Y. Suzuki, M. Tanaka, Org. Lett. 2001, 3, 4103-4105.

277 I. Pérez, J. P. Sestelo, L. A. Sarandeses, Org. Lett. 1999, 1, 1267-1269.

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Oshima a lui utilisé des chlorures de biarylindiums pour obtenir des biaryles à partir de bromures ou d’iodures d’aryle, par catalyse au palladium, en utilisant de l’eau comme co-solvant.279 Les rendements varient énormément selon les substituants.

La synthèse d’arylindiums est possible à partir d’un iodure d’aryle et du métal indium en présence de chlorure de lithium. L’arylindium ainsi obtenu peut réagir avec des iodures d’aryle en présence de palladium et former des biaryles avec de bons rendements.280

Yoshikai a montré que des arylindiums, obtenus à partir de bromures d’aryle par catalyse au cobalt, peuvent réagir avec un iodure d’aryle par catalyse au palladium.281 De très bons à excellents rendements sont obtenus par cette méthode, et une grande variété de substituants et d’hétéroaryles est tolérée (Schéma 106).

Schéma 106. Synthèse de biaryles à partir d’arylindonium obtenus pas catalyse au cobalt

e) Avec des aryllithiens

Ce n’est que très récemment que les aryllithiens ont été employés dans un couplage avec un halogénure d’aryle. En effet, leur réactivité élevée, ainsi que leur faible sélectivité, ont limité leur utilisation. Feringa a montré en 2013 que des (hétéro)aryllithiens réagissent avec des bromures d’aryle par catalyse au palladium.282 La réaction est très rapide et d’excellents rendements sont obtenus à partir de bromures d’aryle enrichis ou appauvris en électrons (Schéma 107). Les hétéroaryllithiens sont tolérés, mais dans le cas du 2-thienyllithien il est nécessaire d’ajouter du TMEDA pour activer ce dernier. Cette réaction a par la suite été développée pour effectuer le couplage catalysé au palladium à partir de chlorures283 ou triflates284 d’aryle et aussi à partir d’aryllithiens encombrés285.

279

K. Takami, H. Yorimitsu, H. Shinokubo, S. Matsuraba, K. Oshima, Org. Lett. 2001, 3, 1997-1999.

280

V. Papoian, T. Minehan, J. Org. Chem. 2008, 73, 7376-7379.

281

L. Adak, N. Yoshikai, J. Org. Chem. 2011, 76, 7563-7568.

282

M. Giannerini, M. Fañanás-Mastral, B. L. Feringa, Nat. Chem. 2013, 5, 667-672.

283

V. Hornillos, M. Giannerini, C. Vila, M. Fañanás-Mastral, B. L. Feringa, Org. Lett. 2013, 15, 5114-5117.

284 C. Vila, V. Hornillos, M. Giannerini, M. Fañanás-Mastral, B. L. Feringa, Chem. Eur. J. 2014, 20, 13078-13083.

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Schéma 107. Synthèse de biaryles à partir d’aryllithiens et de bromures d’aryle par catalyse au palladium

Des réactions sont également possibles à partir d’arylgermaniums,286 d’arylplombs,274 d’arylantimoines,274 d’arylmercures287 et d’arylzirconiums288, mais très peu d’exemples sont mentionnés dans la littérature.

Les réactifs organométalliques peuvent réagir entre eux mais l’utilité de cette méthode est limitée et seuls des biaryles symétriques sont obtenus.

Cependant, toutes ces réactions employant des réactifs arylmétalliques ont le désavantage d’utiliser une quantité stœchiométrique du réactif organométallique, qui coûte cher ou qui doit être obtenu en prenant des précautions, souvent à partir de précurseurs sensibles.