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Chapitre 2 : Synthèse de biaryles

I- 3-1 Réactions entre deux arènes

Le premier homocouplage d’aryle a été décrit par Van Helden et Verberg en 1965 (Schéma 108).289 Cependant, la réaction n’est pas sélective et de nombreux isomères sont obtenus. De plus, les rendements sont moyens car le palladium métallique précipite au cours de la réaction.

286

(a) M. Kosugi, T. Tanji, Y. Tanaka, A. Yoshida, K. Fugami, M. Kameyama, T. Migita, J. Organomet. Chem. 1996, 508, 255-257. (b) T. Nakamura, H. Kinoshita, H. Shinokubo, K. Oshima, Org. Lett. 2002, 4, 3165-3167.

287

A. V. Tsvetkov, G. V. Latyshev, N. V. Lukashev, I. P. Beletskaya, Tetrahedron Lett. 2000, 41, 3987-3990.

288 M. Frid, D. Pérez, A. J. Peat, S. L. Buchwald, J. Am. Chem. Soc. 1999, 121, 9469-9470. 289 R. Van Helden, G. Verberg, Recl. Trav. Chim. Pays-Bas, 1965, 84, 1263-1273.

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Schéma 108. Premier homocouplage d’aryle par catalyse au palladium

Quelques années plus tard, Iataaki a effectué l’homocouplage d’arènes sous pression d’oxygène, catalysé par de l’acétate de palladium.290 L’oxygène pur peut être utilisé, mais par mesures de précautions un mélange d’oxygène et d’azote a été employé. Les biaryles sont obtenus avec des rendements moyens, qui diminuent si des substituants en meta ou ortho sont présents (Schéma 109). Les arènes halogénés donnent de très faibles rendements car ils précipitent le palladium. De plus, subsistent également des problèmes de sélectivité et les groupements amino, cyano et acides ne sont pas tolérés.

Schéma 109. Homocouplage d’arènes sous pression d’oxygène

Itahara a développé l’homocouplage d’hétérocycles, en particulier de thiophènes et de furanes mono- ou di-substitués, par catalyse au palladium acétate.291 La réaction est généralement sélective, mais les rendements sont faibles à moyens. L’homocouplage de thiophènes a par la suite été davantage exploré. Mori a notamment rendu cette réaction chimio- et régiosélective pour synthétiser des oligothiophènes, motifs utilisés dans des matériaux.292 Les hétérocycles azotés293 ou des substrats biarylescontenant un atome d’azote pour chélater le catalyseur294 peuvent aussi être couplés.

L’homocouplage d’arènes peut s’effectuer sans catalyseur métallique. En effet, le permanganate de méthyltributylammonium peut oxyder des méthoxyphénols entre eux, mais les rendements sont moyens.295 Cependant, un composé d’iode hypervalent est efficace pour l’homocouplage d’aryles et de

290

H. Iataaki, H. Yoshimoto, J. Org. Chem. 1973, 38, 76-79.

291 T. Itahara, M. Hasimoto, H. Yumisashi, Synthesis 1984, 255-256. 292

(a) K. Masui, H. Ikegami, A. Mori, J. Am. Chem. Soc. 2004, 126, 5074-5075. (b) M. Takahashi, K. Masui, H. Sekiguchi, N. Kobayashi, A. Mori, M. Funahashi, N. Tamaoki, J. Am. Chem. Soc. 2006, 128, 10930-10933.

293

H. Sonnenschein, H. Kosslick, F. Tittelbach, Synthesis 1998, 1596-1598.

294

(a) K. L. Hull, E. L. Lanni, M. S. Sanford, J. Am. Chem. Soc. 2006, 128, 14047-14049. (b) S. Oi, H. Sato, S. Sugawara, Y. Inoue, Org. Lett. 2008, 10, 1823-1826. (c) X. Chen, G. Dobereiner, X. S. Hao, R. Giri, N. Maugel, J. Q. Yu, Tetrahedron

2009, 65, 3085-3089. (d) L. Liu, P. J. Carroll, M. C. Kozlowski, Org. Lett. 2015, 17, 508-511.

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napthyles, où le trifluorure de bore est utilisé comme activateur de ce composé.296 De très bons à excellents rendements en biaryles et en binapthyles sont obtenus, et la présence d’un groupement directeur en ortho n’est pas obligatoire (Schéma 110).

Schéma 110. Homocouplage en utilisant un iode hypervalent

L’homocouplage intermoléculaire déshydrogénant d’arènes est l’une des méthodes de préparation de 1,1’-binaphtyles substitués symétriques, qui sont notamment des précurseurs de ligands utilisés en catalyse dissymétrique.297

b) Couplage intramoléculaire

Le premier exemple de couplage intramoléculaire a été décrit par Itatani en 1974.298 Des éthers de biaryles donnent, en présence de palladium, des dibenzofuranes avec de bons rendements (Schéma 111). Les substituants en ortho de l’atome d’oxygène ne sont pas tolérés, mais de très bons rendements sont généralement obtenus dans les autres cas en adaptant le solvant. Les produits d’homocouplage sont obtenus avec des rendements plus faibles.

Schéma 111. Synthèse de dibenzofuranes à partir d’éthers de biaryles en présence de palladium

Outre les biaryléthers, le palladium acétate peut être aussi utilisé pour cycliser des biaryles amines, des biaryles cétones ou encore des biaryles acétanilides avec de très bons rendements.299

296

H. Tohma, H. Morioka, S. Takizawa, M. Arisawa, Y. Kita, Tetrahedron 2001, 57, 345-352.

297

(a) S. W. Hon, C. H. Li, J. H. Kuo, N. B. Barhate, Y. H. Liu, Y. Wang, C. T. Chen, Org. Lett. 2001, 3, 869-872. (b) H. Egami, T. Katsuki, J. Am. Chem. Soc. 2009, 131, 6082-6083.

298

A. shiotani, H. Itatani, Angew. Chem. Int. Ed. 1974, 13, 471-472.

299 (a) B. Akermark, L. Eberson, E. Jonsson, E. Pettersson, J. Org. Chem. 1975, 40, 1365-1367. (b) H. J. Knölker, N. O’

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Ohno et Fujii ont décrit la synthèse séquencée de carbazoles.300 La première étape est le couplage intermoléculaire catalysé au palladium entre un triflate d’aryle et une aniline pour donner un biaryle amine, suivie par une oxydation intramoléculaire. De meilleurs rendements sont obtenus à partir d’anilines appauvries en électrons, alors que le groupement présent sur le triflate d’aryle n’a que peu d’influence sur la réaction (Schéma 112). Cette réaction a par la suite été étendue à d’autres anilines et triflates d’aryle.301

Schéma 112. Synthèse séquencée de carbazoles catalysée au palladium

Les réactions de cyclisations intramoléculaires peuvent s’opérer sans métaux de transition, en utilisant un composé d’iode hypervalent.302 Cette réaction radicalaire a été décrite par Kita, et de très bons à excellents rendements en biaryles sont obtenus (Schéma 113). Le trifluorure de bore est utilisé comme activateur de l’iode hypervalent. Cette méthode a été par la suite étendue aux biaryles liés par un pont contenant un atome de soufre, de silicium ou d’oxygène.303

Schéma 113. Cyclisation intramoléculaire en utilisant un iode hypervalent

c) Couplage intermoléculaire

L’arylation intermoléculaire cross-déshydrogénative entre deux (hétéro)arènes différents représente un vrai défi vis-à-vis de la sélectivité.

Chem. 2008, 73, 5022-5028. (d) L. Ackermann, R. Jeyachandran, H. K. Potukuchi, P. Novák, L. Büttner, Org. Lett. 2010, 12, 2056-2059.

300

T. Watanabe, S. Ueda, S. Inuki, S. Oishi, N. Fujii, H. Ohno, Chem. Commun. 2007, 4516-4518.

301

T. Watanabe, S. Oishi, N. Fujii, H. Ohno, J. Org. Chem. 2009, 74, 4720-4726.

302 Y. Kita, M. Gyoten, M. Ohtsubo, H. Tohma, T. Takeda, Chem. Commun. 1996, 1481-1482.

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Lu s’est intéressé au couplage entre le benzène ou le naphtalène avec des arènes substitués.304 Il a notamment montré que cette réaction peut être sélective en fonction de la concentration en arènes et de la quantité d’acide trifluoroacétique utilisée. Cependant, les rendements en biaryles sont faibles.

Les travaux de Fagnou ont permis de faire avancer cet hétérocouplage, en montrant que l’arylation d’indoles par des arènes non activés était possible par catalyse au palladium, en utilisant de l’acétate de cuivre comme oxydant en quantité stœchiométrique.305 La réaction est régiosélective et mène principalement à l’arylation en C3 de l’indole avec de bons rendements, mais pour cela un très large excès d’arène est nécessaire (Schéma 114). De meilleurs rendements sont obtenus à partir d’un indole enrichi en électrons. Il faut noter que l’homocouplage de l’arène n’est pas détecté. L’arylation en position C2 de l’indole est possible en remplaçant l’acétate de cuivre par de l’acétate d’argent.306

Schéma 114. Arylation cross-déshydrogénative d’indole par catalyse au palladium

DeBoef a quant à lui reporté au même moment l’arylation de benzofuranes et d’indoles en utilisant de l’oxygène comme oxydant et l’acide hétéropolymolybdovanadique (H4PMo11VO40) pour avoir une excellente régiosélectivité.307

Par la suite, les conditions réactionnelles ont évoluées et de nombreux arènes possédant un groupement directeur pour avoir une bonne sélectivité ont été arylés en présence de palladium, comme les benzoquinolines,308 les ferrocènes,309 les acétanilides,310 les anilines,311 les pyridines N-oxydes,312 les xanthines,313 les O-phénylcarbamates,314 les phénylacétamides315 ou encore les alkoxybenzènes316.

304

(a) R. Li, L. Jiang, W. Lu, Organometallics 2006, 25, 5973-5975. (b) Y. Rong, R. Li, W. Lu, Organometallics 2007, 26, 4376-4378.

305 D. R. Stuart, K. Fagnou, Science 2007, 316, 1172-1175. 306

D. R. Stuart, E. Villemure, K. Fagnou, J. Am. Chem. Soc. 2007, 129, 12072-12073.

307

T. A. Dwight, N. R. Rue, D. Charyk, R. Josselyn, B. DeBoef, Org. Lett. 2007, 9, 3137-3139.

308 (a) K. L. Hull, M. S. Sanford, J. Am. Chem. Soc. 2007, 129, 11904-11905. (b) K. L. Hull, M. S. Sanford, J. Am. Chem.

Soc. 2009, 131, 9651-9653.

309

J. B. Xia, S. L. You, Organometallics 2007, 26, 4869-4871.

310

B. J. Li, S. L. Tian, Z. Fang, Z. J. Shi, Angew. Chem. Int. Ed. 2008, 47, 1115-1118.

311

G. Brasche, J. Garciá-Fortanet, Stephen L. Buchwald, Org. Lett. 2008, 10, 2207-2210.

312

S. H. Cho, S. J. Hwang, S. Chang, J. Am. Chem. Soc. 2008, 130, 9254-9256.

313 P. Xi, F. Yang, S. Qin, D. Zhao, J. Lan, G. Gao, C. Hu, J. You, J. Am. Chem. Soc. 2010, 132, 1822-1824. 314 X. Zhao, C. S. Yeung, V. M. Dong, J. Am. Chem. Soc. 2010, 132, 5837-5844.

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Après avoir décrit l’utilisation d’un composé d’iode hypervalent pour l’homocouplage d’arènes et la cyclisation intramoléculaire d’arènes, Kita a utilisé cet iode hypervalent pour l’hétérocouplage d’un arène avec un naphtalène, sans ajout de catalyseur.317 De très bons rendements sont obtenus, mais l’arène doit avoir au moins trois substituants (Schéma 115). Il est à noter que seulement un léger excès d’arène est nécessaire alors qu’il en faut généralement quelques dizaines d’équivalents. D’autres iodes hypervalents peuvent aussi servir d’oxydant.318

Schéma 115. Hétérocouplage en utilisant un iode hypervalent

Des 1,1’-binapthyls dissymétriques peuvent être obtenus en couplant deux dérivés de 2-napthols différents grâce au cuivre319 ou au fer320.