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1. Etat de l’art et objectifs de l’étude

1.4 Interaction particules / poumons

1.4.5 Réaction inflammatoire

1.4.5.1 Mécanisme

Comme on l’a vu précédemment, les particules déposées dans les poumons sont majoritairement éliminées par clairance mucociliaire. Cependant en cas de dysfonctionnement des mécanismes de clairance et/ou en cas de concentration élevée en particules, celles-ci vont pouvoir s’accumuler localement dans les poumons. En réponse à cette accumulation une réaction inflammatoire se produit. Cette réponse inflammatoire a pour principal effet d’amener les phagocytes (cellules capables de phagocytose tel les neutrophiles, les monocytes et les macrophages) sur le lieu de l’inflammation. Cette réponse a lieu en trois étapes. Tout d’abord la congestion active, caractérisée notamment par la

sécrétion d’amine vasoactives (histamine, sérotonine sécrétées par les mastocytes et les basophiles) qui a pour effet de provoquer l’augmentation rapide du débit sanguin. Puis la formation d’un œdème inflammatoire, caractérisé par un gonflement localisé. L’œdème permet la dilution et la limitation du foyer inflammatoire ; il permet également un ralentissement du flux circulatoire, facilitant ainsi le passage des phagocytes jusqu’au foyer de l’inflammation. Il se produit enfin un phénomène de diapédèse qui se caractérise par l’expression de molécules permettant l’adhésion des phagocytes mobilisés, sous l’action de médiateurs chimiques (cytokines pro-inflammatoires). Les phagocytes chargés en particules sont ensuite éliminés par clairance pulmonaire (Goulaouic, 2009).

1.4.5.2 Médiateurs chimiques impliqués

La réaction inflammatoire est ainsi orchestrée par l’interaction de nombreux médiateurs chimiques. Parmi ces médiateurs, on distingue les médiateurs pro-inflammatoires indispensables à la mise en place et à l’entretien de l’inflammation, et les médiateurs anti- inflammatoires qui limitent l’action des médiateurs pro-inflammatoires.

Les cytokines sont des protéines, de faibles masses moléculaires (8 à 50 kDa), membranaires ou sécrétées suite à une stimulation, qui permettent la communication intercellulaire. Ces médiateurs jouent un rôle important à chacune des étapes de la réponse inflammatoire (initiation, amplification, entretien ou résolution, réparation). Elles agissent localement à faible concentration, sur les cellules qui les ont synthétisées (action autocrine) ou sur des cellules voisines (action paracrine), par l'intermédiaire d'une fixation à des récepteurs membranaires spécifiques (Goulaouic, 2009), (Rousselet et al., 2005).

Les principales cytokines intervenant dans la réaction inflammatoire sont :

- Les cytokines synthétisées principalement par les lymphocytes activés, tels l’interféron gamma (IFN-γ) qui active les macrophages et inhibe la réplication des virus ; ou les interleukines 2 et 4 (IL-2, IL-4) stimulant la prolifération, l'activation et la différenciation lymphocytaire (Goulaouic, 2009), (Rousselet et al., 2005).

- Les cytokines synthétisées principalement par les macrophages activés, tel l’interleukine 6 (IL-6) qui stimule la synthèse hépatique de protéines de la phase aiguë de l’inflammation et stimule également la prolifération et la différenciation des lymphocytes B. IL-8 est un puissant agent chimiotactique des neutrophiles qui stimule leur dégranulation. IL-1 et TNF-α (facteur de nécrose tumorale) sont impliqués dans l'inflammation

systémique et dans la réaction inflammatoire de phase aiguë. Ces médiateurs induisent les effets systémiques de phase aiguë, telle la fièvre qui inhibe la libération sanguine de neutrophiles à partir de la moelle osseuse, la synthèse hépatique des protéines de phase aiguë... IL-1 et TNF-α stimulent également l’adhérence des leucocytes à l’endothélium, ainsi que la synthèse endothéliale de IL-1, IL-8, IL-6 (Goulaouic, 2009), (Rousselet et al., 2005).

- Les chimiokines, famille de petites protéines, sécrétées par diverses cellules (macrophages activés, endothélium…). Elles ont un pouvoir chimiotactique et ont pour rôle d’activer les cellules immunitaires, ainsi que de les recruter au site de l’inflammation (Goulaouic, 2009), (Rousselet et al., 2005).

1.4.5.3 Effet des particules

De nombreuses études épidémiologiques mettent en évidence l’effet inflammatoire des particules sur les poumons. Des volontaires ont été exposés pendant 2h à des particules d’échappement diesel (200 µg/m3), une réponse inflammatoire des voies aériennes a été observée (Hervé-Bazin, 2007). De même, 15 individus sains ont été exposés pendant 1 h à des particules diesels (300 µg/m3) pendant un exercice modéré. Une réponse systémique inflammatoire a été mise en évidence par l’augmentation significative en neutrophiles, mastocytes, lymphocytes T (Salvi et al., 1999).

Des études in vitro ont révélé un effet pro-inflammatoire des PM2,5 sur les cellules épithéliales en culture ainsi que sur des macrophages. En effet lors d’exposition pendant 24h à des PM2,5 (à des concentrations variant de 18,84 à 75,36 µg/mL), des cellules humaines L132 ont sécrété des quantités de TNF-α supérieures aux cellules témoins (Garçon et al., 2006).

De même des expositions de PM2,5 (5 et 50 µg/mL ) sur des cellules primaires de macrophages alvéolaires humains, ont révélé une augmentation significative des sécrétions des cytokines pro-inflammatoire IL-8, IL-6 et TNF- α (van Eeden et al., 2001).

Les effets biologiques observés suite à une exposition particulaire sont dictés par les caractéristiques physiques et chimiques de la particule. Ainsi le facteur physique le plus critique, outre la taille des particules, est la surface spécifique de ces dernières. En effet plus la surface est élevée, plus il y aura de sites de réactions avec le milieu environnant. Des études montrent ainsi une augmentation des effets inflammatoires des particules avec l’augmentation de la surface spécifique ou la diminution du diamètre (Lison et al., 1997 ;

1.4.5.4 Effet des HAP

Plusieurs études démontrent le rôle des espèces chimiques, notamment des hydrocarbures aromatiques polycycliques, associés à la surface des particules, sur les effets inflammatoires.

Une étude de Fahy et al. (2000) montre une augmentation de la production d’IL-8, suite à la stimulation de cellules mononuclées du sang périphérique par des HAP associés à des particules d’échappement diesel. De même de Bonvallot et al. (2001) observent une réponse inflammatoire accrue des particules d’échappement diesel en contact avec des cellules épithéliales du tractus respiratoire, lorsque ces particules sont recouvertes de HAP par rapport à des particules diesels propres.

Goulaouic (2009) observent néanmoins une réponse inflammatoire diminuée lorsque des HAP sont adsorbés en surface de black carbon comparée à des HAP seuls. En effet les HAP adsorbés à la surface de particules ne sont pas directement toxiques : une désorption est nécessaire. Leur biodisponibilité dépend alors du niveau de solubilisation de ces derniers dans le milieu biologique.

Koike et al. (2014) suggèrent une cytotoxicité des HAP relative à leur structure (nombre de cycles benzéniques et de groupes fonctionnels). Ainsi le naphtalène et le phénanthrène n’ont pas présenté de cytotoxicité par rapport à des cellules épithéliales bronchiques (BEAS-2B). Par contre, leurs dérivés oxygénés (naphtoquinone, phénanthrènequinone) et le pyrène ont engendré une augmentation de la production d’IL-6, cytokine pro-inflammatoire.

Les HAP sont par ailleurs impliqués dans l’exacerbation des réactions inflammatoires allergiques. Des études montrent notamment que la stimulation de cellules mononuclées du sang périphérique par des HAP présents à la surface de particules d’échappement diesel favorisent le recrutement de cellules Th2 associées à des réactions allergiques (Fahy et al., 2002) (Sénéchal et al., 2003). Le benzo[a]pyrène a été notamment montré comme ayant un effet adjuvant sur la réponse immune en réponse à un stimulus allergénique, in vitro et in vivo. Ainsi dans un modèle d’asthme allergique, le BAP augmente la production de cytokines Th2, témoins de l’inflammation pulmonaire allergique (Kadkhoda et al., 2005). L’anthracène, quant à lui, induit un effet adjuvant sur la réponse humorale spécifique d’allergène, augmentant en particulier la synthèse d’IgE spécifiques de l’allergène, et ceci dans des modèles in vivo de sensibilisation allergique (Heo et al., 2001). Le phénantrènequinone a également été impliqué dans la réaction inflammatoire allergique, avec un effet favorisant

l’infiltrat de cellules inflammatoires au niveau pulmonaire et la réponse humorale allergène spécifique (Hiyoshi et al., 2005).