• Aucun résultat trouvé

QUESTIONS GÉNÉRALES DE RECEVABILITÉ

Moldova et Russie – 23 février 2016 – Grande Chambre

I. QUESTIONS GÉNÉRALES DE RECEVABILITÉ

2. Le gouvernement russe soutient que le requérant ne relève pas de sa juridiction et qu’en conséquence la requête doit être déclarée irrecevable ratione personae et ratione loci à l’égard de la Fédération de Russie. Pour sa part, le gouvernement moldave ne nie pas que la République de Moldova conserve sa juridiction sur le territoire contrôlé par la « RMT », mais il estime que le requérant n’a pas épuisé les voies de recours dont il disposait en Moldova. Avant d’examiner la recevabilité et le fond de chacun des griefs introduits par le requérant, la Cour juge opportun de se pencher sur ces deux exceptions, qui sont susceptibles d’avoir des incidences sur l’ensemble des griefs.

A. Juridiction

3. La Cour doit tout d’abord déterminer si, concernant les faits litigieux, le requérant relève de la juridiction de l’un des États défendeurs, ou des deux, au sens de l’article 1 de la Convention.

1. Thèses des parties

(…)

2. Appréciation de la Cour

4. L’article 1 de la Convention se lit ainsi :

« Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la (...) Convention. »

La présente affaire soulève des questions relatives à la signification de la notion de « juridiction » en ce qui concerne tant la juridiction territoriale (pour ce qui est de la Moldova) que l’exercice extraterritorial de la juridiction (pour ce qui est de la Fédération de Russie).

1 Note insérée par Frédéric Bouhon : la République moldave de Transnistrie est une république autoproclamée,

dont le territoire occupe une étroite bande située dans la partie la plus orientale de ce qui est internationalement reconnu comme le territoire de la République de Moldova (Moldavie) ; cette bande de territoire se situe le long de

a) Principes généraux

5. Dans son arrêt Ilaşcu et autres (précité), la Cour a établi les principes suivants en matière de présomption de juridiction territoriale :

« 311. Il découle de [l’article 1 de la Convention] que les États parties doivent répondre de toute violation des droits et libertés protégés par la Convention commise à l’endroit d’individus placés sous leur « juridiction ».

L’exercice de la juridiction est une condition nécessaire pour qu’un État contractant puisse être tenu pour responsable des actes ou omissions qui lui sont imputables et qui donnent lieu à une allégation de violation des droits et libertés énoncés dans la Convention.

312. La Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle la notion de « juridiction » au sens de l’article 1 de la Convention doit passer pour refléter la conception de cette notion en droit international public (Gentilhomme et autres c. France, nos 48205/99, 48207/99 et 48209/99,

§ 20, arrêt du 14 mai 2002, Banković et autres c. Belgique et autres (déc.) [GC], no 52207/99,

§§ 59-61, CEDH 2001-XII, Assanidzé c. Géorgie [GC], no 71503/01, § 137, CEDH 2004-II).

Du point de vue du droit international public, l’expression « relevant de leur juridiction » figurant à l’article 1 de la Convention doit être comprise comme signifiant que la compétence juridictionnelle d’un État est principalement territoriale (décision Banković et autres précitée, § 59), mais aussi en ce sens qu’il est présumé qu’elle s’exerce normalement sur l’ensemble de son territoire.

Cette présomption peut se trouver limitée dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsqu’un État est dans l’incapacité d’exercer son autorité sur une partie de son territoire. Cela peut être dû à une occupation militaire par les forces armées d’un autre État qui contrôle effectivement ce territoire (voir les arrêts Loizidou c. Turquie (exceptions préliminaires) du 23 mars 1995, série A no 310, et Chypre c. Turquie précité, §§ 76-80, tels que

cités dans la décision Banković et autres susmentionnée, §§ 70-71), à des actes de guerre ou de rébellion, ou encore aux actes d’un État étranger soutenant la mise en place d’un régime séparatiste sur le territoire de l’État en question.

313. Pour conclure à l’existence d’une telle situation exceptionnelle, la Cour se doit d’examiner, d’une part, l’ensemble des éléments factuels objectifs de nature à limiter l’exercice effectif de l’autorité d’un État sur son territoire et, d’autre part, le comportement de celui-ci. En effet, les engagements pris par une Partie contractante en vertu de l’article 1 de la Convention comportent, outre le devoir de s’abstenir de toute ingérence dans la jouissance des droits et libertés garantis, des obligations positives de prendre les mesures appropriées pour assurer le respect de ces droits et libertés sur son territoire (voir, parmi d’autres, l’arrêt

Z et autres c. Royaume-Uni [GC], no 29392/95, § 73, CEDH 2001-V).

Ces obligations subsistent même dans le cas d’une limitation de l’exercice de son autorité sur une partie de son territoire, de sorte qu’il incombe à l’État de prendre toutes les mesures appropriées qui restent en son pouvoir.

(...)

333. La Cour considère que, si un État contractant se trouve dans l’impossibilité d’exercer son autorité sur l’ensemble de son territoire par une situation de fait contraignante, comme la mise en place d’un régime séparatiste accompagnée ou non par l’occupation militaire par un autre État, l’État ne cesse pas pour autant d’exercer sa juridiction au sens de l’article 1 de la Convention sur la partie du territoire momentanément soumise à une autorité locale soutenue par des forces de rébellion ou par un autre État.

Une telle situation factuelle a néanmoins pour effet de réduire la portée de cette juridiction, en ce sens que l’engagement souscrit par l’État contractant en vertu de l’article 1 doit être examiné par la Cour uniquement à la lumière des obligations positives de l’État à l’égard des

légaux et diplomatiques dont il dispose envers les États tiers et les organisations internationales, d’essayer de continuer à garantir la jouissance des droits et libertés énoncés dans la Convention.

334. Même s’il n’appartient pas à la Cour d’indiquer quelles sont les mesures les plus efficaces que doivent prendre les autorités pour se conformer à leurs obligations, il lui faut néanmoins s’assurer que les mesures effectivement prises étaient adéquates et suffisantes dans le cas d’espèce. Face à une omission partielle ou totale, la Cour a pour tâche de déterminer dans quelle mesure un effort minimal était quand même possible et s’il devait être entrepris. Pareille tâche est d’autant plus nécessaire lorsqu’il s’agit d’une violation alléguée de droits absolus tels que ceux garantis par les articles 2 et 3 de la Convention. »

Ces principes ont été réitérés tout récemment dans l’arrêt Sargsyan c. Azerbaïdjan ([GC] no

40167/06, § 128, CEDH 2015).

6. Par ailleurs, la Cour a résumé les principes généraux pertinents concernant l’exercice extraterritorial de la juridiction dans l’arrêt Catan et autres (précité) :

« 103. La Cour a établi un certain nombre de principes clairs dans sa jurisprudence relative à l’article 1. Ainsi, aux termes de cette disposition, l’engagement des États contractants se borne à « reconnaître » (en anglais « to secure ») aux personnes relevant de leur « juridiction » les droits et libertés énumérés (Soering c. Royaume-Uni, 7 juillet 1989, § 86, série A no 161,

Banković et autres, décision précitée, § 66). La « juridiction » au sens de l’article 1 est une

condition sine qua non. Elle doit avoir été exercée pour qu’un État contractant puisse être tenu pour responsable des actes ou omissions à lui imputables qui sont à l’origine d’une allégation de violation des droits et libertés énoncés dans la Convention (Ilaşcu et autres c. Moldova et

Russie [GC], no 48787/99, § 311, CEDH 2004VII, Al-Skeini et autres c. Royaume-Uni [GC],

no 55721/07, § 130, CEDH 2011).

104. La juridiction d’un État, au sens de l’article 1, est principalement territoriale (Soering, précité, § 86, Banković et autres, décision précitée, §§ 61 et 67, Ilaşcu et autres, précité, § 312,

Al-Skeini et autres, précité, § 131). Elle est présumée s’exercer normalement sur l’ensemble

du territoire de l’État (Ilaşcu et autres, précité, § 312, et Assanidzé c. Géorgie [GC], no

71503/01, § 139, CEDH 2004-II). À l’inverse, les actes des États contractants accomplis ou produisant des effets en dehors de leur territoire ne peuvent que dans des circonstances exceptionnelles s’analyser en l’exercice par eux de leur juridiction au sens de l’article 1 (Banković et autres, décision précitée, § 67, et Al-Skeini et autres, précité, § 131).

105. À ce jour, la Cour a reconnu un certain nombre de circonstances exceptionnelles susceptibles d’emporter exercice par l’État contractant de sa juridiction à l’extérieur de ses propres frontières. Dans chaque cas, c’est au regard des faits particuliers de la cause qu’il faut apprécier l’existence de pareilles circonstances exigeant et justifiant que la Cour conclue à un exercice extraterritorial de sa juridiction par l’État (Al-Skeini et autres, précité, § 132).

106. Le principe voulant que la juridiction de l’État contractant au sens de l’article 1 soit limitée à son propre territoire connaît une exception lorsque, par suite d’une action militaire – légale ou non –, l’État exerce un contrôle effectif sur une zone située en dehors de son territoire. L’obligation d’assurer dans une telle zone le respect des droits et libertés garantis par la Convention découle du fait de ce contrôle, qu’il s’exerce directement, par l’intermédiaire des forces armées de l’État ou par le biais d’une administration locale subordonnée (Loizidou c. Turquie (exceptions préliminaires), 23 mars 1995, § 62, série A no

310, Chypre c. Turquie [GC], no 25781/94, § 76, CEDH 2001-IV, Banković et autres, décision

précitée, § 70, Ilaşcu et autres, précité, §§ 314-316, Loizidou c. Turquie (fond), 18 décembre 1996, § 52, Recueil des arrêts et décisions 1996VI, et AlSkeini et autres, précité, § 138). Dès lors qu’une telle mainmise sur un territoire est établie, il n’est pas nécessaire de déterminer si l’État contractant qui la détient exerce un contrôle précis sur les politiques et actions de l’administration locale qui lui est subordonnée. Du fait qu’il assure la survie de cette

des politiques et actions entreprises par elle. L’article 1 lui fait obligation de reconnaître sur le territoire en question la totalité des droits matériels énoncés dans la Convention et dans les Protocoles additionnels qu’il a ratifiés, et les violations de ces droits lui sont imputables (Chypre c. Turquie, précité, §§ 76-77, Al-Skeini et autres, précité, § 138).

107. La question de savoir si un État contractant exerce ou non un contrôle effectif sur un territoire hors de ses frontières est une question de fait. Pour se prononcer, la Cour se réfère principalement au nombre de soldats déployés par l’État sur le territoire en cause (Loizidou (fond), précité, §§ 16 et 56, et Ilaşcu et autres, précité, § 387). D’autres éléments peuvent aussi entrer en ligne de compte, par exemple la mesure dans laquelle le soutien militaire, économique et politique apporté par l’État à l’administration locale subordonnée assure à celui-ci une influence et un contrôle dans la région (Ilaşcu et autres, précité, §§ 388-394, Al-

Skeini et autres, précité, § 139).

(...)

115. Le gouvernement russe soutient que la Cour ne peut conclure à l’exercice par la Russie d’un contrôle effectif que si elle estime que le « gouvernement » de la « RMT » peut passer pour un organe de l’État russe, suivant l’approche adoptée par la Cour internationale de justice dans l’affaire relative à l’Application de la Convention pour la prévention et la répression

du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro) (paragraphe 76 ci-dessus).

La Cour rappelle que dans celleci la Cour internationale de justice devait déterminer à quel moment un État pouvait se voir attribuer le comportement d’une personne ou d’un groupe de personnes, de sorte qu’il pût être tenu pour responsable au regard du droit international du comportement en cause. Or en l’espèce la Cour est appelée à connaître d’une question différente, celle de savoir si des faits incriminés par un requérant relevaient de la juridiction d’un État défendeur au sens de l’article 1 de la Convention. Comme le montre le bref exposé de la jurisprudence de la Cour livré cidessus, les critères permettant d’établir l’existence de la « juridiction » au sens de l’article 1 de la Convention n’ont jamais été assimilés aux critères permettant d’établir la responsabilité d’un État concernant un fait internationalement illicite au regard du droit international. »

Ces principes ont été réitérés tout récemment dans l’arrêt Chiragov et autres c. Arménie ([GC], no 13216/05, § 168, CEDH 2015).

b) Application de ces principes aux faits de l’espèce

i. La juridiction de la République de Moldova

7. La Cour doit tout d’abord déterminer si l’affaire relève de la juridiction de la République de Moldova. Elle observe à cet égard que le requérant a toujours été détenu sur le territoire moldave. Il est vrai – comme l’admettent l’ensemble des parties – que la Moldova n’exerce aucune autorité sur la portion de son territoire située à l’est du Dniestr, qui est contrôlée par la « RMT ». Néanmoins, dans l’arrêt Ilaşcu et autres (précité), la Cour a dit que des individus détenus en Transnistrie relevaient de la juridiction de la Moldova du fait que la Moldova était l’État territorial même si elle n’exerçait pas un contrôle effectif sur la région transnistrienne. L’obligation incombant à la Moldova, en vertu de l’article 1 de la Convention, de « reconna[ître] à toute personne relevant de [sa] juridiction les droits et libertés [garantis par la Convention] » se limitait toutefois, dans les circonstances de cette affaire, à l’obligation positive de prendre les mesures qui étaient en son pouvoir et en conformité avec le droit international, qu’elles fussent d’ordre diplomatique, économique, judiciaire ou autre (Ilaşcu et autres, précité, § 331). La Cour est parvenue à une conclusion similaire dans les arrêts Ivanţoc et autres c. Moldova et Russie (no 23687/05, §§ 105-111, 15 novembre 2011) et Catan et autres (précité, §§ 109-110).

8. La Cour ne voit aucune raison de distinguer la présente espèce des affaires mentionnées ci- dessus. Bien que la Moldova n’exerce pas un contrôle effectif sur les actes de la « RMT » en Transnistrie, le fait qu’au regard du droit international public la région est reconnue comme

1 de la Convention, d’user de tous les moyens légaux et diplomatiques dont elle dispose pour continuer à garantir aux personnes qui vivent dans la région la jouissance des droits et libertés énoncés dans la Convention (Ilaşcu et autres, précité, § 333, et Catan et autres, précité, § 109). La Cour recherchera ci-après (paragraphes 151-155 ci-dessous) si la Moldova a satisfait à cette obligation positive.

ii. La juridiction de la Fédération de Russie

9. Il ressort de la jurisprudence de la Cour citée ci-dessus (paragraphes 97-98) qu’il peut y avoir exercice extraterritorial de sa juridiction par un État lorsque, par suite d’une action militaire – légale ou non –, cet État exerce un contrôle effectif sur une zone située en dehors de son territoire (paragraphe 98 ci-dessus ; Loizidou (exceptions préliminaires), précité, § 62, Loizidou c. Turquie (fond), 18 décembre 1996, § 52, Recueil des arrêts et décisions 1996VI, Chypre c. Turquie, précité, § 76, et Ilaşcu et autres, précité, §§ 314-316 ; voir, par comparaison et a contrario, Banković, précité, § 70). Par ailleurs, la Cour rappelle qu’un État peut, dans certaines circonstances exceptionnelles, exercer une juridiction extraterritoriale par l’affirmation, au travers de ses agents, de son autorité et de son contrôle sur un individu ou des individus (Al-Skeini et autres, précité, §§ 136 et 149, et Catan et autres, précité, § 114). En l’espèce, la Cour admet que rien ne prouve que des agents russes aient été directement impliqués dans l’incarcération du requérant et dans le traitement qu’il a subi. Dès lors toutefois que le requérant soutient que la Russie exerçait « un contrôle effectif ou, tout au moins, une influence décisive » sur la « RMT » au moment des faits, elle doit rechercher si tel était ou non le cas pendant la période où l’intéressé a été détenu, soit de novembre 2008 à juillet 2010.

10. Le gouvernement russe tire argument de l’arrêt rendu par la CIJ dans l’affaire du génocide

bosniaque, comme il l’avait déjà fait dans l’arrêt Catan et autres (précité, § 96), et de l’arrêt de la

CIJ dans l’affaire Nicaragua c. États-Unis d’Amérique (paragraphe 93 ci-dessus), qui comptait parmi les précédents jurisprudentiels pris en compte par la Cour dans l’arrêt Catan et autres (précité, § 76). Dans ces affaires, la CIJ devait déterminer à quel moment un État pouvait se voir attribuer le comportement d’un groupe de personnes de sorte qu’il pût être tenu pour responsable au regard du droit international du comportement en cause. Or la Cour rappelle qu’en l’espèce elle est appelée à connaître d’une question différente, celle de savoir si des faits dénoncés par un requérant relèvent de la juridiction d’un État défendeur au sens de l’article 1 de la Convention. Ainsi que la Cour l’a déjà dit, les critères permettant d’établir l’existence de la « juridiction » au sens de l’article 1 de la Convention n’ont jamais été assimilés aux critères permettant d’établir la responsabilité d’un État concernant un fait internationalement illicite au regard du droit international (paragraphe 98 cidessus, et Catan et autres, précité, § 115).

11. Si, dans l’affaire Catan et autres, la Cour s’est principalement attachée à déterminer si la Russie exerçait sa juridiction sur les requérants entre 2002 et 2004, elle a évoqué, pour établir les faits de cette cause, un certain nombre d’évolutions survenues ultérieurement. Ainsi, elle a pris note, entre autres, des éléments suivants : les résolutions adoptées par la Douma russe en février et mars 2005 invitant le gouvernement russe à interdire l’importation d’alcool et de tabac en provenance de Moldova (Catan et autres, précité, § 29) ; l’interdiction par les autorités russes en 2005 des importations de viande, de fruits et de légumes de Moldova (§ 30) ; l’absence depuis 2004 de tout retrait contrôlé d’équipements militaires russes hors de Transnistrie (§ 36) ; le maintien (à la date du prononcé de l’arrêt Catan, soit octobre 2012) d’un millier de militaires russes en Transnistrie, chargés de surveiller le dépôt d’armes (§ 37) ; le soutien économique apporté par la Russie sous la forme soit d’une collaboration étroite avec des entreprises russes produisant des équipements militaires, soit d’achats par des sociétés russes de sociétés de la « RMT », ainsi que grâce à l’achat de fournitures provenant de Transnistrie (§ 39) ; les liens économiques étroits entre la « RMT » et la Russie, notamment le versement symbolique à Gazprom d’une somme correspondant seulement à environ 5 % du prix du gaz naturel consommé (données pour 2011, § 40) ; l’aide économique fournie à la « RMT » entre 2007 et 2010 (§ 41), et le nombre de personnes résidant en Transnistrie ayant obtenu la nationalité russe (§ 42).

12. De plus, sont cités dans l’affaire Catan et autres divers rapports d’organisations intergouvernementales renvoyant à la période 2005-2008 (§§ 64-70), ainsi que des rapports d’organisations non gouvernementales couvrant les années 2004-2009 (§§ 71-73).

13. La Cour relève en outre que certaines des conclusions énoncées par elle dans l’affaire Catan

et autres et se rapportant à la période comprise entre août 2002 et juillet 2004 se fondent sur des

constatations factuelles à propos desquelles les parties en l’espèce n’ont pas soumis d’informations nouvelles. Ces constats ont trait à la quantité d’armes et de munitions stockées à Colbasna (§ 117), à l’effet dissuasif de la présence militaire russe, certes relativement modeste, dans la région transnistrienne et à son origine historique, à savoir l’intervention des troupes russes dans le conflit de 1992 entre les autorités moldaves et les forces de la « RMT », à la fourniture d’armes aux séparatistes et à l’arrivée dans la région de ressortissants russes venus combattre aux côtés des séparatistes (§ 118), et au fait que la Russie maintenait sa présence militaire dans la région et continuait d’y stocker des armes, ce dans le plus grand secret et en violation de ses obligations internationales, signalant ainsi « clairement (...) qu’elle continuait à fournir son appui au régime de la « RMT » (Catan et autres, précité, § 119).

14. Dans l’arrêt Ivanţoc et autres (précité, §§ 116-120), la Cour a recherché si la politique de soutien à la « RMT » menée par la Russie avait évolué entre 2004 et 2007, date de la libération des requérants. Elle est parvenue aux conclusions suivantes :

« (...) la Fédération de Russie a continué d’entretenir des relations étroites avec la « RMT », ce qui s’est traduit par un appui politique, financier et économique apporté au régime séparatiste.

De plus, la Cour relève que l’armée russe (troupes, équipements et munitions) était toujours stationnée sur le territoire moldave à la date de la libération des requérants, en violation tant des engagements pris par la Fédération de Russie d’opérer un retrait total que de la législation moldave (...)

(...) la Fédération de Russie a continué de ne rien faire, que ce soit pour prévenir les violations de la Convention censées avoir été commises après le 8 juillet 2004 ou pour mettre fin à la situation des requérants engendrée par ses agents. »

15. La Cour relève également que la Russie a été critiquée pour avoir ouvert des bureaux de vote dans la « RMT » sans le consentement de la Moldova et pour avoir délivré des passeports à un grand nombre de personnes dans la région transnistrienne, et ce jusqu’en 2012 (paragraphe 67 ci-dessus).

16. Dans l’arrêt Catan et autres (précité, § 121), la Cour a formulé les constatations suivantes : « (...) le gouvernement russe n’a pas convaincu la Cour que les conclusions auxquelles elle était parvenue en 2004 dans l’arrêt Ilaşcu et autres (précité) étaient erronées. La « RMT » avait été établie grâce au soutien militaire russe. Le maintien de la présence de militaires et

Outline

Documents relatifs