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Il y a toujours un décalage entre la forme opératoire de la connaissance, celle qu'on uti-lise dans l'action, et la forme prédicative de la connaissance, faite de mots et d'énoncés.

(Vergnaud, 2005, p. 134)

8.1 Questions de recherche

Les questions de mesure de l’influence des connaissances mathématiques des enseignants sur les résultats des élèves nous ont conduit, en amont, à distinguer les types de connaissances mathématiques et à considérer principalement la classification développée par Ball et son équipe à la suite de Shulman. Elles nous ont mené, en aval, à leur utilisation dans des compa-raisons internationales principalement l’étude de Ma. Cette étude nous a conduit à nous inté-resser plus aux effets sur l’enseignement qu’à ceux sur les performances des élèves et aux outils développés par la didactique française des mathématiques pour décrire le rôle de l’enseignant, plus spécifiquement la structuration du milieu et la pertinence mathématique de l’enseignant. Ces éléments de cadrage nous permettent de préciser nos questions et nos élé-ments de méthodologie.

Ainsi nos questions de recherche sont de façon large :

1. Quelles sont les connaissances mathématiques pour l’enseignement des enseignants primaires vaudois ?

2. En mathématiques et pour des enseignants généralistes, à quels niveaux d’activité du professeur les différents types de connaissances mathématiques pour l’enseignement se manifestent-ils ?

3. Quels effets les différents types de connaissances mathématiques pour l’enseignement des enseignants ont-ils sur la pertinence mathématique de leurs in-terventions et sur l’organisation didactique de leurs cours de mathématiques à l’école primaire ?

Il est bien évident, qu’il va nous falloir spécifier ces questions et que nous ne pourrons les aborder que sur des contenus et une population restreints. Nous répondrons à ces trois ques-tions en deux parties. Le détail des indicaques-tions méthodologiques sera précisé dans chaque par-tie (B et C). Nous donnons ici un bref aperçu de ces indications, ainsi que la description d’un point de vue méthodologique de l’articulation entre ces deux parties.

8.2 Eléments méthodologiques

Dans un premier temps (Partie B), afin de donner une caractérisation des connaissances de mathématiques élémentaires des enseignants vaudois, nous avons tenté de les situer par rap-port à celles des enseignants chinois et à celles des enseignants états-uniens selon l'étude de Ma (1999). Dans ce sens, nous avons traduit les quatre questions de Ma (1999) puis nous les avons analysées et adaptées à notre contexte culturel. Elles mettent en scène une situation de classe nécessitant une réaction de l’enseignant, propre à nous informer sur la pertinence du recours aux connaissances mathématiques de l’enseignant. Seize enseignants généralistes des degrés 3 à 6 de deux écoles ont été interrogés. Leurs réponses ont été analysées et décomptées selon les critères proposés par Ma pour chaque question en vue d'une comparaison de portée

relativement limitée. L’analyse de cette partie utilisera le concept de compréhension profonde des mathématiques fondamentales (voir 4.2) développé par Ma.

Dans un deuxième temps (Partie C), afin d'analyser plus finement le type de connais-sances mathématiques pour l’enseignement et leur pertinence au travers des niveaux d’activité du professeur, nous avons observé toutes les leçons à propos de l’algorithme de la multiplica-tion par un nombre à deux chiffres chez quatre enseignants de 4P71. Il s’agit d’une observation de type « naturaliste », c’est-à-dire que nous ne sommes pas intervenus sur le choix des activi-tés laissé au libre arbitre de chaque enseignant. Les observations ont été précédées et suivie d’un entretien semi-dirigé. Les leçons ont été filmées (caméra en fond de classe et micro cra-vate pour l’enseignant) et quelques passages significatifs du point de vue des connaissances mathématiques pour l’enseignement ont été mis en évidence. Les enregistrements des sé-quences et des entretiens ont été traités à l’aide du logiciel Transana (Fassnacht & Woods, 2002-2011) afin de relever pour chaque extrait le niveau d’activité du professeur et, pour les passages où des connaissances mathématiques sont utilisées, leur type et leur pertinence. Les corrélations entre des trois catégories ont été mises en évidence. Ces extraits peuvent être si-tués dans la séquence grâce à la réalisation d’un synopsis (Schneuwly, Dolz & Ronveaux, 2006) et d’une macrostructure (Dolz & Toulou, 2008). Le moment d’explication de l’algorithme et les choix d’activités des quatre enseignants ont été comparés en fonction de leur connaissance mathématique de l’algorithme. Ce moment d'explication de l'algorithme, mais aussi les explications faisant suite à des difficultés d'élèves, ont été transcrits et analysés avec un grain plus fin. En particulier une analyse ascendante et une analyse descendante d’un épisode a été conduite afin de mettre en évidence des bifurcations didactiques.

La première partie prend donc en compte la forme prédicative des connaissances des enseignants (Vergnaud, 2005, p. 134), ou, autrement dit, leur partie explicite (Morselli, 2005).

L’usage de sénarios de classe, hypothétiques mais fondés sur des questions prototypiques, est considéré comme un moyen d’approcher les pratiques réelles (Biza, Nardi & Zachariades, 2007, p. 301). La seconde analyse leur forme opératoire (Vergnaud) ou encore implicite (Morselli). Cette recherche s‘inscrit donc dans la ligne appelée par da Ponte et Chapman des connaissances des enseignants qui se comprennent dans leur relation à la pratique (da Ponte &

Chapman, 2006, p. 487).

Les enseignants observés dans la seconde partie ne font pas partie du groupe de ceux interrogés lors de la première partie, à la fois pour des raisons pratiques (ils ont été contactés avant que nous n’ayons contacté les écoles pour le questionnaire de Ma), mais aussi pour évi-ter d’influencer leur comportement lors des séances de classe et lors de la préparation de ces séances. Le lien entre les deux parties se fera donc à la fois par le sujet de l’algorithme de la multiplication par un nombre à deux chiffres, présent dans les deux parties et par la discussion des résultats obtenus dans chacune des deux parties.

71 Elèves de 9 à 10 ans, équivalent CM1 en France. Voir Annexe 2.

Partie B

Les connaissances mathématiques pour l’enseignement

des enseignants vaudois :

une comparaison internationale

En vue de réaliser une première approche de l’influence des connaissances mathématiques des enseignants vaudois sur leur pratique d’enseignement, nous avons utilisé la comparaison ef-fectuée par Ma (1999) entre enseignants chinois et étatsuniens afin de comparer à notre tour les réponses d’un groupe d’enseignants vaudois à celles recueillies par Ma. Cette partie met donc constamment en parallèle l’étude de Ma et la nôtre. Dans le Chapitre 9, les deux disposi-tifs de recherche sont décrits. Le Chapitre 10 donne les résultats des enseignants vaudois et les compare à ceux de Ma, le Chapitre 11 enfin tire les conclusions de cette comparaison.