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III. Le contexte géographique et chronoculturel du

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2. La question de l’« question de l’« question de l’« expansion urukéenne question de l’«expansion urukéenneexpansion urukéenneexpansion urukéenne »»»»

On ne peut évoquer le IVe millénaire mésopotamien sans présenter, même

rapidement, le phénomène qui se développe à travers une grande partie du IVe

millénaire, souvent appelé « expansion urukéenne ». Sa chronologie, ses acteurs,

sa nature et bien d’autres facteurs ont suscité quantité d’ouvrages131 et de débats.

Plusieurs colloques lui ont été spécifiquement consacrés132, sans qu’un consensus

soit pour autant dégagé. Il est clair, dans ces conditions, que le but de cet aperçu n’est pas de reprendre la question en détail mais simplement de présenter les grandes lignes d’une évolution qui constitue le cadre chronologique de cette étude.

a. L’émergence de la question urukéenne

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a. L’émergence de la question urukéenne

L e s p r é m i c e s

C’est à Ninive que pour la première fois, au début des années 1930, M. Mallowan mit au jour du matériel céramique dont la similitude avec le matériel de Basse Mésopotamie, alors mis au jour depuis peu sur les sites

129 Quenet 2000 : 150-213.

130 Ces chemins encaissés forment souvent un dispositif rayonnant autour des principaux sites

archéologiques et apparaissent clairement sur les photographies aériennes.

131 Pour ne citer que les plus récents : Algaze 1993 ; Butterlin 2003, Collins 2000 ; Frangipane 1996. 132 Marro & Hauptmann (éds) 2000 ; Rothman (éd.) 2001 ; Postgate (éd.) 2002, Butterlin à paraître.

Ch. Ch. Ch.

Ch. 1111 :::: QuelleQuelleQuelle pertinenceQuellepertinencepertinence pourpertinencepourpour unepouruneuneune étudeétude deétudeétudedede planificationdeplanificationplanificationplanification architecturalearchitecturalearchitecturalearchitecturale protohistoriqueprotohistoriqueprotohistoriqueprotohistorique ????

III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

d’Uruk133, d’Ur134 ou de Tello135 (Fig. 12), ne lui échappa pas. Par ailleurs, les

empreintes de sceaux-cylindres, les fragments d’une tablette numérale et les célèbres écuelles grossières, bols moulés à bord biseauté (encore appelés

bevelled-rim bowls

, ou BRB), déjà retrouvés en très grande quantité dans le Sud

mésopotamien – sont apparus dès les deuxième et troisième campagnes136. Le

Sondage Profond mené du sommet à la base du tell, avec pour objectif de

produire une séquence des cultures préhistoriques de Ninive137, a largement

confirmé la présence de matériel de type méridional. Malgré les incertitudes introduites par l’échantillonnage du matériel et par son enregistrement par cote d’altitude, le Sondage Profond de Ninive représente une séquence de 25 m, dont

12 couvrent le IVe millénaire. À la première périodisation proposée par

M. Mallowan – subdivision du sondage en cinq grandes périodes –, dont la terminologie fut employée jusqu’à nos jours, se substituent maintenant la reprise

et la périodisation de R. Gut138. Quelques années plus tard, M. Mallowan

observait de nouveau les similitudes entre le matériel de Tell Brak et celui de

Basse Mésopotamie139.

Le champ s’est élargi à la Syrie occidentale avec la périodisation de R. Braidwood de la plaine de l’Amuq. L’assemblage de la phase F, qui couvre la

fin du IVe millénaire, reste une référence pour la céramique de Syrie du Nord

(Fig. 13). R. Braidwood souligne la présence très limitée, tant en nombre qu’en diversité, de matériel sud-mésopotamien au sein de l’assemblage céramique de la phase F. Les quelques fragments d’écuelles grossières, tenons perforés et becs verseurs tubulaires courbes retrouvés sur les sites de Tell al-Judeidah et Çatal Höyük proviennent tous des niveaux attribués à la fin de la phase F et au tout

début de la phase G140.

C’est surtout dans les années 1960 et 1970 que s’est révélée l’ampleur du phénomène avec la multiplication des découvertes, en Mésopotamie du Nord, de matériel associé à la culture de Basse Mésopotamie : des types céramiques caractéristiques (notamment les jarres à quatre tenons percés ou à bec verseur tubulaire) mais également du matériel évoquant une activité administrative :

133 Haller 1932.

134 Woolley 1930 : 329-341. 135 Genouillac 1934 : 21-37. 136 Gut 2002 : 17-18.

137 Campbell Thompson & Mallowan 1933 : 127-177. 138 Gut 1995 ; 2002.

139 Mallowan 1947 : 31.

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III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

sceaux-cylindres, tablettes numérales et bulles d’argile recouvertes d’empreintes de sceaux, enfermant ou non des jetons et pouvant porter l’empreinte des jetons

qu’elles contiennent141. Ce matériel de type sud-mésopotamien se trouve

particulièrement bien illustré sur les sites de Habuba Kabira sud/Tell Qannas142

et Djebel Aruda143, sur le moyen Euphrate, où il est largement majoritaire. Ces

deux sites au matériel si caractéristique ont été fondés sur le sol vierge et abandonnés après une occupation de courte durée. Aussi leur plan a-t-il pu être mis au jour en extension dans les deux cas, livrant une architecture monumentale similaire à celle connue en Basse Mésopotamie – bien qu’à une échelle moindre – et une architecture domestique qui constitue un témoignage unique, en l’absence de structure domestique fouillée dans le Sud mésopotamien.

C’est à l’extrême fin des années 1960 et au début des années 1970 qu’est fouillé le site iranien de Godin Tepe, gros tepe d’une quinzaine d’hectares dans la vallée du Kangavar (Zagros central), au sommet duquel on a découvert un ensemble de bâtiments décorés de niches, ceint d’un mur ovale. L’intérieur de cette enceinte recelait majoritairement du matériel semblable à celui de Basse Mésopotamie et de Susiane, comprenant aussi bien de la céramique que du matériel administratif (tablettes numérales, scellements, sceaux-cylindres). Ainsi a-t-on rapidement pris conscience de l’étendue géographique considérable que recouvrait une culture comparable à celle de Basse Mésopotamie, du pays de Sumer aux confins anatoliens et iraniens, donnant à la Mésopotamie son acception la plus large.

141 L’usage de jetons, de sceaux et de scellements n’est pas une nouveauté en soi dans le Nord de la

Mésopotamie. Les plus anciennes attestations de sceaux et d’empreintes de sceau remontent à la fin du PPNB (Akkermans et al. 1983 : 356-357 ; Maréchal 1982 : 223-224, Molist 1996), les plus anciens scellements sur argile proviennent de Tell Sabi Abyad, dans des niveaux datés du tournant du VIe

millénaire (Akkermans & Duistermaat 1996 ; 2004).

142 Tell Qannas et Habuba Kabira sud ne forment au IVe millénaire qu’un seul site dont Tell Qannas

constitue la partie monumentale, qui surplombe Habuba Kabira sud. Les principaux rapports préliminaires sur Habuba Kabira sud sont : Heinrich et al. 1970 ; 1971 ; 1973 ; Strommenger 1976. Voir aussi Strommenger 1980. La céramique a été publiée par Sürenhagen (1974-1975 ; 1978). La publication définitive est en cours d’élaboration : Kohlmeyer & Ludwig en préparation (premier tome). Tell Qannas a fait l’objet de plusieurs rapports et publications, parmi lesquels ont peut citer Finet 1975 ; 1979 ; 2000 ; Finet (éd.) 1982.

143 Les principaux rapports préliminaires sont van Driel 1977 ; 1980 ; van Driel & van Driel-Murray 1979 ;

1983. Concernant le matériel administratif, voir van Driel 1982 ; 1983. La céramique n’est que rapidement présentée : van Driel 2002.

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III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

T h e U r u k W o r l d S y s t e m

La visibilité des phénomènes que nous venons de citer a dirigé les regards

vers le Sud de la Mésopotamie. G. Algaze144 va jusqu’à faire du pays sumérien le

moteur des évolutions économiques mais également sociales qui marquent le

IVe millénaire, en adaptant, dans un ouvrage au titre provocateur –

The Uruk

World System

– les théories d’I. Wallerstein145. Il dessine ainsi dans le Sud

mésopotamien un modèle urbain146 et gestionnaire dont les pratiques et les

techniques administratives auraient été exportées dans une sphère mésopotamienne élargie, s’appuyant en cela sur une opposition entre un centre (Sumer) et sa périphérie, se caractérisant l’un et l’autre par un stade de

complexité socio-économique différent147. C’est dans ce contexte que se serait

mis en place de façon progressive en Syrie du Nord, en Anatolie du Sud-Est, en Iraq du Nord et en Iran occidental un réseau de sites gérés par le Sud mésopotamien – allant du simple comptoir au site de culture pleinement sud- mésopotamienne, au carrefour de routes commerciales – exerçant leur influence sur les sites voisins. La mise en place d’un tel réseau aurait été justifiée, aux yeux de G. Algaze, par le besoin d’importer en Basse Mésopotamie les matières premières qui lui faisaient défaut, au premier rang desquelles le métal. Le système d’échanges qui se serait alors instauré aurait été asymétrique – se démarquant ainsi du commerce de proche en proche attesté à la période néolithique –, poussant les communautés de Haute Mésopotamie à une spécialisation économique qui les aurait fragilisées tandis que l’élite méridionale aurait utilisé les biens de prestige venus du Nord pour conforter l’ordre social.

G. Algaze reconnaît que les deux ensembles distingués (centre et périphérie) ne constituent nullement des entités homogènes et la forme prise par la présence urukéenne dans le Nord de la Mésopotamie varie en fonction du substrat local (situation géographique, niche écologique ou histoire du site) sur

lequel elle se greffe. Les sites sont répartis en cinq catégories148 :

- les sites sans présence urukéenne mais influencés par leurs voisins urukéens ; - les petits avant-postes, aux marges de la sphère mésopotamienne, tels Godin Tepe et Tepe Sialk dans le Zagros, ou El-Kowm 2 dans la steppe syrienne ;

144 Algaze 1993. 145 Wallerstein 1974.

146 La définition de l’urbanité est l’une des difficultés auxquelles se heurtent toutes les études sur le IVe

millénaire.

147 Algaze 1993 : 95-96. 148 Algaze 1993 : 41-56.

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III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

- les stations sur les voies de l’expansion, au titre desquelles nous pouvons citer Tell Qraya ou Tell Ramadi sur le moyen Euphrate, Hassek Höyük sur le haut Euphrate et peut-être Tell Fadgami et Umm Qseir sur le Khabur ;

- les sites principaux, ossature d’un réseau de sites situés à des points névralgiques des voies de communication, comme par exemple Habuba Kabira sud sur le coude de l’Euphrate, Samsat plus en amont, Tell Brak dans le triangle du Khabur ou Ninive sur le Haut Tigre ;

- de nombreux sites plus petits gravitant autour de ces derniers.

Ce réseau de sites n’a pas été créé de façon unitaire mais s’est constitué en

quatre phases successives149. La première voit la colonisation et l’incorporation

au Sud mésopotamien d’une Susiane toute proche et probablement déjà affaiblie. L’assimilation culturelle est très forte et le matériel de Susiane devient extrêmement semblable à celui de Basse Mésopotamie. Dans un deuxième temps, plusieurs occupations sud-mésopotamiennes apparaissent dans le Nord mésopotamien, dans des zones inoccupées (Tell Sheikh Hassan) ou sur un site déjà important (Tell Brak, Ninive, etc.). La troisième phase marque le renforcement du secteur du coude de l’Euphrate avec la création d’enclaves urbaines autour de Habuba Kabira sud et Djebel Aruda, ainsi qu’autour de Karkémish, contrôlant les circulations terrestres et fluviales. Enfin, la fondation d’avant-postes dans les passes du Zagros central permet le contrôle de la route vers le plateau iranien et ses ressources en minerai.

Le Sud mésopotamien n’était pas plus soudé, mais au contraire formé de plusieurs noyaux concurrents. Cette rivalité aurait été un des stimulants à

l’expansion vers le nord et l’est, en quête d’un contrôle commercial plus fort150.

G. Algaze considère l’expansion urukéenne comme faisant partie d’un « élan vers l’Empire » revenant de façon cyclique dans l’histoire

mésopotamienne151. Dans cette perspective, les différentes formes de l’expansion

urukéenne forment un continuum, des formes de domination impériale les plus

formelles aux plus informelles152.

b. La remise en cause de la dialectique centre

b. La remise en cause de la dialectique centreb. La remise en cause de la dialectique centre

b. La remise en cause de la dialectique centre----périphériepériphériepériphérie périphérie

Dès les années 1990, plusieurs points de la thèse commerciale de G. Algaze ont été contestés, notamment l’important écart de développement entre les

149 Algaze 1993 : 110-111. 150 Algaze 1993 : 115. 151 Algaze 1993 : 6. 152 Algaze 1993 : 9

Ch. Ch. Ch.

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III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

sociétés du Sud mésopotamien et celles du Nord et le rapport très inégalitaire qui s’instaure entre elles, impliquant, dans les entités politiques de Basse Mésopotamie une centralisation suffisante pour soutenir une expansion – même progressive – d’une telle ampleur.

La fouille du site de Hacınebi sur l’Euphrate, 3 km au nord de Birecik

(Turquie du Sud-Est)153, a donné une dynamique particulière aux recherches sur

la complexité des sociétés du Nord de la Mésopotamie. Fouillé dans l’optique de mieux comprendre les communautés que, par opposition aux sites dont le matériel est rapproché du Sud mésopotamien, l’on a appelé « locales », il a livré dès la première campagne l’image d’une société impliquée dans un commerce à longue distance et usant d’un bâti monumental. Forgeant un vocabulaire qui a été appelé à une certaine postérité, G. Stein identifie dans la stratigraphie de Hacınebi une phase « pré-Contact », dépourvue de matériel de type méridional, et une phase « Contact » où se côtoient productions céramiques et glyptiques de

type « urukéen » et de type « local »154. D’abord nommées respectivement A et B,

ces deux phases comprennent finalement les périodes A et B1 pour l’une, B2 pour l’autre. Malgré l’absence de certains types caractéristiques de la culture méridionale, que le fouilleur attribue à un facteur chronologique, G. Stein voit dans l’assemblage sud-mésopotamien de Hacınebi l’intégralité du répertoire

méridional155. Le matériel de gestion associé à la culture d’Uruk est également

présent à Hacınebi sous différentes formes : jetons enfermés dans des bulles d’argile recouvertes d’empreintes de sceaux-cylindres, bouchons de jarres et une tablette numérale portant l’empreinte de sceaux-cylindres, ainsi que des sceaux- cylindres eux-mêmes. À cela s’ajoutent d’autres éléments caractéristiques de la culture méridionale, tels les cônes de décor architectural et les faucilles en terre cuite. Ce matériel vient côtoyer celui qui prolonge la tradition matérielle des phases A et B1 de Hacınebi, également très présent dans la phase B2. Cette composante septentrionale du matériel de Hacınebi est complétée par des sceaux-cachets et des scellements de tradition anatolienne, par une architecture monumentale dès la phase A et par l’attestation d’une importante activité

métallurgique156.

153 Fouillé de 1992 à 1997 sous la direction de G. Stein & A. Mısır : Stein 1997 ; Stein & Mısır 1993 ; 1994 a ;

1994 b ; 1995 ; Stein & al. 1996 a ; 1996 b ; 1997 ; 1998. À ces principaux rapports de fouille, il faut ajouter un numéro thématique de Paléorient : Stein (dir.) 1999, ainsi que plusieurs contributions à des ouvrages collectifs : Stein 2001 ; 2002.

154 Stein 2002. 155 Stein 2002 : 151. 156 Stein 2002 : 150.

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III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

Le mode de répartition du matériel identifié par G. Stein dans les zones

fouillées est particulièrement tranché : certains

loci

de la phase « Contact » (sud

et ouest) livrent principalement des artefacts anatoliens, tandis que d’autres (nord) – contemporains – recèlent en grande majorité du matériel de tradition mésopotamienne. Ce biculturalisme matériel est interprété par le fouilleur comme le témoin de la présence sur le site de deux communautés (l’une locale, l’autre étrangère), chacune ayant, outre son assemblage céramique, son propre système de gestion. G. Stein en vient à rejeter l’idée de relations dissymétriques entre « Urukéens » et « Locaux » et à relativiser l’impact de l’apport méridional dans le développement des sociétés septentrionales. Cette vision très tranchée a

été nuancée par plusieurs auteurs, sur des critères céramiques157 et

stratigraphiques158. Malgré tout, G. Stein envisage toujours la cohabitation de

deux populations au matériel et aux traditions différentes, sans émulation et sur

un pied d’égalité à Hacınebi159.

D’autres sites du Nord de la Mésopotamie font état d’une insertion dans les réseaux commerciaux à longue distance, d’un système de gestion et d’une architecture monumentale dans des niveaux antérieurs à ceux qui ont livré du matériel semblable à celui de Basse Mésopotamie. Deux exemples l’illustrent bien : Tell Brak et Arslantepe.

Situé en rive droite du wadi Jaghjagh et à l’entrée des plaines du triangle du Khabur, le site de Tell Brak en Syrie du Nord a livré une séquence continue

depuis la fin de l’époque d’Obeid et pendant tout le IVe millénaire notamment.

Les secteurs TW et CH fouillés par J. et D. Oates entre 1976 et 1993160 ainsi que

les tranchées HS6 et HS1 réalisées sous la direction de R. Matthews entre 1994

et 1996161 ont livré des indices du développement du site de Tell Brak dans la

première moitié du IVe millénaire. Le secteur CH dans une certaine mesure et

surtout le chantier TW et les sondages TX et UA ouverts récemment par

G. Emberling162 ont renseigné les périodes suivantes, jusqu’au début du IIIe

millénaire (Fig. 14).

Tell Brak montre les signes d’un développement important dès la fin de

l’époque d’Obeid et au tournant du IVe millénaire163, aux périodes LC 1 et 2 de la

157 Pollock & Coursey 1996. 158 Butterlin 2003 : 252. 159 Stein 2002 : 152-153.

160 J. Oates 2002, avec références. 161 Matthews (éd.) 2003, avec références. 162 Emberling & McDonald 2001 ; 2003. 163 J. Oates 2002 : 119.

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III. Le contexte géographique et chronoculturel du IVe millénaire mésopotamien

chronologie établie à Santa Fe (Annexe 2). Des vestiges de la période LC 2

(extrême fin du Ve et premiers siècles du IVe millénaire164), – que J. et D. Oates

ont appelé

Northern Early Uruk

– ont été atteints dans le secteur TW ainsi que

dans la tranchée HS6 de R. Matthews. Dans les niveaux les plus anciens (TW 20), une imposante maçonnerie a été mise au jour (Fig. 15), associée à une crapaudine et à un seuil monolithe de plus de 1,5 m de large. Les murs, pouvant aller jusqu’à 2 m de large, témoignent de plusieurs phases de construction. Cette structure a été interprétée lors de son dégagement par J. et D. Oates comme un mur à casemates, comme il en existe à la même période sur le site de Tell

Ziyade, sur le moyen Khabur165. D’autres portions de larges murs du même type

ont été dégagées à trois endroits sur le site de Tell Brak : à l’ouest du secteur

TW, dans la tranchée HS6 ouverte par R. Matthews166 et dans le secteur CH, au

sud du site. Aux vestiges de cette période, il faut ajouter un bâtiment orné de

niches à multiples redents, qui n’est à ce jour que très peu dégagé167. Dès cette

époque également, les processus de production céramique en masse sont à l’œuvre comme l’atteste la présence à Tell Brak – et sur un grand nombre d’autres sites nord-mésopotamiens – de bols produits rapidement sur un

dispositif rotatif, généralement appelés « bols de Coba » (

Coba bowls

) d’après le

site de Coba Höyük, en Anatolie du Sud-Est. Biens de prestige et scellements ont été retrouvés, ainsi qu’un cône de décoration murale, dans le niveau 6 de la tranchée HS6, traduisant l’existence d’une élite, de pratiques de scellement et probablement d’une architecture monumentale richement décorée. Dans les environs de Tell Brak, le matériel retrouvé sur les sites de grande ou de petite