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La rupture conventionnelle plan de départ volontaire

14 N Activités de services administratifs et de soutien 34 9 (+2)

III) Les entretiens : résultats bruts

3. Le contexte de la rupture de contrat : circonstances et pourparlers

3.4. La question de l’accord

Dans quasiment la totalité des cas, l’accord de principe sur le recours à ce dispositif particulier se fait en amont de la procédure officielle, souvent de manière informelle ; c’est la phase des pourparlers qui précèdent celle de la procédure en elle-même. La rupture conventionnelle procède juridiquement d’une initiative commune de rompre d’un commun accord le contrat de travail. Il existe certes des communs accords, mais le consentement peut également être forcé. Ce sont ces différentes situations que nous allons aborder.

Le commun accord a souvent lieu lorsque l’initiative du départ relève du salarié puisque dans ce cas, l’employeur s’oppose rarement au principe de rupture conventionnelle. Mais il s’observe aussi lorsque l’employeur propose ce dispositif à un salarié ayant envie de partir. Ces deux salariées symbolisent des situations de commun accord :

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- agent logistique de distribution : « on s’est mis d’accord, d’un commun accord, pour la

rupture conventionnelle. Ça a été fait en arrangement tous les deux, j’ai pas été contrainte. Aussi bien pour lui que pour moi… Il m’a dit « on va pas se mordre la queue ».

- ingénieur logiciels : « j’avais une opportunité, pas professionnelle, mais de vie, parce que

Paris je commençais à saturer un peu. Et eux, ils n’avaient pas de missions à me proposer, donc dans les deux parties… Chacun a trouvé son compte, ça a été équitable ».

Deux cas particuliers de « commun accord » sont à souligner puisque deux salariés étaient employés par des membres de leur famille (les parents pour l’un, le mari pour l’autre). Le premier, employé agricole à temps partiel, a quitté l’entreprise de ses parents (un GAEC) pour y revenir quelques mois plus tard en tant qu’associé. La seconde, secrétaire à temps partiel, a utilisé la RC car l’entreprise de son mari était liquidée. Elle n’a finalement pas quitté l’entreprise et a dû gérer la liquidation, car son mari était en fin de vie.

L’accord peut également « se faire et se défaire ». Par exemple, dans le cas de ce peintre, le commun accord a eu lieu lors d’une discussion informelle, mais l’employeur n’entame pas la procédure espérant que le salarié démissionne. C’est seulement après un conflit financier que l’employeur est revenu sur sa décision :

- peintre : « entre temps j’ai déménagé, je faisais les allers retours tous les jours et après il y

a eu un conflit parce qu’il ne voulait pas me rembourser mon abonnement SNCF de 100 euros par mois. Il m’avait dit qu’au-delà de 200 kilomètres ce n’était pas remboursé, mais je me suis encore renseigné auprès de mon assurance juridique et je lui ai envoyé les papiers qu’il fallait pour qu’il me rembourse tout. Donc ça a duré 2-3 mois et au bout du troisième mois, il a décidé de faire le licenciement conventionnel. Pendant 2 mois on n’avait pas reparlé de la rupture parce qu’il pensait que comme je faisais les allers retours tous les jours, qu’au bout d’un moment j’allais être fatiguée et j’allais démissionner. Mais non, moi ça ne me dérangeait pas de faire les allers retours. C’est quand je lui ai montré les papiers de mon assurance comme quoi il était obligé de me rembourser la moitié de mes transports, c’est-à- dire à peu près 400 euros, qu’il est revenu sur la rupture conventionnelle. Quand je lui ai

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montré ça, ça l’a fait réfléchir et il a décidé de me licencier en conventionnel parce que c’était plus rentable pour lui ».

Il est à noter que la durée des pourparlers et les délais de réflexion sont extrêmement fluctuants selon les cas. En effet, pour les « communs accords », la procédure est engagée en quelques jours, voire en quelques heures pour certains (pour le conducteur de travaux, la démarche a été expéditive : le 27 septembre, il apprend son départ, la modalité de la RC et donne son accord. Son patron lui demande de quitter l’entreprise le jour même). Alors que pour les situations conflictuelles, telles que les départs contraints, les délais de réflexion peuvent aller jusqu’à plusieurs semaines, comme le souligne ce cadre qui souhaitait fortement négocier son départ :

- consultant : « je lui ai clairement dit que j’allais faire une analyse comparative entre

l’intérêt que j’aurai à passer par une rupture conventionnelle et l’intérêt que j’aurai à être licencié économiquement. On s’est quitté avec un laps de temps de réflexion qu’on s’est accordé réciproquement. Ça a duré un mois, donc ça m’a laissé le temps de creuser ».

Dans un certain nombre de cas, nous avons observé un « vice de consentement » au sens où la contrainte et la pression de l’employeur étaient si fortes qu’il ne s’agit pas d’un réel consentement, mais d’une résignation. Une salariée a même évoqué le fait qu’elle espérait que sa rupture conventionnelle ne soit pas homologuée puisqu’elle ne voulait pas partir. A

contrario, c’est parfois le supérieur direct du salarié qui appuie sa demande de rupture

conventionnelle auprès du responsable des Ressources Humaines qui refuse de prime abord le principe d’une rupture conventionnelle :

- standardiste : « ma supérieure hiérarchique n’a pas émis d’objection à mon envie de partir,

elle a compris ma situation qu’elle connaissait plus ou moins. Par contre, la responsable des ressources humaines n’était pas trop d’accord parce qu’il y avait déjà eu quelques départs négociés et qu’elle n’allait pas non plus les distribuer comme ça ! Mais heureusement, ma supérieure hiérarchique a défendu mon cas en disant qu’ils n’avaient jamais eu de problème avec moi et que ça serait un minimum de me l’accorder. Ça a ensuite été accepté sans plus de souci ».

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