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III- Une gestion alternative pluridisciplinaire qui a ses limites

2- Quelles sont les impacts de cette pratique ?

L’utilisation des herbivores pour gérer des milieux induit de nombreuses externalités, positives comme négatives. Les deux impacts positifs les plus connus, dont nous avons pu traiter et prouver par les entretiens, sont l’impact positif sur la diversité biologique faunistique et floristique et l’impact positif sur le comportement humain. Ces deux impacts sont recherchés par ceux qui ont initié cette pratique, donc nous ne pouvons parler d’externalités positives. Or, l’écopastoralisme engendre des impacts négatifs non intentionnels que nous pouvons qualifier d’externalités négatives.

2.1- L’impact environnemental

Comme il a été vu précédemment l’écopastoralisme engendre de nombreux impacts positifs sur la diversité d’un milieu. Cette méthode aurait un impact positif sur les échappements de gaz liés aux engins utilisés pour entretenir le site. Effectivement, il n’y a plus d’engins qui entretiennent le site car ce sont les herbivores qui s’en chargent mais cet argument est à relativiser car il dépend de nombreux facteurs. L’impact est différent selon :

→ Le type d’engins, thermique ou électrique.

→ Son ancienneté, si c’est un engin neuf il a un degré de pollution moindre qu’un engin vieux.

→ Le degré d’utilisation que l’on a, plus on l’utilise et plus l’engin va diminuer en performance. Et plus on l’utilise à son degré maximal plus son obsolescence grandit. De plus les constructeurs ne peuvent donner de chiffres sur l’impact carbone selon les critères cités ci-dessus. Pour avoir ce résultat il faudrait établir tout un protocole pour étudier l’impact carbone de chaque engin qu’une entreprise possède selon son utilisation et selon chaque site. Cet argument est souvent mis en avant dans des revues techniques mais il n’est pas fondé car aucun calcul n’est démontré, cet argument peut être vite dévié.

Quand bien même il y aurait un impact positif par rapport à l’arrêt de l’utilisation d’engins thermiques, il faut prendre en compte les échappements de gaz liés aux déplacements pour aller surveiller, élever les animaux. Aller voir les animaux sur site peut avoir un impact différent sur le bilan carbone selon la gestion choisie et selon la gestion du site faite auparavant. Admettons que nous allons sur site toutes les deux semaines avec une gestion plus conventionnelle et qu’une fois l’écopastoralisme mis en place on y aille toujours à la même fréquence : bien évidemment l’impact carbone sera plus positif une fois les herbivores en place.

Ce ne sont que des suppositions car le corps professionnel ou scientifique n’a pas encore réalisé d’étude sur cet impact.

Il aurait été possible de réaliser un calcul théorique de la consommation de carburant des camionnettes par exemple mais d’après les témoignages et les calculs réalisés par la suite nous observons que les déplacements sur site se font plus régulièrement pour la surveillance des animaux. Ce n’est donc pas sur la seule prise en compte de ce point qu’il est possible d’affirmer

que l’écopastoralisme est moins polluant que les pratiques actuelles de l’entreprise ou inversement. Il faut prendre en compte l’ensemble des engins des sites qui sont utilisés pour chaque méthode de gestion.

Pour finir, l’écopastoralisme peut avoir des externalités négatives sur la faune ou la flore sauvage. Même si le pâturage d’herbivores favorise la reproduction d’espèces nichant au sol il peut avoir un impact dû au chargement élevé et à son piétinement (Triplet et al., 2020). Il est donc intéressant d’adapter la gestion écopastorale en fonction de la nidification au sol que l’on peut avoir sur site, d’où l’intérêt de réaliser des diagnostics les plus complets possible.

2.2- La question sanitaire

La question sanitaire liée à la réintroduction de l’animal en ville n’est pas du tout évoquée pour l’écopastoralisme. Pourtant l’hypothèse de problèmes sanitaires liés à l’animal en le réintroduisant en ville n’est pas anodine.

En réintroduisant les animaux d’élevage, la transmission d’agents pathogènes peut être plus directe, car l’homme et l’animal viennent à vivre en promiscuité. Cette transmission peut se faire indirectement par la souillure de l’environnement public ou bien par vecteurs (puces, moustiques, tiques…).

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a défini les zoonoses comme « une infection ou infestation naturellement et directement transmissible des animaux à l’homme et vice- versa »[1]. L’animal joue un rôle principalement de vecteur ou d’espèce-hôte.

2.3- L’appropriation des animaux et leur impact sur le bien-être humain

Les témoignages recueillis lors des entretiens nous montrent que les usagers s’approprient les animaux présents. Les usagers, les habitants développent un sentiment d’attachement et d’appartenance envers les animaux qui se trouvent sur site. Stanislas De Mézerac nous raconte cette anecdote : « Les chèvres étaient collées aux maisons type ‘HLM’, il y avait des voitures brûlées, ça avait l’air un peu agité dans le quartier. Au début je me suis dit que ça n’allait pas aller avec les gamins excités qui vont rentrer dans l’enclos. Et en fait je les ai toujours là-bas. Les gens s’approprient les moutons. Comme ils les voient tous les jours, ils s’attachent à eux. ». Ce témoignage éloigne les préjugés que l’on peut avoir sur certaines zones que l’on caractérise de difficiles et où l’on pense que l’écopastoralisme n’a pas sa place. Or, les gens s’approprient les animaux, les défendent et ne sont pas là pour leur faire du mal. Même si le premier réflexe est négatif lorsque l’on veut mettre l’écopastoralisme en place, la finalité est la même : l’attachement des animaux par la population. Alain Divo a installé des ruminants dans le parc de Sceaux, suite à la demande du Conseil départemental. Les premiers retours ont été très négatifs car l’installation des animaux a induit des changements d’usages : « ça changeait leurs habitudes, ils n’étaient pas contents ». Donc ils ont recréé une piste pour les coureurs et une démarche de communication a été réalisée pour d’autres usages qui pouvaient être détournés plus facilement. A ce jour, il est impossible de retirer les animaux de ce parc, ils font partie de l’environnement.

De nombreuses études montrent que l’animal a des effets bénéfiques sur l’Homme. Tel que son effet apaisant et déstressant, démontré dans des expériences de Aaron Katcher et ses collaborateurs ou encore par Hansen et coll. en 1999. Des études nous démontrent que l’animal

peut avoir un rôle thérapeutique. Même si ces études peuvent être largement critiquées car elles ne se basent pas sur des expérimentations rigoureuses. Mais même en se basant sur des expérimentations rigoureuses il est complexe pour un praticien de développer et d’utiliser le changement apporté par la présence de l’animal (Servais, 2007).