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Qu’est-il possible de faire ?

CRISES FINANCIÈRES ET ÉCONOMIQUES

8.2 Qu’est-il possible de faire ?

Le premier conseil que l’on peut donner est le suivant : ne pas paniquer.

Les marchés finissent par revenir à la normale, et les crises financières et économiques ne changent rien aux principes fondamentaux des PPP. Elles

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modifient seulement la façon dont les PPP doivent être structurés pour répondre aux besoins des États et tenir compte de la réalité des marchés financiers. Nous étudions ci-dessous les mesures qui peuvent être prises pour soutenir les PPP en période difficile. Nous examinons les mécanismes qui peuvent être utilisés à l’appui de projets existants et/ou de nouveaux projets qui n’ont pas encore achevé l’étape de l’appel d’offres. Naturellement, ces mesures doivent être adaptées en fonction de la situation propre à chaque pays, du projet lui-même et de la détermination des pouvoirs publics.

8.2.1 Soutien aux recettes et réductions de coûts

Pour répondre au risque de réduction de la demande et d’augmentation du coût du financement, les pouvoirs publics souhaiteront éventuellement sou-tenir une partie du flux de recettes du projet, en particulier lorsqu’il n’est plus possible de relever les tarifs pour des raisons politiques ou des ques-tions de moyens du consommateur. Par exemple, il est possible d’utiliser les subventions pour alléger le fardeau tarifaire des consommateurs à certaines échelles de la société ou ralentir le rythme de l’accroissement des tarifs (voir section 3.3). Les pouvoirs publics souhaiteront peut-être relever les tarifs pour faciliter le recouvrement des coûts et donc renforcer la viabilité à long terme du service public. Les financements publics peuvent contribuer à atté-nuer l’impact de la hausse des tarifs sur les personnes les moins à même d’y faire face, par exemple par le biais de subventions aux services publics visant à compenser la réduction des tarifs en faveur des consommateurs à faible revenu ou grâce à des subventions versées directement aux consommateurs pour compenser la hausse des coûts. Les mesures de soutien tarifaire doivent être ciblées avec précision et accompagnées de mesures d’incitation adéquates pour obtenir une plus grande efficience et satisfaire aux impératifs de perfor-mance. Un soutien tarifaire mal ciblé peut entretenir l’inefficience et détourner les mesures d’incitation de la prestation de services. Le prolongement de la période du projet peut aussi ajouter de la valeur et réduire les tarifs, mais plus la période restante du projet est longue, moins la valeur créée par son prolongement est élevée en raison de la valeur-temps de l’argent — la valeur ajoutée dans un avenir lointain est moindre que la valeur créée aujourd’hui.

Parallèlement, il est possible de dimminuer les coûts, notamment en rédui-sant la taille des installations ou l’ampleur des rénovations, ou en étalant les investissements du projet (en fonction, notamment, de la baisse de la demande).

Toutefois, la réduction des coûts ne doit pas se faire au détriment des travaux d’entretien, ni entraîner une dégradation des exigences de performance majeures ou aggraver le déficit d’investissement à long terme. Des mesures de soutien conditionnel supplémentaires, telles que des garanties de l’État ou des IFI, peu-vent aussi contribuer à réduire les coûts de financement ou fournir une sécurité en ce qui concerne le risque de paiement relatif à l’acheteur de la production.

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8.2.2 Remplacer la dette et les fonds propres privés par des ressources publiques

Lorsque l’accès aux investissements privés est difficile ou trop coûteux et que l’État a accès aux emprunts ou à d’autres formes de financement, les pouvoirs publics devraient envisager de remplacer les investissements privés par des financements publics (subventions, emprunts, fonds propres ou autres instruments). Un projet ainsi financé par des fonds publics peut être refinancé plus tard à l’aide de fonds privés lorsque la situation des marchés financiers s’est améliorée ; le projet de PPP devrait être structuré dès le début en conséquence. Par exemple, le Royaume-Uni a créé au sein du ministère des finances une unité de financement des infrastructures (Infrastructure Finance Unit) chargée de prêter directement aux projets. La France, de son côté, a choisi de fournir des garanties pour encourager la participation des prêteurs privés.

Toutefois, il convient de noter que dans les projets de PPP financés par le secteur privé, le concédant compte sur la présence des prêteurs pour assurer le suivi des flux financiers et sur l’investissement en fonds propres des action-naires pour s’assurer de leur engagement à moyen et long terme en faveur du projet. Dans la mesure où l’État fournit des créances ou des garanties, le prêteur pourrait être moins incité à évaluer soigneusement le projet. Le concédant doit donc jouer un rôle encore plus proactif dans l’élaboration du projet lorsque les prêteurs ne sont pas impliqués dès le début dans la mise en place de mécanismes de protection des flux financiers. Le ministère britan-nique des finances a formé une équipe de spécialistes — l’unité de finance-ment des infrastructures — chargée d’assumer une partie de cette fonction d’évaluation des projets. L’équipe s’efforce aussi de cofinancer des projets aux côtés de banques commerciales chaque fois que cela est possible, afin de tirer parti des fonctions d’évaluation des banques. Pour que les incitations de la société du projet coïncident avec les prestations de services, il fau-dra structurer le projet de PPP en conséquence, par exemple en distribuant les profits au fil du temps ou en obtenant des actionnaires des garanties sur la prestation de services à long terme. La structure d’un PPP peut-être préservée en recourant à un système de passation de marchés basé sur la performance ou la production et en demandant aux actionnaires d’investir une quantité de fonds propres suffisante pour que les incitations de la société du projet soient adéquatement ciblées.

Lorsqu’il fournit un appui de ce type, l’État doit établir une politique claire, en particulier sur les questions suivantes :

• l’ampleur du soutien qu’il convient de fournir, par exemple en proportion du coût total du projet ;

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• les droits de créancier et autres droits que l’État exigera ;

• les termes auxquels l’État établira sa position ultérieurement ;

• la façon d’éviter une mainmise politique sur le mécanisme de soutien, y compris les projets auxquels l’État fournit un appui, le montant de l’aide fournie et les termes auxquels le soutien est fourni ; et

• dans le cas où le soutien est fourni par une entité publique, comment établir une capitalisation, une sélection et une fonction de crédit efficien-tes dans l’entité publique.

8.2.3 Créances et fonds propres d’origine locale

Les investissements privés internationaux ont ralenti de façon significative, mais certains marchés financiers locaux ont été moins sévèrement affectés.

Il est possible d’utiliser les liquidités de ces marchés à l’appui de projets de PPP, ce qui permet également d’accroître les opportunités à long terme sur ces marchés. Lorsque les marchés financiers locaux disposent de la sophisti-cation et de la liquidité requises pour contribuer au financement de projets de PPP, mais sont dépourvus de l’assortiment d’actifs et de passifs nécessaire aux dettes à long terme, ou manquent de savoir-faire en matière de finance-ment de projets de PPP par l’emprunt, un autre mécanisme efficace à la dis-position de l’État est le recours à un intermédiaire financier. L’intermédiaire rassemble les compétences et l’assortiment d’actifs et de passifs nécessaires à l’émission d’emprunts de financement de projets en monnaie nationale et mobilise des fonds supplémentaires en monnaie nationale auprès des banques ou marchés des capitaux locaux en éliminant les risques du projet dans la mesure nécessaire pour permettre à ces entités locales de participer (voir section 3.3).

8.2.4 Autres sources de créances et de fonds propres

Lorsque les sources privées de financement ne suffisent pas à couvrir les besoins des projets de PPP, les OML et les OBL peuvent fournir un appui supplémentaire ou contribuer à mobiliser d’autres sources de financement (par exemple des financements provenant de marchés financiers locaux lorsque les opérateurs locaux n’ont pas l’expérience des PPP, mais à travers lesquels les OML et les OBL peuvent mobiliser efficacement les liquidités disponibles). Comme on l’a vu plus haut, il est probable que les finance-ments concessionnels provenant des donateurs diminueront durant la pé-riode de crise, mais certaines OML pourraient avoir les moyens de mobiliser un surcroît de capacités face à la crise. Il se peut aussi que les fonds sou-verains fournissent une source supplémentaire de financement en faveur des PPP, en particulier sur une base de cofinancement afin d’exploiter l’effet de levier de l’expérience d’autres prêteurs, tels que les OML, en matière de PPP.

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8.2.5 Prolongement des échéances

Lorsque les prêteurs privés ne sont pas en mesure de fournir les créances à long terme qui ont généralement la faveur des projets de PPP, il est possible de combiner l’aide publique et le soutien des promoteurs pour éliminer le risque de refinancement que les prêteurs ne sont pas disposés à endosser. Par exem-ple, le prêteur pourrait accepter de fournir un mécanisme appelé « soft mini-perm », assorti d’une échéance à court terme (5 à 7 ans), au-delà de laquelle la marge augmente sensiblement, ce qui incite fortement la société du projet à refinancer. Une structure similaire — appelée « hard mini-perm » — peut être utilisée lorsque le refinancement est obligatoire. Dans les deux cas, il importe de répartir clairement les risques liés à l’accroissement du coût de la dette, y compris les mécanismes (par exemple un engagement conditionnel de partici-pation) permettant de gérer ces risques. En outre, les parties s’attacheront à répartir clairement la participation aux gains du refinancement.

8.2.6 Ajuster les conditions de la concurrence

Certains ont l’impression que les conditions habituellement appliquées aux projets de PPP ont atteint des niveaux inacceptables peu avant la crise. Quoi qu’il en soit, il est de toute évidence plus facile de mobiliser les financements privés à l’appui de projets de PPP si les conditions de la concurrence sont assouplies au profit du secteur privé. Par exemple, le concédant pourrait réduire le niveau des engagements financiers requis lors des offres. Pour le concédant, cette formule accroît le risque que les prêteurs soulèvent des questions supplémentaires après la phase d’appel d’offres, mais elle accroît le temps dont dispose la société du projet pour rassembler des emprunts.

Lorsque c’est le cas, le concédant peut insister pour que la société du projet n’impose pas de contraintes d’exclusivité ou d’autres restrictions à ses prê-teurs, et leur laisse la liberté de financer le consortium remportant le marché, quel qu’il soit. De même, le concédant peut organiser un processus concur-rentiel en matière financement, qui, une fois le soumissionnaire pressenti (preferred bidder) choisi, est mis en œuvre pour sélectionner les prêteurs qui proposent les meilleures conditions. Le concédant peut aussi souhaiter conserver certains droits sur l’établissement du carnet d’ordres de la société du projet, en s’efforçant d’intensifier les pressions concurrentielles, ou du moins superviser le processus de mobilisation du financement de la société du projet. Il peut être très difficile de définir l’influence que le concédant aura sur l’établissement du carnet d’ordres.

Le concédant peut souhaiter réduire les risques pris en charge par la société du projet afin d’accroître l’attrait du projet et contrer la perception d’une aggravation des risques du projet qui influera sur le marché en période de crise. En offrant de meilleures conditions, le concédant peut contribuer à améliorer la notation du projet. Les actionnaires sont eux aussi très

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cernés, s’agissant par exemple de l’utilisation d’un ratio endettement/fonds propres plus faible et d’un accroissement du soutien des promoteurs du pro-jet. S’il bénéficie d’une cote de crédit suffisamment élevée, le projet peut attirer des financements en émissions obligataires non garanties.

8.2.7 Accroissement du soutien conditionnel

En période de crise, lorsque les risques sont perçus au plus haut, les pouvoirs publics peuvent décider de fournir un soutien conditionnel supplémentaire pour réduire le risque de crédit du projet ou d’autres risques spécifiquement liés au projet. Cette démarche a été adoptée, par exemple, par les autori-tés françaises et portugaises. Les caractéristiques des garanties en matière de soutien aux engagements conditionnels sont très souples, ce qui permet aux autorités d’identifier les préoccupations particulières des investisseurs et prêteurs potentiels et d’ajuster les caractéristiques de leur soutien selon l’évolution de l’impact de la crise. Toutefois, le soutien aux engagements conditionnels est aussi très complexe et la probabilité est grande que ce type de soutien engendre des obliations substantielles pour les administrations publiques, souvent sans qu’elles en soient conscientes. Les services publics de gestion de la dette ne disposent pas forcément du personnel nécessaire pour évaluer, suivre et gérer ces obligations.

8.2.8 Financement de l’élaboration des projets

La participation du concédant au financement de l’élaboration du projet peut avoir un impact très important sur les projets qui font l’objet de passations de marchés et sur ceux qui sont en réserve, à court et à moyen terme. Les autorités publiques s’attacheront à préserver ce financement (en particulier face à la réduction des subventions des donateurs) soit directement, grâce aux allocations budgétaires, soit par le biais de mécanismes d’élaboration de projets ou d’autres mécanismes visant à créer des dispositifs renouvel-ables aptes à réduire en partie l’impact sur les ressources budgétaires pub-liques. Ce soutien à une préparation élargie des projets apparaît d’autant plus important que les investisseurs privés concentreront leur attention sur les projets de qualité lorsque les marchés commenceront à se redresser. Les investissements privés se dirigeront en priorité vers les projets les mieux préparés. L’incapacité des pouvoirs publics à investir aujourd’hui dans la préparation de projets se traduira par une compétitivité réduite et moins d’intérêt de la part des investisseurs lorsque les marchés se redresseront.

8.2.9 Résolution des conflits

Enfin, s’agissant des projets qui ont atteint le stade de la clôture financière, les pouvoirs publics doivent intensifier le suivi des projets et renforcer leur vigilance afin de déceler d’éventuels problèmes dans les flux de recettes, des besoins d’emprunt supplémentaires et d’autres signes annonciateurs de

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blèmes. En identifiant les difficultés d’un projet de PPP à un stade précoce, il est possible d’éviter ou d’atténuer de nombreux problèmes et de réduire les répercussions de la crise. Les autorités publiques doivent affecter un finance-ment suffisant et un personnel expérifinance-menté au suivi des projets et prendre rapidement les mesures qui s’imposent. Comme on l’a vu au chapitre 6, la renégociation peut être l’occasion d’améliorer le projet ; les périodes de crises économiques et financières peuvent créer de nombreuses opportunités de ce type.

SYNTHÈSE DES PRINCIPAUX