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Provinces géomorphologiques et transects régionaux

Partie II: Répartition spatiale des reliques de paléo-surfaces et évolution du réseau de

Chapitre 4. Distribution spatiale des paléo-surfaces en Afrique de l’Ouest

2. Résultats et analyse : répartition des formes et des latérites à l’échelle régionale

2.2 Provinces géomorphologiques et transects régionaux

La carte des provinces géomorphologiques ouest africaines est présentée sur la Figure 4.16. Cette carte indique quel type de forme ou d’altération est majoritaire dans le paysage. Elle constitue une synthèse régionale du degré de préservations des paléo-surfaces d’Afrique de l’Ouest, dont certaines dispositions typiques ont été présentées sur la Figure 4.15 mais aussi sur la Figure 4.2. Cette préservation reflète l’évolution du relief ouest africain depuis 45 Ma et notamment : l’évolution de la dénudation, les mécanismes de dissection (chimique, mécanique), l’impact de la lithologie, l’évolution climatique ainsi que les forçages externes. La description de cette carte est complétée par des grandes coupes régionales (Figure 4.17).

Provinces bauxitiques

Les plus hauts sommets d’Afrique de l’Ouest portent une cuirasse bauxitique, qu’ils soient localisés sur les ceintures de roches vertes du socle précambrien, ou sur les dolérites de la dorsale de Guinée (Fouta Djalon ; coupes BB’ et EE’ de la Figure 4.17). Dans le Fouta Djalon, la morphologie type de la pénéplaine bauxitique de faible relief est bien préservée. Elle fossilise de nombreux escarpements anciens (voir discussion en page 72) et se prolonge sur les mesas des terrains précambriens avec une faible pente régionale (Coupe DD’ de la Figure 4.17). Le paysage bauxitique est plus accidenté dans le massif du Simandou, sur socle précambrien, que dans celui du Fouta Djalon, suggérant un impact de la lithologie. On retrouve des reliques du paysage bauxitique depuis la côte près de Boké jusqu’aux monts mandingues (coupe BB’ de la Figure 4.17 ; Figure 3.12b). De nombreuses reliques bauxitiques sont également préservées sur les grès néoprotérozoïques du plateau de Banfora et du bassin des Voltas.

La surface enveloppe bauxitique forme un bourrelet marginal dont l’altitude diminue vers la côte atlantique, le delta intérieur du Niger et le bassin des Iuellemmeden et le bassin sénégalo- mauritanien (Egbogah, 1973; Boulangé et Millot, 1988; Chardon et al., 2006; Beauvais et al., 2008;

Beauvais et Chardon, 2013 ; coupes BB’ et FF’ de la Figure 4.17). Cette disposition suggère une

déformation ante et/ou post-surface Africaine qui sera discutée plus longuement dans les chapitres suivants. Les témoins bauxitiques sont plus rares dans le bassin des Voltas mais la tendance régionale indique bien un abaissement de la Surface Africaine vers le Nord (voir coupes GG’ et HH’ de la Figure

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4.17). Le long de la côte, on retrouve la surface bauxitique anormalement haute sur la péninsule de Freetown (Grandin et Hayward, 1975; coupe EE’ de la Figure 4.17).

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Figure 4.15 : (En face) Vues Google Earth et leurs interprétations montrant des paysages-types d’Afrique de l’Ouest. (a) Configuration sur socle paléo-protérozoïque avec la surface bauxitique préservée au sommet d’une ceinture de roches vertes ré-incisée par différentes générations de glacis près de Bissigui, Burkina Faso. (b) Modelé et mesas bauxitiques préservées respectivement au dessus et en dessous de l’escarpement gréseux marquant la limite orientale du Fouta Djalon près de Labé, Guinée. (c) Télescopage de la séquence avec des reliques de la surface bauxitique retrouvées 60m au dessus du niveau actuel du Niger près de Ségou, Mali, sur les grès néo-protérozoïques. La même configuration est retrouvée dans cette zone avec des buttes d’Intermédiaire dominant le paysage. (d) Dissection de la série détritique du Continental terminal couverte par la Surface intermédiaire dans le bassin des Iuellemmeden au Nord de Niamey, Niger.

L’équivalent temporel de la bauxite (abandon ~ 45 Ma) dans les bassins sédimentaires est représenté par les dépôts calcaires du milieu de l’Eocène. A l’approche des bassins et du delta interne du Niger, on observe un télescopage de la surface Africaine et des suivantes. Par exemple, près de Matam, les surfaces de la bauxite au Moyen glacis sont se tiennent dans moins de 100 m d’altitude (Coupe AA’ ; Figure 4.17). Cette disposition suggère des liens subtils entre les dépôts sédimentaires et les surfaces d’aplanissement. La géométrie des dépôts éocènes dans les bassins peuvent traduire des hétérogénéités de la topographie du fond des bassins et/ou des déformations post abandon. Dans le bassin des Iuellemmeden, ces dépôts marins dessinent un synforme d’environ 200-300 km de large, suggérant qu’ils ont été déformés à grande longueur d’onde (Coupe HH’ ; Figure 4.17). Aux environs de Thiès (Coupe AA’ ; Figure 4.17), les dépôts paléocènes et éocènes s’amincissent vers l’Ouest, suggérant que cette zone a toujours été un haut topographique.

La différence d’altitude entre la surface Africaine prolongée à la main et la topographie actuelle permet d’estimer une gamme de dénudation depuis 45 Ma (Figure 4.17). Cette dénudation est généralement inférieure à 400 m sur la majorité du craton, elle est de 600-800 m au niveau du bourrelet marginal et de 800-1000 m dans vallées de la Bafing et de la Kakrima, dans la dorsale guinéenne.

Provinces intermédiaires

Les provinces d’Intermédiaire sont principalement préservées sur grès. On les observe le plus souvent coiffant les grès néoprotérozoïques (ex : Tagant ; Figure 4.2b) ou surmontant les dépôts paléogènes du bassin des Iuellemmeden et du bassin sénégalo-mauritanien (Figure 4.16). Sur le plateau de Jos, on trouve la Surface intermédiaire est développée sur une formation volcano-clastique (Boulangé et Eschenbrenner, 1971). Dans ces configurations, le paysage intermédiaire a un très faible relief et comprend un réseau hydrographique peu ramifié. Il correspond à la disposition typique des bas-fonds. Dans le bassin sénégalo-mauritanien, la Surface intermédiaire a subi des légères retouches érosives ainsi que de l’aggradation de dépôts alluviaux tandis qu’elle est disséquée dans le bassin des

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Iuellemmeden (Coupe AA’ et HH’ de la Figure 4.17). L’escarpement de ce bassin, qui recoupe la Surface intermédiaire à l’Est, semble être issu d’une dissection post-intermédiaire (Figure 4.16).

Les reliques de paysage intermédiaire sont réparties très sporadiquement sur le socle et constituent généralement des collines isolées (Figure 4.17). Cependant, leur disposition régionale montre des tendances qui reflètent le paléo-relief intermédiaire et la dissection de la surface Africaine. Les reliques de la Surface intermédiaire sont généralement inclinées vers les drains majeurs (Figure 4.17) suggérant que le drainage intermédiaire était similaire à l’actuel. Le relief de la Surface intermédiaire peut être fort (> 200-300 m) ; ce qui suggère une profondeur de dénudation importante entre le stade bauxitique et le stade intermédiaire. La géométrie des surfaces dans la zone du Haut- Niger suggère une forte dénudation entre les périodes bauxitiques et intermédiaires. Après l’abandon de l’intermédiaire, malgré le développement du Haut-glacis, la profondeur de dénudation est faible (> 50 m).

Provinces de glacis

La majorité du socle de l’Afrique de l’Ouest est dominé par la cuirasse de Haut glacis (Figure 4.17). Dans cette zone, incluant le Libéria, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, l’Est du Ghana, le Sud du Bénin et le Sud du Mali (voir Figure 2.15), les reliques de Haut glacis couvrent la majorité des interfluves (Domaine Birrimien et Haut-Niger sur la coupe DD’ de la Figure 4.17). La pente régionale formée par les reliques de Haut glacis est très proche de la topographie actuelle. Les inselbergs et les mesas de bauxite ou d’Intermédiaire forment de rares interfluves (Figure 3.12c). La province de Haut glacis représente un ensemble assez continu entre les latitudes 5° et 15°.

On peut distinguer deux zones où le Moyen glacis se développe : (1) le Nord-ouest du Fouta Djalon et du plateau mandingue, drainés par le Sénégal, la Gambie et la Kakrima (Figure 4.3) et (2) la zone entre le fossé de la Bénoué et le fleuve Comoé. Le long de la côte atlantique, il n’y a pas de rupture de pente marquée permettant de différencier le Moyen glacis et le Haut glacis dans la zone entre les fleuves Mano et Comoé. Ce domaine, représentée en vert foncé sur la Figure 4.17, correspond à une zone où le Haut glacis a été démantelé préférentiellement par altération chimique depuis 11 Ma (Grandin, 1976). Le paysage résultant est « mou », il est multiconvexe et de très faible relief (Figure 4.2c). Au Sud de la dorsale de l’Adamaoua, dans la zone équatoriale, l’altération chimique est intense et continue probablement depuis l’Eocène (Fritsch, 1978; Beauvais, 1991).

Dans la dorsale guinéenne, les vallées principales portent des témoins abandonnés du Haut glacis et du Moyen Glacis, soulignant l’incision progressive des grands fleuves. Dans ces zones, au niveau des rivières Bafing, Kakrima et Bakoy notamment, le fait que le Moyen glacis soit haut-perché

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sur les interfluves suggère que l’incision a été importante dans la dorsale guinéenne après son abandon. Le Moyen glacis est également développé au niveau du fleuve Comoé, mais il n’est pas incisé (Figure 4.2d et coupe DD’ de la Figure 4.17). A l’approche de la zone sahélienne, au Nord du Burkina Faso (Coupe HH’ de la Figure 4.17), le Moyen-glacis et le Bas-glacis sont plus développés. Vers le Nord, dans la dépression du Hodh (Coupe AA’ de la Figure 4.17), la couverture latéritique est dénudée.

Le Bas glacis est cantonné au domaine sahélien où il représente des zones d’aplanissement très étendues quasiment connectées aux drains. Le Bas glacis est lui-même altéré et légèrement induré. Dans les domaines plus arides, les surfaces d’aplanissement sont fonctionnelles et l’altération est peu marquée. Elles correspondent aux surfaces d’etchplanation définies par Büdel (1982 ; Figure 1.4) et se développent sur terrains sédimentaires ou peuvent même mettre à nu le socle paléo-protérozoïque (Figure 4.17). Une partie des zones sahariennes est recouverte par les sables, mais le socle est mis à nu dans le Hoggar, au Nord du plateau de Jos et dans l’Attakora au Togo.

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3. Discussion : facteurs de répartition des latérites et des formes du relief ouest