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Proust, inventeur d’une poétique de l’intime, « Proust intimiste »

Première partie : Le roman intime

2. Proust, inventeur d’une poétique de l’intime, « Proust intimiste »

Au sein de l’histoire de la poétique de l’intime, Proust occupe une place historique originale par son statut de précurseur et par son opposition à une tradition de l’intime née au XIXe siècle en France. Proust se réfère encore aux concepts du XIXe alors que Pessoa et Woolf sont davantage des modernes du XXe siècle, qui se placent sous l’influence proustienne.

Les années de formation de Proust sont celles de la publication d’ouvrages fondamentaux sur l’intime, que nous avons mentionnés dans l’introduction. Mais l’œuvre proustienne initie un tournant culturel et littéraire dans l’histoire de l’écriture de l’intime, en se situant contre la tradition de l’école intime telle que l’incarne Sainte-Beuve. Ce refus proustien de la conception référentielle de l’intime se manifeste aussi bien dans ses essais critiques, que dans sa mise en pratique dans la Recherche.

A / Du « roman intime » beuvien au roman intime proustien

Proust et l’héritage la première génération intimiste (1830)

C’est contre la génération de 1830 qui revendique le « droit à l’intime », et qui en fait un principe existentiel et esthétique, que va se situer Proust. Il refuse la tradition romantique de l’intime considéré comme une adéquation entre vie réelle et œuvre d’art et dont les critères esthétiques sont la vraisemblance des sentiments et la sincérité. À l’époque où Proust s’empare de la question de l’intime, le discours de la critique littéraire est ambigu. D’un côté, la méthode de Sainte-Beuve véhicule une lecture biographique des œuvres d’art ; de l’autre, émerge un discours critique de plus en plus réticent à la littérature dite personnelle qu’il s’agisse de l’article Brunetière, « La littérature personnelle68

» en 1888 ou celui de Paul Bourget sur « La maladie du journal intime » en 192169. La période allant de 1888 à 1921,

68 BRUNETIERE Ferdinand, « La littérature personnelle », art.cit.

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délimitée par la publication de ces deux articles réticents à l’écriture personnelle, est l’époque même de la formation de Proust et de la rédaction de la Recherche.

L’article de Ferdinand Brunetière est révélateur de ce climat hostile à une certaine production intimiste. Face à la vogue des journaux, des correspondances, et des mémoires, Brunetière écrit un texte polémique contre la « littérature personnelle ». Après s’en être pris à Rousseau, « le plus éloquent des laquais70», il s’attaque à Amiel et à la vogue des journaux dont les représentants sont Les Goncourt et Jules Vallès :

Et de là, dans les genres même qui jadis l’eussent le moins permis, cet étalage du Moi ; de là, dans la critique, cette substitution du goût de l’écrivain à la recherche de la valeur des œuvres ou de la loi des genres ; de là enfin ce caractère personnel ou subjectif qui tend à devenir bientôt celui de toutes les formes de la littérature ; et de là,- pour en revenir à notre point de départ -, cette abondance de Journaux, de

Mémoires et de Confessions71.

Proust se situe paradoxalement dans le sillage de Brunetière alors même que son roman relève d’une poétique de l’intime. Mais cet intime est résolument non autobiographique et non référentiel. Brunetière revendique le style, la composition de l’œuvre, critères que Proust ne cesse de mettre en avant à propos de son œuvre. C’est en ce sens que l’on peut désigner Proust comme l’inventeur d’une poétique de l’intime dont les critères de beauté restent ceux du style, de la composition, de la vision et qui s’oppose à l’intimisme des Romantiques ou au « roman intime72

» de Sainte-Beuve, dont les paramètres d’évaluation sont la sincérité, l’authenticité et l’expression du sensible.

Proust a lu tous les travaux de Sainte-Beuve, qu’il s’approprie et critique au point d’écrire un roman qui explique des idées opposées. L’article de Paul Bourget dans le Figaro du 7 juillet 1907, en forme d’hommage au seul élève de Sainte-Beuve, Charles de Spoelberch, servit de point de départ à la réflexion de Proust. Il écrit alors en réaction contre les célébrations de Sainte-Beuve à l’occasion du centenaire de ce dernier en 1904-1905, notamment Le Livre d’or de Sainte-Beuve qui réunit tous ses partisans, dont Brunetière ou Bourget, ceux-là mêmes qui avaient critiqué la littérature personnelle. C’est donc dans un climat littéraire très particulier que Proust décide d’inventer une nouvelle forme de critique et de littérature qui sera en acte dans la Recherche. La réinvention proustienne de l’intime prend

70 Ibid., p. 213.

71

Ibid., p. 220.

72 Sainte-Beuve est l’inventeur de l’expression de « roman intime » en 1832 dans son article « Du roman intime et de Mlle de Liron », Revue des Deux Mondes, 15 juillet 1832, Paris, n°6, 1832, p. 238-255.

53 une dimension polémique et sociale : il s’agit de s’inventer contre l’académisme littéraire, et par là de se constituer une posture d’auteur. Proust s’attaque alors à une conception de la critique qui impliquait une conception de la littérature. En adoptant une lecture biographique des œuvres et en privilégiant le moi social sur le moi créateur, Sainte-Beuve, on le sait, a méconnu les meilleurs écrivains de son temps comme Nerval, Flaubert ou Stendhal.

Proust s’en prend à Sainte-Beuve pour définir son propre territoire de l’intime et redéfinir les caractéristiques et les enjeux du « roman intime ». Il remet en cause une méthode critique et un type de littérature dont Sainte-Beuve, puis Sand sont les représentants. Proust rejette cette école intime des années 1830 où la littérature y est autoréférentielle, et qui se développe dans les genres des lettres, des journaux, des écrits personnels. Sainte-Beuve est un des premiers à chercher la formule littéraire de cette génération dans ce qu’il appelle le « roman intime », forme hybride oscillant entre fiction et écriture de soi. Dans « Du roman intime et de Mlle de Liron », Sainte-Beuve décrit les critères du ce nouveau roman : peinture des bons sentiments, sincérité et authenticité des faits racontés. Derrière l’éloge emphatique et lyrique de Mademoiselle de Liron, c’est toute une littérature et une éthique du sentiment que défend Sainte-Beuve. Le mode de lecture est moral et psychologique ; aucun commentaire n’est fait sur le style ou la composition de l’œuvre. Sainte-Beuve n’hésite pas à associer « aimable et intime73 », et à donner par là une valeur éthique à l’intériorité :

L’auteur de Mademoiselle de Liron, qui connaît cette littérature aimable et intime beaucoup mieux que nous, vient de l’augmenter d’une histoire touchante qui, bien qu’offerte sous la forme du roman, garde à chaque ligne, les traces de la réalité observée ou sentie.

Vraisemblance, bon sentiment, visée pédagogique, tels sont les critères de qualité retenus par Sainte-Beuve qui tend à réduire les œuvres littéraires à leur contenu moral, à leur prétendue fonction édificatrice, comme le feront la mère et la grand-mère du narrateur dans la Recherche.

En effet, à la lecture de cet essai, on ne peut s’empêcher de penser aux personnages maternels de la Recherche. Proust s’est peut-être servi de la pensée beuvienne pour constituer les personnages de la mère et de la grand-mère, notamment dans leur rapport aux livres : comme Sainte-Beuve, la grand-mère admire l’œuvre de Sand et de Madame de Sévigné, et comme lui, la mère refuse de lire à son fils les passages qu’elle juge immoraux. Ces deux

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personnages beuviens initient le héros à la littérature. Or que fait le narrateur de cet héritage ? Il le pervertit, le contexte narratif et diégétique permettant de subvertir, de souiller la « moralité » et la « sensiblerie » beuvienne. Proust se place délibérément sur le même terrain que Sainte-Beuve pour le contester, le ruiner de l’intérieur. C’est ainsi que le « roman intime » de François le Champi n’est pas intime au sens de la sincérité beuvienne, mais intime au sens proustien en ce qu’il met en place un rapport intime au livre selon un paradigme œdipien. La revendication maternelle d’une littérature morale est mise à mal par l’association récurrente de la pulsion sexuelle et de la pulsion de lecture. La mère a beau sauter les passages licencieux, cette scène n’en reste pas moins fantasmatique pour le héros, qui associe la mère à la femme désirée et le plaisir du livre au plaisir sexuel.

De la même façon, la présence apparemment moralisante de Mme de Sévigné est-elle noircie par la référence au « côté Dostoïevski des Lettres de Mme de Sévigné74 », expression utilisée à deux reprises pour expliciter l’ambivalence des êtres. Employée par le héros lors du voyage qui le conduit à Balbec, cette formule est reprise par Albertine dans la Prisonnière75 qui récite la leçon de littérature donnée par le héros, et qui lui demande des précisions sur cette expression énigmatique. L’association des deux auteurs vise à expliquer à la fois une technique littéraire, qui consiste à présenter les personnages d’un point de vue subjectif, en « nous montrant d’abord l’effet, l’illusion qui nous frappe76 », et à désigner la distance entre le moi apparent et le moi profond, l’action et le côté obscur des êtres. Associée à la figure morale de la grand-mère, l’expression inscrit en creux une identité tue. On a alors un renversement proustien complet de l’axiologie beuvienne : ce que Sainte-Beuve considère comme intime – la confidence, le sentiment pur, l’authentique – est ce que Proust considère comme un masque placé sur l’intime qui est la pulsion, le désir, le « côté Dostoïevski de Mme de Sévigné77 », c’est-à-dire l’inconscient du moi.

Du Contre Sainte-Beuve ou l’invention d’une poétique de l’intime

Dans la Recherche, Proust installe une stratégie de subversion des codes de la littérature intime dans le dialogue qu’il tisse avec les écrits beuviens. Venons-en à l’étude du Contre Sainte-Beuve dont on sait qu’il fut le brouillon de la Recherche.

74 JF, II, p. 14. 75 P, III, p. 880. 76 Ibid. 77 Ibid.

55 Dans les textes du Contre Sainte-Beuve qui nous sont restés, la méthode doublement polémique et créatrice de Proust est révélatrice de la démarche intertextuelle et critique d’un auteur qui se construit contre l’héritage et la tradition intimistes. L’écriture critique est devenue un laboratoire d’expérimentation de nouvelles théories, en même temps qu’elle a contribué à la genèse de la pensée proustienne sur l’intime avec ses conséquences et ses applications romanesques. Si, dans ses manuscrits, Proust déconstruit un modèle de lecture critique, en contestant une forme d’intime, il invente également un intime qui lui est propre. Avant de s’attaquer à l’esthétique intimiste et à sa conception de la littérature, il va d’abord s’agir d’une bataille linguistique : Proust reprend le terme si prisé d’ « intime » pour le charger d’une signification personnelle, l’effort de définition permettant la constitution d’une esthétique de l’intime.

Ainsi en est-il de la préface prévue pour le Contre Sainte-Beuve, qui constitue un des multiples brouillons des épisodes de réminiscence de Du côté de chez Swann et du Temps retrouvé. Dans ce texte, Proust redéfinit la notion de l’intime avant même d’aborder Sainte-Beuve. L’intime chez Marcel Proust apparaît d’abord comme un rapport au passé :

À côté de ce passé, essence intime de nous-même, les vérités de l’intelligence semblent bien peu réelles78.

L’intime est décrit comme l’essentiel par opposition au contingent, comme l’affectif par opposition à la raison. Construisant une opposition structurelle entre l’intime et l’intelligence, Proust détermine, grâce aux déictiques, l’intime sur le mode de l’affectif :

Mais, d’une part les vérités de l’intelligence, si elles sont moins précieuses que ces secrets du sentiment dont je parlais tout à l’heure, ont aussi leur intérêt79.

Une fois instaurés les paramètres de l’intime – temporalité subjective constitutive du sujet, affectivité, essence – Proust va s’opposer à l’intime beuvien qui est du côté de l’intelligence. Critique littéraire et invention artistique vont de pair, la définition d’un type de critique littéraire engageant une pratique de l’écriture et une poétique.

La pensée de Marcel Proust a une structure fondamentalement polémique : Proust construit sa poétique de l’intime avec son sens propre contre la vision biographique et mondaine de Sainte-Beuve. La suite du texte est structurée par un jeu implicite sur le double

78 CSB, p. 215.

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sens d’intime, sens mondain et sens personnel. Cette polysémie engendre une réflexion sur ce qu’est l’intime dans l’œuvre d’art et sur les modalités de la création littéraire :

Ce n’est que l’apparence menteuse de l’image qui donne ici quelque chose de plus extérieur et de plus vague [au métier], quelque chose de plus approfondi et recueilli à l’intimité. En réalité ce qu’on donne au public, c’est ce qu’on a écrit seul, pour soi-même, c’est bien l’œuvre de soi… Ce qu’on donne à l’intimité, c’est-à-dire à la conversation (si raffinée soit-elle, et la plus raffinée est la pire de toutes, car elle fausse la vie spirituelle en se l’associant : les conversations de Flaubert avec sa nièce et l’horloger sont sans danger) et à ces productions destinées à l’intimité, c’est-à-dire rapetissées au goût de quelques personnes et qui ne sont guère que de la conversation écrite, c’est l’œuvre d’un soi bien plus extérieur, non pas du moi profond qu’on ne retrouve qu’en faisant abstraction des autres et du moi qui connait les autres80.

Le jeu sur les différentes significations du terme permet d’instaurer une zone de démarcation, de délimitation entre deux types de rapport à l’écrit, qu’il s’agisse de la lecture ou de l’écriture : rapport mondain, donc superficiel du côté de Sainte-Beuve ; rapport subjectif et personnel, mais non biographique du côté de Marcel Proust. L’opposition de ces deux sens prend une valeur axiologique et esthétique. Proust commence par employer le terme d’« intimités » au sens beuvien, donc mondain du terme. Selon Sainte-Beuve, l’intimité a pour équivalent la conversation, elle renvoie donc au moi social et mondain. Au contraire, l’intimité proustienne relève de la vie créatrice, solitaire, qui se soustrait du regard de l’autre et de la relation. Proust oppose la vie créatrice de l’écrivain à sa vie sociale, le moi profond au moi mondain. Cette intimité créatrice, à laquelle il donne le synonyme de « moi profond », est décrite comme un « monde unique, fermé sans communication avec le dehors qu’est l’âme du poète81 » dans lequel « le moi de l’écrivain ne se montre que dans les livres82 ».

En écrivant contre Sainte-Beuve, Proust aura trouvé son « intime » avec les enjeux épistémologiques et esthétiques qui lui sont propres. S’il rejette totalement la perspective biographique de la réception de la littérature, son œuvre n’en reste pas moins un roman intime. La posture proustienne se trouve d’autant plus ambiguë que le Contre Sainte-Beuve fut un des brouillons de La Recherche.

Ce texte, écrit en marge de la grande œuvre, ne fut jamais publié mais il fonctionne comme l’atelier de la création : dans cette épreuve de tâtonnements, l’effort de définition de l’intime, de ses enjeux, et la manière proustienne de se situer dans une histoire littéraire de

80

CSB, p. 224.

81 CSB, p. 225.

57 l’intime de manière polémique, subversive, sont constitutifs de l’invention de nouveaux codes romanesques. Le lien primitif et consubstantiel entre l’œuvre intime de Proust, la Recherche, et son essai initial du Contre Sainte-Beuve, a été démontré par l’analyse des brouillons et de la correspondance de la Recherche. La genèse de l’œuvre nous révèle l’interaction entre l’essai polémique qui refuse une littérature de type autobiographique et la mise en place d’une pratique d’une poétique de l’intime qui renouvelle les codes tels qu’ils avaient été fixés par les Romantiques et l’école intime.

Proust continue encore en 1909 à désigner son livre par le titre Contre Sainte-Beuve : Je termine un livre qui malgré son titre provisoire, contre Sainte-Beuve, Souvenir

d’une Matinée, est un véritable roman et un roman extrêmement impudique dans certaines parties83.

Placé en amont de la création et de la réflexion, la médiation sur Sainte-Beuve devait aussi conclure l’œuvre proustienne et donc en fixer son sens :

Le nom de Sainte-Beuve ne vient pas par hasard. Le livre finit bien par une longue conversation sur Sainte-Beuve et sur l’esthétique (si vous voulez comme Sylvie finit par une étude sur les Chansons populaires) et quand on aura fini le livre, on verra (je le voudrais) que tout le roman n’est que la mise en œuvre de principes d’art émis dans cette dernière partie, sorte de préface si vous voulez mise à la fin84.

Mais l’essai fut abandonné au profit du roman. On sait que la Recherche a incorporé progressivement l’essai. Proust avait conçu l’essai sur Sainte-Beuve sous la forme d’une conversation avec « maman » qu’il finira par supprimer. Pourtant comme le rappelle Philip Kolb dans son introduction au Carnet de 1908,

(…) si par la suite il a réussi à effacer de son roman la plupart des allusions directes au célèbre critique, son roman n’en a pas moins gardé l’empreinte du but primitif (…) i1 voulait montrer que 1° Sainte-Beuve était un mauvais critique 2° que sa méthode était contestable 3° qu’il écrivait mal (…) Si nous examinons À la

recherche du temps perdu, nous constatons que sur tous ces points il a réussi à

s’exprimer clairement d’une façon ou d’une autre85.

La présence de Sainte Beuve se retrouve explicitement dans certains épisodes de la Recherche, comme celui de la conversation littéraire entre le héros et Albertine de la Prisonnière, dans les propos de Mme de Villeparisis lors de la promenade en voiture avec le héros dans les Jeunes filles en fleurs et dans les conversations littéraires qui émaillent les

83 PROUST Marcel, Correspondance, tome IX, 1909, lettre à Alfred Vallette, p. 155.

84

Ibid., p. 156.

85 Le Carnet de 1908, Cahiers Marcel Proust Nouvelle Série 8, établi et présenté pa Philip Kolb, Paris, Éditions Gallimard, 1976, p. 23.

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salons. Au-delà de ces intrusions ponctuelles, c’est la forme même de la Recherche, qui est une contestation tant de la méthode critique que du « roman intime » désiré par Sainte-Beuve, reposant sur la sincérité, la franchise, le bon sentiment. Si l’intime de Sainte-Beuve relève du mode autobiographique, la Recherche ne cesse de déjouer ce code de sincérité.

L’exemple de la scène avec Mme de Villeparisis est une véritable mise en scène de cette critique de la pensée esthétique de Sainte-Beuve, une démonstration en acte d’un affrontement entre deux poétiques de l’intime et les deux modes de lectures correspondants. Proust se sert de l’espace confiné de la voiture pour déployer l’intime beuvien sous le signe de la conversation, du ragot. Le véhicule apparaît alors comme une réactualisation du tête-à-tête mondain, l’aspect clos et refermé du lieu rejoue les fonctions du cercle et participe de l’échange de secrets. Mais, en face de cet usage beuvien du véhicule, Proust utilise également la voiture pour déployer l’imaginaire du héros, faire défiler ses pensées. La voiture devient le lieu de croisement et de confrontation de deux champs littéraires de l’intime que l’opposition entre la logorrhée de la marquise et le silence du héros vient exemplifier. La scène se dédouble donc entre scène mondaine et scène intérieure, démonstration des idées de