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Protocole de thérapie radiométabolique empirique

Le traitement par thérapie radiométabolique (PRRT) s’administre habituellement sur une base ambulatoire. Le régime de traitement nommé « d’induction » comprend 4 cycles

empiriques dans lesquels le 177Lu-octréotate est administré à intervalles de 6 à 10 semaines.

L’administration du 177Lu-octréotate requiert la suspension des ASST (3-4 semaines pour

les analogues longue action et 24 heures pour ceux à courte action) afin de réduire le plus possible une éventuelle interférence au niveau des RSST. Le jour du traitement, la mise en place de 2 voies périphériques intraveineuses (i.v.) est prévue ainsi que des prélèvements sanguins (formule sanguine, biochimie incluant créatinine, Cg-A) et l’administration de la prémédication antiémétique. Par la suite, la perfusion d’acides aminés pour la néphroprotection (25 g arginine et 25 g lysine dans 1 L de salin 0,9 % à 250 cc/h) sur 4

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heures est débutée 30 minutes après le début de la prémédication. Trente minutes plus tard,

l’administration i.v. de 177Lu-octréotate (environ 6 cc, sur 10 à 20 minutes) est faite

simultanément à l’administration d’acides aminés.

Pour les centres effectuant une étude dosimétrique, une imagerie sériée quantitative est effectuée (tomographie par émission monophotonique plus tomodensitométrie - TEMP/TDM-). À l’Hôpital Hôtel-Dieu de Québec les images sont acquises environ 4, 24 et 72 heures après l’injection du produit radiopharmaceutique. Ces images sont utilisées pour calculer la dose (Gy) de radiation absorbée aux organes critiques (moelle osseuse et reins) et aux tumeurs en utilisant des logiciels spécialisés. Des volumes d’intérêt sphériques (VOI) de 2 cm sont placés sur le parenchyme rénal (à droite et à gauche sur des zones représentatives et uniformes de captation parenchymateuse), au centre des corps vertébraux L4 et L5 (pour la moelle osseuse), et sur jusqu’à 5 lésions tumorales dominantes (sur la zone de captation la plus élevée et pour des lésions de taille > 2 cm) afin d'échantillonner la concentration d'activité à chaque point dans le temps. Pour chaque tissu concerné, une courbe temps-activité est générée, puis intégrée. Un facteur de conversion est appliqué pour convertir l’aire sous la courbe en dose absorbée, dans le tissu donné (Beauregard et al.

2011; Sandstrom et al. 2013).

Efficacité

La réponse thérapeutique est typiquement évaluée trois mois après le quatrième cycle d'induction. La réponse radiologique est évaluée par TDM selon les critères d’évaluation de la réponse dans les tumeurs solides (Response Evaluation Criteria in Solid Tumors, « RECIST »; version 1.1) ou les critères de réponse aux tumeurs solides du Southwest

Oncology Group (SWOG) (Kwekkeboom et al. 2008; Bodei et al. 2011; van Vliet et al.

2013) avec addition de critères de réponse mineure. Ces mesures sont effectuées sur les lésions les plus significatives pour un maximum de deux lésions pour chaque organe et pour un maximum de cinq lésions > 10 mm comme suit :

Les réponses selon les critères RECIST sont : réponse complète (RC) = disparition de toutes les lésions ou lésions < 10 mm; réponse partielle (RP) = diminution d’au moins 30 %

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de la somme des plus grands diamètres des lésions cibles par rapport à la somme des diamètres de l’imagerie de base; réponse mineure (RM) = réduction des dimensions entre 13 % et 30 % (van Vliet et al. 2013); progression de maladie (PM) = augmentation ≥ 20 % de la somme des diamètres des lésions cibles par rapport aux images de base ou apparition d’une ou plusieurs nouvelles lésions; stabilisation de maladie (SM) = ni RP (ou RC ou RM), ni PM.

Les réponses selon les critères SWOG sont : RC = disparition de toutes les lésions; RP = diminution d'au moins 50 % de la somme des produits des deux diamètres des lésions cibles par rapport à la somme des produits des diamètres de l’imagerie de base; RM = réduction des dimensions entre 25 % et 50 % (Kwekeboom et al. 2008); PM = augmentation ≥ 50 % de la somme des produits des diamètres des lésions cibles par rapport à l’imagerie de base ou apparition d’une ou plusieurs nouvelles lésions; SM = ni RP (ou RC ou RM), ni PM.

La réponse fonctionnelle est évaluée visuellement par scintigraphie à l’111In-

octréotide ou TEP au 68Ga-octréotide/octréotate. De plus, la réponse fonctionnelle, dans

notre étude prospective, est évaluée à chaque cycle non initial de 177Lu-octréotate en

comparant les images de TEMP quantitative (quantitative single-photon emission computed

tomography; QSPECT) du jour 3 avec celles du premier cycle. La variation de taille du

fardeau tumoral total positif aux RSST est évaluée visuellement. Étant donné que la charge tumorale est représentée en deux dimensions sur les images planaires et de projections, nous utilisons un ensemble de critères de réponse analogues aux critères SWOG.

La réponse symptomatique et l’amélioration de la qualité de vie (quality of life -

QOL) sont évaluées par des questionnaires QLQ-C30 (questionnaire de base) et QLQ-

GINET21 (questionnaire spécifique pour TNE) de l’Organisation européenne pour la recherche et le traitement du cancer (EORTC) au moment initial et trois mois après le traitement d’induction (Khan et al. 2011). Les résultats du QOL sont transformés dans une échelle de 0 à 100, et les différences d'au moins 10 points dans l’état de santé global des patients et chaque symptôme sont jugés significatifs (Khan et al. 2011).

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d'induction, en utilisant les critères suivants : PM = augmentation de 50 % ou plus de la Cg- A; SM = diminution ou augmentation au moins de 50 % de la Cg-A; RP = diminution d’au moins 50 % de la Cg-A; RC = Cg-A précédemment élevée qui rentre dans un intervalle de normalité.

La survie globale (SG), évaluée jusqu’au décès (pour n'importe quelle raison), et la survie sans progression (SSP), évaluée jusqu’au premier évènement (progression locorégionale ou distante, décès) sont calculées à partir de la date du premier cycle de PRRT.

Toxicité

Les symptômes de même que les effets secondaires aigus et subaigus (jusqu'à 72

heures et 2 mois après chaque administration de 177Lu-octréotate, respectivement) sont

évalués par le médecin nucléiste.

La formule sanguine, ainsi que les paramètres biochimiques du foie et des reins sont obtenus avant et 2, 4 et 6 semaines après chaque cycle de traitement, 3 mois après le traitement d’induction et selon le suivi clinique de routine par la suite.

Les effets secondaires et la toxicité aigus et subaigus sont évalués pour chaque cycle selon le National Cancer Institute’s Common Toxicity Criteria for Adverse Events (CTCAE

version 4.03), tandis que la toxicité chronique est évaluée pour chaque patient.

Problématique

Déterminé par une étude préliminaire sur un petit groupe de patients (n=5), le régime empirique de 4 cycles d’une activité par cycle fixe de 7,4 GBq était basé sur les doses de radiation absorbées moyennes aux organes critiques, et en appliquant les seuils de toxicité reconnus en radiothérapie externe de 23 Gy aux reins et 2 Gy à la moelle osseuse (Kwekkeboom et al. 2001). La toxicité sévère de ce régime est rare (< 1 %), mais l’efficacité de la PRRT demeure limitée, avec une réponse objective chez 46 % des patients (Kwekkeboom et al. 2008).

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La dose de radiation absorbée aux organes critiques suite à l’administration d’une activité fixe de 7,4 GBq varie beaucoup d’un patient à l’autre avec un intervalle allant de 2 Gy et jusqu’à 10 Gy pour les reins (Sandstrom et al. 2013). Par conséquent, pour atteindre le seuil maximal de 23 Gy aux reins, plus de 50 % des patients traités aurait pu recevoir plus de 4 cycles de traitements ; à l’inverse, moins de 20 % des patients auraient pu recevoir un nombre inférieur à 4 cycles de traitements pour atteindre le même seuil (Sandstrom et al. 2013). Les doses délivrées aux organes critiques peuvent limiter l’activité maximale administrable pour chaque patient et par conséquent, la dose de radiation

maximale qui est délivrée aux tumeurs. Pourtant, il serait envisageable d’obtenir une plus

grande efficacité de la PRRT avec une maximisation de la dose à délivrer aux tumeurs, sans augmenter la toxicité aux organes critiques. Cette hypothèse est supportée par des données

préliminaires sur la relation dose-réponse tumorale et dose-toxicité en utilisant le 90Y

(Pauwels et al. 2005; Strigari et al. 2014). Récemment, cette relation a aussi été observée

pour le 177Lu dans le traitement des TNE du pancréas métastatiques (Ilan et al. 2015).

Cependant, contrairement à la radiothérapie externe, où la géométrie des lésions peut permettre la quantification de l’irradiation, la prédiction de la relation dose-réponse en radiothérapie interne est plus délicate, car il est difficile d’estimer la néphrotoxicité et le dommage à la moelle osseuse selon la dose absorbée. D’autres problèmes liés à la dosimétrie en radiothérapie interne résultent de l’absence d’une distribution uniforme de la radioactivité, ou encore d’une captation de la tumeur très variables (Cremonesi et al. 2011). Le débit de dose entre la radiothérapie externe et la PRRT est différent : pour la PRRT, la dose est délivrée à bas débit sur plusieurs mois ; dans la radiothérapie externe, elle est délivrée à haut débit et sur quelques semaines. Cette différence indique que des plus hauts débits de doses pourraient être tolérables avec la PRRT, en particulier pour le rein qui est l’organe critique limitant dans la plupart des cas. Une étude récente a effectivement montré une absence de toxicité significative avec des doses biologiques effectives jusqu’à 40 Gy chez des patients sans facteur de risque, et 28 Gy chez des patients avec un diabète, une hypertension artérielle ou une insuffisance rénale (Bodei et al. 2008).

La PRRT basée sur une activité administrée fixe n’a probablement pas une efficacité optimale. Une personnalisation de la PRRT avec un ajustement de l’activité administrée par

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cycle, calculée selon la tolérance de chaque patient, pourrait permettre de maximiser l’efficacité de la PRRT en maintenant une faible toxicité.

Finalement, la dosimétrie demeure une étape importante de la PRRT, surtout pour les régimes personnalisés. Toutefois, la dosimétrie est souvent perçue comme une procédure complexe et consommatrice de ressources par la communauté médicale. Elle est souvent également associée à l’imprécision de la mesure qui la rend caduque pour une utilisation clinique par la communauté de physique médicale, constituant ainsi des obstacles à une adoption clinique étendue. Actuellement, les lignes directrices courantes pour les procédés de dosimétrie indiquent qu’au moins trois mesures doivent être prises par phase d’élimination après chaque traitement (Lassmann et al. 2011). Certaines études ont mentionné des mesures effectuées jusqu’à 7 jours après le traitement par PRRT (Sandstrom et al. 2015), ce qui peut être incommodant pour le patient. De plus, la dosimétrie peut augmenter le fardeau clinique, et ainsi limiter son adoption clinique à grande échelle. Inversement, certains auteurs ont proposé des protocoles de dosimétrie simplifiés (Miederer et al. 2012; Heikkonen et al. 2016; Hanscheid et al. 2018), qui seraient envisageables pour la personnalisation de la PRRT.

Objectifs

L’objectif de la première étude (Chapitre 2) était de concevoir un protocole de PRRT personnalisée afin d’évaluer son potentiel pour augmenter de façon sécuritaire la dose absorbée au niveau des tumeurs et ce, à travers une étude de simulation basée sur les données de dosimétrie réelles de patients traités par PRRT à activité empirique à l’Hôpital de l’Hôtel-Dieu de Québec entre novembre 2012 et avril 2016. Les objectifs secondaires étaient de rapporter l’efficacité et la sécurité de la PRRT dans ce groupe de patients atteints de TNE, ainsi que les relations dose-effet (Article #1).

Les objectifs principaux de la deuxième étude (Chapitre 3) étaient de rapporter les données préliminaires de dosimétrie, sécurité et efficacité de notre approche de PRRT personnalisée dans une cohorte de patients atteints de TNE métastatique traités depuis avril 2016 selon le protocole personnalisé précédemment développé (Article #2).

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Enfin, dans le but de simplifier le processus de dosimétrie et de réduire le fardeau clinique de celui-ci, l’objectif principal de la troisième analyse (Chapitre 4) était l’étude de l’impact de la réduction du nombre de séances de QSPECT sur l'exactitude et la reproductibilité interobservateurs des estimations de dose obtenues. Le deuxième objectif était la mise à jour de notre protocole de PRRT personnalisée (Article #3).

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Chapitre 1 : Personalized

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Lu-octreotate peptide

receptor

radionuclide

therapy

of

neuroendocrine