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Partie I : Méthodologie globale

2.2. Les propriétés de la zone de faille

Nous avons vu que la définition de la zone de faille est multi-échelle et comprend des structures de taille plurikilométrique à micrométrique. Pour décrire la porosité et la perméabilité dans ces zones de failles, il est donc nécessaire d’étudier l’ensemble des objets qui contrôlent les circulations fluides des structures kilométriques jusqu’à la porosité microscopique. De ce fait, les études menées sur les cœurs de failles et les zones endommagées s’attachant à décrire ces propriétés sont le plus souvent des études statistiques et multi-échelle. Dans cette partie, sont ainsi décrits l’évolution des propriétés de la zone endommagée et des cœurs de failles qui ont une influence sur les transferts dans les réservoirs.

2.2.1. Les propriétés du cœur de faille

Nous avons vu que le cœur de faille était défini comme le volume qui localise déplacement le plus important et le maximum de déformation. Or, il peut être exprimé de différentes manières et peut agir en tant que barrière et/ou en tant que conduit pour la circulation des fluides (Caine et al., 1996). Dans le cas le plus simple, il s’exprime sous la forme d’un unique plan sur lequel s’effectue le mouvement (Caine et al., 1991). Cependant, il peut également être composé d’une gouge plus ou moins riche en argiles et non consolidée, avec du matériel encaissant broyé ayant subit une forte altération chimique (Sibson, 1977 ; Anderson et al., 1983). A l’inverse de ce type de cœur de faille plutôt peu induré, des zones de cataclases très indurées peuvent également se former (Chester et Logan, 1986, Takagi et al., 2012). Dans ces matériaux, la réduction de taille des grains et les précipitations secondaires diminuent la perméabilité par rapport au protolithe (Antonellini et Aydin, 1994 ; Goddard et Evans, 1995).

En l’absence d’argiles, le matériel bréchifié tend à former des clastes dont la distribution de tailles suit une loi de distribution caractéristique et diminue la perméabilité matricielle de 2 à 3 ordres de grandeurs par rapport à celle du protolithe (Sammis et al.,

1987 ; Marone et Scholz, 1989 ; Main et al., 2000 ; Crawford et al., 2008 ; Balsamo et Storti, 2010 ; Dyer et al., 2012). Quand elles sont présentes, les argiles jouent un rôle

déterminant sur la perméabilité du cœur, en particulier lorsque leur proportion dépasse 25 à 40 % du volume rocheux (Yielding et al., 1997 ; Takahashi et al., 2007 ; Crawford et

al., 2008). Faulkner et Rutter (2001) ont, par exemple, montré qu’en présence d’argiles, le

cœur de faille forme une barrière quand elles sont réparties sur l’ensemble du plan de faille. Outre la réduction de perméabilité, la présence d’argiles induit également une augmentation de l’anisotropie de la perméabilité selon la direction du plan de faille qui peut aller jusqu’à 3 ordres de grandeurs (Faulkner et Rutter, 2000).

L’accumulation de ces argiles dans les cœurs de failles peut être soit liée aux transformations minéralogiques liées aux circulations de fluides dans les failles, soit liée aux transports et dépôts de ces argiles depuis les niveaux argileux de la roche encaissante (smearing) (van der Zee et Urai, 2005 ; Yielding et al., 1997). Dans les roches sédimentaires silicoclastiques, les niveaux argileux tendent ainsi à favoriser les cœurs de failles peu perméables, alors que la présence de sables peut soit diminuer la perméabilité du cœur quand il est cataclasé, soit l’augmenter dans les plans de la faille quand la brèche

les roches cristallines le contraste entre la zone endommagée souvent très fortement fracturée et les cœurs de failles argilisées amène au constat que l’anisotropie au sein du cœur de faille à souvent une importance moindre par rapport au contraste de perméabilité entre le cœur et la zone endommagée (Chester et Logan, 1986 ; Forster et Evans, 1991 ;

Caine et al., 1996) (Figure 2.8c). Dans les roches volcaniques, les lithologies du

protolithe peuvent être extrêmement variables, des cœurs de failles peuvent avoir un comportement proche de celui des roches sédimentaires comme pour les tuffs très peu indurés ou au contraire avec un comportement proche des roches cristallines pour les roches compacts de type basaltes ou gabbros (Wilson et al., 2003 ; Gray et al., 2005 ;

Riley et al., 2010 ; Walker et al., 2013). Dans les carbonates, les dissolutions liées aux

circulations fluides génèrent plus facilement des cavités perméables dans le cœur de faille lorsqu’il n’est pas colmaté par les argiles secondaires (Ferrill et Morris, 2003 ; Agosta et

al., 2007; Agosta, 2008) (Figure 2.8d).

Figure 2.8 : schémas des caractéristiques des cœurs de failles dans les différents types de lithologies (Bense et al, 2013).

2.2.1. Les propriétés de la zone endommagée

La zone endommagée joue un rôle majeur dans la circulation des fluides dans les zones de failles. Ainsi, son épaisseur et la densité de la fracturation dans cette zone sont des paramètres majeurs qui contrôlent ces circulations. De nombreuses études se sont focalisées sur le lien entre les différentes caractéristiques des zones de failles (déplacement, longueur, épaisseur,…) afin de déterminer ces caractéristiques à partir d’une seule, comme le déplacement estimé sur une coupe sismique par exemple. Ainsi, il a été montré que l’épaisseur de la zone endommagée peut être reliée au déplacement maximal sur le plan de faille selon une loi de puissance dans la majorité des cas étudiés (Childs et al., 2009 ; Faulkner et al., 2011) (Figure 2.9a).

Le déplacement maximum sur un plan de faille est lui-même relié à la longueur des failles par une loi de puissance (Clark et Cox, 1996 ; Kim et Sanderson, 2005 ;

Schultz et al., 2008) (Figure 2.9b). Dans le cas général, on peut ainsi considérer une

relation entre la longueur L des failles, le déplacement maximal Dmax et l’épaisseur de la zone de faille E selon l’équation 2.3. L’exposant de la loi varie en fonction du déplacement sur la faille : les failles décrochantes développent une zone endommagée proportionnellement plus importante, le mouvement étant parallèle à la longueur de la faille contrairement aux failles normales et inverses (Kim et Sanderson, 2005). La dispersion autour de la loi générale est également dépendante du type de faille : les failles inverses ont globalement une épaisseur de zone endommagée plus constante que les failles normales et décrochantes où les données sont plus étalées (Figure 2.9c) (Bense et

al., 2013). Des ruptures de pentes sont également observées dans les relations

longueur/déplacement en fonction des mouvements et des lithologies traversées (Kolyukhin et Torabi, 2012). Ce changement est lié à la maturation de la zone de faille, avec un premier stade de nucléation de la zone endommagée puis une phase d’élargissement qui change le rapport Dmax/L (Dawer et Anders, 1995 ; Kim et sanderson,

2005). Il est également suggéré que ce changement est la conséquence de nucléations de

failles secondaires dans la zone endommagée (Zygouri et al., 2008 ; Savage et Brodsky,

2011). Il a aussi été montré que le branchement et/ou la séparation de différents segments

de failles a une influence sur ce rapport (Soliva et al., 2008). Enfin, l’effet des changements de rhéologie dans une séquence sédimentaire peut limiter le développement des failles en hauteur et ainsi favoriser l’extension horizontale augmentant ainsi la

longueur de la faille par rapport au déplacement (Soliva et al., 2005 ; Soliva et Benedicto,

2005).

Figure 2.9 : a) compilation des épaisseurs en fonction du déplacement de 318 zones de failles (Childs et al., 2009), b) Compilation du déplacement en fonction de la longueur

des zones de failles normales Kim et Sanderson, 2005), c) Analyse du rapport épaisseur/déplacement des données de Childs et al. (2009) d’après Bense et al. (2013).

𝐸 = 𝐷𝑚𝑎𝑥= 𝐿−1 à−3