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Partie I : Méthodologie globale

Chapitre 1 : La géothermie haute température

1.4. Les réservoirs de socle

1.4.2. Caractérisation des réservoirs fracturés

Pour identifier les zones de circulation des fluides dans ces réservoirs, il est nécessaire de caractériser les propriétés des différents éléments du réseau poreux : les zones de failles et de fractures ainsi que la porosité de la matrice. Cette dernière est soit acquise lors de l’altération soit liée au fonctionnement de la zone de faille et des circulations hydrothermales associées, soit au toit du socle suite à un épisode d’altération supergène précédant son enfouissement. Les structures qui contrôlent les propriétés réservoir comprennent ainsi des objets dont la taille varie sur plus de 10 ordres de grandeurs : depuis les grandes failles régionales (de l’ordre de la centaine de km) qui contrôlent les déformations tectoniques majeures et peuvent former les reliefs, jusqu’aux petites fissures à l’échelle du grain qui sont les principales zones d’interactions entre les roches et les fluides, en passant par les failles et fractures qui jouent le rôle de drains hydrauliques à différentes échelles du kilomètre au décamètre structurant le bassin, les blocs basculés, le réservoir.

De ce fait, pour comprendre l’ensemble du système, localiser les zones d’écoulements et prédire au mieux le comportement des réservoirs situés dans les formations visées, il apparaît nécessaire d’étudier les objets structuraux de taille comprise entre le kilomètre et l’inframicrométrique. Pour décrire ces réservoirs profonds, les outils d’investigation comprennent les techniques de prospection mise en œuvre à partir de la surface (sismique, gravimétrie, magnétotellurie, aéromagnétisme,…) qui ne caractérisent que les objets de grandes tailles, supérieures au kilomètre, et les données de puits qui à l’inverse peuvent décrire les objets avec des tailles d’objet compris entre le mètre et le millimètre (Figure 1.13). De plus, les outils géophysiques de sub-surface et de diagraphies étant dimensionnés pour les réservoirs conventionnels, généralement sédimentaires, ils nécessitent une adaptation des outils et un travail d’étalonnage, et des données de références pour pouvoir être appliquées à l’exploration des réservoirs dans les roches de socle.

Figure 1.13 : comparaison entre résolution et profondeur d’investigation entre les techniques d’analyses de subsurface (basin scale), de données de puits (well scale) et de

l’échelle réservoir (Al-Ali, 2009).

Ainsi, les données obtenues par l’investigation sismique permettent de localiser les grands accidents et de définir la structure macroscopique de ces réservoirs.

roches non litées tels que les granites, excepté aux sommets des plutons où c’est l’interface entre le socle et la couverture qui est le réflecteur principal (Dezayes et al.,

2011 ; Khair et al 2015 ; Carpentier et al., 2016). De plus, l’épaisseur de la zone

endommagée, souvent porteuse des zones de forte perméabilité (section 2.2), et les réseaux de failles et de fractures de dimension inférieure à la centaine de mètre ne sont pas détectables avec cet outil (Mäkel, 2007 ; Alai et al., 2014). Les mesures gravimétriques et aéromagnétiques permettent également de décrire le réservoir à l’échelle plurikilométrique. Ces outils utilisent les propriétés physiques des roches (susceptibilité magnétique, densité) pour caractériser les changements de lithologie et les traits structuraux principaux. Elles sont cependant dépendantes de la connaissance de ces propriétés pour les lithologies étudiées et ne permettent pas non plus d’identifier les propriétés des réservoirs (Edel et al., 2007 ; Bouiflane, 2008 ; Bailleux, 2012). A l’inverse, les méthodes magnétotelluriques et de résistivités électriques utilisent les variations de résistivité des roches afin d’identifier les circulations fluides profondes, mais nécessitent une bonne connaissance structurale préalable pour leurs interprétations (Coppo et al., 2016 ; Bujakowski et al., 2010).

Lorsque des données de puits sont disponibles, d’autres types de caractérisation géophysique sont possibles afin de localiser les chemins de circulation au sein du réservoir. Ainsi, le potentiel spontané et les mesures de résistivité, c’est-à-dire l’étude du courant électrique généré par la circulation du fluide permettent d’avoir une idée de la géométrie des écoulements dans le réservoir depuis la surface (Darnet, 2003 ; Place,

2010). La microsismicité générée lors des phases de stimulations renseigne également sur

l’organisation des zones de failles qui sont mobilisées par les écoulements. A Soultz-sous-Forêts par exemple, le nuage sismique lors de la stimulation de GPK2 a créé un nuage microsismique étendu sur 1,5 km autour du puits, la localisation des microséismes les plus importants a permis d’identifier différentes failles mineures dans lesquelles circulent les fluides (Figure 1.14a). Cependant, seule une partie du réseau de circulation est détectée, puisque les failles dont la perméabilité est très importante ne génèrent pas de microséismes lors des stimulations (Evans et al., 2005 ; Majer et al., 2007 ; Cuenot,

Figure 1.14 : localisation des évènements microsismiques les plus importants lors de la stimulation hydraulique de GPK2 avec identification des plans de failles (Dorbath et al., 2009), b) Identification des plans de fractures de taille hectométrique d’après les données

de VSP (Sausse et al., 2010).

La sismique de puits (VSP), où la propagation d’ondes émises de la surface vers des capteurs à différentes profondeurs dans le puits pour imager les structures aux environs proches du puits, permet également d’identifier certaines fractures de tailles hectométriques (Place et al., 2007 ; Place, 2010 ; Sausse et al., 2010) (Figure 1.14b). Enfin, les données diagraphiques permettent de caractériser les variations lithologiques, la répartition des fractures, les propriétés de stockage et la perméabilité de la matrice. Ces informations sont cependant limitées à la paroi du puits ou aux premiers mètres de massif rocheux encaissant (Genter et Traineau, 1996 ; Genter et al., 1997 ; Luthi et al., 2005 ;

Sausse et al., 2006 ; Ledésert et al., 2009).

Ainsi, si les prospections géophysiques faites en amont des forages permettent de détecter la présence de failles, leur potentiel drainant ne peut être appréhendé qu’avec une

connaissance approfondie du réseau de fractures et du développement de la porosité associée. Ces propriétés n’étant observables qu’après le forage des puits, il est nécessaire de recourir aux analogues de terrain à l’affleurement pour obtenir un premier jeu de valeurs permettant de modéliser le réservoir. Ces données d’analogues sont également très utiles pour interpréter les données de géophysique de subsurface. En effet, dans les contextes extensifs type rift ou fossé d’effondrement, les analogues des formations ciblées par la géothermie affleurent très souvent sur les épaules, ce qui permet la caractérisation des réseaux de failles, de fractures, et des propriétés pétrophysiques à l’échelle d’un réservoir dans ces formations (Figure 1.13). Sur les analogues, la démarche proposée est multi-échelle et multi-disciplinaire, afin de couvrir l’ensemble des échelles d’investigation depuis les objets caractérisés par la géophysique de subsurface jusqu’à l’échelle du puits. Ainsi, l’étude de terrain est basée sur une analyse des zones de failles à l’affleurement, comprenant l’étude de leur organisation à l’échelle plurikilométrique, l’analyse des réseaux de fractures associés aux failles, jusqu’aux propriétés réservoirs et la caractérisation des propriétés de la matrice. Cette étude, permet ainsi de construire un modèle de réservoir composé principalement de zones de failles qui sont les cibles des projets géothermiques dans le fossé Rhénan et la fosse de Valence.

Dans le chapitre suivant, nous allons faire un état des connaissances sur les zones de failles et les zones d’altération au toit du socle. Nous allons ainsi mettre l’accent sur la définition des zones de failles, des fractures, de la porosité et de la perméabilité utilisées dans cette étude. Nous détaillerons ensuite les propriétés des différentes structures de la zone de faille ainsi que la composition des zones d’altération supergène. L’ensemble nous permettra de proposer une méthodologie globale utilisable dans l’étude des analogues de terrain des réservoirs fracturés et les méthodes de caractérisation.

Chapitre 2 : Les zones de failles et d’altération