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Proposition d’une typologie du bâti propre à El Jadida

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 160-167)

Partie II. La mesure du risque : Approche multi-scalaire

Chapitre 6 e : Les indices de risque humain à El Jadida

6.3. Evaluation de la vulnérabilité humaine sur la ville d’El Jadida

6.3.4. Proposition d’une typologie du bâti propre à El Jadida

Cette typologie est basée sur l’identification de critères pouvant influencer la résistance d’un bâtiment face à une submersion par onde de tsunami. La confrontation de différentes typologies citées en haut nous a permis d’identifier les critères les plus pertinents pour une évaluation a priori de la vulnérabilité d’un parc immobilier. Les critères intrinsèques aux bâtiments appartiennent les facteurs structuraux et architecturaux de l’édifice. Ont été sélectionnés en fonction de leur facilité d’identification sur le terrain. Ainsi nous avons tenu compte des éléments suivants :

- le type de matériaux utilisé pour la maçonnerie : à travers leur capacité de résistance, conditionne directement le degré de vulnérabilité de la structure. Un mur en briques, par exemple, est moins résistant qu’un mur en parpaings face aux pressions hydrodynamiques ;

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- le nombre d’étage influence la charge verticale du bâtiment. Ainsi plus le nombre d’étages est élevé, plus les murs sont résistants et donc moins vulnérables aux pressions latérales. De plus, les gros édifices sont solidement renforcés ;

- une estimation de la taille des structures porteuses (poteaux <20 cm ou pas) Suite à l’expertise systématique de l’endommagement du bâti en Indonésie par Leone et al (2006), ils ont constaté que tous poteaux en béton armé inférieur ou égal à 20 cm de diamètre ont été sectionnés pour une hauteur d’eau comprise entre 3 et 6 m ;

- une distinction entre structure calculée et auto-construction : Beaucoup de constructions privées sont réalisées sans prendre en compte de simples règles de l’art, aucun bureau d’étude, ni architecte n’a participé à la construction. La main d’œuvre, pas toujours professionnelle, est facilement soumise aux méthodes de constructions traditionnelles. Les dispositions constructives ne sont pas respectées. De plus, les matériaux de construction ne sont pas souvent de bonne qualité. Au regard de cette brève description, le critère selon lequel un bâtiment est auto-construit ou calculé permet en soi d’établir son degré de solidité.

Un autre point très important de notre typologie relève de la propriété architecturale du bâtiment. On distingue les bâtiments qui sont isolés de ceux qui sont accolés ou en bloc. Un bâtiment isolé est beaucoup plus vulnérable car il va subir une pression hydrodynamique et hydrostatique de toutes parts. De plus, les formes irrégulières ou asymétriques favorisent les contraintes locales dans les angles et l’instabilité du bâtiment (Gauraz, 2008).

Evaluation du risquetsunamiquesur le littoral atlantique mar 161

Tableau 8. Typologie structurelle du bâti à El Jadida(Leone et al., 2012)

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Cette typologie permet de classer l’ensemble du bâti de la ville d’El Jadida, en 5 classes structurelles en fonction d’une vulnérabilité décroissante (Tableau 8). Elle repose donc sur l’intégration de critères relativement simples à identifier sur le terrain, accessibles par un non spécialiste en ingénierie de structures, facilement et rapidement identifiables sur le terrain.

Les critères de vulnérabilité retenus doivent permettre de transposer cette typologie à d’autres villes du Maroc ou du Maghreb.

Classe A regroupe les constructions les moins résistantes. Il s’agit de constructions isolées, très légères en pierres sèches ou en pisé, parfois en bois et tôles (Baize et al., 2004). Ces constructions de plain-pied ont une hauteur faible généralement inférieure à 5 m. Cette catégorie représente 4 % de l’habitat de notre zone d’étude. Ce pourcentage ne reflète pas la réalité de l’ensemble de la ville d’El Jadida. En périphérie de la ville, cela correspond généralement à de l’habitat rural ou informel, non réglementaire (Figure 76 a). Ces habitations insalubres abritent une population pauvre qui vit dans une très grande précarité.

Dans ce cas précis, ces zones d’habitations non réglementaires se sont développées officieusement sur des espaces communaux non viabilisés pour l’extension urbaine (Meunier, 2008). En centre-ville, il s’agit le plus souvent de kiosques ou de téléboutiques construits en verre et en tôle. Ce sont des espaces très vulnérables qui peuvent accueillir plusieurs personnes en même temps. La capacité de résistance du bâti est quasiment nulle. De plus la capacité de fuir verticalement est impossible. Au regard de cette description, les individus localisés dans ce type d’habitat seront les plus vulnérables en cas de tsunami (Figure 76b) (Leone et al., 2012).

a b

Figure 76. a. Habitat informel en périphérie de la ville, b. Téléboutique en centre-ville (Lagahé & Péroche, 2010).

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Classe B correspond à des constructions maçonnées généralement en briques, de structure légère et comportant des poteaux de 20 x 20 cm renforcés par des fers à bêton. Les matériaux et les méthodes de construction de cette catégorie sont les mêmes que pour la catégorie D. Ce type d’habitat est caractérisé par une construction isolée. Il est donc très vulnérable aux pressions hydrauliques exercées lors d’une inondation par tsunami. Ce type de construction, très dispersé sur notre zone d’étude, représente seulement 4 % des bâtiments diagnostiqués. Il peut s’agir d’habitations marocaines traditionnelles auto-construites à 1 étage, de cafés-terrasse ou encore de locaux industriels. Cette classe de bâti, bien que plus rigide que la classe A, est tout aussi vulnérable. Seule la présence d’un étage permettrait de sauver des vies, si les hauteurs d’inondation restaient assez faibles pour épargner la structure porteuse du bâtiment (Figure 77) (Leone et al., 2012).

a . . b

Figure 77. a. Construction individuelle, b. Bâtiment isolé sur le port (Lagahé & Péroche, 2010).

Classe C correspond à une habitation individuelle, isolée du type villa (Figure 78). La construction présente une géométrie en plan plus complexe avec toujours un étage. La structure est renforcée. Il peut s’agir de constructions modernes de haut standing comme d’anciennes villas coloniales. Elles sont toujours en retrait de plusieurs mètres par rapport aux rues, avec sur leurs pourtours, une petite cours délimitée par un mur. Cette classe de bâti représente 15 % du parc immobilier de notre zone d’étude. Elle est principalement constituée, en ville, par des anciennes villas de l’époque coloniale. Dans la partie Est de notre zone d’étude elle est représentée par de nouveaux quartiers résidentiels en construction, dont les parcelles sont d’une surface minimum de 250 m². Ce type d’habitat abrite une catégorie de population aisée. Cette classe du bâti est la moins vulnérable des constructions isolées. La rigidité des structures ainsi que la bonne qualité des matériaux utilisés en sont les principales raisons (Leone et al., 2012).

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Figure 78. Villa moderne (Lagahé & Péroche, 2010).

Classe Dest la classe de bâti la plus représentée dans le secteur d’étude. Il s’agit de bâtiments auto-construits, en bloc, sans structure en béton armé. Principalement à usage d’habitation, ils peuvent également abriter des commerces ou des garages au rez-de-chaussée. La structure est en général moyennement renforcée par rapport à la taille de ces bâtiments. Ils sont construits sur un à deux étages, avec un dernier niveau ceinturé par de hauts murs formant une terrasse (Baize et al., 2004). Leurs façades donnent directement sur la voirie. Cette classe représente 59 % du parc immobilier de notre zone d’étude. L’habitat économique traditionnel ancien constitue la médina. Ce tissu ancien très dense est situé en centre-ville. Il se caractérise par des habitations qui s’imbriquent les unes aux autres, de manière plus ou moins anarchique le long de petites ruelles très étroites et sinueuses. Ce type d’habitat abrite une population traditionnelle peu aisée. L’habitat économique traditionnel moderne constitue les « quartiers populaires » de la ville. Il s’agit de constructions qui datent de la fin de l’époque coloniale.

Elles se sont développées aux marges de la médina selon un plan orthogonal, avec des voies de communication larges. Ces quartiers sont situés dans la partie Nord de la ville et au Sud de la médina (Figure 79).

Bien que très différents dans la forme des structures et des matériaux utilisés, ces deux types d’habitat présentent des capacités de résistance potentielle proches, du fait de leur organisation en bloc. De plus la présence d’un étage au minimum, ainsi que l’accès à la terrasse permettraient aux occupants de se réfugier en cas de tsunami. Cette classe regroupe également les bâtiments à usage public (administration et enseignement) ou privé (services, entrepôts, petites industries). Ils sont le plus souvent de petite taille, assez anciens et parfois en mauvais état apparent. Il s’agit en général de petits immeubles de un à deux étages avec une structure renforcée. Certaines mosquées anciennes peuvent être classées dans cette

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catégorie. Ces espaces sont caractérisés par une forte concentration d’enjeux humains dans la journée.

Figure 79. Habitat traditionnel marocain moderne (Lagahé & Péroche, 2010).

Classe Ecaractérise des bâtiments collectifs de très bonne conception avec des structures en béton armé renforcées et calculées (Figure 80). Il s’agit le plus souvent d’immeubles d’habitat collectif avec des commerces en rez-de-chaussée. Cette classe regroupe également de gros bâtiments administratifs, religieux (mosquées récentes) ou privés (hôtels, banques). Elle comprend également d’anciens bâtiments coloniaux très imposants. Cette classe de bâti est très représentée en centre-ville, le long des grandes avenues. Elle représente 18 % du parc immobilier de notre zone d’étude. Ces bâtiments sont construits sur des terrains vagues et remplacent petit à petit les vestiges abandonnés du passé colonial de la ville (anciennes villas ou entrepôts). L’architecture massive de ce type de construction, ainsi que la présence d’un grand nombre d’étages, rendent la population beaucoup moins vulnérable face à tsunami potentiel.

a …….. b

Figure 80. a. Bâtiment administratif, b. Habitat collectif avec petits commerces en rez-de-chaussée (Lagahé & Péroche, 2010).

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