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Ce premier article mobilise les résultats d’une analyse secondaire de données statistiques nationale sur le devenir professionnel d’étudiants dont une partie d’entre eux vivaient avec des limitations de capacités ; dans le but de montrer les limites inhérentes à cet exercice. En effet, nous cherchons moins à présenter les principaux résultats de cette exploitation qu’à détailler la façon dont celle-ci s’avère coûteuse. D’une part, la délimitation du contour des échantillons s’avère frustrante. Rien ne nous assure que la population étudiée est véritablement composée d’individus ayant pu vivre des situations de handicap durant leurs études ou de jeunes ayant obtenu, à ce titre, des aménagements. D’autre part, les échantillons retenus sont quantitativement faibles. Cependant, les résultats permettent tout de même de créer un premier niveau de connaissance. Cette opération semblait nécessaire dans le cadre d’un recherche exploratoire et face à l’absence de données récentes sur le devenir de cette population lors de sa sortie de l’enseignement supérieur.

La construction de l’article révèle son principal propos. Il commence par la description du parcours de formation et de transition vers l’emploi de trois anciens « étudiants handicapés » présents dans notre corpus d’entretiens ; ceci afin d’illustrer la variété des situations vécues. S’ensuit une présentation des enquêtes mobilisables et des sous-populations qu’elles permettent de définir. Les résultats de l’exploitation secondaire de l’enquête Génération 2004 (Céreq, 2007, 2009) sont alors exposés. Enfin, il s’achève par plusieurs préconisations méthodologiques émises dans l’espoir de saisir autrement, via des enquêtes statistiques (ad hoc ou plus générales) à venir, le devenir

de cette population. Deux intentions sont exprimées : appréhender quantitativement davantage de parcours (c’est-à-dire travailler sur des échantillons dépassant la centaine d’individus) et discerner plus finement les populations délimitées. L’objectif est ainsi de pouvoir offrir la possibilité de questionner l’hétérogénéité de cette population. En effet, ce caractère était absent des premiers résultats produits à partir des données statistiques disponibles au moment de la publication de l’article ; et pour autant évident à la lecture des parcours recueillis par entretiens. Cela peut apparaître ordinaire à l’investigation sociologique et être moteur des divisions classiques entre méthodes quantitatives et qualitatives. Cependant, nous postulons que certaines dimensions individuelles relatives à l’expérience du handicap pourraient être questionnées dans des enquêtes statistiques. Ceci nous permettrait de dépasser la seule analyse de l’accès à l’emploi de cette population pour tendre, toujours avec des méthodes quantitatives, vers l’analyse du poids des dimensions individuelles liées au handicap dans les parcours de vie des jeunes. À la suite de cet article, nous invitons le lecteur à consulter les annexes 4, 5 et 6 pour prendre connaissance des réalisations menées sur ce sujet.

Une partie du travail présenté dans le cadre de cet article a été élaborée de façon concomitante à la rédaction d’un rapport de recherche (Segon et Le Roux, 2013a). Il a par ailleurs été nourri par des remarques issues d’une communication scientifique présentée en 201291. L’article a été soumis dans une première version en novembre 2013, accepté sous réserves de modifications majeures à partir de trois expertises92

en février 2014 puis publié en juillet 2014. Nous sommes premier auteur et avons mené l’état des lieux des enquêtes mobilisables, l’exploitation secondaire de l’enquête retenue et l’analyse critique des perspectives potentielles. Les contributions des autres auteurs, cités dans l’ordre, sont relatives à l’encadrement du travail (Nathalie Le Roux) ; aux temps d’échanges visant à nous familiariser avec la démarche retenue – l’exploitation secondaire de grandes enquêtes nationales (Maks Banens) – ; et à l’aide technique apportée au sujet d’un outil utilisé (Champely et al., 2012), le logiciel PointG (Stéphane Champely).

91 « Les parcours d’insertion des anciens étudiants handicapés : état des lieux statistique et perspectives

de recherche », communication lors du colloque interdisciplinaire « Trajectoires, emploi et politiques

publiques » organisé par l’Université de Caen Basse-Normandie, le laboratoire CREM, la MRSH-UCBN et la Fédération de recherche TEPP les 14 et 15 juin 2012.

92 Le principal axe de modification était relatif à l’équilibre entre la partie de présentation des résultats et la partie d’analyse critique des données disponibles.

Article

Après des études secondaires excellentes, Annette93 se lance, sur l’encouragement de ses parents, dans des études de médecine. Au bout de quelques semaines, se sentant acculée, elle « pète les plombs » et arrête brutalement ses études. Elle reprend sa première année avec succès l’année suivante dans une nouvelle ville. Elle délaisse ensuite progressivement cette formation lorsqu’une une nouvelle « crise » se déclare en quatrième année. Un diagnostic est alors posé : Annette est « maniaco-dépressive ». À 22 ans, elle débute un traitement dont les effets secondaires entraînent un fort ralentissement de son attention et une grande fatigabilité. Elle s’endort fréquemment en cours ou pendant ses stages. Au cours de ce cursus, elle n’a quasiment pas bénéficié d’aménagements spécifiques, à l’exception de quelques dispenses de stages. Elle vit très mal ce trouble psychique, n’en parle à personne et redoute le regard des autres. Suite à un nouvel épisode maniaque, Annette est hospitalisée. Ses parents relâchent alors « la pression ». Elle se sent libérée, abandonne ses études. Elle a suivi 12 années d’études (dont 6 redoublements) mais n’a obtenu aucun diplôme. Pour rompre l’isolement, elle fréquente depuis peu un Groupe d’Entraide Mutuelle (GEM) et débute l’apprentissage de la maladie. Elle tente de construire un nouveau projet professionnel. Cependant, elle ne demande pas la Reconnaissance de Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH). Au moment de notre rencontre, Annette occupe un emploi à temps partiel d’assistante de vie scolaire : « c’est un CDD du début de l'année à fin

août. C'est renouvelable 6 ans. C'est payé une misère [Rire] ! C'est merdique, mais le boulot est génial, mais c'est merdique ».

A 17 ans, Anthony effectue une première technologique dans le domaine de la santé. Il a un accident pendant l’été. Devenu tétraplégique, il apprend progressivement à maitriser son fauteuil roulant dans la vie quotidienne. Fortement encouragé par ses parents à reprendre ses études, il intègre un centre spécialisé permettant une scolarisation. Ceci se fait en écartant son projet initial de formation. Il fait reconnaître administrativement son handicap dès ses 18 ans et reçoit l’Allocation d’Adulte

93 Les cas d’Annette, Anthony et Marie proviennent d’un corpus de 22 entretiens de type récits d’insertion, recueillis entre janvier et juin 2012, de jeunes étudiants handicapés sortis de l’enseignement supérieur (Segon et Le Roux, 2013).

Handicapé (AAH) à 20 ans. Il s’inscrit à l’université dans une nouvelle ville, dans un Institut Universitaire de Technologie (IUT) tertiaire. Cette orientation s'accomplit avant tout en raison de l’obtention d’une place dans un foyer d’accueil médicalisé. Anthony se rend seul quotidiennement à l’université avec son véhicule personnel. Pour y parvenir, il est prêt à faire des « sacrifices » comme se lever à des heures très matinales. Dans le cadre universitaire, il bénéficie d’une aide à la prise de notes pendant un semestre. L’obtention de son diplôme ne cache pas son attrait limité pour ce domaine d’études. Il emménage un peu plus tard seul dans un appartement. En parallèle il s’inscrit à Pôle Emploi et Cap Emploi, cherche un emploi à mi-temps et cible les grandes entreprises. Après avoir répondu à quelques annonces, il abandonne ses recherches sans avoir obtenu un seul entretien. Anthony est sans activité professionnelle et ne recherche pas de travail depuis deux ans. Il redoute l’idée de devoir perdre une partie de son autonomie et insiste sur le temps et l’énergie déjà investis chaque jour dans l’entretien de son appartement. La perspective d’un emploi paraît particulièrement contraignante pour Anthony mais lève cependant un questionnement moral : « Aujourd'hui je dépends des allocations. Niveau éthique ça

me gêne quand même un peu. Je dirais que c'est un peu pour ça que j'ai cherché […] sinon je pense que j'aurais arrêté avant aussi. Profiter des allocs comme ça, des fois j'ai du mal quand j'y pense ».

Marie est née avec une paralysie cérébrale. Elle est en fauteuil roulant depuis son enfance. Sa famille s’est toujours mobilisée pour lui apporter une aide dans les déplacements et les gestes de la vie courante. Elle suit sa scolarité dans des établissements ordinaires, hormis quelques années passées dans une institution spécialisée au moment du collège. Avec des résultats scolaires très satisfaisants, elle s’oriente vers une licence en droit. Elle demande et obtient dès que possible une reconnaissance administrative de son handicap. Elle bénéficie d’un secrétaire durant les examens et s’arrange le reste du temps avec les autres étudiants. À la fin de son Master, elle réussit un concours de la fonction publique réservé aux personnes handicapées, sous les conseils du service d’accueil des étudiants handicapés (SAEH) de son université. Elle déménage seule dans une nouvelle ville et s’éloigne ainsi de sa famille. Marie a recours à des auxiliaires de vie pour accomplir une grande partie des tâches quotidiennes (se laver, s’habiller, faire les courses, etc.). Sur son lieu de travail, Marie est pleinement autonome. Les locaux sont adaptés aux déplacements en fauteuil roulant et son poste informatique est équipé d’une dictée vocale. Elle se consacre

rigoureusement à ses missions et se projette déjà dans un ambitieux plan de carrière. Mais derrière son engagement professionnel, se cache une solitude importante : « Moi

ici, je suis seule dans... seule dans la vie quoi. Je n'ai vraiment personne […] Enfin bon c'est pourquoi moi ça ne me dérange pas de faire des gros horaires puisque de toute façon, je n'ai personne qui m'attend chez moi ».

À un moment de leur parcours, tous trois ont eu le statut d’« étudiant handicapé ». Anthony et Marie ont demandé et obtenu un ou des aménagements pour raison de handicap ou de problème de santé. Cela semble avoir été plus informel dans le cas d’Annette. Quelques mois après s’être détachée de ses études, cette dernière occupe un emploi de transition. Elle y expérimente une nouvelle forme d’investissement professionnel. Anthony a « joué le jeu » de la recherche d’emploi pendant quelques temps mais les effets de son orientation par défaut ont, entre autres, concouru à son renoncement professionnel. Marie n’a jamais cherché du travail car elle a obtenu son premier poste quelques semaines après la fin de ses études. Qu’est-ce qui différencie ces trois trajectoires ? Annette décrit un environnement familial contraignant. Elle s’est découverte atteinte d’un trouble psychique. Aucun système de compensation ne lui a semblé convenir – d’autant qu’il lui est difficile d’avoir recours à des aides étiquetées « pour les personnes handicapées » alors qu’elle ne se définit pas comme telle. Le milieu associatif lui permet d’échanger avec des personnes atteintes de la même pathologie. Depuis son accident, Anthony a quant à lui passé plusieurs années dans des centres spécialisés. Le travail représente une menace pour son autonomie péniblement gagnée. Pour Marie, au contraire, il est un espace d’autonomie et de sociabilité nécessaire. Éloignée de sa famille, elle lutte contre l’isolement.

Une lecture microsociologique permet de mettre en évidence la complexité des dimensions à prendre à compte pour comprendre les parcours de transition vers l’emploi des étudiants handicapés ou plus largement leur passage à la vie adulte. Nous nous intéressons donc dans cet article aux « anciens étudiants handicapés » c'est-à-dire aux sortants (non réinscrits l’année suivante), diplômés ou non, de l’enseignement supérieur. Est-il possible d’obtenir, en complément de ces analyses qualitatives, des tendances globales quant au devenir de cette population, principalement en comparaison avec les autres sortants de l’enseignement supérieur ? En effet, on peut se demander en quoi les parcours des anciens étudiants handicapés sont spécifiques au regard de leurs pairs anciens étudiants ? Dans ce cadre, quelles enquêtes statistiques

sont alors mobilisables ? À quel point les échantillons disponibles s’approchent-ils de la population des « anciens étudiants handicapés » ? Par ailleurs, on peut se demander si ces enquêtes contiennent les indicateurs permettant d’analyser le poids des différentes dimensions liées au handicap abordées plus haut ?

Nous verrons tout d’abord qui sont aujourd’hui les « étudiants handicapés » et en quoi cette catégorie de bénéficiaires de l’action publique présente un intérêt scientifique. Seront examinées ensuite les différentes sources de données publiques disponibles pour tenter de répondre à notre questionnement. Nous présenterons les résultats d’une exploitation secondaire de l’enquête Génération 2004 (Céreq, 2007, 2009). Nous conclurons sur les limites de l’appareil statistique actuel et des propositions de pistes de développement.

La question du devenir des anciens étudiants handicapés

La question du devenir des anciens étudiants handicapés s’inscrit dans celles, plus larges, de l’accès à l’emploi des jeunes et leur autonomisation (Le Roux et Marcellini, 2011). L’insertion des jeunes, et en particulier celle des sortants de l’enseignement supérieur, est un objet qui mobilise de nombreux chercheurs en sciences sociales. Leurs parcours et éventuelles difficultés d’insertion sont analysés en premier lieu comme le reflet de la conjoncture économique (Brunet, 2004). Sont questionnés également les effets différenciés de multiples facteurs comme l’origine sociale des étudiants (Calmand et Épiphane, 2012), les niveaux de diplôme (Giret et al., 2006 ; Calmand et Recotillet, 2013), le type de filière choisie –professionnelle ou générale– (Lemistre, 2010), ou les stages (Giret et Issehnane, 2010). D’autres travaux traitent des discriminations à l’embauche à l’égard des jeunesissus de l’immigration (Frickey et al., 2002), des femmes (Joseph et Lemière, 2005) et des personnes handicapées (Amrous

et al., 2013). Ainsi, d’une manière générale, on sait que les personnes ayant une

reconnaissance administrative d’un handicap sont davantage au chômage que la population générale (21 % contre 9 %) et sont moins diplômées : 51 % d’entre elles ont un niveau de brevet d’études du premier cycle du second degré –BEPC– ou inférieur, contre 31 % de la population générale (Ibidem). Il paraît donc intéressant de cibler des

recherches sur une population handicapée ayant suivi des études supérieures afin d’aller au-delà des discours communs associant le manque de qualification aux difficultés d’insertion de cette population.

Différentes étapes (décohabitation du foyer familial, emploi, mise en couple et procréation) sont prises en compte dans l’analyse de l’accès à l’âge adulte et à l’autonomie (Mauger, 1995, Galland, 1996, Bidart 2006b, Van de Velde 2008). Cependant, au sein de la population étudiée dans cet article, de nombreuses questions spécifiques peuvent être soulevées. Comment envisager le temps des études comme un temps d’accumulation d’expériences diverses permettant l’autonomisation quand l’emploi du temps des étudiants handicapés peut être réduit par des contraintes d’ordre médical ? Dans quelle mesure la décohabitation du foyer parental marque-t-elle une autonomisation pour les jeunes vivant et étudiant dans des établissements spécialisés ? Dans un contexte de troubles psychiques, Parron et Sicot (2009) s’interrogent sur la tension entre l’injonction à l’autonomie des jeunes et la prise en charge collective et institutionnelle de la maladie. Enfin, la mise en couple également peut s’avérer spécifique (Banens et al., 2007). Il semble notamment que les personnes vivant avec une déficience nécessitant au quotidien une aide humaine voient leurs probabilités de commencer une union réduites.

Cependant, lorsque l’on parle de « population handicapée », il convient de présenter plus avant celle-ci, en précisant que cette formulation courante et trop rapide ne doit pas cacher la dimension contextuelle du handicap. En effet, si le handicap a longtemps été appréhendé comme une conséquence directe et inéluctable d’une déficience94

(dimension organique), et de ce fait considéré comme une caractéristique de l’individu dans le modèle dit « médical » du handicap, depuis plusieurs dizaines d’années des conceptions plus complexes du handicap ont émergé. Dans une perspective plus systémique, le « modèle social » du handicap met l’accent sur la part des facteurs environnementaux dans la production du handicap, les perspectives les plus radicales posant ainsi la société comme entièrement responsable du handicap, c'est-à-dire du désavantage social subi par les personnes ayant des déficiences. Le modèle du « Processus de Production du Handicap » (Fougeyrollas, 2002, 2010 ; Fougeyrollas et Charrier, 2013) met en avant les interactions entre des facteurs personnels (limitations

94 « Une déficience équivaut au degré d’atteinte anatomique, histologique ou physiologique d’un

de capacités –dimension fonctionnelle– entraînées par une déficience ou un trouble) et un environnement pouvant contenir des obstacles (matériels ou symboliques) ou des facilitateurs à la participation. Dans ce cadre, l’interaction sujet-environnement produit des « situations de handicap », ou au contraire, des « situations de participation sociale ». Ainsi, une personne ayant une déficience qui limite certaines de ses capacités n’est pas forcément et systématiquement « handicapée » (dimension sociale), comme le modèle médical pourrait le suggérer. Au contraire, en fonction de la nature et de la qualité des environnements dans lesquels elle circule, elle peut rencontrer des situations de handicap ou des situations de participation sociale ordinaire.

Cette conception interactionniste du handicap a des effets directs sur la manière dont sont pensées les politiques publiques. Elle ouvre notamment la question du droit à la compensation du handicap pour les personnes ayant des besoins spécifiques. Les environnements universitaires et professionnels sont-ils alors capables de proposer des dispositifs de compensation du handicap adéquats en fonction de la nature des limitations de capacités individuelles ? Ces environnements peuvent-ils se transformer pour réduire les obstacles et annuler les situations de handicap ?

Dans les universités françaises, la loi du 11 février 2005 « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées » a conduit à la généralisation des SAEH. Ces structures mettent en place des aménagements afin que les étudiants handicapés puissent poursuivre leurs études et passer des examens. Elles proposent notamment des aides techniques (numérisation de documents, carte de photocopie) ou humaines (preneur de notes par exemple). Pour autant, les formes et niveaux de structurations diffèrent : chaque université étant autonome, la politique mise en œuvre peut varier sensiblement d’un établissement à l’autre dans la philosophie, le budget alloué ou le mode de fonctionnement.

De plus, l’environnement peut peiner à comprendre les situations de handicap et ainsi à concevoir et mettre en œuvre des systèmes de compensation. Lorsqu’ils génèrent des limitations brouillant les interactions interpersonnelles, certains troubles semblent plus exposés à ces difficultés. C’est le cas notamment des déficiences produisant des limitations dans les domaines de la communication ou du comportement (Barreyre et

al., 2011). Les déficiences à l’origine de ces incapacités peuvent être de natures

motrices cérébrales, surdités). À titre d’exemple, les professionnels chargés de statuer sur l’attribution des droits aux personnes handicapées font face à des difficultés notables quand ils évaluent les dossiers des personnes ayant un trouble psychique95

(Bureau et Rist, 2013). Dans le monde de l’entreprise, une distinction dans la gestion des ressources humaines paraît s’opérer entre les « employables » et les « inemployables » (Ebersold, 2009). Par ailleurs, le moment où est survenue la déficience marque aussi le parcours et la manière dont les personnes envisagent leur déficience et les moyens à leur disposition pour compenser leur handicap. Ainsi, la population même des étudiants handicapés, entendue dans cet article comme ceux ayant recours à des dispositifs institutionnels de compensation du handicap, ne reflète qu’une partie des étudiants présentant des limitations de capacités. En effet, la demande de compensation peut ne pas se faire, selon la façon dont est vécue la déficience, ce qu’elle peut provoquer en termes de stigmatisation ou encore la manière dont elle peut être auto-compensée (Segon et Le Roux, 2013b). Pour comprendre les parcours des étudiants handicapés, il semble alors nécessaire de prendre en compte ces dimensions personnelles liées à la déficience afin de mesurer les effets de l’environnement sur les situations de handicap. C’est bien l’entrelacement des différentes dimensions individuelles et environnementales qui permettent d’éclairer la complexité des parcours observés pour les trois cas présentés en introduction.

La nature du trouble est une information présente dans le recensement public annuel des étudiants ayant demandé et obtenu des aménagements en raison d’un problème de santé ou d’un handicap96. Les étudiants ayant des troubles moteurs sont les plus