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5. L’exigence de proportionnalité en droit pénal. L’exigence de proportionnalité est consubstantielle au droit pénal, même si elle n’est pas encore élevée au rang de principe général de droit (8).

Ainsi, en 1748, Montesquieu souligne que seule la peine proportionnée est utile parce que, lorsqu’elle est sans mesure, l’on est souvent enclin à lui préférer l’impunité (9). En 1764, Cesare Beccaria défend l’idée que, « pour qu’une peine cesse d’être l’acte de violence d’un seul ou de plusieurs contre un citoyen, elle doit être […] toujours proportionnée aux délits et jamais prise hors de la loi » (10). Bref, l’exigence de proportionnalité de la peine est une nécessité, non seulement parce qu’elle est conforme au sen-timent de justice mais encore parce qu’elle est socialement utile. Même le Code pénal de 1810, pourtant appelé le code de fer, s’en était fait l’écho, sans la nommer, lorsqu’il conçoit le système de la gradation des peines comme honorable pour les juges, en les investissant d’une confiance digne de leurs fonctions, satisfaisant pour les jurés, que la considération d’une peine uniforme rend trop souvent vacillants, consolant pour les prévenus, dont le cœur et la conduite passée n’ont pas encore été infectés par l’habi-tude du mal, et redoutable pour ceux dont la perversité est connue (11).

Le message a été clairement reçu par le législateur belge lors des dis-cussions relatives au Code pénal de 1867. La Commission de Fernelmont souligne, en 1849, que « c’est un principe d’éternelle justice que la peine soit proportionnée (à l’infraction)  » (12). La Commission de la justice du

(8) Sur cette exigence, voy. : F. Kuty, Principes généraux du droit pénal belge, t. 4, La peine, Bruxelles, Larcier, 2017, n° 2191 ; J. rozie, « Over de toetsingsbevoegdheid van de strafrechter bij onredelijke straffen », in Toetsing van sancties door de rechter, Anvers, Intersentia, 2011, pp.  37-66  ; M. franchiMont, «  Loyauté, proportionnalité et procès équitable », in Mélanges Pierre Lambert, Bruxelles, Bruylant, 2000, pp. 375-384.

(9) Charles Louis de secondat, baron de La Brède et de Montesquieu, De l’esprit des lois (1748), Paris, Garnier, 1871, p. 84.

(10) C. Beccaria, Des délits et des peines (1764), Paris, Dalibon, 1821, p. 180.

(11) Rapport sur le Livre II du Code pénal fait au Corps législatif le 15 février 1810 par le député riBoud, Législation civile, commerciale et criminelle, t. 15, Bruxelles, Tarlier, 1837, pp. 131-132.

(12) Rapport relatif au chapitre V du Livre Ier du Code pénal fait au nom de la Commission du Gouver-nement par J.-J. haus, Législation criminelle de la Belgique, t. I, Bruxelles, Bruylant, 1867, p. 99, n° 219.

Sénat précise, en 1852, que la peine doit être déterminée eu égard à la gravité de l’infraction déclarée établie et aux antécédents du condamné.

Cette règle est fondée sur une idée d’utilité publique car l’intérêt social commande une répression proportionnée aux dangers que le coupable fait courir ou peut faire craindre à la société (13). La peine d’une sévérité excessive, avait dit le rapporteur Eudore Pirmez à la Chambre des repré-sentants en 1866, perd, aux yeux du public, son influence morale, elle ne pourvoit plus à ce besoin impérieux de la société de voir la justice se faire et elle blesse la conscience publique. S’agissant des effets d’une peine excessive sur la magistrature, avait-il ajouté, « c’est une erreur assez répan-due de croire que l’abaissement des peines n’est dicté que par l’intérêt qu’inspirent les coupables. Presque toujours, cependant, c’est le maintien de l’ordre social qui l’exige. Les peines d’une sévérité exagérée ne sont pas appliquées et, pour avoir voulu une répression trop complète, la législa-tion n’obtient qu’une répression très imparfaite ; l’excès de la peine est évité par l’impunité » (14). En communion avec ces propos, le ministre de la Justice Jules Bara avait renchéri, la même année, que lorsqu’une loi commine des peines qui ne sont pas en rapport avec l’infraction commise, le juge ne les applique pas (15). Moins d’un siècle plus tard, le procureur général Léon Cornil en souligne les bienfaits. La peine, dit-il, doit être proportionnée, dans l’intérêt même de la société. À commencer par la magistrature, car il est et des classements sans suite décidés par des par-quetiers et des acquittements prononcés par des juges professionnels dont le seul fondement réside dans la disproportion entre la gravité de l’infrac-tion et celle de la peine comminée par la loi (16). C’est encore l’intérêt de la population que les cours et tribunaux n’infligent que des peines justes, c’est-à-dire qui frappent le coupable précisément dans la mesure où il le faut pour apaiser la conscience sociale troublée par l’infraction, pour empêcher le condamné de récidiver et pour maintenir la masse dans la crainte salutaire des sanctions prêtes à s’abattre sur quiconque méconnaît ses devoirs essentiels envers la société (17).

(13) Rapport sur le Livre Ier du Code pénal fait au nom de la Commission de la justice du Sénat par le baron J. d’anethan, Législation criminelle de la Belgique, t. I, Bruxelles, Bruylant, 1867, p. 293, n° 36.

(14) Discussion du titre IX du Livre II du Code pénal à la Chambre des Représentants, Législation crimi-nelle de la Belgique, t. III, Bruxelles, Bruylant, 1868, p. 599, n° 37.

(15) Discussion du titre IX du Livre II du Code pénal au Sénat, Législation criminelle de la Belgique, t. III, Bruxelles, Bruylant, 1868, p. 698, n° 2.

(16) L. cornil, « Le droit pénal et la procédure pénale après la tourmente », Les Novelles, Procédure pénale, t. I, vol. 1, Bruxelles, Bruylant, 1946, pp. 15-92, spéc. p. 43.

(17) L. cornil, « Le droit de grâce dans le cadre de la Constitution belge », R.D.P.C., 1949-1950, pp. 588-608, spéc. p. 589.

6. L’exigence de proportionnalité n’a intégré le Code d’instruction cri-minelle qu’en 2010, dans le cadre de la transaction pénale, lorsque son article 216bis dispose que la somme d’argent dont le paiement est proposé par le ministère public afin d’éteindre l’action publique doit être propor-tionnelle à la gravité de l’infraction, en 2016, dans le cadre de la procé-dure de reconnaissance préalable de culpabilité, lorsque l’article 216 invite le juge à vérifier que les peines proposées par le ministère public sont proportionnelles à la gravité des faits, à la personnalité du prévenu et à sa volonté de réparer le dommage éventuel et, en 2018, tant dans le cadre de la médiation pénale entre le ministère public et la personne poursui-vie prévoyant l’exécution de mesures et le respect de conditions, lorsque l’article 216ter dispose que les mesures proposées par le procureur du Roi doivent être proportionnées à la gravité des faits et à la personnalité de l’intéressé, que dans le cadre de la cause d’excuse de repentance organisée aux articles 216/5, 216/6 et 216/7. Elle se rencontre encore, implicitement cette fois, lorsque le législateur retient le caractère facultatif de la peine, permet au juge de la moduler entre un minimum et un maximum ou autorise sa réduction en deçà de son minimum légal par l’admission de circonstances atténuantes ou d’une cause d’excuse.

7. De lege lata, le principe de proportionnalité de la peine devrait sans doute faire son entrée dans le futur Code pénal. Si la Commission de ré-forme du droit pénal ne l’a pas consacré comme tel dans l’article 26 de son projet de Livre Ier qui traite des objectifs de la peine, l’exposé des motifs qui l’accompagne indique néanmoins que cette disposition fait écho au principe de proportionnalité dans la détermination de la peine (18). Le Conseil d’État ne manqua pas de relever qu’il serait judicieux d’en faire mention, parmi les critères à prendre en considération lors du choix de la peine et de la détermination de son taux, le qualifiant de « principe de la proportionnalité de la peine qui s’applique aussi lorsque le juge inflige une peine dans un cas concret » (19).

8. La proportionnalité de la peine est essentielle en ce qu’elle par-ticipe à sa légitimité. La peine infligée, fut-elle légale, n’est pas nécessaire-ment légitime. Sa légitimité ne peut se confondre avec sa légalité. Ainsi, le professeur Jacques-Joseph Haus avait-il à juste titre relevé, en 1849, qu’une peine intrinsèquement légale peut être injuste par rapport à la société qui

(18) Commission de réforme du droit pénal, Proposition d’avant-projet de Livre Ier du Code pénal, Exposé des motifs, Bruxelles, la Charte, 2016, p. 100.

(19) Avis du Conseil d’État n° 60.893/3 sur l’avant-projet de Code pénal – Livre premier, n° 119.

l’inflige, ce qui est le cas lorsque la punition n’est pas nécessaire ou n’est pas utile au but que le pouvoir doit se proposer (20). Au contraire, soulignait le sénateur Jules d’Anethan une quinzaine d’années plus tard, la peine légitime est celle qui a pour fondement la réparation du devoir ou du droit méconnu et qui présente un degré suffisant d’intimidation tout en étant proportionnée à l’infraction commise (21).

La question de la légitimité de la peine est complexe et nécessite d’avoir recours à la sociologie et à la criminologie. Qu’il nous soit simplement permis, dans les limites de cette contribution, de souligner que la peine, pour être acceptée par le condamné et approuvée par la population, bref pour être légitime, se doit d’être juste, ce qui suppose qu’elle soit, dans les circonstances concrètes de la cause, proportionnée à l’infraction com-mise et à la situation personnelle et patrimoniale du condamné. La Cour européenne des droits de l’homme ne dit rien d’autre lorsqu’elle souligne que la proportionnalité de la peine participe à sa justification (22).

9. L’exigence de proportionnalité consacrée par la Cour de cassa-tion et la Cour constitucassa-tionnelle. Le principe de proporcassa-tionnalité de la peine a logiquement été reconnu par la jurisprudence.

La Cour de cassation l’a rapidement consacré. Ainsi, en 1845, toutes chambres réunies, elle dit pour droit que l’intérêt de la société requiert que la peine soit proportionnée au fait et que «  le ministère public ne [puisse], pas plus en appel qu’en première instance, restreindre le pouvoir du juge et le contraindre […] à maintenir une peine disproportionnée au délit  » (23). Sa jurisprudence s’est formée, pour l’essentiel, durant le XXe siècle. Elle nous enseigne que les cours et tribunaux doivent souverai-nement déterminer, mais dans les limites établies par la loi, c’est-à-dire selon l’échelle des peines prévue par la loi pour l’infraction (24), entre les taux minimum et maximum que leur impose la loi (25), la peine qu’ils esti-ment proportionnée à la gravité de l’infraction qu’ils déclarent établie et à

(20) Rapport relatif au chapitre IV du Livre Ier du Code pénal fait au nom de la Commission du Gou-vernement par J.-J. haus, Législation criminelle de la Belgique, t. I, Bruxelles, Bruylant, 1867, p. 88, n° 196.

(21) Discussion du Livre  Ier du Code pénal amendé et complété en 1862, Législation criminelle de la Belgique, t. I, Bruxelles, Bruylant, 1867, p. 429, n° 3.

(22) Cour eur. D.H., arrêt Cumpănă et Mazăre c. Roumanie du 17  décembre 2004 rendu en grande chambre à l’unanimité, § 114 (l’effet dissuasif que la crainte de pareilles sanctions emporte pour l’exercice par ces journalistes de leur liberté d’expression est manifeste. Nocif pour la société dans son ensemble, il fait lui aussi partie des éléments à prendre en compte dans le cadre de l’appréciation de la proportionnalité – et donc de la justification – des sanctions infligées en l’espèce aux requérants »).

(23) Cass. (ch. réunies), 2 avril 1845, Pas., 1845, I, p. 215.

(24) Cass., 25 février 2009, Pas., 2009, p. 589.

(25) Cass., 25 février 2014, Pas., 2014, p. 497 ; Cass., 16 septembre 2009, Pas., 2009, p. 1293.

la responsabilité pénale du condamné sans être tenus par le réquisitoire du ministère public (26). Cette position, qui fut la sienne dès avant l’entrée en vigueur de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (27), fut encore renforcée à la suite de celle-ci (28).

En d’autres termes, la peine doit être adaptée à l’infraction commise et à la personnalité de son auteur (29), ce qui signifie que le contrôle de propor-tionnalité lui est consubstantiel (30). Même les sanctions qui ne peuvent être qualifiées de pénales en droit interne mais présentent néanmoins une nature pénale au sens de l’article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont soumises au contrôle de proportionnalité (31).

La Cour constitutionnelle exige également que la peine infligée soit proportionnée à la gravité du comportement répréhensible (32), relevant que le législateur a opté pour la personnalisation des peines laissant au juge un choix quant à la sévérité de la peine lui permettant de tenir compte de circonstances atténuantes (33). La liberté de choix reconnue au juge pénal entre les peines minimales et maximales fixées par la loi doit être mise en œuvre dans le respect du principe de proportionnalité (34).

10. Les critères retenus par ces deux hautes juridictions s’avèrent plus nombreux que la seule gravité de l’infraction. Les modalités de personnali-sation de la peine permettent aux cours et tribunaux de prendre en considé-ration la gravité de l’infraction déclarée établie (35), les circonstances dans lesquelles celle-ci a été commise (36), la personnalité du condamné (37),

(26) Cass., 25 février 2014, Pas., 2014, p. 497.

(27) Cass., 4 juillet 1949, Pas., 1949, I, p. 506 ; Cass., 25 octobre 1948, Pas., 1948, I, p. 593 ; Cass., 7 octobre 1946, Pas., 1946, I, p. 354 ; Cass., 7 janvier 1935, Pas., 1935, I, p. 99.

(28) Cass., 24 avril 2012, Pas., 2012, p. 882 ; Cass., 20 septembre 2011, Pas., 2011, p. 1999 ; Cass., 5 juin 2009, Pas., 2009, p. 1435 ; Cass., 13 mars 2008, Pas., 2008, p. 699 ; Cass., 27 octobre 2006, Pas., 2006, p. 2183 ; Cass., 5 mars 2003, Pas., 2003, p. 464 ; Cass., 28 février 2002, Pas., 2002, p. 614 ; Cass., 21 septembre 1999, Pas., 1999, I, p. 1174 ; Cass., 23 octobre 1997, Pas., 1997, I, p. 1070 ; Cass., 8 novembre 1996, Pas., 1996, I, p. 1101 ; Cass., 14 avril 1987, Pas., 1987, I, p. 982 ; Cass., 13 août 1986, Pas., 1986, I, p. 1367.

(29) Cass., 16 juin 2009, Pas., 2009, p. 1550.

(30) Cass., 16 novembre 2017, Pas., 2017, p. 2194.

(31) Ibid.

(32) C. const. (aud. plén.), 5 février 2015, n° 13/2015, M.B., 2015, p. 14623 ; C. arb. (aud. plén.), 14 juillet 1997, n° 40/1997, C.A.-A., 1997, p. 575.

(33) C. arb. (aud. plén.), 14 septembre 2006, n° 138/2006, C.A.-A., 2006, p. 1651 ; C. arb., 18 janvier 2006, n° 8/2006, C.A.-A., 2006, p. 153.

(34) C. const., 18 janvier 2018, n° 5/2018, M.B., 2018, p. 49038, NjW, 2018, p. 438, obs. M.J. horseele. (35) Cass., 18 janvier 2018, Pas., 2018, p. 130 ; Cass., 27 septembre 2011, Pas., 2011, p. 2056.

(36)  C. arb. (aud. plén.), 14  juillet 1997, n°  40/1997, C.A.-A., 1997, p.  575  ; Cass., 7  janvier 1935, Pas., 1935, I, p. 99.

(37) Cass., 24 mai 2016, Pas., 2016, p. 1177 ; Cass., 27 septembre 2011, Pas., 2011, p. 2056.

son amendement (38), son degré de responsabilité pénale (39) ou de culpa-bilité individuelle (40), c’est-à-dire à la part qu’il a prise dans la situation illégalement créée (41), et même l’incertitude qu’il a dû connaître du fait de la durée des poursuites (42).

11. Le refus de reconnaissance, en droit belge, d’un principe général du droit à la proportionnalité de la peine. Si l’exigence de proportionnalité de la peine n’est pas inconnue des cours et tribunaux et n’est plus discutée dans les faits, elle n’est pas, comme telle, expressément consacrée par un texte de droit positif de portée générale.

Le principe de la proportionnalité de la peine n’est toutefois pas étran-ger à notre système juridique qui, en règle, permet au juge d’infliétran-ger la peine qu’il estime proportionnée à l’ensemble des éléments de la cause en la déterminant entre les taux minimum et un maximum déterminés par la loi, en tenant compte d’éventuelles circonstances atténuantes ou en ordonnant le sursis à l’exécution de la peine ou la suspension du prononcé de la condamnation (43) et, s’agissant de l’amende, l’invite à tenir compte de la situation sociale et de la situation financière précaire du prévenu (44). Le principe de proportionnalité réapparaît encore en matière de sanction administrative ayant un caractère répressif au sens de l’article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. En l’occurrence, le juge auquel il est de-mandé de la contrôler dispose d’une compétence de pleine juridiction pour examiner si elle est justifiée en fait et en droit et si elle respecte les exigences impératives des traités internationaux et du droit interne, en ce compris les principes généraux du droit (45), de même que le principe de proportionnalité (46).

(38) C. arb. (aud. plén.), 14 juillet 1997, n° 40/1997, C.A.-A., 1997, p. 575.

(39) Cass., 7 août 1866, Pas., 1866, I, p. 396.

(40) Cass., 24 avril 2012, Pas., 2012, p. 882 ; Cass., 27 septembre 2011, Pas., 2011, p. 2056 ; Cass., 8 juin 2005, Pas., 2005, p. 1253 ; Cass., 14 avril 1987, Pas., 1987, I, p. 982 ; Cass., 13 août 1986, Pas., 1986, I, p. 1367.

(41) Cass., 24 avril 2012, Pas., 2012, p. 882.

(42) Cass., 27 septembre 2011, Pas., 2011, p. 2056.

(43) C. const. (aud. plén.), 30 octobre 2008, n° 140/2008, A.C.C., 2008, p. 2289 ; C. const. (aud. plén.), 7 juin 2007, n° 81/2007, A.C.C., 2007, p. 959.

(44) C. const. (aud. plén.), 30 octobre 2008, n° 140/2008, A.C.C., 2008, p. 2289 ; C. const. (aud. plén.), 7 juin 2007, n° 81/2007, A.C.C., 2007, p. 959.

(45) Cass., 18 janvier 2018, Pas., 2018, p. 130.

(46) Cass., 21 mars 2018, Pas., 2018, p. 677 ; Cass., 18 janvier 2018, Pas., 2018, p. 130 ; Cass., 16 novembre 2017, Pas., 2017, p. 2194 ; Cass., 18 avril 2013, Pas., 2013, p. 888 ; Cass., 11 mars 2011, Pas., 2011, p. 770 ; Cass., 13 février 2009, (quatre espèces), Pas., 2009, pp. 455, 466, 470 et 475 ; Cass., 12 décembre 2008, Pas., 2008, p. 2943 ; Cass., 16 février 2007, Pas., 2007, p. 365 ; Cass., 16 février 2007, Pas., 2007, p. 374 ; Cass., 24 janvier 2002, Pas., 2002, p. 226.

Cependant, force est de constater que, à ce jour, la Cour de cassation se refuse, obstinément diront certains, à reconnaître l’existence d’un principe général du droit à la proportionnalité de la peine, que ce soit en matière pénale (47), en matière disciplinaire (48) ou dans le cadre de l’exécution des peines (49). À défaut d’être reconnu par la Cour de cassation, le moyen qui invoque la violation d’un tel principe général du droit au motif que la peine infligée serait disproportionnée à l’infraction déclarée établie soit manque en droit (50), soit est irrecevable (51). Le contrôle marginal de la motivation de la peine, auquel la Cour de cassation s’astreint, ne la conduit toutefois pas à s’autoriser à se substituer au juge du fond dans l’appréciation du caractère approprié de la peine ou de son degré (52), un tel moyen, en ce qu’il revient à critiquer l’appréciation des faits par le juge (53), supposant la vérification d’éléments de fait pour laquelle la Cour est sans pouvoir (54).

12. Nous relèverons néanmoins que, dans un arrêt isolé du mois de septembre 2005, la Cour a admis, en droit pénal, l’existence d’un principe général de proportionnalité de la peine lorsque, incidemment, au détour d’une question préjudicielle, elle a interrogé la Cour constitutionnelle sur le fait de savoir si la disposition légale qui ne laisse au juge pénal aucune marge pour apprécier l’amende qui y est prévue n’est pas contraire aux articles 10 et 11 de la Constitution et 6, § 1er, de la Convention de sauve-garde des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la mesure où les dispositions pénales de droit commun, en prévoyant un minimum et un maximum ou l’application de circonstances atténuantes, offrent au juge répressif la possibilité de déterminer lui-même, dans une certaine mesure, le taux de la peine sur la base des circonstances concrètes de la cause et des principes généraux du droit, parmi lesquels figure le principe de proportionnalité (55). Nous aurions cependant préféré un attendu clair

(47) Cass., 24 mai 2016, Pas., 2016, p. 1177 ; Cass., 16 décembre 2015, Pas., 2015, p. 2935 ; Cass., 29 avril 2015, Pas., 2015, p. 1073 ; Cass., 1er février 1995, Pas., 1995, I, p. 117 ; Cass., 16 novembre 1994, Pas., 1994, I, p. 945.

(48) Cass., 19 novembre 1993, Pas., 1993, I, p. 972. Contra : C. const. (aud. plén.), 4 février 2010, n° 8/2010, A.C.C., 2010, p.  107 («  Lorsqu’elle inflige une peine disciplinaire, l’autorité disciplinaire doit appliquer le principe général du droit de la proportionnalité de la peine disciplinaire, ce qui implique que la peine doit être raisonnablement proportionnée au manquement disciplinaire »).

(49) Cass., 2 janvier 2013, Pas., 2013, p. 1 (« Aucun principe général du droit relatif à la proportionnalité ne s’applique au tribunal de l’application des peines »).

(50) Cass., 16 décembre 2015, Pas., 2015, p. 2935 ; Cass., 1er février 1995, Pas., 1995, I, p. 117 ; Cass., 16 novembre 1994, Pas., 1994, I, p. 945.

(51) Cass., 19 novembre 1993, Pas., 1993, I, p. 972.

(52) Cass., 21 septembre 1999, Pas., 1999, I, p. 1174 ; Cass., 24 janvier 1995, Pas., 1995, I, p. 65.

(53) Cass., 8 novembre 1996, Pas., 1996, I, p. 1101.

(54) Cass., 5 mars 2003, Pas., 2003, p. 464.

(55) Cass., 27 septembre 2005, Pas., 2005, p. 1751.

et net, d’autant que, ultérieurement, la Cour a à nouveau affirmé que, en matière répressive, la proportionnalité de la peine n’est pas élevée au rang de principe général du droit (56). Nul doute, nous en faisons le pari, que la Cour reviendra bientôt sur sa jurisprudence pour recevoir le principe général de la proportionnalité de la peine quoique, au vu de son actuelle jurisprudence fondée sur l’article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, sur laquelle nous revien-drons infra, la question présente finalement assez peu d’intérêt.

13. Le principe de proportionnalité dans le cadre des infractions au droit de l’Union européenne. La Cour de justice de l’Union euro-péenne a reçu, de longue date déjà, le principe de proportionnalité de la peine qui est, par ailleurs, expressément consacré à l’article 49.3 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 18 décembre 2000 (57). S’agissant de la répression d’infractions à des dispositions de droit communautaire (58), lorsqu’un règlement communautaire ne com-porte aucune disposition spécifique prévoyant une sanction en cas de violation ou renvoie, sur ce point, aux dispositions législatives, réglemen-taires et administratives nationales, les États membres doivent veiller à ce que les violations du droit communautaire soient sanctionnées de peines proportionnées (59). L’intensité des peines ne peut dès lors être dispro-portionnée par rapport à l’infraction, de sorte que les mesures répressives ne doivent pas dépasser le cadre de ce qui est strictement nécessaire aux objectifs poursuivis et que les modalités de contrôle ne doivent pas être assorties d’une sanction à ce point disproportionnée à la gravité de l’infraction qu’elle en deviendrait une entrave aux libertés consacrées par

13. Le principe de proportionnalité dans le cadre des infractions au droit de l’Union européenne. La Cour de justice de l’Union euro-péenne a reçu, de longue date déjà, le principe de proportionnalité de la peine qui est, par ailleurs, expressément consacré à l’article 49.3 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 18 décembre 2000 (57). S’agissant de la répression d’infractions à des dispositions de droit communautaire (58), lorsqu’un règlement communautaire ne com-porte aucune disposition spécifique prévoyant une sanction en cas de violation ou renvoie, sur ce point, aux dispositions législatives, réglemen-taires et administratives nationales, les États membres doivent veiller à ce que les violations du droit communautaire soient sanctionnées de peines proportionnées (59). L’intensité des peines ne peut dès lors être dispro-portionnée par rapport à l’infraction, de sorte que les mesures répressives ne doivent pas dépasser le cadre de ce qui est strictement nécessaire aux objectifs poursuivis et que les modalités de contrôle ne doivent pas être assorties d’une sanction à ce point disproportionnée à la gravité de l’infraction qu’elle en deviendrait une entrave aux libertés consacrées par

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