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III Des religieux français

C) Propager la grandeur du roi de France

Ce n’est pas le souverain pontife ni la Sacrée Congrégation de la Propagation de la Foi qui décidèrent de faire partir les capucins en Terre d’Islam. Ils ont répondu favorablement à une demande d’un religieux français, le Père Joseph de Paris. Nous allons voir que ce dernier, en plus d’agir pour la grandeur du catholicisme, agissait pour son roi. Il va de soi que la politique de « l’Eminence Grise » de Richelieu se ressentait sur ses subalternes.

Afin de mieux comprendre les missions orientales, il est nécessaire de s’arrêter brièvement sur le Père Joseph de Paris. Né dans une famille aristocratique le 4 octobre 1577, il perd son père, Jean IV Le Clerc, à l’âge de 10 ans puis entre en religion chez les capucins le

2 février 1599. En 1613, il est élu provincial de Touraine et entame sa montée en puissance. Nous avons déjà étudié son rêve de croisade, il est perceptible dans ses écrits notamment la

Turciade, qu’il commença à rédiger en 1617 et qui fut publiée au cours de l’année 1625. Il

voit en Louis XIII le champion du christianisme, le roi qui vaincra les « infidèles ». Son

biographe, Lepré-Balain, dit de lui qu’ « il jugeait que la ruine du Turc était nécessaire, facile et agréable à Dieu pour l’étendue de sa gloire. Que les princes chrétiens, ecclésiastiques et séculiers y étaient obligés, que c’était un moyen pour étouffer l’hérésie et une entreprise glorieuse à tout le monde54 ». L’ « Eminence grise » du cardinal voyait en la croisade tout autant un moyen de vaincre les Turcs qu’un vecteur qui mènerait à l’union des princes chrétiens55.

Mais le projet de croisade fut contrecarré par la Guerre de Trente Ans, la Milice chrétienne fut même dissoute en 1628. Pragmatique, le Père Joseph abandonna l’idée de la lutte armée pour la prédication. Son entrée au service du cardinal de Richelieu en 1624 lui assurait la protection de l’homme le plus puissant de France et lui permettait d’influer sur la politique française.

Lorsqu’en 1622 le Père Pacifique de Provins ouvrit les portes de l’Orient, le Père

54 P

IERRE, Benoist, op. cit., p. 143.

Joseph sauta sur l’occasion et en 1625, il fut élu à Rome, préfet des missions séraphiques. Il choisit de se concentrer sur trois espaces : la Grèce et l’Anatolie, le Proche et le Moyen- Orient, ainsi que l’Afrique du Nord, le Père Léonard de Paris se voyant confier les missions d’Angleterre et du Canada56

. Le Père Joseph du Tremblay envoya des clercs de son propre ordre religieux dans ces missions. Les capucins de la province de Paris avaient la charge de la Grèce, des îles Ioniennes et d’une partie de l’Anatolie, dont Constantinople, tandis que les Tourangeaux, puis de facto les Bretons, avaient la charge des actuelles Syrie, Palestine, Iraq et Egypte, ainsi que le sud de la Turquie, puis l’Inde.

Les capucins d’Orient font souvent référence au Père Joseph dans leurs lettres. S’ils correspondent avec leur supérieur direct, comme le Père Raphaël de Nantes, ils n’en savent pas moins que les décisions viennent du bras droit du cardinal de Richelieu. Par exemple, le Père Blaise de Nantes écrivit que « Le R. P. Joseph » lui « avoit envoyé deux obedience pour envoyer des Religieux en Sourat pais des Indes »57 : l’ « Eminence Grise » du cardinal est celui qui distribue les obédiences, donc c’est lui qui choisit qui doit s’installer dans tel ou tel autre hospice. Dans la même veine, le Père Alexis de Lamballe, alors qu’il est à Antalya, nous dit qu’il n’est pas certain de pouvoir rester dans ce lieu car il doute « d’obtenir le consentement du R. P. Joseph, lequel veut qu’on ne prenne point de lieux si on n’y peut vivre d’aumosne »58

. Le Père Joseph du Tremblay avait donc toute latitude pour créer ou fermer une mission.

Le Père Joseph n’est que rarement sollicité par les missionnaires eux-mêmes, ces derniers passent majoritairement par l’intermédiaire de leurs provinciaux. Sur les 168 lettres émises par des missionnaires depuis leur lieu de mission, seulement 4 sont directement adressées à l’ « Eminence grise » du cardinal. En outre, ces 4 lettres furent rédigées entre 1625 et 1628 par les Pères Michel de Vezin et Pierre d’Alençon, tous deux présents au Maroc. Ces missionnaires avaient quitté la France en 1624, soit deux années avant les missionnaires du Levant mais surtout un an avant que le Père Joseph ne devienne préfet des missions. S’ils écrivent au Père Joseph, c’est peut-être parce qu’à cette époque, les missions n’étaient pas totalement organisées. Il convient aussi de noter que jusqu’en 1625, le Père Joseph était le provincial des capucins de Touraine. Ces missionnaires avaient donc peut-être pris l’habitude de lui écrire ; notons toutefois qu’en 1628, le Père Pierre d’Alençon écrit une lettre au Père Jérôme de la Flèche, le provincial de Touraine.

56 Ibid., p. 212.

57 Ms. 1533, lettre du Père Blaise de Nantes au Père Raphaël de Nantes, d’Ispahan le 28/07/1640, p. 518. 58

Peut-être plus que de son vivant, c’est à la mort du Père Joseph, en 1638, que l’on constate le plus son importance pour les missions d’Orient. Au cours de l’année suivante, le Père Gabriel d’Alençon écrivit qu’ « à present nous ne scavons souls la direction de qui nous sommes. » il rajoute, probablement au nom d’une partie des missionnaires, « nous désirerions pour beaucoup de raisons que la conduitte fust entre les mains des TR. PP. Provinciaux, ou quelqu’un qui eust esté en la charge, pour plusieurs inconveniens qui peuvent arriver, q’un qui ne cognoist que peu ou point les Religieux qui sont en ces cartiers en aye la conduitte »59. Les capucins ont peur d’être dirigés par des personnes qui ne sauraient pas comment s’y prendre, d’autant qu’à une telle distance, si un supérieur n’est pas satisfait de l’exécution de l’un de ses ordres et veut apporter un contre ordre, le temps que la nouvelle lui parvienne et qu’il fasse parvenir ce contre ordre il peut s’être écoulé des semaines voire des mois. D’où la volonté d’avoir quelqu’un de capable et probablement de facile à joindre, d’où la demande que ce fût un provincial, car dans ce cas les missionnaires savaient à qui envoyer leurs requêtes. De plus, ils connaissaient le tempérament de ce dernier s’ils l’avaient côtoyé en France. Le Père Léonard, quant à lui, ne se sent pas capable d’assurer seul la gestion des missions60. Les capucins resteront sous l’autorité de leurs provinciaux qui recevaient le titre de préfet des missions. C’est une particularité de cet ordre qui, plus que les autres familles religieuses, restait très attaché à sa hiérarchie ordinaire. Le Père Joseph fut l’exception, mais en 1633, lors du renouvellement de ses pouvoirs, il dut recourir à l’appui du cardinal de Richelieu, de Louis

XIII ainsi que du secrétaire de la Propagande, Ludovic Ludovisi, pour conserver sa charge de

préfet61.

A la mort de Joseph du Tremblay, les missions capucines eurent des difficultés à se réorganiser. On a le sentiment que les capucins étaient perdus lorsqu’on lit : « pour l’estat de nostre mission je ne scay encore qu’en mander. Jusques à ce que nous voyons l’ordre et la disposition que l’on y mettra ; car pour vous dire franchement, nous sommes un peu dans le désordre, et la confusion depuis la mort du R.P. Joseph a cause que le V.P. Guillaume nostre superieur en ce cartier a envoyé la plus part des Missionaires de chacun son costé »62 ; voire qu’ils se sentent abandonnés comme le dit explicitement le Père Alexis de Lamballe lorsqu’il adressa une lettre au Père Raphaël de Nantes en affirmant « que depuis deux ans qu’est

59 Ms. 1533, lettre du Père Gabriel d’Alençon au Père Raphaël de Nantes, de Beyrouth le 08/06/1639, p. 335- 336.

60

MAUZAIZE, Jean, Op. cit., p. 290. 61 D

OMPNIER,Bernard, « Missions lointaines et missions de l’intérieur chez les capucins français de la première moitié du XVIIe siècle », in Les réveils missionnaires en France du Moyen Âge à nos jours (XIIe- XXe siècles),

Paris, Beauchesne, 1984, p. 95. 62

decedé le P. Joseph nous autres de Touraine et Bretagne n’avons reçeu aucune assistance »63

. S’il est évident qu’en terre d’Islam, les religieux n’étaient pas forcés de respecter scrupuleusement les décisions du Père Joseph, qui ne pouvait tout connaître et qui n’était pas confronté aux réalités du terrain, son autorité était entièrement reconnue et son action essentielle, car on voit bien qu’après son décès les missionnaires se sentaient abandonnés. Notons que les capucins des provinces de Bretagne et de Touraine faisaient aussi face à la division de l’ancienne province de Touraine, partage qui n’était toujours pas effectif en Orient.

Outre cela, l’année 1638 fut un coup dur pour les missionnaires capucins, car ils ont « perdu en Bagdat le P. Juste de Beauvais qui scavoit parfaitement le persien, l’arabe, et le turcquesque ; au Caire le P. Benoist de Dijon, qui scavoit tres bien l’arabe, et les PP. Agathange et Cassien en Enthiopie, qui tous deux scavoient fort bien les langues du pays, et apres eux le R. P. Joseph »64. Le Père Bonaventure du Lude pouvait encore ajouter le Frère Etienne de Châtellerault à son énumération, car ce dernier décéda à Bagdad dans les mêmes conditions troubles que le Père Juste de Beauvais. Les capucins doivent aussi renoncer à la mission d’Ethiopie suite au martyre de deux de leurs religieux, alors qu’aux Antilles un nouveau gouverneur arrive à l’île de Saint-Christophe, Philippe de Longvillier de Poincy65

, et se montre d’emblée, hostiles aux capucins ; il les chassera de l’île en 1646.

Nous aborderons plus tard les relations entre missionnaires et diplomates français mais admettons pour le moment que ces derniers étaient majoritairement favorables aux capucins. C’est ainsi que les Pères de la mission d’Antalya résidaient « chez Monsieur le Consul pour la nation françoise en ce pays, aux despens dusquels » ils étaient « nourry depuis que l’on a pris ce lieu66 ». Il semble ainsi que les hauts diplomates français, présents au Moyen-Orient, étaient bien disposés envers les capucins bretons. Pourquoi un tel attachement à ces religieux plutôt qu’à d’autres ?

Premièrement, les capucins bretons et tourangeaux étaient français, il était donc logique que leurs compatriotes agissent en leur faveur. Une lettre rédigée en 1643 et pour laquelle on ne possède ni le nom de l’auteur ni le lieu d’émission, si ce n’est qu’elle fut écrite dans l’une des missions présentes en terre d’Islam, nous donne un autre élément de réponse. L’auteur nous dit que les capucins étaient « maintenus par l’authorité et par les lettres de la

63 Ms. 1533, lettre du Père Alexis de Lamballe au Père Raphaël de Nantes, de Saïda le 18/08/1640, p. 526. 64 Ms. 1533, lettre du Père Bonaventure du Lude au Père Raphaël de Nantes, d’Alep le 23/12/1639, p. 360. 65 Il y fut gouverneur jusqu’à sa mort en 1660.

66

Maiesté tres chrestienne d’heureuse mémoire Louis 13e. qu’il a escrittes en leur faveur et

recommendation tant au grand Seigneur qu’au Roy de Perse comme aussi a Messieurs ses Ambassadeurs et Consuls d’Orient, si que a juste titre il peut estre qualifié fondateur des Missions lesquelles ont faict tels progrès pendant sa vie et soubs sa fabveur qu’il ne se pourroit facilement raconter67.»

Le chroniqueur de l’Abrégé des missions des capucines jusqu’en 1665 confirme ces dires. Il intègre à son histoire trois lettres de Louis XIII. Par la première de ces lettres, destinée au cardinal Ludovisi, le roi affirme que les capucins étaient « soubs mon nom et ma protection », il lui demande d’en informer « le pape, les cardinaux et la Congregation de la propagation de la foy68 ». Ensuite viennent deux lettres du roi datant du 26 février 162669. Dans l’une des deux, il les recommande au patriarche des maronites, tandis que dans le seconde il commande à son ambassadeur, le comte de Césy, de s’employer « a la Porte pour obtenir les commandements necessaires » aux capucins pour « la résidence qu’ils veulent establir a Alep et a Seyde ». Parmi les sources retenues nous disposons de la copie d’une lettre qui porte le sceau du roi de France. Elle fut rédigée au camp royal au cours du siège de la Rochelle le 22 juillet 1628. Dans cette lettre, le roi déclare « par ces patentes signées de notre main, que nous avons pris, prenons et mettons en notre protection et sauvegarde les religieux capucins qui vont au dit pays du Levant », il poursuit en encourageant son ambassadeur, puis ses successeurs, à « empêcher, autant qu’il leur sera possible, que lesdits Pères religieux ne soient molestés de personne70 ».

Le roi de France expédie des lettres à ses représentants en Orient pour qu’ils soient bien disposés à l’égard de ces religieux, et aide financièrement les missions capucines. Tout ceci, en partie, grâce aux recommandations du Père Joseph71. Au moins pour le XVIIe siècle, l’aumône royale destinée aux missions capucines était prélevée sur le revenu issu des gabelles du Languedoc. Cette aumône annuelle de 6000 livres était divisée entre les missions des provinces de Bretagne, de Paris et de Touraine72.

Lorsqu’il est fait référence au roi de France, c’est toujours en des termes élogieux. Si l’on revient à la lettre rédigée par un auteur inconnu en 1643, l’auteur semble y écrire un panégyrique du roi de France. Il convient de noter que dans cette lettre l’auteur est plus pompeux que les autres religieux car le roi vient de mourir, ce qui explique qu’il écrit un peu

67 Ms. 1533, auteur inconnu, rédigée dans une mission orientale en 1643, p. 711. 68

Ms. 1436, p. 75. 69 Ibid., p. 76.

70 Ms. 2693, lettre de Louis

XIII au comte de Césy, du camp de la Rochelle le 22/07/1628, p. 1. 71 P

IERRE, Benoist, op. cit., Paris, Perrin, 2007, p. 214. 72

plus loin à propos de Louis XIII: « hélas auiourd’huy que Nostre Seigneur l’a appellé pour luy

donner la couronne de tant d’œuvre heroiques ». Il ne s’agit peut-être que d’un exercice de rhétorique, mais on ne peut nier que s’ils étaient des hommes de Dieu, les capucins bretons et tourangeaux se sentaient aussi français. Dans cette veine l’auteur ajoute que les capucins sont « tous françois de cœur et de nation73 ». Si certaines personnes se le demandent, on constate, à la lecture de ces lettres, qu’apparemment les missionnaires ne revendiquaient pas une identité bretonne ou tourangelle. De plus, Benoist Pierre nous dit que lorsqu’ils érigeaient des bâtiments religieux au Moyen-Orient, les capucins y gravaient les armes du roi de France74. Il n’est jamais fait référence à un tel rituel dans la correspondance des capucins, mais ceci n’est pas impossible, en tout cas rien ne permet non plus de soutenir le contraire.

B. Pierre en nous prouvant que Louis XIII fut associé à l’action apostolique des

capucins, va même jusqu’à parler d’une « religion royale ». Une religion à la tête de laquelle Louis XIII serait le nouveau saint Louis (1226-1270), lui qui a combattu l’hérésie en ses terres

et était prêt à combattre les « mahométans » en Terre Sainte.

On peut noter qu’à la mort du roi Très Chrétien, l’auteur inconnu de la lettre précédemment citée a pu écrire que les « Missions n’ont plus de support »75. Il est donc évident que les capucins voyaient l’importance du roi, et qu’ils savaient qu’il les favorisait par rapport aux autres missionnaires.

Des traces de ce gallicanisme se retrouvent dans les autres missions françaises. C. Galland montre qu’au Canada la royauté a choisi pour missionnaires les récollets, en 1670, car ils semblaient les plus aptes à servir ses intérêts dans la colonie et à y contrebalancer l’influence des jésuites italiens76

. De plus, en 1644 une lettre du roi de France ordonna aux capucins de ne pas recevoir de décret de la Propagande sans qu’ils aient été acceptés par le « Conseil de sa Majesté77 ». en 1725, le ministre Maurepas78 a ainsi écrit que « vous devez savoir qu’aucun bref des papes ne doivent être enregistré qu’ils ne soient revêtus de lettres d’attache de Sa Majesté79

». Ceci confirme que les missionnaires français dépendaient autant, voire plus, de leur roi que du pape.

73 Ms. 1533, auteur inconnu, rédigée dans une mission orientale en 1643, p. 711. 74

PIERRE, Benoist, op. cit., Paris, Perrin, 2007, p. 214.

75 Ms. 1533, auteur inconnu, rédigée dans une mission orientale, en 1643, p. 711. 76 G

ALLAND, Caroline, Pour la gloire de Dieu et du Roi. Les récollets en Nouvelle-France aux XVIIe et XVIIIe

siècles, Paris, Cerf, 2012, p. 175.

77 Ms. 193, p. 32-33 78

Jean Frédéric Phélypeaux (1701-1781), comte de Maurepas, fut Secrétaire d’Etat à la Marine (1723-1749) sous Louis XV.

79 F

ROSTIN,Charles, « Pouvoir royal et missions lointaines, le personnel missionnaire français aux XVIIe et XVIIIe

siècles », in Les réveils missionnaires en France du Moyen Âge à nos jours (XIIe- XXe siècles), Paris, Beauchesne,

Si les rois de France successifs ont protégé les capucins, ces derniers pouvaient leur être utiles notamment dans les relations diplomatiques avec les Etats musulmans, bien que le Père Joseph ne désirât pas que les missionnaires s’occupent des affaires politiques80. Etant les seuls Français en certains lieux, le rôle, volontaire ou non, d’agents diplomatiques du roi ou au moins de représentants de la France leur incombait inévitablement.

Il est vrai qu’en plus d’être des prédicateurs, les capucins ont pu, dans certains cas, servir d’intermédiaire politique, comme le Père Pacifique de Provins qui fut à Ispahan l’agent privilégié des négociations avec le shah de Perse suite à l’échec de la délégation menée par Louis des Hayes81. Toujours en Perse, le Père Raphaël, présent à Ispahan depuis 1647, supérieur de l’hospice de 1649 à son décès, fit office de traducteur aux shahs de Perse dans ses relations diplomatiques et commerciales. Entre la fin de l’année 1654 et le début de l’année 1655, F. Richard trouve la première mention de l’emploi de ce religieux comme traducteur : il traduisit une lettre de l’ambassadeur du roi Charles II (1660-1685)

d’Angleterre82

. Par la suite, les souverains iraniens firent appel, à lui lorsqu’ils traitaient avec les Européens, peu importe leur nationalité.

Tout bon agent diplomatique connaît les relations de son Etat avec les Etats voisins. C’est sans doute pour ne pas faire d’erreur auprès du shah et des dignitaires européens présents en Perse que le Père Raphaël confia à Mr Baron83qu’il ne voyait « point encore bien clair touchant l’estat de France avec l’Angleterre, et le dessein de Flandre mettra bien du brouillé dedans tous les empires d’Europe84

». La guerre de Dévolution (1667-1668) venait en effet d’éclater, guerre franco-espagnole avec médiation anglaise.

Une fonction différente de celle de « diplomate » fut confiée au Père Ambroise de Preuilly qui fut constitué par le gouverneur de Surat « juge de tous les différents des Chrestiens85 ». Cette charge lui donnait une place prééminente parmi les Français mais aussi tous les chrétiens qu’ils soient européens ou orientaux.

Les capucins étaient donc, dans un premier, temps menés par deux personnages importants : le Père Joseph, le chef des missions d’Orient, et Louis XIII, le chef de la nation