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III. INTRODUCTION GENERALE

2. Le gène du RGnRH mammalien et sa régulation dans l’hypophyse

2.3 Les approches in vitro et le décryptage des combinatoires transcriptionnelles

2.3.1. Le promoteur de souris

a. Expression constitutive

Le promoteur murin de 1,2 kb a été le premier promoteur cloné (Albarracin et al., 1994), suivi d’une version plus étendue de 1,9 kb isolée par une seconde équipe (Clay et al., 1995). Un site majeur d’initiation de la transcription dans les cellules αT3-1 a été identifié en position -62 (numérotation définie par rapport à l'adénine du codon d'initiation de la traduction considérée à la position +1), ainsi que deux sites additionnels en positions -90 et -200. Le promoteur est dépourvu des boites classiques TATA et CAAT à proximité de ces sites d’initiation de la transcription. Dans ces deux

études, la spécificité du promoteur a pu être démontrée par transfection transitoire d’une construction contenant un gène rapporteur sous contrôle du promoteur murin, induisant une activité maximale dans la lignée gonadotrope αT3-1, contre une activité relative de 17% dans la lignée somato-lactotrope de rat GH3 et de 5% seulement dans la lignée placentaire humaine JEG-3.

L’activité promotrice spécifique des cellules gonadotropes (αT3-1) est conférée par une région tripartite située dans les 500 premières bases en amont de l’ATG (Figure 9) (Duval et al., 1997a, 1997b). Cette région comporte trois motifs essentiels, l’élément de réponse à SF1 (-243/-235), celui répondant au facteur AP-1 (Activator Protein 1), facteur composé de l’hétérodimère c-FOS/c-JUN (- 336/-330), et enfin un nouvel élément dénommé GRAS (GnRH Receptor Activating Sequence) (-391/- 380) (Duval et al., 1997b). Dans la lignée αT3-1, la mutation isolée de chaque élément réduit d’environ 60% l’activité promotrice, activité totalement abolie par la mutation simultanée des trois éléments. Récemment, plusieurs autres motifs ont été caractérisés : un élément de réponse au facteur PITX1 (- 370/-326) (Jeong et al., 2004), les éléments de réponse à OCT1 (-352/-349) et à NFY (-350/-346) (Kam et al., 2005) et un élément de réponse au facteur LIM (LIN11-ISL1-MEC3) à homéohomaine LHX3 (-360/-357) (McGillivray et al., 2005). Hormis NFY, tous ces facteurs sont des protéines à homéodomaine, dont le site consensus de liaison sur l’ADN contient un motif crucial TAAT (ou ATTA). Une étude récente a évalué l’importance relative des deux TAAT les plus proximaux du promoteur murin dans les lignées gonadotropes αT3-1 et LβT2, et a ainsi permis d’identifier un second élément de réponse à OCT1 en position -131/-128 (Lents et al., 2009). Par ailleurs, les facteurs de transcription CLOCK et BMAL1, formant un hétérodimère connu pour son rôle essentiel dans l’établissement du rythme circadien, pourraient également être impliqués dans la régulation du promoteur dans les cellules αT3-1 (Resuehr et al., 2007). Les 600 premières paires de bases du promoteur murin contiennent sept éléments de type E-box, constituant des éléments de réponse potentiels pour ces facteurs à domaine hélice-boucle-hélice basique (HBHb). L’un de ces motifs E- box, situé en position -270/-265, est sensible à deux facteurs à domaine HBHb, NEUROD1 et MASH1 (Cherrington et al., 2008). Plus précisément, cet élément est transactivé par NEUROD1 dans les cellules αT3-1 et par MASH1 dans la lignée LβT2 plus différenciée. Ce résultat laisse supposer que ce site pourrait, in vivo, être activé de façon séquentielle, d’abord par NEUROD1 puis par MASH1 au cours du développement hypophysaire.

b. Expression régulée

La GnRH joue un rôle majeur dans la régulation du promoteur murin. Deux études ont démontré un effet activateur de la GnRH sur le promoteur dans la lignée αT3-1 (White et al., 1999, Norwitz et al., 1999), qui implique deux régions promotrices (Norwitz et al., 1999) : SURG-1 (Sequence Underlying Response to GnRH) en position -354/-347, et SURG-2 (-338/-331). Ce dernier contient l’élément AP-1, essentiel à l’activité basale du promoteur (Duval et al., 1997b). SURG-1 recouvre les éléments de réponse pour OCT1 et NFY (Kam et al., 2005). En outre, une approche d’immunoprécipitation de la chromatine a démontré une interaction physique d’OCT1, NFYA et c-JUN

SF1 -243/-235 PITX1 -370/-326 NFY -350/-346 OCT1 -352/-349 AP-1 -336/-330 GRAS -391/-380 OCT1 -131/-128 LHX3 -360/-357 NEUROD1/MASH1-270/-265 -62 SURG-2 SURG-1

FOXL2 AP-1 SMAD

Activine

CRE -109/-102

GnRH

SF1 -15/-7 NRS NRS

AMPc

Nur77 DARE AMPc GlucocorticoïdesDans la lignée G-GH3

Figure 9 :

Le promoteur du Rgnrh murin (0,5 kb)

Sur ce schéma sont représentés les différents éléments impliqués dans la régulation de l'activité promotrice du Rgnrh de souris. Le promoteur comporte un site principal d'initiation de la transcription localisé en position -62 par rapport à l'adénine du codon d'initiation de la traduction (+1). La plupart des éléments identifiés participent à la fois à l'expression constitutive du Rgnrh murin et à sa régulation par la GnRH, l'activine ou l'AMPc.

DARE : Downstream Activin Regulatory Element ; GRAS : GnRH Receptor Activating Sequence ; NRS : Nuclear Response Sequence ; SURG : Sequence Underlying Response to GnRH.

(qui fait partie du complexe AP-1) sur le promoteur dans la lignée murine αT3-1. Cette interaction s’accroît suite à un traitement des cellules par la GnRH. Des mutations individuelles des éléments de réponse pour ces trois facteurs diminuent à la fois l’activité basale du promoteur et l’effet stimulateur de la GnRH, indiquant que ces mêmes facteurs sont également impliqués dans la régulation homologue de l’expression du récepteur (Kam et al., 2005). L’activation de SURG-2 succède au recrutement de la voie PKC/MAPK par le RGnRH (White et al., 1999, Ellsworth et al., 2003a), sans que la voie AMPc/PKA soit elle-même activée, en accord avec les données sur le couplage exclusif du

Rgnrh à la protéine Gq/G11 dans ces cellules (Grosse et al., 2000a). Dans un modèle cellulaire

différent, la lignée somato-lactotrope de rat, GH3, transfectée de façon stable par le Rgnrh de rat (lignée G-GH3), la GnRH stimule l’activité du promoteur de souris via la PKC mais également via la voie AMPc/PKA, avec pour cible ultime l’élément CRE (cAMP Response Element) en position -109/- 102 (Lin et Conn, 1998, Maya-Nuñez et Conn, 1999).

L’activine est également capable de stimuler la transcription du Rgnrh endogène ainsi que celle d’un gène rapporteur sous le contrôle du promoteur murin de 1,2 kb dans les cellules αT3-1, cellules qui expriment les récepteurs de l’activine de type I et II (Fernández-Vázquez et al., 1996). En accord avec ces données, la follistatine exerce un effet inhibiteur sur l’activité promotrice basale et induite par l’activine (Fernández-Vázquez et al., 1996, Duval et al., 1999). Elle agit en se liant aux sous-unités β de l’activine, empêchant la formation de dimères actifs. A l’image des cellules gonadotropes hypophysaires, les cellules αT3-1 expriment également l’activine B, suggérant un mode d’action autocrine ou paracrine de ce facteur (Fernández-Vázquez et al., 1996). Sur le promoteur, l’un des éléments de réponse à l’activine correspond à l’élément GRAS (Duval et al., 1999). En outre, la GnRH et l’activine agissent en synergie, probablement via l’instauration d’un dialogue croisé entre les voies de signalisation de leurs récepteurs (Norwitz et al., 2002). En effet, l’élément GRAS est transactivé par des facteurs SMAD, eux-mêmes activés par la voie de signalisation du récepteur de l’activine (Ellsworth et al., 2003b). GRAS est également transactivé par le facteur à domaine Forkhead FOXL2 ainsi que par le complexe AP-1, activé en réponse à la GnRH (Ellsworth et al., 2003a, 2003b). Plus récemment, une étude comparative entre le promoteur de souris et celui de rat, qui est insensible à l’activine et présente une différence d’une base dans l’élément GRAS, a démontré que cet élément est indispensable mais non suffisant pour conférer la sensibilité à l’activine. Une seconde région impliquée dans cette réponse, nommée DARE (Downstream Activin Regulatory Element) a été localisée en aval de GRAS entre -365 et -348, contenant le motif ATTA reconnu par LHX3 ainsi qu’un second TAAT répondant à OCT1, distants de quatre bases (Cherrington et al., 2005). La mutation de ces deux TAAT abolit la réponse à l’activine du promoteur murin. L’implication de LHX3 dans la réponse médiée par DARE est suggérée par l’effet inhibiteur d’un dominant négatif de LHX3 sur la réponse du promoteur à l’activine (Cherrington et al., 2006). En outre, la distance entre GRAS et DARE semble cruciale pour conférer au promoteur murin une sensibilité maximale à l’activine. Ces deux éléments sont séparés par une vingtaine de bases, ce qui les place en phase à deux tours d’hélice sur l’ADN. En modifiant la distance de 5 ou 15 bases, la réponse du promoteur à l’activine est significativement réduite, contrairement aux modifications de 10 ou 20 bases, suggérant une

interaction fonctionnelle entre les facteurs liés, altérée quand GRAS et DARE se trouvent en opposé sur l’hélice d’ADN.

La régulation du promoteur murin par la voie AMPc été mise en évidence dans les cellules αT3-1, en activant la voie PKA par la forskoline ou l’AMPc puis en évaluant la quantité d’ARNm du récepteur par Northern blot (Sadie et al., 2003). Cet effet, à la fois activateur et inhibiteur, met en jeu deux sites sensibles, l’élément SF1 déjà connu (-245/-236) et un second élément de réponse aux récepteurs nucléaires ou NRS (Nuclear Response Sequence) en position -15/-7. Ces deux éléments sont capables de lier SF1 et NUR77 in vitro. Le facteur NUR77 agirait comme régulateur négatif du promoteur murin via l’élément NRS proximal.

Le promoteur du Rgnrh murin serait également sensible aux glucocorticoïdes, comme l’illustre une augmentation du niveau d’ARNm du récepteur suite à un traitement par la dexaméthasone dans les cellules LβT2 (Turgeon et al., 1996). Les mécanismes d’action de ces stéroïdes n’ont pas encore été élucidés dans un contexte gonadotrope, mais des études dans la lignée G-GH3 ont mis en évidence un élément de réponse aux glucocorticoïdes dans le promoteur du Rgnrh de souris, localisé entre -393 et -317 (Maya-Nuñez et Conn, 2003).

2.3.2. Le promoteur de rat

a. Expression constitutive

Une région génomique de 3,3 kb située immédiatement en amont du codon d'initiation de la traduction du Rgnrh de rat a été isolée au laboratoire par PCR inverse (Pincas et al., 1998). A l’exception de 14 bases, la séquence est identique à celle clonée par Reinhart et collaborateurs (1997). Cinq sites principaux d’initiation de la transcription ont pu être identifiés dans les 110 pb les plus proximales. Cette région s'est révélée capable de diriger l'expression d'un gène rapporteur spécifiquement dans les lignées cellulaires murines gonadotropes αT3-1 et LβT2, démontrant ainsi qu'elle possédait les propriétés d'un promoteur histospécifique. Par la suite, l'analyse du promoteur du

Rgnrh réalisée avec ces deux lignées cellulaires a permis de montrer que la région de 1,1 kb

s’étendant de -1135 à -26 était suffisante pour obtenir une expression histospécifique maximale (Pincas et al., 1998). Plus précisément, l’activité de cette séquence se répartit à la fois sur les parties proximale (-475/-26) et distale (-1135/-753) du promoteur, cette dernière constituant un enhancer spécifique nommé GnSE (pour GnRH receptor Specific Enhancer) (Figure 10). Certaines données montrent que le GnSE n’est actif qu’en présence de la partie proximale, suggérant l’existence d’une interdépendance fonctionnelle entre ces deux régions, bien qu'aucune interaction physique claire n’ait pu être démontrée à ce jour.

Quatre séquences cis-régulatrices ont déjà été identifiées dans la région proximale du promoteur de rat (Figure 10) : l’élément CRE liant un facteur de la famille CREB (-110/-103), l’élément SF1 (-245/-237), un élément directement adjacent au motif SF1 et liant un facteur non encore identifié appelé SAP (pour SF1 Adjacent Protein) et enfin le site AP-1 (-352/-346) (Pincas et al., 1998, 2001a).

LIRE

-873/-852 -352/-346AP-1

GATA

-982/-960

Région active distale -1135/-753 (GnSE) Région active proximale -475/-26 5'GnSE -1063/-948 -950/-8273'GnSE

PACAP

SAP -260/-246 -245/-237SF1 -110/-103CRE PARE I PARE II

Figure 10 :

Le promoteur du Rgnrh de rat (1,1 kb)

Contrairement au promoteur murin, la région proximale du promoteur de rat (0,5 kb) n'est pas suffisante pour induire une expression maximale d'un gène rapporteur dans des cellules gonadotropes. Ce promoteur contient une seconde région active distale, le GnSE (GnRH receptor Specific Enhancer), contenant un élément de réponse aux protéines LIM à homéodomaine (LIRE) ainsi qu'un élément liant un facteur de type GATA. Plusieurs éléments intervenant dans l'expression constitutive du Rgnrh de rat sont indiqués sur ce schéma, ainsi que les deux régions PARE (PACAP Response Element) I et II impliquées dans la régulation par le PACAP. Il existe plusieurs sites d'initiation de la transcription situés à -97, -99, -107 et -110.

ISL1/LHX3

La présence de l’élément SF1 sur les promoteurs de rat et de souris, mais également sur le promoteur humain (Ngan et al., 1999), reflète l’importance de ce facteur dans la régulation spécifiquement gonadotrope du Rgnrh mammalien.

En parallèle, les éléments de réponse situés dans l'enhancer distal ont été partiellement identifiés au laboratoire. Deux domaines indépendants et agissant de manière additive, nommés 5’GnSE (-1063/-948) et 3’GnSE (-950/-827) confèrent une activité maximale à l’enhancer (Pincas et

al., 2001a). L'analyse de la région 5'GnSE par retard sur gel (ou EMSA : Electromobility Shift Assay) a

permis de mettre en évidence une interaction avec une protéine apparentée aux facteurs GATA (Pincas et al., 2001a). En outre, un élément de réponse aux protéines LIM à homéodomaine a été caractérisé par de multiples approches au sein du 3’GnSE (Granger et al., 2006). L’élément de réponse caractérisé dans le promoteur du Rgnrh de rat, appelé LIRE (-873/-852), pour LIM Response Element, lie spécifiquement les protéines ISL1 et LHX3, qui interagissent sous forme d’hétérodimère. D’autres facteurs de la même famille, comme LHX9 et LHX5, sont notablement moins efficaces. De plus, SF1 stimule l’activité du promoteur de 1,1 kb en synergie avec ces deux protéines (Granger et

al., 2006), suggérant que ces trois facteurs, au moins, forment une combinatoire transcriptionnelle

activant le promoteur de façon extrêmement spécifique. Les promoteurs de rat et de souris contiennent un élément de réponse bien conservé pour LHX3. Il est intéressant de noter que cet élément LIRE, caractérisé dans l’enhancer distal chez le rat, est situé dans la région proximale du promoteur de souris et en sens inverse par rapport au rat. Il a donc conservé une fonction similaire chez ces deux espèces malgré une position différente et inversée. Enfin, il est important de souligner ici que le promoteur humain répond également à LHX3 et ISL1 (Granger et al., 2006).

b. Expression régulée

Le PACAP (Pituitary Adenylate-Cyclase Activating Peptide) est un polypeptide de 38 acides aminés qui, comme l’indique son nom, a été initialement isolé à partir d’extraits hypothalamiques ovins pour ses propriétés d’activation de l’adénylate cyclase dans des cellules anté-hypophysaires de rat en culture (Miyata et al., 1989). Par la suite, de nombreux effets du PACAP ont été décrits à la fois dans le système nerveux central et en périphérie, en particulier dans l’hypophyse et les glandes surrénales (Counis et al., 2007, Ghzili et al., 2008). Dans les cellules gonadotropes, le PACAP participe notamment à la régulation du Rgnrh de rat. Au laboratoire, cette régulation a été mise en évidence dans les cellules αT3-1, qui expriment les récepteurs PAC1-R spécifiques du PACAP (Pincas et al., 2001b). Les effets induits par le PACAP sur le promoteur du Rgnrh sont similaires à ceux provoqués par la toxine cholérique et sont fortement réduits par un inhibiteur de la PKA, alors que l’activation de la voie PKC n’entraîne aucune variation de l’activité promotrice, démontrant que le PACAP stimule le promoteur du Rgnrh via la voie AMPc/PKA. Ces données sont cohérentes avec la stimulation de l’activité du promoteur du Rgnrh de rat dépendante de la voie PKA précédemment décrite dans les cellules αT3-1, en excluant toute intervention de la voie PKC (Reinhart et al., 1997). Les régions promotrices médiant la réponse au PACAP ont pu être délimitées sur deux éléments, PARE I (PACAP

Response Element) (-272/-237), incluant les éléments SF1 et SAP, et PARE II (-136/-101), qui contient un élément de réponse non palindromique à l’AMPc (TGACGTTT). Ces observations confortent l’idée que ce neuropeptide puisse jouer un rôle crucial dans le fonctionnement des cellules gonadotropes, en particulier sur la synthèse et la libération des gonadotropines (Counis et al., 2007).

2.4 Les apports réciproques entre régulation d’expression génique et mécanismes du développement hypophysaire