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PARTIE III : ANALYSE INSTITUTIONNELLE

III.2 ANALYSE DES PROGRAMMES DE MATHEMATIQUES

III.2.4 Programmes de mathématiques du collège au Sénégal

Voici les objectifs généraux attendus des programmes du premier cycle (collège) :

Assurer la continuité de l’enseignement des mathématiques déjà entamé;

Relier les mathématiques aux activités de la vie : faire le lien entre les connaissances construites et les connaissances mathématiques, l’exploration et la valorisation de l’environnement socioculturel sont conseillées ;

Développer chez l’élève les capacités de raisonnement en favorisant notamment l’accroissement de son habileté à observer, à analyser, à émettre des hypothèses et à les vérifier par une démarche rigoureuse inductive ou déductive ;

Développer son aptitude à une bonne communication basée sur une expression écrite ou orale concise claire et précise ainsi que sur les qualités d’ordre, de soin, et de rationalité;

Mobiliser ses acquis de base pour résoudre des problèmes. La résolution de problèmes est une trame de fond de tout enseignement de mathématiques.

(Programmes de mathématiques du Premier Cycle, 2006, p. 3)

Reste à savoir si ce lien entre les mathématiques et les autres activités de la vie évoqué ici est effectivement pris en charge dans la réalité, au moins en ce qui concerne les notions qui nous intéressent ici.

Nous allons à présent nous attacher à analyser les différentes parties des programmes qui correspondent à la translation et aux vecteurs.

L’étude de la notion de vecteur est abordée pour la première fois au collège en classe de quatrième où elle est associée à la notion de translation dans la rubrique vecteurs et

translation du thème activités géométriques. Le programme de ce niveau d’étude fait une large place à ces deux notions.

Le fait d’associer les deux notions dans le programme peut laisser supposer que l’une des notions est subordonnée à la définition de l’autre, cependant, nous verrons que les sujets sont traités indépendamment l’un de l’autre. Le programme aborde d’abord la translation qui est définie à partir du parallélogramme vu dans les classes antérieures, mais les auteurs précisent dans les commentaires qu’on pourra la présenter comme une application du plan dans lui-même.

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Extrait du programme de quatrième (CNM, 2006, pp.70-72)

Comme on le voit dans les compétences déclinées ci-dessus, la notion de translation apparaît dans cette première rencontre comme un nouvel outil pour résoudre des problèmes de

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géométrie : alignement, distances, angles, parallélisme de droites, droites perpendiculaires. Notons qu’il est dit qu’on doit « aider les élèves à percevoir progressivement la translation comme une transformation ou un déplacement ». Cette dernière idée renforce la conception dynamique de la translation, mais aucun commentaire n’est fait sur les liens et différence avec le mouvement de translation. C’est toutefois logique, vu que cette notion n’est abordée en physique que deux ans plus tard. C’est donc surtout à ce moment-là que le problème de la confusion pourra se poser.

Les vecteurs sont introduits de façon très laconique en lien avec les translations, mais c’est la caractérisation par direction – sens – longueur qui est mise en avant. La notation u est introduite comme si c’était une évidence et le lien avec les translations n’est pas explicité. On peut se demander quelle est la pertinence de l’introduction de la notation u et comment les professeurs arriveront à faire vivre la propriété «Étant donnés un vecteur u et un point A du plan, il existe un point B unique du plan tel que :AB=u» et de quels moyens ils disposent pour la justifier.

Comme on le voit, le principal objectif de l’introduction des vecteurs au premier cycle en quatrième est de fournir un outil efficace de résolution de problèmes de géométrie plane. Ces programmes permettent de mieux prendre en compte l’aspect outil des notions de vecteur et de translation dans les mathématiques.

Enfin, aucun lien avec la physique n’est évoqué.

En 3ème, les vecteurs apparaissent dans la rubrique Activités géométriques. On y étudie trois sujets : l’addition vectorielle, la multiplication d’un vecteur par un réel et les vecteurs colinéaires.

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Extrait du programme de troisième (CNM, 2006, p.92)

On voit ici que le lien entre vecteur et translation, dont on vient de constater qu’il n’était pas explicitement introduit dans les programmes de la classe précédente est ici supposé acquis. Ceci montre qu’il y a un problème de rédaction dans les programmes de la classe de 4ème. L’addition vectorielle est ici reliée à la composition des translations, comme c’est le cas en France au même niveau.

Cette présentation de l’addition vectorielle, qui s’appuie sur les translations est équivalente à la relation de Chasles, mais la relation de Chasles est citée ensuite sans lien apparent avec ce qui précède. De plus, aucun commentaire n’est fait à propos de méthodes de construction effective de la somme de deux vecteurs.

On peut remarquer à travers cette présentation de l’addition vectorielle, une volonté des auteurs du programme de faire voir que cette nouvelle opération sur les vecteurs s’appuie sur la composition des translations, ce qui permet de « régler » la question du représentant. Cependant, on peut s’interroger sur la pertinence de cette présentation vue que la relation

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entre les notions de translation et de vecteur reste implicite aussi bien en classe de quatrième qu’en classe de troisième. De fait, la question de l’unicité de la construction, quel que soit le point de départ reste à démontrer, en l’absence d’un théorème antérieur sur la nature de la composée de deux translations. Il est bien dit dans les commentaires de faire remarquer que la somme est indépendante du point A, mais aucune démonstration de ce fait ne semble être exigée.

Nous avons là un point sensible de l’enseignement des vecteurs et des translations, comme le souligne Pressiat (1999) à propos des programmes français de 1993 :

Il a été constaté que le lien entre la composition des translations et l’addition vectorielle est peu travaillé pour définir cette dernière (ceci revient à inverser les rôles tenus par ces deux objets dans les transpositions didactiques antérieures, inversion que de nombreux professeurs semblent avoir trouvée peu légitime du point de vue du savoir mathématique). Lors des évaluations qui ont été faites, un élève sur deux en moyenne confond « la règle du parallélogramme » avec la « relation de Chasles » en donnant BC ou CB comme résultat pour la somme AB+ AC : pour un tel élève, construire la somme, c’est « fermer le triangle » dont deux côtés sont déjà tracés. (Ibid, p. 244)

Au Sénégal, la règle du parallélogramme n’apparaît pas explicitement dans les programmes à ce niveau, alors que c’est bien la construction la plus utilisée pour la somme des forces en physique.

Les auteurs abordent ensuite la multiplication d’un vecteur par un réel et ses propriétés. Les compétences exigées sur les vecteurs à ce niveau concernent la construction graphique de représentants de vecteurs (bien que la distinction entre un vecteur et ses représentants soit passée sous silence) et l’utilisation des vecteurs pour la résolution de problèmes concernant les configurations (alignement et parallélisme) :

Construire le vecteur somme de deux vecteurs donnés. Connaître et utiliser la relation de Chasles.

Construire le vecteur produit d'un vecteur par un réel donné.

Connaître et utiliser les propriétés de la multiplication d'un vecteur par un réel. Utiliser une égalité vectorielle pour démontrer :

- la colinéarité de vecteurs ; - le parallélisme de droites ; - l'alignement de points. (CNM, 2006, 92-93)

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On peut noter aussi qu’aucune des propriétés de l’addition vectorielle n’est présentée alors que celles relatives à la multiplication d’un vecteur par un réel sont données de façon très formelle et identique aux axiomes de la structure d’espace vectoriel.

Les translations en classe de troisième se séparent des vecteurs pour se retrouver dans l’introduction générale des transformations du plan, et elles ne font l’objet d’aucune compétence exigible. Le vecteur prend donc son indépendance de la translation et se constitue ainsi en thème autonome mais servant d’outil pour la résolution de problèmes géométriques liés aux configurations planes. Cette tendance va se confirmer dans le programme de seconde S que nous allons examiner au paragraphe suivant