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Ce premier chapitre présente le contexte de l’étude au travers une description du processus de mesure en ligne. Une analyse détaillée des sources d’erreurs et des grandeurs d’influence sur la mesure permet de mettre en évidence la nécessité des travaux de caractérisation de la géométrie d’une machine dans ce contexte de mesure. Un état de l’art des moyens d’évaluation des sources d’erreurs sur la mesure en ligne avec un intérêt particulier pour leserreurs géométriqueset leur mo-délisation est effectué, pour finalement en extraire des problématiques scientifiques et techniques. Par la suite, ces problématiques seront traitées et exposées dans le manuscrit dont la chronologie est illustrée à la figure1.36comme épilogue de ce chapitre.

1 Processus de mesure en ligne

Le processus d’élaboration de pièce, malgré sa simplicité apparente, est une succession d’ac-tivités communicantes par un transfert d’informations et qui sont en réalité très complexes [La-vernhe, 2006]. Cette complexité ne permet pas une totale maîtrise du processus. La maîtrise non totale est due à des sources d’écarts présentes sur l’ensemble du processus [Prévost,2011] rédui-sant la capacité à maîtriser la géométrie de pièces finies vis-à-vis de l’objectif initial à l’issue de la définition d’un besoin. La mesure du produit permet de statuer sur l’écart entre le réel et le besoin (figure1.1), par rapport à des tolérances spécifiées dans le cahier des charges.

CAO FAO Besoin Ecart sur le livrable Trajectoire effective Produit fini Exécution sur MOCN

Figure 1.1 – Processus d’élaboration de pièce par enlèvement de matière, à partir de [Tournier,2001].

Cette mesure peut se faire à l’aide d’instruments de mesureou desystèmes de mesuredédiés [JCGM 200,2012]. Ils dépendent de la nature du mesurande, c’est-à-dire de la grandeur que l’on veut mesurer selon leVocabulaire International de Métrologie (VIM)[JCGM 200,2012]. Mais les instruments sont choisis surtout en regard de la dimension dumesurandepar rapport aux grandeurs de base du Système International (SI) d’unités et du niveau d’incertitude de mesuresouhaité sur le résultat de mesure. Ainsi pour des pièces mécaniques, les systèmes de mesureclassiquement utilisés peuvent aller du pied à coulisse, au micromètre, en passant par des systèmes de mesure de formes, jusqu’aux systèmes optiques de très faibles résolutions (p. ex. 0.5 nm dans le cas de l’interférométrie confocale chromatique). LaMachine à Mesurer Tridimensionnelle (MMT)est un moyen couramment utilisé qui associe une grande adaptabilité à la procédure de mesure mise en place et un niveau d’exactitude de mesurepouvant aller de 10 µm à 0,1 µm.

Chapitre 1 : Sources d’erreur volumétrique

Plusieurs stratégies de mesure au sens de Vacharankul et Mekid [Vacharanukul et Mekid,2005] peuvent être envisagées telles qu’elles sont illustrées sur la figure1.2:

– la mesure hors-ligne (« post-processus ») qui est totalement découplée du processus d’élabo-ration de pièce ( 1 figure1.2). Elle se fait sur un moyen de contrôle dédié (P. ex. uneMMT), pour un produit fini ou entre deux phases du processus, soit sur tous les produits de la série soit sur un échantillon. Il y a donc transfert de pièces de la ligne de production dans l’atelier vers la cellule de métrologie, et donc un passage de l’opérateur au métrologue. Malgré ce changement, ce type de mesure est très répandue, car elle offre un maximum de confiance sur lesrésultats de mesureet unetraçabilité métrologique. En revanche, toutes les reprises sur le moyen de production afin d’apporter une correction à la géométrie du produit sont délicates, car de nouvellesMIses en Positions (MIPs), etMAintiens en Positions (MAPs)introduisent des erreurs de positionnement. Ces erreurs difficilement mesurables dans le flux de produc-tion impactent tout de même directement les géométries reprises. Ces raisons ont amené les industriels et de manière générale, les utilisateurs deMachine-Outil (MO)à entreprendre de la mesure en ligne ou in situ.

– la mesure in situ ( 2 et 3 figure 1.2) se fait directement sur le moyen de production avec arrêt de l’activité de réalisation et sans démontage de la pièce. Ce type de mesure peut se faire soit sur pièce finie au même titre que la mesure hors-ligne, ou ponctuellement entre deux opérations au fil de la production. L’objectif est de contrôler la géométrie réalisée et pouvoir intervenir au plus vite par des actions correctrices sur le processus.

– la mesure in-process ( 4 figure1.2), quant à elle, est menée en parallèle de l’enlèvement de matière sur le moyen de production sans arrêt de l’activité de réalisation. Ce type de mesure exige que les mesures de la pièce se fassent durant le processus d’élaboration qui engendre une géométrie finie. C’est pourquoi la mesure in-process est une stratégie au service de la productivité, puisque deux activités (de réalisation et de contrôle) sont intimement liées. Malgré tout, ce type de mesure est difficile à mettre en place, car l’environnement (coupe exothermique, présence de fluides, de copeaux) et la présence d’un outil en broche peuvent être un frein à son déploiement ainsi qu’une source perturbant la mesure [Shiraishi,1989a]. La plupart des mesures in-process sont des mesures temps réel de paramètres du processus et non des mesures de la géométrie produite [Shiraishi,1988,1989b]. Ces mesures peuvent tout de même permettre une compensation de certaines dérives.

Par abus de langage, l’emploi du terme « in-process » est parfois utilisé pour décrire l’en-semble des mesures, ou processus de mesures au sein même ou proche de la chaîne de production. Ce point de vue est notamment celui du projet européen JRP IND62-TIM dans [Wendt, 2015]. Cette définition englobe donc la mesure in situ et in-process au sens de Vacharanukul et Mekid [Vacharanukul et Mekid,2005] (définitions précédemment énoncées).

Quelle que soit son architecture, une MOest un agencement de groupes cinématiques, et de systèmes de mesurequi font partie intégrante de :

main-1. PROCESSUS DE MESURE EN LIGNE

Contrôle off-line de la géométrie du produit fini sur un moyen de contrôle dédié (ex. MMT)

Contrôle in situ (sur le moyen de production) de la géométrie du produit fini

Contrôle in situ (sur le moyen de production) de la géométrie du produit entre deux opérations ou 2 phases de fabrication

Contrôle in-process (sur le moyen de production) de la géométrie du produit pendant la fabrication

Facilité de déploiement au sein d'une chaîne de production, et d'assurer une traçabilité Assurance d'une continuité du processus et minimisation de l'utilisation du parc machine et du personnel Dessin de définition (Besoin) Produits finis

Exécution sur MOCN CAO FAO Ecart sur le livrable 2 3 4 1 2 3 4 1

Figure 1.2 – Les différentes stratégies de mesures lors du processus d’élaboration de pièces.

tient la position relative entre deux objets spécifiés [NF ISO 230-1,2012]. Une paire typique d’objets spécifiés est un outil de coupe et une pièce à usiner. Dans ce cas, la boucle struc-turelle comprend la broche, les paliers et le logement de la broche, les liaisons et le bâti de la machine ainsi que les dispositifs de serrage de l’outil et de la pièce. Dans le cas des machines de grandes dimensions, la fondation (dalle en béton) fait également partie de la boucle structurelle Uriarte et al.[2013].

– la boucle métrologique. Cette boucle, quant à elle, est la structure d’une machine dite de mesure, qui est un générateur de positions, constituée d’un ensemble de solides qui sont reliés par des liaisons paramétrables [Leleu, 2000]. La solution classique consiste à créer une chaîne sérielle de solides et de liaisons cinématiques liant la pièce au système d’ac-quisition terminal. La qualité de mesure de la machine dépend des défauts élémentaires de chaque élément de la boucle métrologique. Les erreurs de chaque liaison et la flexibilité de chaque solide de la chaîne se cumulent pour caractériser l’exactitude finale [Slocum, 1992; Leleu,2000]. Diolez [Diolez, 2006] définit très simplement laboucle métrologiquecomme la chaîne composée de solides et de capteurs, permettant de connaître la position du capteur par rapport à la pièce.

Cependant, laboucle métrologiquene doit pas être confondue avec la chaîne de mesure défi-nie par leVIM [JCGM 200, 2012] comme étant la suite d’éléments d’un système de mesure qui constitue un seul chemin du signal depuis le capteur jusqu’à l’élément de sortie. La chaîne de mesure s’apparente donc plutôt à une chaîne d’acquisition. Cette dernière a pour fonction de re-cueillir et transformer la grandeur à mesurer sous une forme adaptée à son exploitation [Molinaro 9

Chapitre 1 : Sources d’erreur volumétrique

et al., 2015]. Elle est constituée d’un ensemble d’éléments nécessaires à la capture des données (analogiques ou numériques) à leur transmission jusqu’au récepteur et à l’utilisateur des données capturées (l’homme ou la machine).

La mise en exergue des différences entre ces trois concepts que sont la boucle structurelle, la boucle métrologiqueet la chaîne d’acquisitionest faite au travers de la figure 1.3. Il est possible d’observer que certainssystèmes de mesurecommerciaux font appel à des méthodes partiellement découplées de laboucle structurelle. En effet, la figure1.3bcontrairement à la figure1.3a montre que la boucle métrologique est étendue au sol par l’utilisation d’un trépied. Par conséquent les sources de perturbations inhérentes au sol et au trépied, si elles ne sont pas maîtrisées, peuvent nuire à la qualité de la mesure. Par ailleurs, dans les deux applications, un déplacement de la structure permet d’évaluer un écart entre un trajet nominal et un trajet effectif. Or l’écart par rapport au nominal est mesuré par unsystème de mesureexterne n’ayant pas forcément de couplage avec la machine soit par la récupération des informations codeurs soit en passant par la Commande Numérique (CN). Comme le montre la figure1.3, dans ces deux cas, lachaîne d’acquisitionqui est mise en place et qui permet l’acquisition n’intègre pas lessystèmes de mesure(c.-à-d. les codeurs linéaires ou incrémentaux) composant laboucle métrologiqueintrinsèque à laMO. Par conséquent l’image de la géométrie issue de laboucle métrologiquepeut ne pas être conforme à la géométrie de la boucle structurelle. De plus, la CN industrielle opère des transformations sur les valeurs brutes des codeurs en introduisant des compensations préenregistrées par le fabricant [Siemens, 2006b] ou des traitements mal maîtrisés par l’utilisateur. L’image de laboucle structurelleest donc pré compensée par laCN. Elle peut être « floutée » par laCN, à cause de perturbations, de retards d’acquisition dus au temps de cycle (4 à 12 ms), de même qu’une désynchronisation possible entre le déclenchement du capteur et la capitalisation d’informations par lachaîne d’acquisition.

Sous-ensembles cinématiques + codeurs + CN Chaîne d'acquisition Boucle métrologique Boucle structurelle

(a) Mesure par ballbar, d’après Renishaw [Renishaw,

2016a]. Sous-ensembles cinématiques + codeurs + CN Sous-ensembles cinématiques + codeurs + CN Sol + trépied Chaîne d'acquisition Boucle métrologique Boucle structurelle

(b) Mesure par interféromètre laser, d’après EMCI [EMCI,2016].