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Processus contrôlant l'évolution à long terme de la Longe

6.5 Résultats numériques

6.6.2 Processus contrôlant l'évolution à long terme de la Longe

Le premier résultat de cette étude est l'amélioration signicative de la prédiction

morpho-logique obtenue lorsque le forçage de vagues est considéré en plus du forçage tidal. Ce résultat

conrme l'hypothèse formulée par Chaumillon et al. (2008) selon laquelle les vagues pourraient

jouer un rôle relativement important dans le contrôle de l'évolution de ce banc estuarien, bien

que celui-ci soit caractérisé par une morphologie globale dominée par la marée. Dans le but de

mieux comprendre l'impact des vagues sur le transport sédimentaire, et donc sur l'évolution du

banc, le transport résiduel (i.e. transport moyenné sur un cycle tidal) est calculé dans la zone

sud du banc (Fig. 6.5, vecteurs) dans le cas d'un forçage tidal et celui d'un forçage combinant

la marée et un climat de vagues énergétiques. Dans ce dernier cas, les paramètres de vagues au

large sont les suivants : H

s

= 4m,T

p

= 13s, Dir

p

=N290

, de telles conditions menant à une

hauteur signicative d'environ1.3 m sur la Longe. L'évolution du fond étant proportionnelle à la

divergence du ux sédimentaire, son calcul permet de localiser les zones d'érosion et d'accrétion

correspondantes. Plus précisément, l'opposé de la divergence du transport résiduel (pondéré par

le facteur de porosité) est calculé (c'est-à-dire−

1

1−λ

∇ ·Q

res

) et superposé aux vecteurs de

trans-port résiduel (Fig. 6.5, couleurs), puisque c'est à ce terme que la dérivée temporelle de l'élévation

du fond est égale dans l'équation d'Exner (cf Eq. 3.52).

On constate que dans cette partie sud du banc, la diminution de la hauteur d'eau depuis

l'extrémité sud vers la crête du banc entraîne une augmentation des ux sédimentaires, et donc

une érosion (puisque −∇ ·Q

res

< 0 et donc ∂z

b

/∂t < 0; couleur bleue sur la Fig. 6.5). Au

contraire, l'augmentation de la hauteur d'eau depuis la crête du banc vers le anc SE entraîne

une diminution des ux sédimentaires, et donc un dépôt de sédiment (−∇ ·Q

res

> 0 et donc

∂z

b

/∂t >0, couleur rouge sur la Fig. 6.5). Il est intéressant de constater que les zones d'érosion

et de dépôt correspondant aux ux résiduels à l'échelle d'un cycle tidal, et dans le cas où un

climat de vagues énergétique est ajouté au forçage tidal, coïncident relativement bien avec celles

obtenues après40 ans de simulation. Cela suggère que la dynamique à long terme de cette partie

du banc est assez bien expliquée par le transport sédimentaire à l'échelle d'un cycle de marée et

en présence de vagues énergétiques.

La direction du transport résiduel sur la Fig. 6.5 apparaît également aectée par l'action des

vagues, en particulier le long du anc SE du banc. La rotation vers le chenal de la direction du

transport dans cette zone lorsque les vagues sont ajoutées au forçage tidal explique donc le

phé-Figure 6.5: Transport sédimentaire résiduel (vecteurs) calculé sur un cycle tidal dans la zone sud du banc, avec les vitesses d'érosion et de dépôt associées (couleurs) fournies par le calcul du terme− 1

1−λ∇ ·Qres. (a) Forçage tidal uniquement, (b) forçage mixte (marée et vagues), avec les paramètres de vagues au large suivants :Hs= 4 m,Tp= 13s,Dirp=N290.

nomène d'accrétion latérale observé initialement. Le fait, plutôt contre-intuitif, que l'accrétion

sédimentaire se fasse suivant une direction perpendiculaire à celle des courants dominants (i.e.

l'axe du banc) est par conséquent dû à la présence de vagues. Il est également intéressant

d'ana-lyser l'impact des vagues sur le gradient de surface libre dans la partie sud du banc, la présence

de ce gradient étant proposée par Bertin et Chaumillon (2005) comme hypothèse pour expliquer

la déviation horaire des courants dans cette zone. Sur la Fig. 6.6, qui montre la comparaison

entre l'élévation de la surface libre lors du jusant obtenue pour les deux mêmes forçages que dans

le cas du calcul de transport résiduel, on constate que la présence de vagues énergétiques entraîne

l'intensication du gradient de surface libre observé entre les ancs est et ouest de cette partie

du banc. Ce mécanisme pourrait ainsi également contribuer à la déviation horaire du courant et

donc du transport dans cette zone.

An de mieux comprendre l'impact des vagues sur le transport sédimentaire de façon

géné-rale, le transport instantané calculé par la formule de Wu et Lin (2014) dans le cas d'un courant

seul est comparé au transport calculé dans le cas d'un courant en présence d'une vague

sinusoï-dale (Fig. 6.7). Bien que l'ajout de la vitesse orbitale à la vitesse du courant ne change pas la

valeur moyenne de la vitesse totale au cours d'une période de vague, on constate que le

trans-port sédimentaire moyen est augmenté d'environ un ordre de grandeur lorsque l'eet des vagues

est pris en compte. Ceci est dû à la non-linéarité de la relation entre la vitesse du uide et le

transport, et explique l'augmentation des ux sédimentaires obtenus précédemment (Fig. 6.5).

L'importance du rôle joué par les vagues en morphodynamique littorale a déjà été mis en

évidence dans la dynamique des dunes sableuses connectées à la plage (shoreface-connected sand

ridges), ces dunes étant des gures sédimentaires rythmiques observée le long de nombreux

plateaux continentaux dominés par l'action des tempêtes. En eet, Swift et al. (1978) ont observé

Figure 6.6: Élévation de la surface libre dans la partie sud de la Longe, lors du jusant : (a) forçage tidal uniquement, (b) forçage combinant la marée et un climat de vagues énergétiques (cf. Fig. 6.5).

0 2 4 6 8 10 12 0.6 0.8 1 1.2 1.4 vitesse du fluide (m/s) sec courant courant + vagues 0 2 4 6 8 10 12 10−6 10−5 10−4 10−3 sec transport sédimentaire (m 2 /s) courant courant + vagues

valeur moyenne dans le cas courant + vagues

(b) (a)

Figure 6.7: (a) Vitesse instantanée du uide dans le cas d'un courant stationnaire d'amplitude 1 m.s−1

et dans le cas où une vague sinusoïdale est ajoutée à ce courant (la vitesse orbitale est calculée suivant la théorie linéaire pour une hauteur de vague de 0.5m, une période de 12s, et une hauteur d'eau de

4 m). (b) Transport sédimentaire associé calculé avec la formule de Wu et Lin (2014) et suivant la même paramétrisation granulométrique que pour les résultats précédents.

que ces dunes n'évoluaient que lors du passage d'intenses tempêtes, lorsque l'action combinée de

fortes vagues et de courants générés par le vent causait un transport sédimentaire signicatif.

Plus récemment, l'étude de Nnae et al. (2014) s'appuyant sur un système de modélisation

morphodynamique 2DH basé sur les processus a conclu que le mécanisme d'agitation (stirring)

engendré par la présence des vagues était nécessaire pour expliquer la croissance de ces dunes.

Enn, l'impact occasionnel des vagues dans l'évolution de bancs de sable hauturiers a également

été observé par certaines études géomorphologiques (e.g. Tessier et al., 1999; Liu et al., 2007).