• Aucun résultat trouvé

: LES PROBLEMES LIES A L’ATTRACTIVITE DES IDE DANS LA CEMAC

L’ATTRACTIVITE DE LA CEMAC

SECTION 3 : LES PROBLEMES LIES A L’ATTRACTIVITE DES IDE DANS LA CEMAC

3.1 - La corruption

Parmi les problèmes d’ordre institutionnel qui minent l’expansion des IDE dans la CEMAC, La corruption est sans doute le facteur le plus marquant des années d’indépendance de ces pays, surtout en ce qui concerne les secteurs minéraliers et pétroliers, ainsi que la passation des marchés publics. La corruption a fait l’objet de beaucoup de réflexions de la part des organisations internationales et des organismes spécialisés dans la défense des droits et de la légalité. Ainsi, des organismes comme Internationl Country Risk Guide (ICRG), Institute for Management Development (IMD), Transparency Internationl (CPI) ont tous développés des indices de perception de la corruption qui sont publiés régulièrement à la fin de chaque mois ou de chaque année.

Pour ce qui est des pays africains au sud du Sahara (PASS), Assiedu (2002) avance que la corruption est le plus gros facteur dissuasif pour l’implantation des IDE dans les Pays Africains.

Chaque année, l’ONG Transparency international, qui est présente dans de nombreux pays, publie son rapport sur la corruption dans les différents pays du monde. Les notes vont de 10 à 0, et sont classées des pays les moins corrompus (note proche de 10) vers les pays les plus corrompus (proche de 0).

En 2004, Transparency international épingle en particulier les pays producteurs de pétrole : « Comme l’indique l’indice de perception de corruption de Transparency international, les riches pays producteurs de pétrole tels que l’Angola, le Tchad, le Congo, le Gabon, pour ne parler que des Pays de la CEMAC, affichent des scores extrêmement faibles. Dans ces pays, le secteur pétrolier souffre d’une évasion des revenus de la part des proches des dirigeants occidentaux des sociétés pétrolières, des intermédiaires et des fonctionnaires locaux ». Or, ce qui est intéressant dans cette liste, c’est que n’y figurent aucun des pays occidentaux producteurs de pétrole, des Etats-Unis à la Grande-Bretagne, pays dans lesquels les compagnies pétrolières sont indépendantes du gouvernement. Au contraire, tous les pays cités comme corrompus par le pétrole par Transparency

international sont des pays dans lesquels le pétrole est nationalisé et appartient à des compagnies d’Etat. Ce sont pour la plupart des pays ou d’anciens pays socialistes ou socialisants et à économie étatisée, et des dictatures sur le plan politique.

Au niveau de la CEMAC, il ressort du classement que publie l'exécutif de Transparency International (T I), que le Cameroun occupe le 8e rang des pays les plus corrompus de la planète avec 1,8 point contre 2,2 en 2002, année au cours de laquelle le pays s'est classé 13ème sur les 122 de l'échantillon arrêté. Pour l’édition 2003, le Cameroun s’est classé au rang de deuxième pays africain le plus corrompu derrière le Nigeria qui occupe, pour la seconde année consécutive, le rang de deuxième pays au monde de la corruption soit 125ème parmi les 133 pays qui constituent l'échantillon retenu en 2003 (voir tableau 8). Ce constat n'a pas de quoi surprendre, du moment où le programme de gouvernance dans son dernier rapport note que le programme de lutte élaboré cette année là contre la corruption n'a pu être exécuté qu'à hauteur de 22%. D'autre part, les dernières enquêtes sur la situation de ce fléau dans le pays ont identifié six secteurs prioritaires comme étant les plus affectés. Il s'agit, par ordre, de la justice, de la police, de la santé, de l'éducation, les milieux politiques et des douanes. Pour autant, la réalité de la corruption au Cameroun permet de noter que d'autres secteurs comme celui des marchés publics où il faut donner une somme à l’ordonnateur sont de nouveau très actifs, amplifient l'état du mal, sans oublier le secteur pétrolier qui reste la chasse gardée de la présidence de la république.

Comme le Cameroun, d'autres pays africains de la CEMAC restent au creux de la vague selon un rapport de Transparency International publié le 20 octobre 2004, le Gabon fut classé 74e sur les 145 pays inclus dans ce rapport et 97ème en 2005, le Cameroun 137ème et le Tchad 158ème .

Le Gabon croule sous le poids d'une corruption incontrôlée qui sévit à tous les niveaux de l'appareil d'Etat et qui envahit en même temps le secteur privé car les hommes politiques sont également ceux qui contrôlent explicitement ou implicitement la plupart des compagnies établies au Gabon. Omar Bongo lui-même est connu, selon le Sénat américain, comme quelqu'un qui s'accapare, à titre personnel, d'au moins 10% de la rente pétrolière, de plus de 15% des recettes minières et du bois Avec sa famille et ses complices du régime.

Le cas de la corruption au Congo est un exemple dramatique du régime néocolonial en Afrique : le président congolais après avoir hypothéqué le pétrole à ELF Aquitaine, s’est trouvé battu aux élections par Lissouba , et le nouveau gouvernement congolais ayant dénoncé le contrat mafieux passé entre les anciens dirigeants d’Elf-Aquitaine (actuellement en prison) et l’ancien président Lissouba s’est vu chassé du

pouvoir par un coup d’Etat organisé par l’ancien président Denis Sassou Nguesso et financé par Elf depuis leur base d’Angola. Denis Nguesso qui est au pouvoir depuis 1971 sert aussi d’abord les intérêts de sa famille dans un pays qui ne possède aucun axe lourd, ni un hôpital de référence.

Le Tchad et la Guinée Equatoriale sont considérés comme les pays les plus corrompus au monde aux cotés de l’Azerbaïdjan et du Kazakhstan, les secteurs pétroliers étant la source de toutes les convoitises. Au mépris du peuple tchadien, le président Déby a changé la constitution en supprimant la limitation du mandat présidentiel après la découverte du pétrole afin d’assurer sa réélection aux prochains scrutins.

Il ressort de l’analyse de la corruption qu’elle n’est pas le fait le plus souvent du secteur privé, quand il fonctionne librement, mais d’abord du secteur public, livré à toutes les tentations des hommes de l’Etat. Plus généralement, Transparency note que la corruption dans les marchés publics constitue un « obstacle majeur au développement » des pays pauvres. Sur les 4000 milliards de dollars dépensés par les gouvernements pour les marchés publics, les sommes perdues en pots de vin et autres corruptions lors de la passation de ces marchés représentent au moins 400 milliards de dollars, de même, les fonds d’aide publique venus des pays riches sont systématiquement détournés. La lutte contre la corruption passerait donc en priorité par l’introduction de la bonne gouvernance dans la passation des marchés publics.

Tableau 12 : Indice de perception de la corruption de la CEMAC en 2005 Rang

Pays IPC en

2005

Surveys used Ecart-type Min. et max.

Tableau 13 : Indice de la perception de la corruption et classement du Cameroun Année 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005

IPC 1,4 1,5 2,0 2,0 2,2 1,8 2,1 2,2

Classement 85/85 99/99 84/90 84/91 89/102 24/133 129/145 137/158 Source : Transparency International.

3.2 - Le risque pays

Un pays est d’autant plus attractif vis-à-vis des investisseurs étrangers qu’il présente le moins de risque possible. Le pays est dit à risque lorsqu’il peut y avoir un changement politique brusque, lorsqu’il y règne une atmosphère de corruption endémique et la non-transparence institutionnelle, lorsqu’il peut suspendre le paiement ou peut modifier unilatéralement sa dette, ou tout simplement lorsqu’il est en guerre. Ces situations peuvent compromettre les bénéfices d’exploitation comme la valeur des capitaux. Ainsi, le risque pays peut prendre plusieurs facettes et reste très présent dans les transactions internationales.

Selon Bhattacharya et al. (1997), le risque élevé que représente les investissements en Afrique subsaharienne y compris dans la zone CEMAC (voir annexe n°10) expliquerait pourquoi cette dernière n’a pas beaucoup bénéficié de flux d’IDE. Faouzi (2003) pense qu’« investir, c’est en partie prendre des risques, mais pas n’importe lesquels. En réalité, les systèmes transparents où le cadre juridique est efficace et la corruption faible tendent à attirer plus d’investissement ».

Asiedu (2001) explique la faible attractivité des pays sub-sahariens par le risque politique qui sévit dans cette région. Depuis l’accession des pays de la CEMAC à l’indépendance au début des années 60, cette région a connu des périodes mouvementées jonchées de troubles sociaux et politiques. En dehors du Cameroun et du Gabon, la quasi-totalité des pays de cette zone a connu chacun un ou plusieurs coups d’Etats militaires, quand ce ne sont pas des tentatives avortées aboutissant généralement dans un bain de sang. Ce climat n’est pas favorable à un afflux des IDE, et cela explique en partie la rareté des flux de capitaux extérieurs dans cette région d’Afrique jusqu’ à l’ouverture démocratique au début des années 90. Si les dirigeants de l’Afrique de l’Ouest ont accueilli la démocratie avec un certain optimisme, il n’en a pas été le cas en Afrique Centrale et particulièrement dans la zone CEMAC où la mise en place de la démocratie s’est faite à feu et à sang (des dizaines de

morts au Cameroun et au Gabon sans compter qu’à l’heure actuelle, trois des cinq chefs d’Etat qui font partie de la CEMAC, au Tchad, au Congo et en Guinée Equatoriale, sont d’anciens militaires issus des coups d’Etat parfois sanglants).

3.3 - Les coups d’Etat et l’instabilité politique

Le Cameroun n’a pas connu de coup d’Etat militaire, mais une tentative de renversement du régime civil par les militaires au début des années 80 qui s’est soldé par un échec réprimé dans un bain de sang par le régime actuel. Depuis cette date, le régime se maintient au pouvoir en se faisant réélire tous les sept ans avec la bénédiction de l’armée.

Le Gabon, tout comme le Cameroun a eu droit à une tentative de coup d’Etat, mais le régime de Bongo (au pouvoir depuis 1969) se maintient au pouvoir par la corruption des politiciens et la bénédiction de l’armée qui est dévouée entièrement à sa cause.

Le Congo est le pays que nous pouvons qualifier de « tragédie de l’Afrique Centrale », car c’est dans ce petit pays de trois millions d’habitant que la CEMAC a connu son premier coup d’Etat militaire et le premier assassinat d’un chef d’Etat après un coup d’Etat (le premier président Marien Ngouabi renversa le président élu et fut lui-même assassiné quelque temps après par un militaire). Le président actuel qui remplaça Ngouabi fut renversé par les urnes lors de la démocratisation de la CEMAC dans les années 90 et revint à nouveau au pouvoir par un coup d’Etat après une guerre civile de trois mois contre le président élu Bernard Koléla qui fut contraint à l’exil.

La Guinée Equatoriale est gouvernée par un ancien général qui renversa le dictateur Macias Nguema par un coup d’Etat sanglant et depuis lors, ce petit pays du golfe de Guinée qui vivait en reclus et qui était souvent considéré comme le plus pauvre du monde jusqu'à la récente découverte du pétrole est aujourd’hui le pays le plus riche potentiellement en Afrique Centrale devant le Gabon.

Le Tchad dont les nièmes coups d’Etat viennent d’échouer en 2006 et en 2008 a toujours été gouverné par les armes depuis la mort de son premier président Ngarta Tombalbaye assassiné lors d’un coup d’Etat militaire. Depuis lors il y a eut une succession de coups d’Etats menés soit par des rebelles (Hissène Habré) soit par des militaires( Félix Malloum, Idriss Deby) ou même par des civils (Ngoukouni Oueidei). Idriss Deby l’actuel président tente d’instaurer la démocratie, mais en même temps il a fait changer la constitution à sa guise afin de rester au pouvoir.

Nous constatons que tous ces pays affectés par de multiples coups d’Etat et une instabilité politique6 ne représentent pas un endroit favorable pour les IDE. Les problèmes économiques qui frappent ces pays depuis 1990 ont obligé toutefois leurs dirigeants qui sont sous la pression de la Banque mondiale à s’ouvrir et à restructurer leur pays. Le vent de la démocratie qui a soufflé en Afrique Centrale change un peu les choses.

Conclusion

Le chapitre deux avait pour but de faire ressortir les différents aspects de l’attractivité que représente la zone CEMAC. Il ressort de cette revue que des problèmes minent la zone tels la corruption, le risque pays, mais que des efforts notables ont été accomplis par les autorités de la CEMAC dans le but de rendre cette zone économiquement et politiquement attirante. La politique mise sur pied (OHADA) pour attirer les investissements en Afrique et dans la CEMAC se résume en trois points essentiels : 1) la réglementation et le renforcement de la bonne gouvernance ( Etat de droit, charte des investissements) ; 2) le renforcement et la consolidation de la stabilité économique et budgétaire par la politique de convergence macroéconomique au sein de la CEMAC ( taux d’inflation, masse salariale etc.), 3) favoriser de l’exploitation des ressources naturelles existantes et améliorer les infrastructures.

Une analyse empirique va nous permettre de préciser les variables qui ont joué fondamentalement dans l’attractivité des IDE entre 1960 et 2005.

6 Pour plus de détails sur le risque d’instabilité politique, voir annexe 10.

CHAPITRE 3

LES DETERMINANTS DES IDE DANS LES PAYS DE LA CEMAC :