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Chapitre IV 1 ière application : étude comparative des réponses de huit dosimètres pour la mesure

IV. A.2 La problématique des mini-faisceaux

Un « mini-faisceau » est par définition un faisceau de petite dimension dont la taille est telle que des questions particulières doivent se poser pour réaliser correctement la dosimétrie. L’attention doit être portée sur la taille, la composition et le centrage du détecteur.

En routine clinique, pour les énergies de photons habituellement utilisées en stéréotaxie aujourd’hui (RX ou gamma inférieures ou égales à 10 MV), il convient de parler de mini-faisceau lorsque la taille de ce dernier est inférieure ou égale à 30 mm. La taille se réfère soit au diamètre d’un champ circulaire (ce qui est le cas dans notre étude) soit au côté d’un champ carré [IRSN07] [DAS08].

Ces mini-faisceaux vont donc engendrer des problèmes dosimétriques pour la mesure des données de base nécessaires aux TPS telles que le rendement en profondeur, les profils de dose et surtout les facteurs d’ouvertures collimateur. Le rapport ICRU n°91 [ICRU91] est consacré à la problématique de la mesure des mini-faisceaux. Les problèmes dosimétriques sont liés :

- à l’occlusion d’une partie de la source ; - au manque d’équilibre électronique latéral ; - à la variation du spectre en énergie ;

- à la taille du volume sensible du détecteur par rapport au faisceau ; - à la non équivalence eau des détecteurs.

Occlusion d’une partie de la source

Lorsque la taille de champ devient trop petite, la taille du système de collimation (cône stéréotaxique) est du même ordre de grandeur voire inférieure à la taille de la source (cf. figure IV-2). Par conséquent, une partie de la source n’est alors plus visible depuis le point de mesure. La fluence particulaire est alors diminuée sur l’axe du faisceau ce qui va faire chuter la valeur du facteur d’ouverture collimateur de ces mini-faisceaux.

(a) (b)

Figure IV-2 : Illustration de l’occlusion d’une partie de la source [ICRU91]. (a) il n’y a pas d’occlusion de la source et donc pas de recouvrement des pénombres. (b) occlusion d’une partie de la source et recouvrement des

pénombres.

De plus, le profil de dose n’est plus qu’une zone de pénombre ce qui va fausser le calcul de la taille de champ par la méthode de la largeur à mi-hauteur. Cela pose le problème de la définition de la taille de champ pour les mini-faisceaux (cf. figure IV-3). L’IEC (International Electrotechnical Commission) [IEC04] donne deux définitions de taille de champ différentes :

- la taille de champ géométrique définie par la projection géométrique de l’ouverture du collimateur par la source sur un plan perpendiculaire à l’axe du faisceau ;

- la taille de champ d’irradiation définie par la largeur à mi-hauteur du 50 % de la dose maximale (FWHM pour Full With at Half Maximum ou LMH) sur un plan perpendiculaire à l’axe du faisceau.

L'analyse des données publiées sur les corrections de perturbation du détecteur indique que les erreurs commises lors du choix d'une spécification de taille de champ incorrecte sont importantes [DER08]. L’AIEA, via le TRS 483 [TRS483] conclut que la FHWM du profil est le paramètre de taille de champ le plus représentatif pour une dosimétrie précise des mini-faisceaux.

Figure IV-3 : Effet du chevauchement des pénombres sur la FWHM du profil de dose pour les mini-faisceaux illustrant l’élargissement du champ apparent par rapport aux réglages du collimateur [DAS08]

Manque d’équilibre électronique latéral et détecteurs non

équivalents eau

Le manque d’équilibre électronique latéral est présent sur l’axe du faisceau lorsque le rayon du champ d’irradiation est inférieur au parcours latéral maximal des électrons. Ce parcours latéral est environ égal à la profondeur du maximum de dose zmax. Ce parcours dépend donc de l’énergie initiale du faisceau ainsi que de la densité et de la composition du milieu [DAS08]. Li et al [LI95] ont déterminé par simulation Monte-Carlo (EGS4), le rayon minimal circulaire 𝑅𝐿𝐸𝐸 à partir duquel l’équilibre électronique latéral est atteint au centre du champ en fonction du 𝑇𝑃𝑅1020 du faisceau :

𝑅𝐿𝐸𝐸 = 5,973 × 𝑇𝑃𝑅1020− 2,688 [𝑔. 𝑐𝑚−2]

Le problème d’équilibre électronique latéral est donc davantage pénalisant à haute énergie car plus le faisceau est énergétique, plus la taille de champ minimale va augmenter. C’est pour cela que l’IPEM (Institute of Physics and Engineering in Medicine) via son rapport 103 [IPEM103] ne recommande pas l’utilisation d’énergies élevées pour les mini-faisceaux. Le tableau IV-1 indique le rayon minimal pour atteindre l’équilibre électronique latéral en fonction des qualités de faisceau.

Faisceau 𝐓𝐏𝐑𝟐𝟎𝟏𝟎 RLEE (g.cm-2) 60Co - 0,6 6 MV 0,670 1,3 10 MV 0,732 1,7 15 MV 0,765 1,9 24 MV 0,805 2,1

Tableau IV-1 : Rayon minimal pour lequel l’équilibre électronique latéral est atteint pour différents faisceaux [LI95]

Nous remarquons que dans notre cas, avec une qualité de faisceau de 0,669, le seul cône cylindrique pour lequel l’équilibre électronique latéral est atteint est le cône de diamètre 30 mm.

Dans le cas où l’équilibre électronique latéral est atteint, le spectre en énergie des électrons s’étend d’une énergie nulle à l’énergie maximale des photons. En cas de déséquilibre électronique latéral, il manque sur l’axe du faisceau les électrons ayant un parcours proche du parcours maximal, donc les électrons de plus faible énergie (cf. figure IV-4).

Figure IV-4 : Schéma de l’équilibre électronique latéral en un point P sur l’axe du faisceau. (a) l’équilibre est atteint lorsque Rf > Rm. (b) Rf < Rm : il y a un manque d’équilibre électronique latéral. Dans ce cas, il manque au

point P les électrons proches du parcours maximal ce qui modifie le spectre des électrons au point P [MAR14]

Le spectre énergétique va donc être modifié, car l’énergie moyenne des électrons par rapport au faisceau standard va augmenter (cf. figure IV-5).

Figure IV-5 : Spectres en énergie des électrons à 20 cm de profondeur dans l’eau, pour des faisceaux de 5 mm et 100 mm de diamètre et une énergie de 6 MV, calculés par simulation Monte-Carlo d’après [HEY96]

Cette variation de spectre est problématique dans la mesure du FOC lorsque le détecteur utilisé n’est pas équivalent eau. En effet, si la composition du détecteur est significativement différente de celle de l’eau, le rapport des pouvoirs de ralentissement massique (𝑆𝑐𝑜𝑙

𝜌 )𝑑𝑒𝑡 𝑒𝑎𝑢

et le rapport des coefficients massique d’absorption en énergie (𝜇𝜌𝑎𝑏)

𝑑𝑒𝑡 𝑒𝑎𝑢

varient avec l’énergie. Cet effet peut conduire à une sur ou sous-estimation de la valeur du FOC.

De plus, si la densité (et aussi la composition) du détecteur est significativement différente de celle de l’eau, la présence du détecteur va perturber la fluence électronique et ainsi aggraver le défaut d’équilibre électronique latéral.

Variation du spectre en énergie et détecteurs non équivalents

eau

Le spectre en énergie des photons à la surface du fantôme d’eau varie avec la taille de champ. L’énergie moyenne augmente lorsque la taille de champ diminue. Cet effet est dû à la différence de directivité des photons en fonction de l’énergie. En effet, lorsque la taille de champ diminue, la proportion de photons de basse énergie va diminuer à cause de leur directivité moins importante que les photons de plus haute énergie. La figure IV-6 montre la variation du spectre des photons en fonction de différentes collimations, à la surface du fantôme, que nous avons réalisée par simulation Monte-Carlo pour un faisceau de 6 MV.

Figure IV-6 : Variation du spectre des photons dans l’air à la surface du fantôme d’eau pour différentes tailles de

0,000 0,001 0,002 0,003 0,004 0,005 0,006 0,007 0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 in ten sité (n o rm alis ée à l'in tégrale ) Énergie (keV) 10 x 10 cm² Cône 20 mm Cône 10 mm Cône 4 mm

Les résultats nous confirment une diminution des photons de basse énergie par rapport aux photons de haute énergie. La tableau IV-2 indique l’énergie moyenne du spectre de photons en fonction de la collimation.

Collimation Énergie moyenne

10 x 10 cm² 1644 keV

Cône Ø 20 mm 1829 keV

Cône Ø 10 mm 1933 keV

Cône Ø 4 mm 2034 keV

Tableau IV-2 : Énergie moyenne du spectre de photons en fonction de différents diamètres de cônes de collimation et du champ de référence

Ces résultats montrent une augmentation d’environ 400 keV entre un faisceau de 10 x 10 cm² et un faisceau avec un cône de diamètre 4 mm. Ces résultats semblent en accord avec les résultats issus de la littérature puisque Verhaegen et al. trouve une augmentation de 300 keV entre un champ de 5 mm et un champ de 50 mm [VER98].

Dans l’eau, le spectre des électrons secondaires engendrés par le faisceau de photons primaires est également modifié de manière importante lorsque la taille de champ diminue (cf. figure IV-7 b). Heyderian et al. [HEY96] montre que l’énergie moyenne du faisceau d’électrons augmente lorsque la taille de champ diminue, et cela, même pour des faisceaux dont l’équilibre électronique latéral est atteint.

Pour la mesure du FOC avec des détecteurs non équivalents eau, le problème est donc le même qu’expliqué précédemment.

De plus, le spectre en énergie des particules varie avec la profondeur du fait du durcissement du faisceau et de l’augmentation de la diffusion (cf. figure IV-7). Cela peut poser des problèmes pour la mesure des rendements en profondeur avec des détecteurs non équivalent eau.

Figure IV-7 : Variation de l’énergie moyenne des photons (a) et des électrons (b) en fonction de la profondeur et de la taille de champ [HEY96]

Taille du volume sensible du détecteur

Les mini-faisceaux possèdent sur leurs parties centrales, une zone homogène extrêmement réduite : inférieure au millimètre pour le cône de diamètre 4 mm. La principale problématique de la dosimétrie des mini-faisceaux est lorsque la taille du détecteur devient du même ordre de grandeur que la taille du faisceau. Dans ce cas, il y a une sous-estimation de la dose absorbée car la mesure correspond à la moyenne de la dose sur l’ensemble du volume sensible.

Concernant les mesures de FOC, le volume sensible du détecteur, et plus particulièrement sa surface d’entrée perpendiculaire à l’axe, doit rester inférieur à la zone homogène du profil de dose. Lorsque ce n’est pas le cas, on observe un effet de moyennage volumique qui va diminuer l’estimation de la dose « ponctuelle », et donc sous-estimer la valeur du FOC. La figure IV-8, qui représente la réponse des détecteurs en fonction de la surface d’entrée du volume sensible, montre l’importance de la surface d’entrée du volume sensible pour la mesure de la dose « ponctuelle ».

Figure IV-8 : Réponse des détecteurs en fonction de la surface d’entrée du volume sensible dans l’eau à une profondeur de 5 cm pour un faisceau de 6 MV [BJA90] adaptée par l’IPEM [IPEM103]

Concernant les mesures de profils de dose, la surface d’entrée du volume sensible est le principal paramètre qui influence la mesure. En effet, si la surface d’entrée est trop importante la mesure des pénombres va être faussée. L’effet de moyennage va mal définir la zone de fort gradient et donc augmenter les valeurs de pénombre.

Enfin, la taille du volume sensible du détecteur peut avoir un effet sur les mesures de rendement en profondeur. En effet, lorsque la distance source détecteur augmente, la taille du faisceau augmente également. Par conséquent, la proportion du volume de détection irradié ne sera pas la même en fonction de la profondeur. À faible profondeur, le détecteur aura tendance à sous-estimer la valeur de dose absorbée alors qu’à forte profondeur le volume sensible du détecteur se trouve davantage sur la partie homogène.

Positionnement du détecteur

À ces problèmes dosimétriques, s’ajoute l’importance du positionnement du détecteur et de la cuve à eau pour l’ensemble des mesures dosimétriques de base. En effet, à cause de la faible dimension de la zone homogène des mini-faisceaux, une petite erreur de positionnement du détecteur (de l’ordre de quelques dixièmes de millimètre) va induire une sous-estimation sur les mesures de dose

De plus, l’alignement du bras de l’accélérateur et de la cuve à eau, ou plus précisément, du système de motorisation du détecteur, va avoir un impact très important sur la mesure du rendement en profondeur. L’axe du faisceau doit être parfaitement perpendiculaire à la face d’entrée du fantôme d’eau et le système de motorisation doit permettre un déplacement vertical sans induire de décalage. Scott et al. [SCO08] ont montré par simulation Monte-Carlo qu’un décalage de 1 mm par rapport à l’axe du faisceau, pour un champ de 5 mm de côté, entraîne une augmentation du rendement mesuré de 0,8 % à 1,5 cm de profondeur.

IV.A.3 Le formalisme AIEA pour la mesure du débit de référence