• Aucun résultat trouvé

Chapitre II. Intérêt des structurations multicouches à l’échelle nanométrique

II. Problématique

La conductivité des matériaux est bien connue pour les matériaux monocouches. En effet, il existe trois grandes classes de matériaux :

- les conducteurs,

- les isolants,

- les semi-conducteurs.

Les matériaux conducteurs sont généralement métalliques et les deux autres classes comprennent une multitude de composés dont les oxydes métalliques. Le semi-conducteur (SC) est à l’interface des propriétés des métaux et des isolants. Le but de ces travaux est d’étudier la possibilité de produire un matériau au comportement de conduction hybride entre un semi-conducteur et un métal (Fig. II.7), tout en se concentrant sur les relations qu’il pourrait y avoir entre la structure des films périodiques et leurs propriétés électriques. Ces travaux concernent des couples métal/oxyde, respectivement conducteurs (titane, tungstène,

tantale) et semi-conducteurs (TiO2, WO3, Ta2O5). L’ordre de grandeur de la résistivité de ces

matériaux étant voisin de 10-7 Ω.m pour les métaux et supérieur à 10-2 Ω.m pour les

conducteurs déficients en oxygène proches des semi-conducteurs, une grande gamme de résistivités est à exploiter entre un métal et son oxyde.

En outre, cette différence de conductivité est due (entre autre) à la concentration en porteurs de charges présents dans la matière. En effet, ces porteurs peuvent être des électrons ou des trous dans les semi-conducteurs, ce qui engendre une nette différence dans la quantité de flux de courant transmise par le matériau.

34

Figure II.7. Réponses résistives classiques en température des matériaux encadrant les possibilités souhaitées de mélange des propriétés électriques par nanostructuration de

multicouches périodiques.

Le flux de courant pouvant traverser un matériau diffère selon sa nature et sa composition. Un métal présente une réponse résistive linéaire en fonction de la température (Fig. II.8.a) et cette conduction augmente avec l’épaisseur totale du dépôt jusqu’à une épaisseur critique [52].

Figure II.8. a) Résistivité de différents métaux en fonction de la température et b) résistivité à différentes températures du cuivre en fonction de l’épaisseur de la couche déposée [52].

35

En effet, dans le cas du cuivre, pour des épaisseurs nanométriques, les dépôts métalliques sont plus résistifs et tendent vers un maximum de conduction pour des épaisseurs de l’ordre de la centaine de nanomètres (Fig. II.8.b).

L’idée directrice de ces travaux est donc de réguler la conduction d’un métal par l’ajout de couches de semi-conducteur et/ou inversement. Une étude menée sur des mélanges métal/oxyde montre que le comportement électrique des semi-conducteurs comme les

composés AlyOx [53] peut être grandement modifié avec une faible incorporation de

particules métalliques. D’autres études démontrent l’influence des interfaces et des joints de grains sur la conduction électrique en température de multicouches [54-59]. Dans ces études, il est à noter que la résistivité mesurée se situe entre les valeurs de conduction du métal et du semi-conducteur. De plus, la réponse semble être toujours linéaire en fonction de la température, mettant en évidence une conduction de type plutôt métallique caractérisée par l‘équation suivante :

(II.05)

Où 0 est la résistivité mesurée à T0 = 300 K et 0 est le coefficient thermique de

résistance TCR (K-1) défini par la relation suivante :

[ ]

(II.06)

Les TCR métalliques sont généralement positifs comme mentionné ci-dessus, mais parfois cette réponse peut être décroissante en fonction de la température. Cet effet est principalement attribué au libre parcours moyen des électrons par rapport à la taille des grains [60]. Ce dernier point montre donc que la réponse de la conduction dans un matériau métallique peut être modifiée par la structure cristalline.

L'objectif de ces travaux est non seulement d’associer un semi-conducteur avec un métal de manière à influencer cette réponse, mais aussi de produire des matériaux à TCR nul. Ce comportement invariant en température a déjà été réalisé pour des couches d'oxynitrure de titane élaborées par RGPP [61]. Mais les nitrures surtout utilisés pour leur grande dureté n’ont pas la gamme étendue des propriétés de conduction que peuvent posséder les oxydes. Or, la

36

résistivité de ces derniers est très fluctuante surtout à température ambiante (semi-conducteur). Ainsi, maîtriser la réponse électrique en température d’un oxyde serait déjà une première avancée. De plus, la conductivité des oxydes peut être sensible à la présence de certains gaz. Ce contrôle de la réponse électrique permettrait alors une détection plus fine des gaz adsorbés à la surface de ce type de matériau sensible [17]. De plus, si la réponse électrique du matériau sensible est invariante en température (Fig. II.9), il serait alors possible de s’affranchir de l’ajout de composants électroniques de compensation engendrant des surcoûts de fabrication.

Figure II.9. Schéma de principe du fonctionnant d’un capteur de gaz à détection conductimétrique dans le cas où la conduction du matériau est invariante en température.

L’exemple d’une application possible de cette structuration métal/oxyde multicouche est donné par la figure II.9. Cette dernière représente l’évolution de la résistivité d’un matériau sensible sous forme de structures multicouches périodiques lors de la détection d’un gaz. On peut noter cinq étapes de fonctionnement du capteur si la résistivité est invariante en fonction de la température :

- étape 1 : la résistivité mesurée est celle du système multicouche à température ambiante, - étape 2 : un gaz s’adsorbe sur la surface du matériau sensible (dernière couche composée d’oxyde) et la résistivité mesurée sera celle du système multicouche + gaz. La variation de résistivité sera fonction de la quantité de gaz adsorbé,

37

- étape 3 : afin de pouvoir reconduire une détection, le système est chauffé pour enlever le gaz adsorbé. La résistivité tend à retourner à la valeur du système multicouche seul, - étape 4 : plus aucune molécule de gaz n’est présente à la surface du capteur et le chauffage peut être stoppé,

- étape 5 : le système retourne à température ambiante (étape 1). La « réaction » entre le matériau sensible et le gaz est réversible et la résistivité mesurée est celle du système multicouche d’origine.

Une fois ce concept décrit, il est à noter que le système devient un composant électronique comparable à un interrupteur logique « 0 – 1 » simple de fonctionnement et d’utilisation. La problématique de ces travaux énoncée, il faut maintenant décrire le type de couple métal/oxyde choisi pour répondre aux attentes présentées ci-dessus.