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Chapitre II. Intérêt des structurations multicouches à l’échelle nanométrique

I. Intérêt d’une nanostructuration multicouche

I.2. Les propriétés fonctionnelles des multicouches périodiques

Ce paragraphe s’attache à décrire les propriétés des films périodiques, ainsi qu’à détailler les conditions nécessaires à l’obtention de propriétés exacerbées, originales ou nouvelles engendrées par des structurations périodiques de couples de matériaux. Bien qu'un effet mécanique ne puisse être comparé à un effet optique, des pistes de recherche émergent aussi de ces domaines.

I.2.1. Propriétés électriques

En ce qui concerne l’étude des propriétés électriques, la configuration symétrique est la plus employée. Les conductions de diverses couches externes sont connues et l’influence de l’ajout d’une couche centrale a été étudiée [17,18]. De plus, ces propriétés des matériaux multicouches ont été particulièrement étudiées pour les systèmes Métal/Oxyde/Semi-conducteur (M.O.S.) [19,20] très largement utilisés dans le domaine de l’électronique.

Ces systèmes étant non périodiques, les conclusions apportées par leur étude sont difficilement applicables à notre configuration périodique. Toutefois, la conduction dans les bi-couches a été théorisée [21]. Depuis, des études ont été menées sur les propriétés de

conduction des multicouches périodiques [22-25]. Sata et al. [26], puis Guo et al. [27] se sont

particulièrement attachés à déterminer et étudier l’influence que l’épaisseur des sous-périodes

peut avoir sur la conduction en température des systèmes périodiques CaF2/BaF2. La

figure II.2 montre que l’association de deux composés CaF2/BaF2 sous forme de multicouches

périodiques possède des valeurs de conduction différentes comparées à celles des

monocouches de CaF2 et BaF2 mesurées distinctement. De plus, il faut noter que la conduction

des multicouches augmente avec la réduction d’épaisseur des sous périodes et que celles-ci

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Figure II.2. Conductivité en température des multicouches périodiques CaF2/BaF2 en fonction de l’épaisseur de leurs sous-périodes [28].

Fert et al. [29] montrent que la configuration périodique de couches ferromagnétiques

séparées par un film ultra-mince (environ 1 nanomètre) de métal non ferromagnétique (Fe/Cr/Fe) engendre un phénomène appelé la magnétorésistance géante. Celle-ci a été observée pour la première fois dans une configuration multicouche, et la recherche concernait

principalement des empilements de dix couches ou plus. Une étude de Springer et al. [30]

montre que la réponse électrique en température d’un matériau multicouche TiO2/Ti peut être

liée au rapport d’épaisseurs de sous-couches TiO2/Ti et que la conduction augmente avec

l’épaisseur des sous-périodes (Fig. II.3).

Figure II.3. Conductivité DC en température et énergie d’activation pour différentes épaisseurs de couches à rapport d’épaisseurs TiO2/Ti constant [30].

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Sur la figure II.3, on peut remarquer que la conduction en température de ces couches est dépendante du rapport d’épaisseur de chaque sous-couche. Ainsi, avec le même rapport épaisseur d’oxyde sur épaisseur de métal, il y a variation de conduction avec une épaisseur

totale constante. Toutefois, Springer et al. notent que l’épaisseur de la période influence la

valeur d’énergie d’activation des systèmes périodiques TiO2/Ti. On peut donc remarquer que

le caractère périodique des couches joue un rôle dans le domaine de la conduction électrique.

I.2.2. Autres propriétés a) Propriétés mécaniques

Koehler [31] figure parmi les premiers en 1970 à évoquer des agencements périodiques pour des revêtements durs. Il répertorie les conditions nécessaires à la réalisation d’un tel revêtement multicouche composé de deux matériaux A et B. Parmi ces conditions, A et B doivent être non miscibles, posséder des modules d’élasticité différents et être de préférence empilés de façon épitaxiée afin d’éviter des contraintes localisées aux interfaces. Différentes études sur les multicouches montrent que même si le revêtement multicouche n’est pas constitué de couches épitaxiées, ses propriétés fonctionnelles comme la dureté, l’adhérence ou la tenue à l’usure vont être fortement dépendantes de la période Λ de la nanostructuration [32-46] (Fig. II.4).

Figure II.4. Premier résultat publié en 1987 sur les variations du module de Young d’un revêtement multicouche TiN/VN en fonction de la période Λ du super réseau [25].

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Le paramètre influençant donc le plus les propriétés mécaniques telles que le module de Young ou encore la dureté est la période Λ du super réseau. Généralement, cette période doit être comprise entre 5 et 10 nm pour pouvoir observer des propriétés mécaniques exacerbées.

b) Propriétés optiques

De nombreux travaux concernent les propriétés optiques de multicouches de couples métal/oxyde [47-51]. La période a aussi son importance sur l’influence de la réflexion et/ou de la transmission optique. L’exemple type des ondes réfléchies par un miroir multicouche est décrit par l’interférence constructive des réflexions sur toutes les interfaces. Une structure multicouche possède un maximum de réflectivité quand les réflexions sont en phase pour chaque alternance de couche et donc interfèrent constructivement. Cela revient à satisfaire la loi de Bragg :

(II.01)

Avec d la période de la multicouche, θ l’angle de Bragg, n l’ordre de diffraction

(nombre entier) et  la longueur d’onde du rayonnement. Pour un angle de Bragg donné, on

fabrique une structure multicouche avec une période d de manière à sélectionner la longueur d’onde souhaitée. La figure II.5 représente une coupe schématique d’une structure multicouche.

Figure II.5. Schéma d’un miroir multicouche optique.

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(II.02)

est le décrément à l’unité de l’indice optique moyenné sur une période :

(II.03)

Où Γ est le rapport des épaisseurs des couches contenant l’élément lourd sur la période du miroir multicouche.

(II.04)

Avec ce simple exemple, on remarque que la condition de réflexion est régie tout d’abord par le type de matériaux utilisés mais aussi par un rapport d’épaisseurs de chacune

des couches. Ainsi, une simple différence d’épaisseur de couche () nous a amené à observer

des différences de propriétés optiques pour  < 10 nm (Fig. II.6).

Figure II.6. Transmission optique des multicouches Ti/TiOx de période Λ < 25 nm élaborées par le procédé de gaz réactif pulsé (RGPP).

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Les structures les plus généralement utilisées pour l’étude des propriétés des multicouches ont été présentées. Ainsi, il est à noter que différents paramètres tels que la composition, la structure cristalline, l’épaisseur, le nombre d’interfaces et l’agencement des couches influencent les propriétés finales du matériau élaboré. En conclusion, la nature des matériaux, les différentes interfaces (A/B, B/A, joints de grains …), et l’agencement périodique et nanométrique de chacune des couches sont autant de paramètres à maîtriser afin de modifier les propriétés des matériaux multicouches périodiques. L’influence de l’épaisseur totale, de la période ou encore du rapport d’épaisseurs des couches a été montrée pour diverses propriétés. La suite de ce manuscrit s’attachera à mettre en relation la structure périodique des films et leurs propriétés électriques.