• Aucun résultat trouvé

III.2.2 MODELE MECANIQUE DETERMINISTE AUX ELEMENTS FINIS (ETAPE 2)

III.2.2.2 Prise en compte de la succion matricielle

Nous avons vu dans la Partie I qu’il était important de prendre en compte le comportement non saturé des sols, et dans la Partie II comment nous pouvions obtenir, à partir des données disponibles sur un barrage en remblai, la courbe de rétention permettant de le représenter. La non saturation a une influence sur l’écoulement dans le remblai mais également sur son comportement mécanique : l’hétérogénéité de saturation du sol va modifier d’une part le poids volumique du milieu, et d’autre part créer des forces de cohésion par capillarité.

L’équation Eq. III. 11 décrit l’expression du poids volumique apparent 6&& en fonction de la porosité Y et du degré de saturation du sol S, < et 8 étant respectivement le poids volumique solide du sol et celui de l’eau (Masekanya, 2008) :

6&&= C1 − YD < ? Y S 8 Eq. III. 11

L’utilisation de la contrainte effective de Bishop (cf. Eq. I.5) avec l’égalité [C SD = S modifie l’expression de la contrainte de cisaillement H = !7? .′ tan #′ qui devient, avec les notations utilisées au I.3.3.1 (Masekanya, 2008) :

H = !7? Stan #′ I ? C. − I6D tan #′ Eq. III. 12 Nous voyons donc apparaître un terme de cohésion supplémentaire !6CItD = S tan #′Itrelatif à la cohésion capillaire et dépendant de la succion matricielle I . La cohésion apparente totale s’écrit alors :

Dans la démarche que nous proposons, la prise en compte des relations Eq. III. 11 et Eq. III. 13 dans le modèle mécanique peut être faite pour tenir compte de la non saturation à partir du champ de succion matricielle donné par la modélisation hydraulique décrite dans la Partie II. Dans une approche non couplée entre les modèles hydraulique et mécanique, l’intégration dans le modèle de ces deux relations peut être facilement réalisée.

III.2.2.3 Calcul du facteur de sécurité par la méthode des éléments finis

Le calcul du facteur de sécurité par la méthode des éléments finis, et plus particulièrement par celle dite de réduction des paramètres de résistance, a été présenté au I.3.5.3 et nous avons mis en évidence le fait que la rupture d’un massif de sol n’est pas simple à définir numériquement et que de nombreux auteurs employant la méthode de réduction des paramètres considèrent la non convergence du calcul aux éléments finis pour estimer le facteur de sécurité.

Cette façon de procéder peut cependant être problématique dans le cadre d’une analyse probabiliste nécessitant l’enchaînement d’un grand nombre d’appels au modèle déterministe aux éléments finis, la non convergence étant souvent à l’origine de l’arrêt du code de calcul.

Nous proposons donc d’autres approches alternatives à celle considérant la non convergence pour le calcul du facteur de sécurité : la première est basée sur le calcul du travail du second ordre, la seconde sur l’analyse des courbes d’évolution tracées lors de la réduction.

Travail du second ordre

Un des problèmes les plus complexes en géomécanique est de définir, d’analyser et de simuler la rupture (Darve et al., 2004). Pour les géomatériaux, la notion de rupture est souvent décrite par l’existence de certains états de contraintes limites définissant une surface de rupture dans l’espace des contraintes (Laouafa et al., 2011; Nicot et al., 2011). Cependant, il a été observé en pratique que la rupture peut se produire bien avant que cette surface de rupture (pouvant par exemple être définie par le critère de Mohr-Coulomb) ne soit atteinte, à cause de la non-associativité. Le phénomène de liquéfaction en est par exemple une illustration (Khoa, 2005). En effet, les sols sont reconnus comme étant les matériaux les plus fortement non-associés à cause de la dépendance à la pression de leur comportement plastique (Nicot et al., 2011).

Cette première conclusion motive la définition d’un critère de stabilité plus global. Hill (1958) a proposé un critère de stabilité d’un système mécanique basé sur l’analyse du signe du travail du second ordre. D’après (Hill, 1958), un système est considéré comme instable si pour une petite perturbation de contrainte, la déformation peut se poursuivre de manière infinitésimale sans apport d’énergie extérieure au système (Khoa, 2005). Dans le cadre de l’élasto-plasticité associée, le critère de Hill s’exprime par l’inégalité suivante :

= f.7∶ f> > 0 Eq. III. 14

stipulant qu’un état de contraintes-déformations est stable si, pour tout couple Cf.7 , f>D d’incréments de contrainte effective et de déformation, le travail du second ordre est strictement positif.

CISAILLEMENT ET COUPLAGE MECANO-FIABILISTE

Ce critère de stabilité suppose donc que l’initiation de la rupture est associée à l’apparition d’instabilités. Il a été récemment utilisé dans un certain nombre d’études relatives aux géomatériaux (Darve et al., 2004; Laouafa et al., 2011; Nicot et al., 2011; Nicot et Darve, 2015). Certains auteurs l’ont également considéré pour évaluer la stabilité des pentes (Khoa, 2005; Prunier et al., 2009; Lafifi, 2011) Il fait intervenir des notions plus complexes qui ne sont pas abordées ici. Nous renvoyons le lecteur à la littérature citée pour plus de détails.

Le critère de stabilité de Hill a déjà été utilisé avec les codes aux éléments finis PLAXIS (Lafifi, 2011), LAGAMINE (Khoa, 2005), et Cast3M (Prunier, 2014). Le calcul du travail du second ordre dans un code éléments finis est effectué pour tous les points d’intégrations du milieu continu et entre deux pas d’équilibre successifs. L’instabilité correspondrait au non respect de la condition Eq. III. 14 en un point qui peut être considéré comme un indicateur de la rupture locale et donc l’amorce de la rupture globale (Khoa, 2005).

Khoa (2005). propose, pour plus de lisibilité, de normaliser le travail du second ordre local par rapport au produit des normes des incréments de contraintes f.7 et de déformations f> :

V= f.7:f>

f.7 f> Eq. III. 15

En sommant la quantité V sur l’ensemble du domaine d’étude, il est possible de déterminer le travail du second ordre global V= ∑ V,„.

Le critère de Hill peut être utilisé dans une démarche telle que celle que nous proposons pour définir l’apparition de la rupture en étudiant le signe de la grandeur scalaire V. L’avantage de ce critère est qu’il est physiquement fondé et, en outre, relativement facile à mettre en œuvre dans une modélisation par éléments finis.

Analyse des courbes d’évolution au cours de la réduction des paramètres de résistance

La courbe d’évolution de certaines variables au cours du processus de réduction des paramètres de résistance, comme le déplacement maximal, peut avoir une forme particulière (cf. Figure I. 12). Griffiths et Lane (1999) décrivent par exemple une accélération brutale du déplacement maximal à l’approche de la rupture.

(Fell et al., 2000) précisent que, pour des glissements de terrains naturels, du fait de la nature visqueuse des sols, le taux de mouvement \, correspondant au déplacement en fonction du temps, ne passe pas abruptement de 0 à 1 lorsque le facteur de sécurité †< devient inférieur à 1 mais qu’il augmente progressivement en fonction du niveau de contrainte de cisaillement appliqué. Ils montrent que ce taux de déplacement peut se mettre sous la forme d’une loi puissance de paramètres Ñ et Y :

\ = Ñ l1

<nV Eq. III. 16

Nous proposons ici est de tracer les courbes de certaines variables évoluant au cours de la réduction des paramètres et d’ajuster sur ces courbes des relations mathématiques asymptotiques prédéfinies permettant soit de déterminer directement le facteur de sécurité, soit de participer à un critère numérique permettant son estimation.

L’extrapolation de la courbe asymptotique permet de prédire la prochaine valeur de la variable d’étude afin d’arrêter le calcul avant que la non convergence, causant souvent l’arrêt brutal du code de calcul, ne survienne.

A titre d’illustration, si on reprend l’exemple de la Figure I. 12 et que l’on considère que le déplacement maximal tend vers l’infini lorsque le facteur de réduction tend vers le facteur de sécurité, l’ajustement d’une équation mathématique comportant une asymptote verticale permet de prédire le facteur de sécurité tout en restant à des facteurs de réduction biens inférieurs (Figure III. 5).

Figure III. 5 Exemple d'ajustement d'une courbe d'évolution

Les deux approches présentées dans cette section – critère de stabilité défini par le travail du second ordre et ajustement des courbes d’évolution du déplacement maximal – sont des propositions de critères d’arrêt du calcul numérique afin d’éviter l’occurrence de la non convergence pouvant causer l’arrêt de certains codes de calcul.