• Aucun résultat trouvé

Prise en compte de la cassure du deuton et d’autres voies de réaction avec le deuton

Dans la partie précédente, nous avons estimé expérimentalement la contribution des réactions sur les noyaux de carbone de la cible au spectre d’énergie d’excitation. Cependant, de nombreuses réactions autres que le transfert et produisant des protons peuvent avoir lieu avec le deuton. On peut, par exemple, considérer les réactions suivantes :

(d,pn) : cassure du deuton en ces deux constituants élémentaires. Il est nécessaire de distinguer la cassure élastique du deuton, lors de laquelle le noyau incident reste dans son état fondamental et aucun des constituants du deuton n’interagit avec lui, et la cassure inélastique lors de laquelle un des constituants du deuton interagit avec le noyau incident et l’excite.

(d,2p),

(d,pα),

...

Nous tenterons d’estimer ici la contribution aux spectres expérimentaux de ces réactions. Une simulation a été réalisée dans ce but. Celle-ci sera présentée dans un premier temps. Dans une deuxième partie, la section efficace de cassure élastique du deuton sera quantifiée à l’aide d’un modèle de réaction de type DWBA.

3.8.1 Principe du fonctionnement de la simulation : définition d’un espace de phase.

Lors d’une réaction ayant plus de 2 corps en voie de sortie, la cinématique n’est pas fixée entière- ment par les caractéristiques de la voie d’entrée. Les lois de conservation de l’énergie et de l’impulsion permettent de définir l’espace des phases de la voie de sortie, c’est à dire l’ensemble des valeurs acces- sibles pour les quadrivecteurs de chaque particule de sortie. Parcourir cet espace des phases revient à parcourir l’ensemble des configurations possibles pour la voie de sortie et permet d’accéder aux angles et énergies des différentes particules. Une simulation Monte-Carlo prenant en compte la géométrie de notre dispositif de détection a été créée pour étudier les réactions pouvant produire des protons.

Pour la réaliser, nous avons utilisé la classe TGenPhaseSpace de ROOT [44]. Celle-ci permet de générer, à partir du quadrivecteur de la voie d’entrée (somme des deux quadrivecteurs d’entrée), un évènement à plusieurs corps (au maximum 18 ! !). La section efficace issue de la simulation est isotrope dans le centre de masse.

Les évènements ainsi simulés sont relus à l’aide du programme d’analyse afin d’effectuer exactement les mêmes sélections que pour les évènements de transfert (voir la partie3.6). Cela nous permet de considérer uniquement les protons ayant les bonnes caractéristiques pour être détectés par le dispositif expérimental. Lors de notre analyse, on suppose que tous les protons détectés sont issus de la réaction de transfert (d,p). Comme explicité à la partie3.3, la cinématique de cette réaction particulière permet de déterminer l’énergie d’excitation du noyau produit lors de la réaction de transfert. Ainsi les protons issus d’une réaction telle que la cassure du deuton vont contribuer au spectre d’énergie d’excitation et vont donc contaminer nos spectres : il convient donc de les éliminer ou du moins de les estimer.

3.8. Prise en compte de la cassure du deuton et d’autres voies de réaction avec le deuton. 111

3.8.2 Résultat pour les différentes voies de réaction considérées.

Pour un dispositif expérimental idéal. Nous avons étudié les trois réactions énumérées précédem-

ment dans le cas du 36S et du34Si. La figure Fig.3.22 montre leur contribution au spectre d’énergie

d’excitation dans le cas du34Si (Fig.3.22(a)) et du36S (Fig.3.22(b)).

(a) Réaction avec le34Si. (b) Réaction avec le36S.

FIGURE3.22: Contribution au spectre d’énergie d’excitation des réactions parasites suivantes : (d,pn) en

noir, (d,pα) en bleu hachuré. La contribution de la réaction (d,2p) est représentée par le spectre rouge plein. Seules les réactions élastiques sont représentées ici.

A noter que les résultats présentés ici ont été obtenus pour une simulation considérant une section efficace isotrope dans le référentiel du centre de masse et sans considérer l’effet de l’épaisseur de la cible. De plus, les réactions considérées ici ne peuplent que les états fondamentaux des produits de réaction. Dans le cas de la cassure du deuton, seule la cassure élastique est considérée. On constate sur la figure Fig.3.22que les réactions (d,2p) et (d,pα) commencent à contribuer au spectre d’énergie d’excitation à partir de 8.9 MeV (13.7 MeV) lors des réactions sur le36S (34Si). Ainsi ces réactions ne

contribueront qu’à haute énergie d’excitation où de toute façon la résolution ne nous permettra pas d’en faire une étude précise.

La contribution de la réaction de cassure du deuton dans les conditions expérimentales. Expé-

rimentalement, les spectres obtenus sont dégradés par de nombreux effets (épaisseur de cible, incerti- tudes,...) comme nous l’avons montré précédemment. La simulation présentée dans la section3.4a été utilisée afin de simuler la contribution réellement observée de la cassure du deuton au spectre d’énergie d’excitation. La figure Fig.3.23présente l’impact du dispositif expérimental sur la contribution au spectre d’énergie d’excitation de la cassure élastique du deuton.

L’effet est particulièrement important aux grandes énergies d’excitation. En effet, les protons qui sont émis à de faibles énergies (hautes énergies d’excitation) ne sont souvent pas assez énergétiques pour sortir de la cible. On remarque, par ailleurs, que la contribution de basse énergie au spectre d’énergie d’excitation ne commence pas à partir du seuil d’émission neutron mais légèrement en dessous (voir le graphique en insert Fig.3.23). Cet effet est inhérent aux diverses incertitudes induites par la cible réelle. Nous utiliserons ce résultat lors de la soustraction de la contribution de la cassure du deuton.

FIGURE 3.23: Contribution au spectre d’énergie d’excitation de la cassure du deuton. En trait bleu ha-

churé, le spectre obtenu en tenant compte des caractéristiques de notre dispositif expérimental. En rouge est représenté le résultat obtenu dans le cas d’un dispositif parfait. Le graphe en insert est un agrandis- sement sur la partie du spectre à basse énergie d’excitation.

La cassure du deuton : divers processus de réactions. Jusqu’à présent, nous n’avons que men-

tionné la cassure élastique du deuton. En d’autres termes, nous n’avons jamais considéré que l’ion qui induit la cassure puisse s’exciter lors de ce processus. Ce type d’évènement peut avoir lieu lorsqu’un état excité existe dans le34Si : on parle alors de cassure inélastique du deuton. La figure Fig.3.24présente

le schéma de niveau connu du34Si et du36S. On constate que le premier état excité a une énergie de

3.33 MeV dans le cas du34Si et de 3.29 MeV dans le cas du36S. Pour le34Si, il existe également un état

0+

2 à 2719(3)keV [16]. De ce fait, les contributions inélastiques de cassure du deuton ne contribueront

qu’à partir de 5.80 MeV et 7.62 MeV respectivement pour le34Si et le36S.

3.8.3 Calcul théorique de la section efficace de cassure du deuton.

La simulation réalisée présentée précédemment est uniquement basée sur la définition d’un espace de phase et n’incorpore donc rien de la physique de la réaction. Elle permet uniquement d’estimer l’allure que devrait avoir la contribution de la cassure élastique du deuton pour une tranche angulaire peu large. La simulation effectuée ici et l’expérience ne sont comparables sur l’ensemble de la couverture angulaire que si la cassure élastique du deuton est isotrope dans le centre de masse. De nombreuses études aussi bien expérimentales que théoriques sont à l’oeuvre afin d’élaborer des tables nucléaires comme il en existe pour les réactions avec les neutrons. Cela revêt d’une importance cruciale pour les nouveaux accélérateurs comme Spiral2. Il est en effet nécessaire de quantifier la radioactivité induite par ces réac- tions lors de l’activation des matériaux de la ligne de faisceau pendant l’accélération des deutons. Dans l’article [51], la section efficace de cassure du deuton a été mesurée pour différentes cibles pour des deutons ayant une énergie de 56 MeV. Une expression analytique de la section efficace totale

σ

cassure

totale a pu être déduite :

σ

cassure totale

= 23.7(A

1 3

+ 0.8)

2

mb

(3.8)

A

est la masse de la cible utilisée. Bien entendu, cette expression n’est valable que pour des deutons ayant une énergie de 56 MeV. Malheureusement ces études sont inclusives.

3.8. Prise en compte de la cassure du deuton et d’autres voies de réaction avec le deuton. 113

(a) Pour le34Si. Données extraites de [49]. (b) Pour le36S. Données extraites de [50]. Seules une par-

tie du schéma de niveau est représentée ici.

FIGURE3.24: Schéma de niveau connu pour les noyaux de34Si et de36S.

potentiels optiques qui permettent de faire des prédictions assez fiables et ce aussi bien pour une grande gamme de noyaux que pour une grande gamme en énergie [52].

FIGURE3.25: Prédiction théorique de la section

efficace de cassure dans le cas d’une réaction

d+

34

Si. Voir [

52] pour l’explication des diffé-

rentes composantes représentées ici. Par cour- toisie de M. Avrigeanu.

La figure Fig.3.25montre les prédictions théoriques obtenues pour la réaction

d+

34

Si. L’expérience

de transfert avec un faisceau de34Si a été réalisée à une énergie faisceau d’environ 20.1 A.MeV soit

conditions expérimentales devrait être d’environ 75 mb.

Bien entendu, si nous voulons pouvoir estimer la section efficace totale de la cassure élastique du deuton, cela nécessite de connaitre l’allure de la section efficace sur l’ensemble de la couverture angu- laire. Des calculs de distributions angulaires de cassure élastique du deuton ont été réalisés à l’aide de code CDCC pour la cassure élastique du deuton sur une cible de63Cu (M. Avrigeanu, communication

privée). La figure Fig.3.26montre le résultat de ce calcul.

FIGURE3.26: Prédiction théorique de la dis-

tribution angulaire de détection du proton produit lors de la cassure élastique du deu- ton sur cible de 63Cu. Par courtoisie de M.

Avrigeanu.

On constate que la section efficace est piquée à l’avant et n’a vraiment pas du tout la forme d’une distribution isotrope dans le centre de masse (comme dans notre simulation). Il est donc particulièrement intéressant d’établir expérimentalement l’allure qu’à la section efficace de cassure élastique du deuton. Si la distribution n’est pas isotrope dans le centre de masse, il sera impossible de conclure sur la section efficace totale de cassure du deuton.