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PARTIE III PRISE EN CHARGE DES EFFETS INDESIRABLES ET ROLE DU

2. Effets indésirables de la chirurgie du sein

2.3. Prise en charge du lymphœdème

Le lymphœdème provient d’une accumulation de lymphe dans les espaces interstitiels, le curage axillaire ayant pour conséquence un ralentissement de la circulation lymphatique. Il apparait chez 25 % des patientes traitées et constitue un effet secondaire handicapant sur le plan physique et psychologique [87]. Son incidence a beaucoup diminuée depuis le développement du ganglion sentinelle (5 % des cas). La kinsithérapie précoce (avec drainage manuel, massage progressif de la cicatrice, exercice d’étirements des muscles du thorax et de l’épaule, exercices actifs de l’épaule), selon un essai randomisé, diminue le risque d’apparition d’un lymphoedème (7 % contre 25 % sans) [88-89]. Une différence de circonférence de plus de 2 cm entre les deux bras permet de poser le diagnostic. Les signes cliniques du lymphœdème sont une tension, une lourdeur, une gêne ou des douleurs occasionnelles du membre supérieur et une difficulté à pincer la peau entre les doigts (signe de Stemmer positif). Il débute classiquement à la racine du membre pour descendre progressivement jusqu’au poignet et/ou à la main. Il peut aussi débuter à la main et s’étendre à l’ensemble du membre supérieur.

Il existe différents stades de lymphœdèmes [90] :

- stade I : il est spontanément réversible à l’élévation du membre, le signe du « godet » est positif ;

- stade II : l’élévation ne réduit plus le volume et l’œdème est toujours dépressible mais il y a des transformations de la peau et des tissus sous- cutanés qui deviennent durs et cartonnés, une fibrose ainsi qu’un engraissement s’installe ;

- stade III : éléphantiasis avec disparition du caractère dépressible de l’œdème et présence de troubles trophiques : hyperkératose, verrues et vésicules lymphatiques. Ce stade se rencontre de moins en moins du fait de l’évolution des techniques chirurgicales et de la prise en charge précoce des formes débutantes.

La complication la plus fréquente est le risque infectieux (lymphangite ou érysipèle) par déficit de drainage lymphatique, dont la porte d’entrée est une blessure. Le bras devient chaud, rouge, douloureux et augmente de volume. Par la suite, des signes généraux peuvent survenir : fièvre, altération de l’état général…

2.3.1. Kinésithérapie

La kinésithérapie est le traitement majeur du lymphœdème. Il associe le drainage lymphatique manuel (DLM) et les bandages réducteurs dans un premier temps puis les orthèses de compression, dans un second temps.

107 Les objectifs de ce traitement sont de faire diminuer le volume du membre, de lui faire retrouver sa mobilité et d’empêcher les complications grâce à différents moyens tels que :

- des drainages lymphatiques manuels quotidiens ou rapprochés ; - des mobilisations tissulaires ;

- la pose de bandages réducteurs ; - une gymnastique sous bandages ;

- une mise en place de conseils d’hygiène de vie personnalisés.

Dans un deuxième temps, il faudra stabiliser le volume du membre, éviter les récidives et retrouver une fonction normale. Ceci se fait par des drainages lymphatiques manuels plus espacés, le port d’une orthèse de compression adaptée le jour (manchon), et éventuellement des autobandages ou un manchon en Mobiderm® la nuit.

2.3.2. Bandages compressifs

Les bandages compressifs permettent une diminution du volume du bras par accélération du drainage veineux et lymphatique lors des mouvements. La force de compression est choisie en fonction de la pathologie, de l’aspect clinique et de la tolérance de la patiente. Tout d’abord, la patiente recouvre son bras par un dispositif de capitonnage (exemple : Tubifast® ligne bleue du laboratoire Mölnlycke Health Care) pour protéger la peau et uniformiser la pression. Le bandage multicouche est ensuite réalisé en commençant par l’extrémité distale du membre en laissant les bouts de doigts libres puis plusieurs bandes sèches inélastiques ou à allongement courts sont superposées (exemple : sur la main, mettre une bande Rosidal SC®, sur l’avant-bras une bande Rosidal K® 6cm, et sur le bras une bande Rosidal K® 10cm du laboratoire Lohmann Rauscher). La patiente pourra faire ses bandages elle- même après que son médecin ou son kinésithérapeute lui ait montré la méthode.

2.3.3. Manchons de compression

Le manchon de compression est une orthèse aux propriétés élastiques exerçant une certaine pression même au repos. Il est porté uniquement le jour. Une variante au manchon est le manchon en Mobiderm® de chez Thuasne (non remboursé) porté la nuit en alternative aux bandages. Il est toujours réalisé sur mesure. Sur l’ordonnance le médecin devra préciser la classe de contention (classe I à IV), le type de manchon (simple, avec mitaine attenante ou séparée ou sans, tresse simple, tresse anti-glisse, attache-épaule, couvre-épaule). Le pharmacien devra prendre différentes mesures selon le type de manchon souhaité (Annexe 6), le matin après une éventuelle séance de kinésithérapie en veillant à ne pas trop serrer le mètre et à ce qu’il ne soit pas trop lâche non plus. Il est remboursé 26,01 € par la sécurité sociale. Il doit être renouvelé dès qu’il n’est plus adapté (usure mécanique, modification du volume du bras). Il est important de choisir un modèle confortable et acceptable par la patiente pour une bonne observance.

108 En cas d’œdème de la main, la réalisation d’un manchon avec mitaine intégrée sera préférable car cette solution diminue le risque de surpression au niveau de la superposition. Une mitaine distincte du manchon peut être utilisée pour offrir une plus grande polyvalence. Dans ce cas, la mitaine devra couvrir environ 6cm après le poignet afin d’assurer une superposition plus importante avec le manchon et d’éviter de provoquer un garrot.

Conseils de mise en place et d’entretien d’un manchon (Annexe 7)

Lors de l’essayage, le pharmacien retourne le manchon jusqu’à l’ouverture prévue pour la main puis l’enfile progressivement sur le bras (le faire glisser et ne pas trop tirer le tissu). Il faudra veiller à ce qu’il n’y ait aucun pli (bien ajuster au niveau du coude). Une fois que le manchon est complètement mis en place, un massage du produit est nécessaire pour assurer une contention homogène.

Il est recommandé de laver le manchon quotidiennement avec une lessive pour linge délicat et sans assouplissant, de le rincer à l’eau tiède, de l’essorer sans le tordre et de ne pas utiliser de sèche-linge ou de sources de chaleur directe (radiateur, soleil) pour le séchage ; il ne faut pas repasser le manchon. Le lavage permet de le nettoyer mais aussi de resserrer les fils distendus par le port.

Il est recommandé de ne pas appliquer de crème grasse sous le manchon ; par contre, il est conseillé d’appliquer un agent émollient la nuit.

Le manchon doit être mis en place le matin après la douche et retiré en fin de soirée. Il doit être porté lorsque le bras est sollicité et lors de voyages en avion.

L’Endotélon® (oligomères procyanidoliques) est le seul médicament ayant une AMM dans la prise en charge du lymphœdème du bras après traitement radiochirurgical du cancer du sein. Il doit être utilisé en complément de la contention élastique adaptée. Sa posologie est de deux comprimés par jour, en deux prises matin et soir. Il a un intérêt au début, lorsque l’œdème est réversible [66].

Le pharmacien pourra rappeler quelques mesures à prendre par la patiente pour prévenir le lymphœdème (Annexe 5):

- éviter le port de charges lourdes : ne pas porter une charge de plus d’un kilo au bout du bras ;

- éviter de porter des vêtements serrés, bagues ou bracelets trop étroits. Porter des soutiens gorges à bretelles larges, peu serrées et sans armature métallique ;

- éviter les perfusions, injections, prise de sang, prise de tension du côté opéré ; - éviter les bains chauds (sauna, hammam) et l’exposition au soleil, la chaleur

favorisant le lymphœdème ;

- utiliser des gants pour la vaisselle, le jardinage ;

- en cas de blessures, bien désinfecter la plaie et surveiller tout signes infectieux ;

- éviter de tirer et de pousser de façon répétitive dans le cadre de vos activités quotidiennes ;

109 - privilégier le rasoir électrique pour l’épilation de l’aisselle et veiller à ne pas

arracher de peau lors des soins de manucure ;

- faire attention en portant un enfant : il est conseillé de s’agenouiller, de le ramener contre soi avant de se redresser par la force des membres inférieurs en portant l’enfant sur la hanche du côté non opéré ;

- surélever le bras dans la journée au cours des activités repos (télévision, lecture) ;

- maintenir une activité physique adaptée favorisant la circulation lymphatique. Stopper l’activité dès que le bras est lourd ou que la fatigue se fait ressentir ; - éviter la prise de poids favorisant la survenue de lymphœdème ;

- poser les avant-bras sur une table pour écrire à l’ordinateur ; - porter un manchon pour les voyages en avion ou pour les efforts ; - ne pas porter de sac à main ou sac à dos du côté opéré ;

- demander conseil à un médecin avant de reprendre certaines activités physiques, le golf et le tennis n’étant pas conseillés.

Les patientes peuvent consulter le site de l’association AVML (Association Vivre Mieux le Lymphœdème) : www.avml.fr. Il s’agit d’une association de patientes atteintes de lymphœdème qui propose à ses adhérents de l’information, des conseils et des ateliers d’auto-soins et d’échanges.