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Dans notre contexte le terme navigation se réfère à la possibilité de se déplacer, se posi-tionner et s’orienter pour visualiser une scène de façon virtuelle. Lorsqu’il s’agit de l’étude d’une structure anatomique complète par endoscopie virtuelle, dans un but diagnostique, il est nécessaire d’effectuer une navigation optimale au regard des caractéristiques de la struc-ture et de la lésion. Dans ces conditions, la détermination de la trajectoire et le réglage de paramètres intrinsèques de la caméra virtuelle pour la visualisation sont fondamentaux. Si, de plus, la navigation est utilisée dans un objectif de planification ou d’assistance aux inter-ventions, il peut être nécessaire de confronter les images virtuelles aux images réelles et de reproduire les conditions de navigation virtuelle dans le réel.

La navigation en endoscopie virtuelle peut être interactive [Bart01c], où l’utilisateur contrôle complètement les paramètres de l’endoscope, planifiée le long d’une trajectoire précalculée [Truy01] [Nain01] ou complètement automatique, où le capteur calcule sa trajectoire au cours de la navigation, basé sur ses propriétés de perception de l’environnement [Bell00].

À partir d’une trajectoire précalculée, la navigation peut encore être guidée de manière à donner à l’utilisateur le contrôle sur certains paramètres de la caméra, mais en contraignant les déplacements à la trajectoire planifiée [Bart01a].

3.2.1 La planification de trajectoires

Pour la planification de trajectoires, trois stratégies existent : l’approche manuelle, dans laquelle c’est l’utilisateur qui définit au préalable les points de déplacement ; l’approche semi-automatique, où à partir des points choisis par l’opérateur, une interpolation (linéaire, spline, etc.) est effectuée ainsi qu’un lissage ou ajustement à l’intérieur de la structure ; et finalement l’approche suivi automatique, où à partir de certains critères d’optimalité une trajectoire est calculée. Afin d’être utilisées dans un schéma de navigation en endoscopie virtuelle, ces trajectoires doivent rester à l’intérieur des organes.

La détermination des trajectoires de façon manuelle est un travail fastidieux qui requiert la connaissance a priori des structures visitées. Dans la planification automatique, trois

cri-tères d’optimalité sont identifiés : i) suivre la ligne centrale d’une structure, ii) déterminer le chemin le plus court entre deux points iii) garantir la visualisation pendant la navigation de la totalité de la structure.

3.2.1.1 Chemins optimaux en endoscopie virtuelle

La détermination de la ligne centrale n’est pas évidente en géométrie discrète tridimen-sionnelle (auto-intersections, non connexité, branches parasites, etc.). Des techniques comme la squelettisation ont été utilisées. Elle repose sur l’intention de caractériser un objet par sa topologie, et permet de réaliser sa modélisation en associant au squelette une représenta-tion éventuellement analytique de sa surface et/ou de son volume. Le squelette permet une manipulation aisée de l’objet qui est dans ce cas modélisé par une structure de taille plus compacte [Bitt01]. Il peut fournir une base pour la construction de trajectoires de navigation pour l’endoscopie virtuelle [Zhou99] [Vila99]. Cependant, le calcul d’un squelette 3D peut être très coûteux dans le cas de volumes de grande taille. De plus, des problèmes comme l’existence de zones de courbure excessive apparaissent. La navigation dans ce type de si-tuations serait impratiquable ou d’interprétation difficile.

Plusieurs solutions différentes ont été proposées afin de s’affranchir des difficultés asso-ciées à la squelettisation et garantir la faisabilité de la navigation. En colonoscopie virtuelle, par exemple, une méthode d’extraction automatique d’une ligne centrale utilisée comme trajectoire a été proposée par Wan et al. [Wan02]. Elle est basée sur la recherche du chemin de coût minimal à partir d’une carte de distances 3D, par rapport à la frontière du colon. Nain et al. [Nain01] proposent un système qui combine des possibilités de navigation in-teractive ou semi-automatique à partir des points choisis par l’opérateur, et automatique à partir d’une trajectoire pré-calculée. Le calcul automatique de la trajectoire est basé sur un modèle de distribution de température qui suppose l’existence d’une valeur maximale près de la surface et minimale au centre de la structure. La ligne centrale est formée par les centres de masse de courbes de potentiel qui satisfont l’équation de Laplace  . Un système d’équations différentielles partielles décrivant le système est résolu en utilisant des méthodes numériques basées sur les éléments finis. Pour une surface constituée de 100.000 polygones, une solution trouvée dans un temps inférieur à 5 minutes est reportée, en utili-sant une machine Sun Ultra 10.

Bartz et al. [Bart01a] [Bart01c] proposent l’utilisation d’une trajectoire, définie sur la base d’une carte de distances 3D, qui peut être utilisée en navigation-guidée. Un ensemble de lois cinématiques et de forces est créé par rapport à la surface segmentée. Elles agissent sur le capteur virtuel en même temps que les actions de l’utilisateur afin de garantir un déplace-ment à l’intérieur de la structure. La surface segdéplace-mentée repousse le capteur et, inversedéplace-ment, le centre de la structure attire le capteur et l’oblige à rester à l’intérieur.

Une autre méthode semi-automatique, qui génère des axes suivant la structure de voies respiratoires a été présentée par Swift et al. pour la bronchoscopie [Swif02]. Il s’agit d’un algorithme qui construit un modèle en cylindres généralisés de l’arbre bronchique, à par-tir d’une description structurale obtenue lors d’une étape préliminaire. L’utilisateur choisit initialement un point d’intérêt à l’intérieur de la structure, à partir duquel, un ensemble de segments centraux est généré et lissé par des splines cubiques. Finalement, une segmenta-tion de la structure sur des coupes perpendiculaires à la trajectoire est effectuée. Les contours

détectés constituent le modèle de l’anatomie en cylindres généralisés. Le calcul du contour représentant la section est réalisé en utilisant le lancer de rayons sur un plan perpendicu-laire à la trajectoire calculée, où 16 rayons sont envoyés vers l’extérieur de la structure et la détection de la surface interne est réalisé avec un seuil manuel, qui établit la différence entre le densité à la position du capteur et la densité au niveau de la paroi. Le système a été testé sur fantôme et sur quelques données patients. Les résultats concernant le calcul de trajec-toires et la représentation sont satisfaisants comparativement aux résultats obtenus par des méthodes complètement manuelles. Des problèmes de détection existent surtout dans le cas où la paroi bronchique est très fine.

Deschamps et al. [Desc01] ont proposé l’utilisation des chemins minimaux pour trou-ver une trajectoire optimale suivant la ligne centrale. Deux points sont choisis au préalable, et une fonction de coût est ensuite définie dans l’ image. Le chemin minimal est le trajet pour lequel l’intégrale de coût entre les deux points est minimale. Le problème est résolu en utilisant une équation de propagation de front et résolu par l’algorithme de Fast Marching proposé par Sethian et al. [Seth99]. La méthode des chemins minimaux a été testée sur plu-sieurs problèmes de navigation et de visualisation de pathologies telles que les anévrismes cérébraux et des polypes en colonoscopie virtuelle [Truy01].

Une approche pour trouver le chemin le plus court entre deux points a été présentée par Jolesz et al. [Jole97]. Dans leur méthode ils utilisent des notions de robotique pour planifier des trajectoires en considérant l’endoscope virtuel comme un robot ponctuel, et les murs de la paroi artérielle comme des obstacles. Une adaptation d’un algorithme de planification de trajectoires de robots est utilisée pour guider l’endoscope [Leng90]. La surface interne est extraite préalablement et la reconstruction de la surface est réalisée avec la méthode des Marching Cubes [Lore87]. Un point d’arrivée est défini et tous les voxels à l’intérieur de la structure sont affectés de la distance au point d’arrivé. À partir d’un point de départ donné, l’algorithme de planification de trajectoire trouve le plus court chemin pour arriver au point cible final. Les coordonnées des voxels constituant la trajectoire optimale sont enregistrés et un algorithme de lissage est utilisé pour construire la trajectoire finale.

D’autres travaux se sont orientés vers la définition de critères d’optimalité exprimés en terme de “fiabilité” de l’observation des structures anatomiques. He et al. [He01], dans le cadre de la recherche de polypes dans le colon, basent leur proposition sur la recherche d’une trajectoire qui permette au capteur de visualiser principalement la totalité de la struc-ture. Cette trajectoire suit une ligne de faible courbure et de longueur minimale, passant près du centre. Un chemin d’une longueur de l’ordre du millier de voxels peut être généré en moins d’une centaine de secondes, sur des données TDM de voies respiratoires ou des artères. L’efficacité de leur méthode, utilisée dans le colon, dépend de la résolution des don-nées et de la complexité des structures.

3.2.2 La Navigation active

Même si les démarches d’analyse par suivi des structures anatomiques d’intérêt, et no-tamment par suivi vasculaire (cf. Section 3.3), peuvent permettre de déterminer automati-quement une trajectoire au cours de la navigation, elles n’exploitent pas l’information pro-duite par la vue endoscopique virtuelle. Des travaux précédents de notre équipe au LTSI, ont permis de définir un capteur virtuel actif capable d’explorer automatiquement un volume

image non pré segmenté [Bell00]. Dans cette approche, appelée navigation active, le capteur combine le calcul de l’image de la scène observée ainsi que son analyse afin de déterminer sa trajectoire.

Aucune modélisation préalable n’est effectuée : la détection de surface, le calcul de l’image, l’analyse de scène et l’estimation de trajectoire sont réalisés au cours de l’exploration pour chaque position du capteur virtuel, qui construit automatiquement un modèle descriptif des données patient préopératoires [Bell99] [Haig04].

3.2.3 Mise en correspondance de l’information des images virtuelles et réelles

L’endoscopie virtuelle peut être utilisée comme un outil de planification et de guidage péropératoire. Un des éléments de la planification peut être le calcul des trajectoires guidant le chirurgien vers une région anatomique d’intérêt. Pendant l’intervention le chirurgien doit localiser et guider un endoscope réel à partir des éléments fournis par l’endoscopie virtuelle [Jole97].

La reproduction de cette trajectoire dans la vrai intervention peut s’appuyer sur la com-paraison des images endoscopiques virtuelles et des images réelles peropératoires. Si les éléments de localisation sont extraits des mesures de similarité entre les images réelles et vir-tuelles, le modèle de l’endoscope virtuel doit reproduire de la manière la plus fidèle possible la géométrie de l’endoscope réel [Mori02]. Une autre possibilité est l’exploitation de l’infor-mation structurelle visible sur les images endoscopiques (présence de bifurcations) [Bric98]. Cette problématique a été principalement abordée dans le cas des bronches, celles-ci se di-visant en multiples bifurcations qui fournissent un grand nombre de repères anatomiques. Les principales difficultés rencontrées sont notamment le temps de calcul, l’identification de repères anatomiques caractéristiques, les déformations des structures et la flexibilité des outils.

3.3 L’analyse de structures

Au delà de l’analyse diagnostique, l’apport des données quantitatives est d’un intérêt primordial dans le cas de la chirurgie mini-invasive, car la connaissance de certaines me-sures concernant les organes affectés par les pathologies détermine la réalisation d’un geste. Des fonctionnalités d’analyse quantitative peuvent être ajoutées à l’endoscope virtuelle pour profiter de ses capacités de navigation et le faire évoluer d’un outil de visualisation vers un outil d’analyse de structures anatomiques. À présent, il n’est pas seulement pos-sible de détecter et d’évaluer visuellement les lésions mais aussi de caractériser leur nature, de mesurer leur taille, ou d’extraire virtuellement des petites régions de l’image pour leur analyse (dissection virtuelle). Plusieurs travaux ont introduit des outils donnant la possibi-lité à l’utilisateur de réaliser des mesures interactivement à partir de l’endoscopie virtuelle [Mori96] [Nain01] [Auer02]. Sur certaines structures, des mesures sur les sections perpendi-culaires le long d’une trajectoire (évolution de la lumière interne) fournissent les éléments nécessaires pour évaluer indirectement le rétrécissement d’une zone sténosée, comme dans les voies respiratoires [Swif02] ou dans les vaisseaux [Gobb98] [Bart99a] [Bart01a] [Robb00]. Les travaux récents de DiSimone et al. [DS03] montrent un exemple d’application au plan-ning de pose d’endoprothèses dans les voies respiratoires, à partir des mesures de sténose

prises interactivement.

Des fonctionnalités automatiques ont été implantées pour pouvoir mesurer différentes caractéristiques de la structure au cours de la navigation [Summ00a]. Les travaux les plus remarquables ont été développés en colonoscopie où des opérateurs d’analyse de multiples paramètres ont été ajoutés pour la détection des polypes. Des propriétés de forme telles que la courbure [Zhan02], l’intensité, la taille et la texture [Jere02], ont montré leur utilité. En bronchoscopie, l’analyse de la courbure de la surface interne est utilisée dans la détection de certaines lésions [Summ98] et en angioscopie des opérateurs d’analyse fractale permettent de mesurer la rugosité de la paroi, pour la détection de l’athérosclérose [Summ99].

Il est possible d’étendre les fonctionnalités du capteur virtuel avec des possibilités de construction d’un modèle surfacique de la structure anatomique, à partir des images d’en-doscopie virtuelle extraites au cours de la navigation [Acos03]. Préalablement à l’analyse quantitative, le problème de description de structures vasculaires, a été abordé selon diffé-rentes approches d’analyse d’images de modalités diffédiffé-rentes (Doppler, TDM, angiographie avec produit de contraste, ultrason, IRM). Les méthodes de segmentation, pouvant être ap-pliquées sur des coupes 2D indépendantes, ou directement sur les volumes 3D, peuvent être classées selon le type d’information a priori utilisé. Les approches les plus simples exploitent l’information de bas niveau, comme dans le cas des techniques de seuillage d’intensité en utilisant les niveaux de gris sur les images. Dans les techniques de croissance de régions, les propriétés de connexité entre éléments sont exploitées [Reda02]. Le principal avantage de ces méthodes est leur simplicité d’implémentation et rapidité. Il existe par ailleurs des approches qui exploitent la spécificité géométrique des vaisseaux, notamment leur forme tubulaire et leur orientation. Ces méthodes sont amenées souvent à résoudre des problèmes intermédiaires tels que le suivi d’une structure dans l’espace 3D (planification des trajec-toires à l’intérieur du vaisseau, cf. Section 3.2.1) [Wink00] [Desc01] et la segmentation sur des coupes successives 2D reformatées.

En ce qui concerne la segmentation sur des coupes 2D, un ensemble de techniques et d’outils mathématiques et algorithmiques, combinés et très variés peuvent être utili-sés. Nous pouvons citer parmi les principales, les modèles déformables [Terz97] [McIn96] [HH02], les moments géométriques [Toum01], des filtres multi-échelle [Wink00] et les mé-thodes d’ensembles de niveaux (level sets) [Wang99] [Wils01]. Les formulations de level sets et fast marching ont été introduites par Sethian [Seth96] pour la solution des problèmes de propagation de fronts. Suivant cette approche, la frontière d’un objet est représentée par l’en-semble de niveau-zéro d’une fonction dépendante du temps qui est calculée itérativement. Cette fonction est définie ou modifiée selon l’application. Dawant et al. [Dawa01] proposent, par exemple, une fonction qui se modifie dynamiquement au fur et à mesure que le front progresse. Ces méthodes en 2D peuvent être extensibles à des modèles 3D. Tel est le cas des modèles déformables cylindriques proposés par Yim et al. [Yim01].