• Aucun résultat trouvé

1 - LE PRINCIPE DE PERSONNALISATION DE LA SANCTION

LE PRINCIPE DE NECESSITE ET LA SANCTION PRONONCEE

1 - LE PRINCIPE DE PERSONNALISATION DE LA SANCTION

123. Des principes complémentaires. Autrefois nommé principe

d’individualisation409, le principe de personnalisation est étroitement lié à celui de la nécessité

de la sanction, ce dernier constituant « le garde-fou du principe de nécessité des peines »410. Le

législateur ne peut qu’édicter des sanctions abstraites tandis que le juge aura la possibilité de moduler la sanction en fonction des circonstances de l’espèce, permettant d’appliquer la

punition strictement nécessaire à l’individu concerné ou de l’en dispenser411. Ainsi, c’est

l’existence du choix de personnalisation qui permet de considérer qu’une peine est constitutionnelle, malgré même ses éventuels excès, le pouvoir de personnalisation participant

au principe constitutionnel de nécessité des peines412. Le principe de personnalisation entretient

dès lors d’étroits liens avec le principe de nécessité, duquel il découle directement. Cette filiation permet notamment de lui conférer une force constitutionnelle et de l’ériger au rang des principes fondamentaux (A). Néanmoins, il apparaît que de nombreuses restrictions lui sont apportées, particulièrement en droit pénal des affaires (B), touchant directement le principe de nécessité.

A - La contribution du principe de personnalisation à la nécessité de la sanction

124. La reconnaissance du caractère constitutionnel du principe de personnalisation. De prime abord, le Conseil constitutionnel était réticent à établir la filiation entre le principe de nécessité et celui d’individualisation de la peine. Lors de sa décision sur la loi dite « Sécurité et liberté », le Conseil constitutionnel avait affirmé « qu’ainsi, à supposer même que le principe de l’individualisation des peines puisse, dans ces limites, être regardé comme l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, il ne saurait

409 R. OTTENHOF, « Introduction générale », in L’individualisation de la peine, dir. R. OTTENHOF, Eres, coll. « Criminologie et sciences de l’homme », 2001, p. 7.

410 A. DARSONVILLE, « Les sanctions pénales », in Le principe de nécessité en droit pénal, Actes de la journée d’études radicales du 12 mars 2012, op. cit., p. 100.

411 Art. 132-58 C. pén.

412 Y. MAYAUD, « Le législateur contre l’interprétation judiciaire », in Histoire et méthodes d’interprétation en droit criminel, op. cit., p. 129.

147

mettre obstacle à ce que le législateur, tout en laissant au juge ou aux autorités chargées de déterminer les modalités d’exécution des peines un large pouvoir d’appréciation, fixe des règles

assurant une répression effective des infractions »413. Dans le même sens, la doctrine se montrait

hésitante à la reconnaissance de la valeur constitutionnelle du principe d’individualisation comme a pu le souligner Monsieur Jacques LE CALVEZ en affirmant que « l’individualisation de la sanction pénale ne constitue pas un principe d’ordre constitutionnel car il n’a pas le caractère d’un principe unique et absolu prévalant de façon nécessaire et dans tous les cas sur les autres fondements de la répression pénale ». Sans consacrer un principe d’individualisation à valeur constitutionnelle, le Conseil avait déjà affirmé qu’une peine, pour être conforme aux exigences constitutionnelles, ne peut « être appliquée que si le juge l’a expressément prononcée,

en tenant compte des circonstances propres à l’espèce »414. Pourtant, on ne pouvait douter que

le principe de personnalisation soit un aspect concret du principe de nécessité de la sanction. Ce n’est que dans sa décision du 22 juillet 2005 qu’il a affirmé que « le principe d’individualisation des peines […] découle de l’article 8 de la Déclaration des droits de

l’homme et du citoyen de 1789 »415. A l’inverse de la nécessité abstraite à la charge du

législateur, l’individualisation des peines permet de mesurer la sanction à une situation de faits d’espèces et emporte de nombreuses conséquences.

125. Le refus des peines automatiques. La notion de peine automatique ou accessoire concerne les sanctions « qui sont attachées automatiquement à certaines peines principales, en sorte qu’elles suivent celles-ci même si le juge ne les a pas expressément

prononcées »416. La contradiction avec le principe de personnalisation et donc de nécessité est

ici évident, le juge ne pouvant moduler la peine en fonction des circonstances de fait. Le Conseil constitutionnel a très tôt marqué son opposition aux peines automatiques, se référant expressément au principe de personnalisation, découlant du principe de nécessité de l’article 8 de la Déclaration de 1789. Les censures ont alors été nombreuses en la matière. Ainsi, dans deux décisions du 17 mars 2011, à propos de majorations fiscales, le Conseil a jugé que « le principe d’individualisation des peines […] implique que la majoration des droits, lorsqu’elle constitue une sanction ayant le caractère d’une punition, ne puisse être appliquée que si

413 Cons. const., 19 et 20 janv. 1981, n° 80-127 DC, 16e consid.

414 Cons. const. 15 mars 1999, n° 99-410 DC, 41e consid.

415 Cons. const. 22 juil. 2005, n° 2005-520, 3e consid.

148

l’administration, sous le contrôle du juge, l’a expressément prononcée en tenant compte des

circonstances propres à chaque espèce »417. Aussi, le Conseil constitutionnel a déclaré non

conforme au principe de nécessité et d’individualisation la peine de publication de la décision de condamnation obligatoire pour des faits de fraude fiscale telle que prévue par l’article 1741

du Code général des impôts418.

La contradiction des peines automatiques avec les principes constitutionnels avait poussé le législateur à intervenir pour y mettre fin. En ce sens, le Code pénal qui précise en son article 132-17 « qu’aucune peine ne peut être appliquée si la juridiction ne l’a pas expressément prononcée », a procédé à une importante vague de suppression des peines accessoires. Cependant, la forte présence de ce type de sanctions au sein des autres codes n’a pas permis une suppression totale et exhaustive, ce qu’a pu réaliser en partie l’intervention du législateur dans chaque matière concernée. Ainsi, la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie est venue transformer les interdictions commerciales de plein droit en peines complémentaires et alternatives. Ces interdictions, présentes au sein du Code de commerce aux articles L. 128-1 et suivants, frappaient automatiquement les personnes condamnées pour

certaines infractions et empêchaient toute activité commerciale ou industrielle419. Le refus des

peines automatiques participe assurément au prononcé d’une peine nécessaire. Le prononcé de la peine fait également l’objet d’autres prescriptions qui tendent à la peine nécessaire.

126. L’obligation de motiver le prononcé d’une peine d’emprisonnement sans sursis. La motivation dans le prononcé de la peine collabore pleinement à la nécessité de cette dernière au cas d’espèce. En ce sens, l’article 132-19 du Code pénal dispose expressément qu’en matière correctionnelle, une peine d’emprisonnement ferme ne peut être prononcée que si « cette peine [est] nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ». Ainsi, la loi pose une obligation de motivation à la charge du juge pénal si ce dernier souhaite prononcer une peine privative de liberté ferme en matière correctionnelle. En prenant en compte la personnalité de l’auteur et la gravité de l’infraction, le juge doit être à même de prononcer une peine nécessaire au cas qui lui est soumis. Dès lors, l’obligation de motivation est étroitement liée au principe de nécessité, ce qui illustre les termes utilisés par l’article 132-19 précité. En

417 Cons. const. 17 mars 2011, n° 2010-103 QPC, 4e consid. et n° 2010-105/106 QPC, 5e consid.

418 Cons. const. 10 déc. 2010, n° 2010-72/75/82 –QPC.

419 E. VERGES, « Loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie : peines complémentaires et alternatives d’incapacité d’exercice d’une activité commerciale ou industrielle », RSC 2008. 954.

149

outre, la Chambre criminelle de la Cour de cassation contrôle la motivation de la peine d’emprisonnement ferme retenue par les juges du fond qui doivent établir qu’une autre peine n’est pas nécessaire en l’espèce. A titre d’exemple, dans un arrêt du 22 novembre 2016, la Haute juridiction a ainsi contrôlé la motivation d’une cour d’appel ayant condamné l’auteur de pratiques commerciales trompeuses à une peine d’emprisonnement ferme, notamment en raison

de l’absence de nécessité d’autres peines420. Les juges du fond se devaient d’expliquer

clairement en quoi les autres peines n’étaient pas nécessaires eu égard aux caractéristiques de l’affaire. Sans aucun doute, l’obligation de motivation contribue au principe de nécessité en tant que frein à l’intervention pénale dans la matière économique.

127. Vers l’obligation de motiver toute peine. Outre cette obligation de motivation en matière d’emprisonnement, la Chambre criminelle de la Cour de cassation exige des juridictions du fond une motivation spéciale et expresse à propos des autres peines et notamment de l’amende. Bien que l’article 132-20 du Code pénal ne prévoit aucune exigence de motivation en matière de sanction pécuniaire, celui-ci affirme tout de même que « le montant de l'amende est déterminé en tenant compte des ressources et des charges de l'auteur de l'infraction ». Cependant, la Haute juridiction en faisait une interprétation restrictive, n’exigeant

pas une motivation spéciale au sein du jugement de condamnation421. Dans une décision du 1er

février 2017422, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a opéré un revirement de

jurisprudence à ce sujet dans une affaire concernant deux prévenues condamnées en première instance à 5 000 euros d’amende pour des faits de recel et de blanchiment et dont les peines, à hauteur d’appel, avaient été lourdement aggravées en passant à 50 000 et 30 000 euros, prenant en compte la particulière gravité des faits et le bénéfice tiré de l’infraction. La Haute juridiction a estimé qu’ « en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l’infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de l’auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges », cassant l’arrêt d’appel qui avait alourdi les peines pécuniaires. Cette solution jurisprudentielle fut confirmée quelques mois plus tard lors d’un arrêt du 15 mars 2017, rendu à propos de délit de

favoritisme423 et à l’occasion duquel la Chambre criminelle de la Cour de cassation a précisé

420 Cass. crim., 22 nov. 2016, inédit, pourvoi n° 15-83.559.

421 Cass. crim., 27 oct. 2015, inédit, pourvoi n° 14-87.571.

422 Cass. crim., 1er févr. 2017, inédit, pourvoi n° 15-83.984, D. act. 16 févr. 2017, obs. C. FONTEIX.

150

qu’ « en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle [...] ». La décision d’appel attaquée qui ne comportait aucun développement ou analyse sur les ressources ou les charges du prévenu encourait donc la cassation sur ce point. Il est évident qu’en exigeant une motivation spéciale eu égard aux ressources du délinquant, la Chambre criminelle de la Cour

de cassation participe pleinement à contrôler le choix de la peine nécessaire prononcée424.

En outre, il convient de noter que les juges ont rendu le 1er février 2017 deux autres

arrêts ordonnant une motivation non prévue par les textes dans le prononcé d’une peine. Ainsi, selon la Chambre criminelle de la Cour de cassation, doivent désormais faire l’objet d’une

motivation spéciale les peines d’inéligibilité425 et d’interdiction de gérer426. Si ces décisions ont

pour objet de renforcer le principe d’individualisation et par conséquent le principe de nécessité, ce qu’il faut féliciter, il n’en reste pas moins que le législateur n’a, pour l’heure, pas emprunté cette voie pour l’ensemble des peines pouvant frapper le condamné. En outre, cette position fait encore davantage passer l’obligation de nécessité du législateur vers le juge, ce qui est en contradiction avec l’esprit originel du principe de nécessité.

Se voulant le garant d’une nécessité propre à chaque espèce, le principe de personnalisation se trouve néanmoins réduit à sa plus faible expression dans de nombreux cas du droit pénal des affaires.

B - Les restrictions au principe de personnalisation

128. La relativité du principe. Même s’il s’agit aujourd’hui d’un principe à valeur constitutionnelle, le principe de personnalisation n’est pas absolu. En ce sens, le Conseil constitutionnel a maintes fois rappelé dans ses décisions que ce principe « ne saurait toutefois

interdire au législateur de fixer des règles assurant une répression effective des infractions »427.

La personnalisation, en ce qu’elle permet de moduler la sanction en fonction de l’espèce et de permettre l’application de la peine jugée nécessaire, ne doit pas pour autant empêcher la répression effective voulue par le législateur et le priver de son pouvoir de fixer des peines

424 Cass. crim., 9 janv. 2018, inédit, pourvoi n° 17-80.200.

425 Cass. crim., 1er févr. 2017, inédit, pourvoi n° 15-84.511.

426 Cass. crim., 1er févr. 2017, pourvoi n° 15-85.199.

151

lourdes. Cette relativité du principe explique les restrictions qui lui sont apportées tant par le Conseil constitutionnel lui-même que par le législateur.

129. Le cas des majorations fiscales. Une des particularités de la répression fiscale

consiste en l’application de majorations. Ces sanctions à taux fixe qui ont le caractère d’une

punition sont soumises aux exigences de l’article 8 de la Déclaration de 1789. Cependant, le Conseil constitutionnel juge constamment ces sanctions conformes au principe de personnalisation. Par exemple, l’article 1729 du Code général des impôts réprime les omissions ou inexactitudes dans les déclarations du contribuable et prévoit une majoration de 40 % en cas de mauvaise foi et une majoration de 80 % en cas de manœuvres frauduleuses. Lors de l’examen de la disposition dans sa décision du 17 mars 2011, le Conseil constitutionnel a rappelé « que la loi a elle-même assuré la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés ; que le juge décide, dans chaque cas, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l’administration, soit de maintenir ou d’appliquer la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, soit de ne laisser à la charge du contribuable que des intérêts de retard s’il estime que l’administration n’établit pas que ce dernier se serait rendu coupable de manœuvres frauduleuses ni qu’il aurait agi de mauvaise foi ; qu’il peut ainsi proportionner les pénalités selon la gravité des agissements commis par le

contribuable »428. Même si elle existe, la marge de manœuvre du juge est ici très limitée puisque

les taux sont fixes. En réalité, seules trois possibilités sont permises, soit le taux de 40 %, celui de 80 % ou les intérêts de retard.

De façon similaire, dans sa décision du 17 septembre 2015, le Conseil a eu à juger d’amendes à taux forfaitaires, prévues par l’article 1736 du Code général des impôts qui punit de 1 500 ou 10 000 euros le défaut de déclaration d’un compte bancaire ouvert à l’étranger,

selon que le territoire est ou non coopératif sur le plan fiscal429. Les juges ont considéré que « la

loi elle-même a assuré la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements

réprimés en prévoyant deux montants forfaitaires distincts »430. Le Conseil a rajouté que « le

juge décide après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l’administration, en fonction de l’une ou l’autre des amendes prononcées, soit de maintenir

428 Cons. const. 17 mars 2011, n° 2010-103, 6e consid.

429 Cons. const., 17 sept. 2015, n° 2015-481 QPC.

152

l’amende, soit d’en dispenser le contribuable, […], qu’il peut ainsi proportionner les pénalités selon la gravité des agissements commis par le contribuable ».

Pourtant, le contrôle du juge se réduit seulement à une alternative de maintien de l’amende ou de dispense de celle-ci. La position de Conseil constitutionnel en la matière apporte une réelle restriction au principe de proportionnalité, la liberté du juge dans le choix de la peine nécessaire s’en trouvant réduite. Mais les Sages ne sont pas les seuls à restreindre le principe puisque le législateur y a lui aussi apporté quelques tempéraments.

130. Les peines complémentaires obligatoires. A la différence des peines automatiques, les peines complémentaires obligatoires se doivent d’être prononcées par le juge et peuvent être écartées par une décision motivée de la juridiction. Malgré cette possibilité, il est possible de voir dans ce type de peines une atteinte certaine au principe d’individualisation, le prononcé de la sanction étant alors le principe et sa mise à l’écart l’exception. Le mécanisme des peines complémentaires obligatoires a notamment été retenu par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. En son article 19, la loi a modifié l’article 432-17 du Code pénal et a inséré une peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité pour les personnes s’étant rendues coupables d’un manquement au devoir de probité, résultant des articles 432-10 et suivants du Code pénal. Plus précisément, le dernier alinéa de l’article 432-17 disposait que « par dérogation au 1° du présent article, le prononcé de la peine complémentaire d'inéligibilité mentionnée au 2° de l'article 131-26 et à l'article 131-26-1 est obligatoire à l'encontre de toute personne coupable de l'une des infractions définies à la section 3 du présent chapitre. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette peine, en considération des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ». Cet article a été modifié par la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 qui a transféré cette peine complémentaire obligatoire au sein d’un nouvel article 131-26-2 du Code pénal. Le texte prévoit désormais que la peine d’inéligibilité devra être prononcée pour treize types d’infractions énumérés par l’article, dans le domaine économique et financier, fiscal et électoral. La juridiction de jugement devra prononcer cette peine, à moins d’émettre une décision spécialement motivée. A noter que le Conseil constitutionnel a déclaré l’article 131-26-2 du Code pénal conforme au principe de nécessité des peines (mis à part en ce qui concerne les infractions de presse) en indiquant qu’ « en instituant une peine complémentaire obligatoire d'inéligibilité, le législateur a entendu renforcer l'exigence de probité et d'exemplarité des élus

153

et la confiance des électeurs dans leurs représentants »431 sans effectuer un réel contrôle de la

nécessité d’une telle sanction et en se contentant de rappeler la possibilité d’y déroger par décision spécialement motivée.

A l’évidence, cette peine laisse peu de marge de manœuvre au juge pénal qui est contraint de la prononcer et qui doit spécialement motiver sa mise à l’écart. Le principe de personnalisation adopte ici une forme négative, ne justifiant plus l’application d’une peine mais son exclusion. Il est dès lors possible de douter de la nécessité d’une telle peine. En outre, ce sont parfois les peines principales elles-mêmes et non plus les peines complémentaires qui portent une atteinte au principe de personnalisation.

131. Les peines comportant un minimum. De manière générale, les minimums légaux de la sanction ont disparu avec le Code pénal de 1994. Auparavant, les quanta de peine étaient limités tant par le haut que par le bas. A titre d’exemple, l’escroquerie simple était punie

d’une amende de « 3 600 francs au moins et de 2 500 000 francs au plus »432. Dans cette

hypothèse, le pouvoir de personnalisation s’en trouvait restreint puisque le juge se devait de prononcer une peine doublement limitée dans son montant. Outre la loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive intégrant les peines planchers dans la législation, il est une disposition particulière en droit économique prévoyant un minimum de quantum. En

effet, en matière boursière, les infractions de délit d’initié433, de manipulation de cours434 et la

diffusion d’information fausse ou trompeuses435 sont punies d’une amende « de 100 millions

d’euros ce montant pouvant être porté jusqu'au décuple du montant de l'avantage retiré du délit,

sans que l'amende puisse être inférieure à cet avantage »436. Même si cette peine minimale est

selon la doctrine compatible avec les principes de nécessité et de personnalisation437, force est

de constater qu’elle apporte une restriction à la liberté du juge dans le choix de la peine nécessaire au cas d’espèce, ce dernier ne pouvant descendre sous le minimum prévu légalement.

431 Cons. const., 8 sept. 2017, n° 2017-752 DC.

432 Anc. art. 405, al. 1 C. pén.

433 Art. L. 465-1, al. 1er C. mon. fin.

434 Art. L. 465-2, al. 1er C. mon. fin.

435 Art. L. 465-2, al. 2 C. mon. fin.

436 Art. L. 465-1, al. 1er C. mon. fin.

Documents relatifs