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4.5 Modélisation numérique du verrouillage des modes en phase

4.5.1 Principe du modèle

Le code MATLAB utilisé est très similaire à celui du Chap. 3.6.2. L’enveloppe du champ électrique est décrite par un tableau de valeurs complexes de taille Npts (typiquement 2048),

définissant une fenêtre temporelle allant de −Tcav/2à Tcav/2, où Tcav est le temps d’aller-retour

dans la cavité. Le spectre est donc décrit sur une fenêtre fréquentielle bornée par la fréquence de Nyquist (ou de coupure) fnyq = 0,5 Npts/Tcav. La fenêtre temporelle est synchrone avec

l’impulsion laser de fréquence centrale ω0, i.e. avec la vitesse de groupe vg(ω0). On considère

ensuite la propagation de cette impulsion à travers les différents éléments de la cavité, dont les épaisseurs sont négligées. Les effets transverses ne sont pas pris en compte (ondes planes). La cavité est linéaire, et les effets d’onde stationnaire (spatial hole burning) sont négligés. Dans ces conditions le gain en amplitude dans le milieu laser pour un tour complet de cavité est

g (ω) = exp (∆N σglgf (ω)) ,

où ∆N est l’inversion de population moyenne du milieu laser, σgest la section efficace d’émission

laser, lgla longueur du milieu laser, et f (ω) la forme de la raie laser, supposée de profil Lorentzien

et de largeur ∆ω = π/T2, où T2 le temps de décohérence de la transition. À chaque tour de

cavité, l’inversion de population est mise à jour pour tenir compte de la saturation. Ceci se fait en résolvant l’équation différentielle classique [Sie86]

d∆N dt = 1 T1  ∆N0− ∆N − 2 2∗∆N hIi Isat  ,

où T1 est le temps de vie effectif du niveau excité, ∆N0 est un terme de pompage (valeur

qu’atteint ∆N en l’absence d’oscillation), Isat = 1/T1σg est l’intensité de saturation, et hIi est

l’intensité laser en s−1.m−2 dans la cavité, moyennée sur la fenêtre temporelle. Le facteur 2

provient du fait que la cavité est linéaire (aller-retour dans le milieu à gain). Le facteur 2∗, ou

bottleneck factor, introduit par Siegman, tient compte de la durée de vie du niveau inférieur de la transition laser, qui réduit l’inversion de population disponible. Il vaut 1 pour un laser à

4.5 Modélisation numérique du verrouillage des modes en phase 4 niveaux idéal, et 2 pour un laser à trois niveaux. En pratique, il permet un ajustement du modèle aux résultats expérimentaux. Par la suite nous prendrons la valeur pessimiste 2∗ = 2.

Par ailleurs, le temps de vie T1n’est pas forcément confondu avec le temps de vie de la transition

laser, car il peut exister d’autres modes de relaxation pour le niveau excité. Néanmoins, pour simplifier l’analyse, nous confondrons T1avec le temps de fluorescence mesuré dans la littérature

pour le Cr:ZnSe [Sor04].

Le fait de prendre une intensité moyenne revient à négliger les effets de façonnage de l’im- pulsion par la saturation, ce qui est possible pour des lasers à gain modéré5 comme celui

dimensionné au Chap. 4.6. Ceci est également justifié par le fait que le temps de vie de ce laser (6 µs) est très long devant le temps d’aller-retour de la cavité (3 ns) ou la durée d’impulsion attendue (< 100 ps). La saturation du milieu laser se fait donc grâce à plusieurs impulsions successives, après plusieurs tours de cavité, et non par une impulsion individuelle. De plus, on peut montrer que dans ce cas la saturation par une impulsion unique n’est pas nécessaire pour assurer la stabilité du verrouillage de modes6 [Hau76, Kel96].

L’interaction dans le cristal non-linéaire est décrite par la résolution exacte des équations non-linéaires (1.11), de manière similaire au Chap. 2. Pour résoudre ces équations, on suppose l’accord de phase exact aux fréquences des porteuses ω0 et 2ω0. De plus, puisque la seconde

harmonique est nulle à l’entrée du cristal, sa phase est libre de s’ajuster automatiquement pour maximiser l’efficacité de doublage. La phase non-linéaire vaut donc ϕ = π/2. De même, au retour dans le cristal, on suppose que la phase non-linéaire a été ajustée à −π/2 à l’aide d’une lame dispersive afin de maximiser la reconversion. Les champs u sont alors réels et leur expressions sont très simples puisque seules des fonctions hyperboliques sont impliquées. Dans ce cas, la réflectivité non-linéaire est donnée par

RN L =

u021 (lc)

u2

1(0)

t2FP(ω) ,

où u1(0) est le champ de l’onde fondamentale à l’entrée du cristal, et

u01(lc) = u01(0) sech  κlc q u021 (0) /2 + u022 (0)  × " 1 − s u022 (0) u02 1 (0) /2 + u022 (0) tanh  κlc q u021 (0) /2 + u022 (0) # −1

le champ de l’onde fondamental au retour, avec κ le coefficient de couplage non-linéaire, et lc

5Cet effet de pulse shaping est en revanche très important dans les lasers Nd:YAG oscillants avec des coupleurs

de 4 %, où une analyse de Frantz-Nodvik devient nécessaire [Sie86].

6Cette conclusion serait différente avec un laser à semiconducteur par exemple (T

la longueur du cristal. u0

1(0) = Ru1(lc) est le champ fondamental réfléchi par le coupleur. Avec

ces notations les densités de puissance sont données par ωu2/2Z

0. À l’aller les champs pour

l’onde fondamentale et la seconde harmonique sont u1(lc) = u1(0) r 1 − tanh2κlcu1(0) / √ 2 u2(lc) = u1(0) tanh  κlcu1(0) / √ 2  /√2.

Pour des raisons de simplicité et de temps de calcul, nous avons choisi d’utiliser des fonctions analytiques pour décrire le miroir non-linéaire. Ces fonctions donnent les expressions exactes des champs, et dispensent d’une résolution numérique approchée des équations non-linéaires. Cependant, la dispersion dans le cristal (ou le désaccord de phase) n’est pas contenue dans ces équations. La bande passante du miroir non-linéaire est donc prise en compte par un filtre Fabry-Perot de transmission en amplitude tFP(ω)(élevée au carré car la lumière passe deux fois

dans le filtre par tour de cavité). Ceci permet par ailleurs d’éviter les problèmes d’aliasing7. À

noter que cette méthode a également été utilisée par Barr pour modéliser le miroir non-linéaire dans un laser à 1 µm [Bar91]. Pour prendre en compte la dispersion de façon rigoureuse, il faudrait recourir à une approche numérique (comme au Chap. 3.6.2), ou utiliser des fonctions de Jacobi incluant le désaccord de phase (comme au Chap. 3).

Pour accélérer le temps de calcul, le laser est démarré avec les conditions initiales du ré- gime continu, soit une intensité et une inversion de population correspondants à la solution stationnaire gain = pertes. Ces valeurs sont Icw = Isat(r − 1) / (2 2∗) et 4Ncw = p/2σglg, où

p = q + ppassives sont les pertes totales de la cavité, somme des pertes du miroir non-linéaire

q = ln 1/R et des pertes passives ppassives, et r = 4N0/4Ncw est le taux de pompage, ou

nombre de fois au dessus de l’inversion de population seuil. Partant de ces conditions initiales, quelques milliers de tours de cavité sont nécessaires pour que l’oscillation se stabilise au niveau de la précision de calcul, selon le taux de pompage. Un pic de bruit, d’amplitude correspondant à celle de l’émission spontanée dans le mode laser, est ensuite injecté au milieu de la fenêtre temporelle pour initier le verrouillage de modes.