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Les techniques analytiques ne peuvent pas tenir compte des fortes non-lin´earit´es dues aux nombres de Rayleigh ´elev´es, et les m´ethodes num´eriques 3D, qui s’av`erent n´ecessaires si l’on veut caract´eriser la forme de l’´ecoulement convectif dans le manteau, et plus pr´ecis´ement en base de lithosph`ere oc´eanique, sont coˆuteuses. Les exp´eriences de laboratoire semblent d`es lors une approche logique pour ´etudier ce type de probl`eme. Elles ont de plus l’avantage non n´egligeable de fournir une solution physiquement pos- sible `a des conditions limites impos´ees, ce qui peut ne pas ˆetre toujours le cas pour les mod`eles num´eriques.

Nous pr´esentons ici l’´etude exp´erimentale de l’´ecoulement convectif en base de lithosph`ere oc´eanique. Nous nous int´eresserons en particulier `a la forme de la convec- tion `a petite ´echelle qui se d´eveloppe quand des instabilit´es de type Rayleigh-B´enard se forment sous la couche limite thermique sup´erieure froide, et interagissent avec l’´ecoulement cisaillant `a grande ´echelle. Dans cette optique, la formation d’instabilit´es ´etant contrˆol´ee principalement par les conditions thermiques impos´ees, nous avons pri- vil´egi´e l’effet thermique par rapport `a l’effet m´ecanique. Nous verrons cependant que les r´esultats de cette ´etude pourront ˆetre ´elargis au cas o`u les effets m´ecaniques sont dominants, du fait de la configuration particuli`ere de notre exp´erience.

Dans nos exp´eriences, la circulation `a grande ´echelle est impos´ee par un chauffage lat´eral, repr´esentant l’analogue d’une ride m´edio-oc´eanique, et l’on impose une condi- tion limite sup´erieure froide (Figure 5.1). La condition inf´erieure est soit isotherme, maintenue `a la mˆeme temp´erature que la condition sup´erieure, soit adiabatique. Nous avons ainsi les deux conditions souhait´ees : l’existence d’un mouvement relatif (ci- saillant) en base de lithosph`ere, et un bon contrˆole des temp´eratures. Comme dans le syst`eme terrestre, la couche limite thermique froide s’´epaissit en s’´eloignant de la condition chaude lat´erale. Si elle d´epasse une ´epaisseur critique, elle va devenir gravita-

froid chaud ' lithosphère ' ' ride' ' manteau ' (Tup < Tlat) (Tlat)

froid (Tlow =Tup) ou adiabatique

adiabatique

Fig. 5.1 – Principe de l’exp´erience : la circulation `a grande ´echelle est impos´ee par un chauffage lat´eral (analogue d’une ride m´edio-oc´eanique). On impose une condition sup´erieure froide. La couche limite thermique froide qui en r´esulte est l’analogue de la lithosph`ere oc´eanique.

tionnellement instable, et g´en´erer des instabilit´es `a petite ´echelle, qui vont s’organiser en pr´esence de l’´ecoulement `a grande ´echelle. C’est ce m´ecanisme que nous allons ´etudier. Nous pouvons faire deux remarques concernant le syst`eme pr´esent´e dans la fi- gure 5.1 :

1. Nous n’imposons pas de gradient de temp´erature vertical (pas de chauffage par le bas). Ce n’est pas r´ealiste dans le cadre d’une mod´elisation globale de la convec- tion terrestre, qui n´ecessiterait une condition limite inf´erieure chaude. Nous avons choisi dans cette ´etude de nous focaliser uniquement sur l’´etude de la convection en base de lithosph`ere et de son m´ecanisme de d´estabilisation. Dans cette op- tique, la configuration pr´esent´ee est la meilleure, car un chauffage par le bas induirait la formation de panaches chauds au niveau de la plaque inf´erieure, qui remonteraient et viendraient ”polluer” les m´ecanismes de g´en´eration d’instabi- lit´es froides sous la couche limite thermique sup´erieure. Il en r´esulterait l’impos- sibilit´e d’´etudier proprement l’interaction de ces instabilit´es avec l’´ecoulement `a grande ´echelle g´en´er´e par le chauffage lat´eral. Ceci est d’autant plus vrai dans un fluide `a viscosit´e d´ependant de la temp´erature, les instabilit´es montantes chaudes ´

etant dans ce cas moins visqueuses, donc plus rapides, que les instabilit´es froides sublithosph´eriques. Nous imposons donc soit une temp´erature froide, ´egale `a la temp´erature de la condition limite sup´erieure, soit une condition adiabatique, de fa¸con `a ne pas g´en´erer de panaches montants.

2. Nous privil´egions ici les effets thermiques, en imposant la temp´erature, et non pas la vitesse, de la plaque sup´erieure (un bon contrˆole simultan´e de ces deux param`etres dans le cas d’une limite sup´erieure mobile ´etant impossible pour des raisons techniques). Ramen´e au syst`eme terrestre, on peut alors s’interroger sur les vitesses relatives de la lithosph`ere et de l’asth´enosph`ere. Si l’existence d’un cisaillement dˆu `a une vitesse relative non nulle est commun´ement admise, la

question de la valeur relative de ces vitesses, ou en d’autres termes, qui de la li- thosph`ere ou de l’asth´enosph`ere a la vitesse la plus importante dans le r´ef´erentiel terrestre, re¸coit des r´eponses tr`es mitig´ees. Nous reviendrons sur ce point impor- tant dans le chapitre 8.

La table 5.1 pr´esente les valeurs des diff´erents nombres sans dimension, dans le cas de la Terre et pour les exp´eriences que nous avons r´ealis´ees en laboratoire. On se place dans des r´egimes `a haut nombre de Rayleigh et haut nombre de Prandtl : les forces de flottabilit´e sont beaucoup plus grandes que les processus diffusifs (le syst`eme convecte), et les forces visqueuses l’emportent sur les effets inertiels. L’un des param`etres cl´e du syst`eme, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, est le rapport entre la vitesse verticale des instabilit´es tombant de la couche limite sup´erieure froide et la vitesse horizontale de l’´ecoulement cisaillant. Les valeurs pour la Terre ont ´et´e estim´ees `a partir des lois d’´echelle trouv´ees par Crambes et al. (2004).

Tab. 5.1 – Nombre de Rayleigh, nombre de Prandtl et rapport d’aspect pour la Terre et pour nos exp´eriences. Le dernier param`etre, rapport entre la vitesse verticale des instabilit´es de la couche limite thermique sup´erieure froide et de la vitesse horizontale du cisaillement, sera discut´e dans les chapitres suivants.

Terre Exp´eriences

Ra∼ 105− 5.108 Ra∼ 104− 108

P r∼ 1024 P r∼ 7.102− 2.105

a∼ 3 − 20 a∼ 2 − 3

vinstab/vshear ∼ 0.1 − 1 vinstab/vshear∼ 0.01 − 0.8

La section suivante pr´esente le syst`eme exp´erimental. Nous nous int´eresserons dans le chapitre 6 `a la caract´erisation du point de vue de la m´ecanique des fluides des diff´erents mouvements pr´esents dans le syst`eme, et de leur interaction. Enfin, nous reviendrons aux implications g´eophysiques de nos exp´eriences dans le chapitre 8.