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Premier épisode, cours et pronostic de la schizophrénie

Génétique Conception

2.5 Premier épisode, cours et pronostic de la schizophrénie

Des études relativement récentes (89, 90) soutiennent le fait que la schizophrénie est une maladie du cerveau. Elles ont démontré que les individus ayant une apparition de la maladie dans leur enfance, présentent au cours de leur adolescence une diminution progressive du volume du cerveau et particulièrement, une diminution de la matière grise.

Premier épisode

En général, les premiers signes de la maladie se développent entre l'adolescence et l'âge adulte. Néanmoins, approximativement 2% des schizophrènes auront leurs premiers symptômes durant leur enfance. Avant l’âge de 5 ans, la maladie est extrêmement rare et présente une faible croissance jusqu’à l’âge de 10 ans. Les manifestations de la maladie sont très similaires chez les enfants et chez les adultes. Beaucoup de chercheurs soutiennent toutefois l’hypothèse que les facteurs génétiques jouent un rôle beaucoup plus important dans le développement de la maladie chez les enfants (91).

La majorité des personnes qui développent la schizophrénie ont une enfance normale qui ne laisse pas entrevoir l’expression de la maladie. Pour d’autres cependant, leur famille soutient «qu’ils ont toujours été différents des autres enfants» sans pouvoir identifier le moment précis du début de la maladie. Par contre, il faut spécifier que le fait «d’être différent des autres enfants» ne prédit pas le développement de la schizophrénie, car il est bien connu que les enfants excentriques peuvent aussi prédire de futurs «leaders». Ce constat rend très difficile la distinction entre les enfants normaux et les enfants présentant des symptômes précoces de la schizophrénie.

Les principaux symptômes précoces signalés par les familles des personnes atteintes de schizophrénies sont : la dépression, le changement du comportement social (particulièrement le retrait social), le changement des habitudes de sommeil et d’alimentation, les suspicions ou la sensation qu’il y a des personnes qui parlent avec eux, le changement dans les habitudes d’hygiène personnelle, le changement dans les performances scolaires, le sentiment de faiblesse ou de manque d’énergie, les maux de tête ou sensations bizarres dans la tête, le changement dans la relation émotionnelle avec la famille et les amis, la confusion et les pensées bizarres. En plus de ces symptômes identifiés par la famille, on peut aussi énumérer ceux moins tangibles comme l’anxiété, l’agitation, la difficulté de concentration et la diminution de la confiance en soi.

Aux États-Unis, on estime que chez environ les trois quarts des malades, les premiers symptômes de schizophrénie surviennent entre l’âge de 15 et 25 ans (91). Bien que la maladie touche autant les hommes que les femmes (22), l'âge d'apparition tend à être légèrement inférieur chez les hommes (12). Une étude menée au Québec par Nicole et al. démontre que l’âge moyen des personnes admises pour un premier épisode de schizophrénie à l’hôpital Louis-H Lafontaine (HLHL) est de 26,9 ans pour les hommes et de 34,2 ans pour les femmes (16).

Tel qu’il existe une certaine forme de schizophrénie chez les enfants, on distingue aussi une forme qui se manifeste après l’âge de 40-45 ans. L’incidence de la maladie après cet âge demeure inconnue, mais elle n’est pas rare (92). En général, il existe une différence entre les études européennes et celles américaines quant à l’âge d’apparition de la schizophrénie, avec une occurrence plus tardive de la maladie chez les européens (93).

À travers le temps, un changement de l’âge d’apparition des premiers symptômes a aussi été rapporté. La maladie semble vouloir se présenter à un âge moins élevé présentement, comparativement à il y a 50 ou 100 ans. Mais elle se présente avec une distribution uniforme dans le monde et avec des manifestations similaires dans les différentes populations en fonction de l’âge et du sexe (2, 91).

Cours et pronostic de la schizophrénie

La schizophrénie est une maladie progressive qui peut être divisée en cinq grandes phases : la phase pré-morbide (période précédent la première manifestation claire de symptôme de la maladie), la phase prémonitoire (la période avec la plus ancienne présentation de la maladie, mais sans diagnostic), la phase d’apparition (la période durant laquelle les symptômes de la psychose sont clairement identifiables), la phase chronique (la période caractérisée par des rechutes et des rémissions périodiques, d’une durée moyenne et approximative de cinq ans), et la phase progressiste. Les symptômes de la phase

progressiste ressemblent à ceux de la phase prémonitoire. Si la personne n’a pas eu de symptômes avant le premier épisode, il est possible qu’elle n’en ait peu ou pas du tout par la suite. Certaines personnes schizophrènes n’ont qu’une ou deux crises dans leur vie, tandis que d’autres en ont beaucoup plus. La phase progressiste est caractérisée par les symptômes résiduels de la maladie qui risquent d’augmenter alors que chaque rechute dans la phase chronique diminue la capacité de fonctionner normalement. Habituellement, la détérioration clinique de la schizophrénie se produit pendant les cinq premières années de la maladie (94).

En 1986, Rabiner et al. (95) ont divisé les personnes souffrant de schizophrénie en trois groupes selon le pronostic de la maladie. Ils considèrent qu’après un premier épisode de schizophrénie, 25% des patients seront guéris avec peu ou pas d’événement récurrent. La majorité, soit 50% présenteront une maladie récurrente sous forme d’événements aigus suivis par des périodes de rémission et présentant peu ou pas de conditions psychopathologiques résiduelles. Finalement, le dernier 25% présenteront une maladie caractérisée par des récupérations incomplètes qui conduisent à l’accumulation des symptômes résiduels et à la détérioration progressive de la fonction mentale. En résumé, après un premier épisode de schizophrénie, la majorité des patients continuent d’avoir des épisodes actifs suivis par des épisodes de rémission (96).

Les résultats d'une méta-analyse réalisée dans la littérature internationale, montre que 40,2% des patients ont présenté un état amélioré après un suivi moyen de 5,6 ans (97). Une autre méta-analyse, effectuée principalement sur des études nord-américaines de longue durée et sur une étude de l'OMS, estime qu’entre 21% et 57% des patients présentent une amélioration à long terme. Cette variation entre les résultats s’explique par la rigueur des critères utilisés pour diagnostiquer la schizophrénie (98). Après 10 ans, Stephens et al. ont montré que le cours naturel de la schizophrénie se présente de la façon suivante : 50% des patients sont complètement guéris et relativement indépendants, 25%

sont améliorés mais nécessitent du support, 15% sont hospitalisés sans aucune amélioration et 10% sont décédés (99).

Généralement, une apparition tardive de la maladie a été associée avec un meilleur pronostic. Par exemple, une personne diagnostiquée à l’âge de 25 ans a un meilleur pronostic qu’une personne diagnostiquée à l’âge de 15 ans (22). De plus, le pronostic de la maladie dépend de la façon dont les symptômes apparaissent. Ainsi, une personne ayant une apparition brusque des symptômes a plus de chance de se rétablir, comparativement à une personne ayant une apparition graduelle (3). Finalement, les femmes ont habituellement un meilleur pronostic pour la schizophrénie étant donné que la maladie se manifeste près de 5 ans plus tard que chez les hommes et qu’une apparition tardive a été associée à un meilleur pronostic, (100-102).