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DE LA PREMIÈRE ÉTAPE DE MODERNISATION INTERVENUE À LA SUITE DE L’INDÉPENDANCE

La vocation première du législateur étant d’assurer l’uniformité de la justice aussi bien par le droit que par les institutions, les autorités exécutives, agissant sur habilitation de l’Assemblée nationale, vont par une série d’ordonnances mettre en place une organisation juridictionnelle spécifique (Chapitre 1), tant dans sa structuration que dans ses règles d’organisation et de fonctionnement.

Mais durant ses années de maturation, le système n’est cependant pas resté immuable : il a connu des retouches çà et là tendant à le rendre plus fonctionnel et plus moderne.

En 2002, l’institution judiciaire a fait l’objet d’un diagnostic sévère quant à son organisation et son fonctionnement. Ce qui a conduit à l’adoption d’un plan plus global et plus cohérent de modernisation de la justice dénommé Programme sectoriel Justice(chapitre 2) ayant pour ambition de changer en profondeur la physionomie et le fonctionnement de la justice par le biais de projets structurants tendant à l’amélioration de l’accessibilité et de l’efficacité de la justice sans occulter celle de son cadre institutionnel.

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Chapitre 1

La mise en place d’un modèle juridictionnel spécifique

En 1960, il y avait urgence à mettre en place un nouvel État, et dès lors, un nouveau système judiciaire qui puisse aider à consolider la Nation et à pacifier le nouveau territoire pour en faire un espace de développement. Il fallait, par conséquent, gommer les disparités juridiques entre les citoyens, prendre en compte les coutumes, les traditions et les religions, mais également la faiblesse des moyens budgétaires et humains et du taux d’alphabétisation des populations. Cette réflexion, qui a plus été le fait d’une petite élite francisée que de consultations nationales, a donné un système original d’unité de juridiction à dualité de contentieux (section 1) reposant sur une architecture institutionnelle simplifiée (section 2).

Section 1. Un système original et cohérent.

L’unité de juridiction à dualité de contentieux allait se manifester par une uniformisation des juridictions : les citoyens sénégalais seront désormais jugés par des juridictions de même nature et de type moderne, c’est-à-dire des juridictions structurées en siège pur, parquet et instruction, officiant avec des juges professionnels qui appliquent des lois communes à tous.

Cette unité se traduit par la suppression des juridictions particulières, comme les tribunaux coutumiers et les tribunaux musulmans.

Le système mis en place se caractérise par une unité de juridictions : en d’autres termes, il n’y a pas deux ordres de juridiction comme en France, mais un seul, qui traite tous les types de contentieux. Le recours au cadi, qui était juge de droit dans les tribunaux

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musulmans, devient facultatif en matière de statut personnel ou de succession nécessitant l’application des règles du droit musulman.

Cette unité de juridictions se caractérise également par une dualité du contentieux, qui se manifeste par le traitement des contentieux judiciaire et administratif par le même juge, à la seule différence que la saisine pour les affaires administratives est soumise à des règles spécifiques déterminées par les articles 729 et suivants du code de procédure civile (CPC).

D’autres règles s’appliquant spécifiquement au contentieux administratif sont fixées par le code des obligations de l’administration contrairement au contentieux administratif français, essentiellement encadré par la jurisprudence. C’est pourquoi nous allons voir d’abord les principes qui gouvernent l’organisation de ce modèle spécifique (§1), avant d’aborder l’architecture institutionnelle simplifiée qui en fut la résultante (§2).

§1. Les principes d’organisation.

L’organisation judiciaire initiale va reposer sur deux principes d’organisation : d’une part, le choix d’un ordre de juridiction unique pour tenir compte des contraintes en ressources humaines et budgétaires (A) ; et d’autre part, la différenciation des contentieux judiciaires et administratifs par l’institution de règles de saisine spécifiques pour prendre en compte la particularité de l’État et de ses démembrements (B).

A.- Le choix d’un ordre de juridiction unique.

Si beaucoup de pays ont choisi une organisation judiciaire basée sur plusieurs ordres34, le Sénégal a opté pour un ordre unique, se traduisant par l’existence de juridictions de droit commun, ayant des compétences embrassant la quasi-totalité des matières. C’est ainsi que les tribunaux des différents degrés connaissent aussi bien les affaires civiles, commerciales, familiales, sociales, qu’administratives, Il est important de préciser que « l’ouverture aux influences étrangères notamment à celle de l’ancienne métropole et du Maroc et l’adaptation de ces apports extérieurs au contexte local semblent avoir réussi sur ce point. L’adoption du système marocain d’unité de juridiction a été réalisée en pleine conformité avec le principe français de la séparation du pouvoir au Sénégal. Si ce mode d’organisation de la justice

34 Cas de la France.

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administrative avait été contraire à leurs principes constitutionnels, les Etats africains ne l’auraient certainement pas adopté. Mais à la vérité, les considérations d’ordre logique et théorique n’ont pas occupé la plus grande place parmi les raisons du choix d’un système d’unité de juridiction ».35

Les motivations d’une telle option étaient en effet dictées d’abord par une insuffisance des ressources humaines (1) doublée d’un niveau limité des conditions socio-économiques des populations (2).

1. Un choix dicté par une insuffisance de ressources humaines.

L’une des raisons de ce choix vient du fait que non seulement le nouvel État n’avait pas suffisamment de ressources mais qu’il ne disposait pas non plus de suffisamment de magistrats et de personnels qualifiés.

En effet, de 1960 à 1963, le Sénégal n’a eu que sept (7) magistrats autochtones36 exerçant dans des juridictions, qui, pour l’essentiel, étaient animées par des coopérants français. Avec la prise de fonction effective de Madame Ricou née Crespin, et de Messieurs Gilbert André, Ousmane Camara et El Hadji Diouf, le 29 septembre 1961, ce nombre est passé à 11 magistrats sénégalais.

2. Un choix dicté par la situation socio-économique des populations.

L’autre raison était liée au taux élevé d’analphabétisme et d’illettrisme. En effet, avec le système colonial qui avait imposé la langue française comme langue officielle et réduit l’accès de celle-ci à une petite élite, la majorité des sénégalais était confinée dans l’analphabétisme et l’illettrisme. Cette situation était exacerbée par l’absence totale d’une politique d’alphabétisation et de valorisation des langues locales qui étaient considérées comme des langues « vernaculaires ».

35 KANTE, Babacar : Unité de juridiction et droit administratif : l’exemple du Sénégal. Thèse, Dakar, 1983, p

102.

36 Monsieur Ousmane Camara a affirmé, que le 29 septembre 1961, au moment où il a pris ses fonctions avec

trois autres camarades de promotion, « tous les postes de la magistrature sont occupés par des coopérants français, à l’exception de sept magistrats sénégalais qui sont : Issac FORSTER, Président de la Cour suprême, Ibrahima BOYE, Procureur général près la Cour suprême, Kéba MBAYE, Amadou Louis GUEYE, Laïty NIANG, Ousmane GOUNDIAM, membres de la Cour suprême, Abdoulaye Maturin DIOP, juge de paix à Matam. », CAMARA O., Mémoires d’un juge africain - Itinéraire d’un homme libre. Dakar, KARTHALA-CREPOS, 2010, p. 71.

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Le démantèlement des universités dispensant un enseignement religieux, telle que l’Université de Pire,37 n’a pas permis non plus, à cette époque, l’alphabétisation des populations en langue arabe. Les quelques « Daara » qui ont survécu aux tentatives d’éviction de l’administration coloniale, ont plutôt développé des techniques de communication telle que le « wolofaal », c’est-à-dire l’utilisation de l’alphabet arabe pour transcrire la langue wolof.

Voilà autant de maux qu’un système complexe et hermétique n’a cessé d’exacerber, éloignant ainsi les justiciables de leur justice !

B.- La différenciation des contentieux judiciaire et administratif.

La différenciation des contentieux va se manifester par l’établissement d’un corps de règles propres à la saisine des juridictions en matière administrative (1) et de règles dérogatoires du droit commun (2).

1. Les règles de saisine spécifiques au contentieux.

Le principe de l’unité de juridiction est posé par l’article 3 de la loi n° 84-19 du 2 février 1984 fixant l’organisation judiciaire au Sénégal qui dispose :

« Sous réserve des compétences d’exception en premier et dernier ressort de la Cour suprême, de la Cour d’appel et des Cours d’Assises et, en premier ressort des Tribunaux du Travail, des Tribunaux Départementaux et des organismes administratifs à caractère juridictionnel, les Tribunaux Régionaux sont juges de droit commun en première instance en toute matière. »

Ils sont notamment compétents pour connaître :

1. de toutes instances tendant à faire déclarer débitrices les collectivités publiques, soit en raison de marchés conclus par elles, soit en raison des travaux qu’elles ont ordonnés soit en raison de tous actes de leur part ayant occasionné préjudice à autrui ;

2. de tous litiges relatifs à l’assiette, au taux et au recouvrement des impositions de toute nature et particulièrement des demandes en déchéance ou réduction formulées par les

37 Khaly Amar Fall (1555-1638) fonde au début du XVIIe siècle (1603) le centre universitaire de Pire (province de Saniokhor, département de Tivaouane au Sénégal), qui fut l’une des premières universités d’Afrique noire. Durant 300 ans, l’Université de Pire allait être la plus prestigieuse et la plus influente du Sénégal et de la sous-région (cf. https://nofi.fr/2017/07/universite-de-pire-senegal/39131).

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contribuables ainsi que les demandes en annulation des actes de saisies ou de poursuites administratives ;

3. de tous les litiges portant sur les avantages pécuniaires ou statutaires reconnus aux fonctionnaires et agents des diverses administrations, doivent être portés devant les mêmes juridictions, les actions intentées par les administrations contre les particuliers.

Ces dispositions qui reprennent textuellement celles –en vigueur depuis l’indépendance– de l’ordonnance n° 60-56 du 14 novembre 1960 actuellement abrogée, résument toute la conception unitariste de la juridiction administrative au Sénégal et marque une rupture brutale avec la conception dualiste, collégiale, voire traditionnaliste de la justice administrative française telle que nous l’avons reçue avec les Conseils du contentieux administratif des colonies qui avaient remplacé en 1881 les anciens Conseils privés coloniaux. La loi précitée institue dans un langage quelque peu sibyllin un seul ordre juridictionnel en consacrant les Tribunaux régionaux, juges de droit commun, en toutes matières judiciaires ou administratives, sauf en ce qui concerne les compétences réservées qu’elle qualifie d’exceptionnelles.

Elle ira jusqu’à énumérer les domaines administratifs de compétence en citant :

1. en matière contractuelle, les marchés publics et en matière extracontractuelle les actes dommageables des administrations ;

2. en matière fiscale, le contentieux de l’assiette et le contentieux du recouvrement ; 3. en matière de contentieux de la fonction publique, le plein contentieux relatif aux

rapports entre l’administration et ses agents.

Enfin, elle renvoie aux mêmes juridictions la compétence des actions dirigées par les administrations contre les particuliers. En somme au Sénégal, il n’existe pas un ordre juridictionnel judiciaire mais plutôt une unicité d’ordre juridictionnel englobant une pluralité de matières : la juridiction unique embrasse une multiplicité de matières même si la procédure et le droit applicable peuvent varier d’une matière à l’autre.

La justice administrative signifiera donc pour nous matière administrative et plus précisément contentieux administratif, vocable riche de particularités tant du point de vue de la forme que du fond.

L’existence d’un ordre de juridiction unique présente certes des vertus simplificatrices, mais ne tient pas compte des spécificités de tous les types de contentieux.

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C’est pourquoi, prenant en considération la particularité de l’État et de ses démembrements dotés par conséquent de prérogatives de puissance publique liées à la poursuite d’objectifs d’intérêt général, le législateur a prévu une procédure particulière pour le règlement des contentieux administratifs.

Cette procédure, prévue par les articles 729 et suivants du code de procédure civile, pose le principe d’un recours administratif préalable38, à peine d’irrecevabilité pour toute requête visant l’État et ses démembrements.

38 L’article 729 du code de procédure civile (CPC) dispose que : « Toute action en justice doit être précédée d’une demande adressée à l’autorité administrative désignée pour recevoir l’assignation aux termes de l’article 39. Le silence gardé plus de quatre mois par l’autorité saisie vaut décision de rejet. L’assignation doit, à peine d’irrecevabilité, être saisie dans le délai de deux mois qui suit, soit l’avis donné de la décision de l’administration, soit l’expiration du délai de quatre mois valant décision implicite de rejet. Elle doit, à peine de nullité, viser la réponse implicite ou explicite donnée par l’administration à la demande préalable. Si c’est l’administration qui est demanderesse, l’assignation est délivrée à la requête du ministre compétent ou à celle des autorités visées à l’article 39 ».

Les dispositions dudit article du CPC précisent que :

« Sont assignés :

1. l’État en la personne de l’agent judiciaire de l’État ou en ses bureaux, à charge pour ce dernier de saisir le fonctionnaire compétent pour plaider au fond, s’il y a lieu;

2. les établissements publics de toute nature en la personne de leur représentant légal ou en ses bureaux; 3. les communes en la personne du maire à son domicile ou au siège de la municipalité;

4. les autres collectivités publiques en la personne de leur représentant légal. Dans les cas ci-dessus, l’original est visé par celui à qui copie de l’exploit est laissée: en cas d’absence ou de refus, le visa est donné par le Procureur de la République auquel, en ce cas la copie est laissée;

5. les sociétés de commerce tant qu’elles existent en leur maison sociale ou au lieu de leur principal établissement et s’il n’y en a pas en la personne ou au domicile de l’un de leurs représentants légaux; 6. les unions et directions de créanciers en la personne ou au domicile de l’un des syndics ou directeurs; 7. ceux qui n’ont aucun domicile connu au Sénégal sont assignés au lieu de leur résidence actuelle; si le

lieu n’en est pas connu l’exploit est exposé au tableau d’affichage du tribunal où la demande est portée; une seconde copie est donnée au Procureur de la République lequel vise l’original;

8. ceux qui habitent à l’étranger peuvent être assignés au parquet du Procureur de la République près le tribunal régional dans le ressort duquel la demande est portée; celui-ci vise l’original et envoie la copie au ministre de la Justice ou à toute autre autorité déterminée par les conventions diplomatiques. »

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2. Des règles dérogatoires du droit commun.

Outre cet aspect procédural sur l’action en justice contre l’administration, cette dernière en tant que justiciable bénéficie d’un certain nombre de privilèges qu’on peut considérer à certains égards d’exorbitants du droit commun :

immunité d’exécution de l’article 19439 du code des obligations civiles et commerciales (COCC) qui l’a protège de l’action forcée sur son patrimoine. Immunité étendue aux personnes morales de droit privé concessionnaires de service public, cette immunité de l’article 194 parce que partie du COCC s’applique même lorsque le droit applicable à l’Administration est le droit privé ;

interdiction de lui faire des injonctions (ou obligations de faire ou de ne pas faire), de la mettre sous astreintes ;

faculté de faire prononcer par le juge de cassation en vertu de (l’article 54 de la loi organique sur la Cour suprême) le sursis à exécution des décisions définitives prononcées contre elle, objet de recours de cassation lorsque de telles décisions sont susceptibles de lui causer un préjudice irréparable40 ;

en matière contractuelle, possibilité d’introduire dans l’acte contractuel des dispositions unilatérales imposables au cocontractant, non applicabilité de la règle non adimpleti contractus, pouvoir de modification unilatérale de contrat, pouvoir de résiliation administrative du contrat, etc. ;

responsabilité ni générale ni absolue de l’administration, dont le fonctionnement défectueux s’apprécie en tenant compte de la rupture du service, des difficultés qu’elle

39 L’article 194 du code de procédure civile en son alinéa 2 dispose : « Il n’y a pas d’exécution forcée ni de mesures conservatoires contre l’Etat, les collectivités locales et les établissements publics. Lorsque l’exécution forcée et les mesures conservatoires sont entreprises à l’égard de personnes morales autres que celles-ci-dessus énumérées et sont de nature à porter gravement atteinte à la continuité du service public, le juge peut, pour prévenir ou mettre fin au trouble, prendre toutes mesures appropriées. »

40 Dans l’arrêt n° 5 du 23 janvier 1985 ORTS/ Mansour Seck et autres, le juge de cassation à l’occasion de la saisie de véhicules de cet établissement public a prononcé le sursis à exécution de la saisie opérée à cause de la gêne fonctionnelle que pourrait causer une telle privation de l’ORTS dans son fonctionnement en tant que service public.

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rencontre et des moyens dont elle dispose, les tiers ne pouvant obtenir réparation que d’une partie du dommage anormal et spécial que leur a causé l’administration41 ;

protection spéciale de ses actes qui ne peuvent être remis en cause en annulation que par une procédure appropriée, volontairement balisée d’écueils et diligentée devant la plus haute juridiction nationale à savoir le Conseil d’État, ce qui ne rapproche point cette forme de justice de son justiciable ;

faculté de se faire justice dans certains cas à elle-même par le privilège de l’exécution d’office ou même par recours à la force publique sans passer par l’investiture du juge, notion liée au privilège du préalable qui lui permet de modifier le droit par la prise d’un acte administratif revêtu du caractère exécutoire de plein droit ;

non opposabilité du taux de dernier ressort à l’administration qui peut toujours faire appel.

En effet l’article 732 du code pénal dispose que : « les jugements en matière administrative sont toujours susceptibles d’appel, l’appel est toujours suspensif de l’exécution du jugement ». En conséquence, pas d’exécution provisoire en matière administrative. Un tel justiciable bénéficiaire d’un droit inégalitaire à son profit peut paraître redoutable même dans un cadre de primauté du droit, mais cette armature dont il est revêtu n’en fait pas moins un justiciable soumis à la légalité, seule sa vocation à sauvegarder l’intérêt de tous, face à l’intérêt des particuliers, lui vaut de telles attributions, lesquelles ne peuvent inquiéter que lorsque les hommes qui personnifient l’administration la détournent de sa vocation première et abusent de ces pouvoirs à des fins non identifiables à l’intérêt de tous, ce que la justice administrative a vocation de prévenir et de guérir. C’est à ce stade qu’interviennent les rapports entre les administrés dans l’exercice de leurs droits et l’administration, devant cette justice administrative conçue dans l’ordre juridictionnel unique qui prévaut au Sénégal où les ordres judiciaire et administratif se confondent devant le juge.

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§ 2. Le schéma institutionnel.

L’architecture institutionnelle mise en place va reposer sur des juridictions de droit commun, c’est-à-dire des juridictions ayant des compétences larges touchant plusieurs matières (A), et des juridictions spécialisées ne traitant que de contentieux spécifiques (B).

A.- Les juridictions de droit commun.

Si le principe des juridictions de droit commun est posé par l’octroi de compétences larges à des juridictions déterminées (1), ce principe subit des atténuations qui brouillent la délimitation des compétences (2).

1. Le principe des juridictions de droit commun.

Les juridictions de droit commun sont les juridictions qui ont des compétences étendues à plusieurs matières. C’est ainsi que les TPI constituent les juridictions de droit commun en matière correctionnelle, en matière civile et commerciale et en matière de plein contentieux.

Les justices de paix sont les juridictions de droit commun en matière familiale et successorale, en matière de rectification d’erreurs matérielles dans les actes d’état civil et en matière contraventionnelle.

2. Les tempéraments au principe.

Plusieurs tempéraments sont apportés par la loi au principe de juridictions de droit commun. C’est ainsi que le TPI, juridiction de droit commun en matière correctionnelle, est privée du traitement de trente-quatre délits au profit de la justice de paix42. Ladite juridiction, qui est la juridiction de droit commun en matière familiale, est elle-même privée de la connaissance de l’attribution préférentielle et de la vente sur licitation-partage.

À l’aune de la pratique, ces dérogations vont être sources de conflits de compétences et parfois causes de retards dans le traitement des contentieux, puisque, dans certaines affaires