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Cette section met ainsi en lumière les pratiques de collaboration entre l’orthopédagogue et l’enseignante de chaque dyade. Tel que mentionné, les interventions privilégiées par les orthopédagogues correspondent à la fois à des pratiques de collaboration. Ces interventions sont spécifiques à l’une ou l’autre des modalités. Une prise en compte du nombre d’énoncés distincts à chacune des modalités par dyade permet de relever respectivement, à l’aide de ce que les participantes en disent, l’importance accordée à cette modalité. Le tableau 4.3 ci-dessous indique le nombre d’énoncés portant sur chaque

modalité d’accompagnement par participante. Les pratiques de collaboration pour chaque dyade sont ensuite décrites de manière succincte dans les rubriques qui suivent.

Tableau 4.3 Importance accordée par dyade aux modalités d’accompagnement par les orthopédagogues

4.3.1 Les pratiques de collaboration de la dyade 1

La dyade 1, qui en est au début de la mise en œuvre du modèle RàI, semble accorder davantage d’importance à deux modalités d’accompagnement : 1) l’implication de l’orthopédagogue aux activités de formation continue (n= 18 et n=18) et 2) la consultation (n=22 et n=13). Par ailleurs, un nombre élevé d’énoncés sur le soutien est comptabilisé. En regard à cette modalité, l’E1 dénonce que des moyens de soutien aient été imposés par la direction d’établissement : « J’ai été insultée comme prof quand on m’a envoyé un orthopédagogue dans ma classe pour animer un enseignement explicite d’une stratégie de lecture. J’ai bien compris que ce n’était pas pour mes élèves qu’on faisait ça. J’étais vraiment fâchée! » Selon cet extrait, imposer une intervention particulière ne semble pas prendre en compte ni l’expertise ni ses besoins spécifiques des enseignantes accompagnées.

L’E1 dénonce aussi un manque d’outils pédagogiques au 2e cycle : « Au 2e cycle, je trouve que c’est là où on est le moins outillés. (…) Je trouve vraiment bien de faire le palier 2 avec mes élèves. Mais pour ce faire, j’ai besoin qu’on me nourrisse en matériel. »

En ce sens, le nombre élevé de citations pour l’E1 (n=26) s’inscrit davantage dans la dénonciation que le besoin. Quant à l’O1, elle énonce fréquemment le soutien (n=27) qu’elle dépeint utiliser auprès d’autres enseignantes qu’E1 qui, elle, semble avoir « juste de besoin de lui expliquer et tout va être appliqué. Avec d’autres enseignantes, je vais modéliser en classe. » (O1). En ce sens, la dyade 1, de par ses propos, n’accorde pas une grande importance à cette modalité.

Ces deux modalités d’accompagnement auxquelles la dyade 1 accorde de l’importance viennent éclairer leurs pratiques de collaboration. D’abord, l’intervention relative à l’implication des orthopédagogues aux activités de formation continue est la médiation.

Celle-ci vise à informer et à échanger sur le modèle RàI et les pratiques d’enseignement efficaces de la lecture de manière à orienter les prises de décisions. Malgré son caractère formel, cette modalité n’implique pas d’engagement de la part des enseignantes. En second lieu, la dyade 1 accorde à la fois une grande importance à la consultation. L’O1 précise rencontrer les enseignantes « vraiment beaucoup de façon spontanée. » La consultation consiste en une activité dialogique dont les interventions sont le partage d’informations, le dialogue réflexif et la modélisation indirecte. Cette seconde modalité se caractérise par une relation d’entraide dialogique à sens unique de type informel. Par conséquent, les pratiques de collaboration de la dyade 1 constituent principalement en de l’échange d’informations et de matériel pédagogique. Elles sont principalement décrites à sens unique et s’actualisent en contexte surtout informel.

4.3.2 Les pratiques de collaboration de la dyade 2

Les résultats ont montré qu’au terme de quatre années de mise en œuvre du modèle RàI, la dyade 2 semble suffisamment recourir aux pratiques d’enseignement efficaces de la lecture. La dyade accorde par ailleurs une grande importance à la modalité coordination de l’enseignement (n=25 et n=38) où les orthopédagogues interviennent par la planification des rencontres collaboratives, le dialogue réflexif et la modélisation indirecte. Malgré le leadership endossé par les orthopédagogues, cette modalité est caractérisée par le partage des expertises, des responsabilités et des compétences ainsi

qu’un cadre commun de référence. En effet, il est décrit qu’une planification de l’enseignement est relaissée en contexte de collaboration formel et structuré. Ces caractéristiques favoriseraient non seulement l’opérationnalisation du modèle RàI, mais, en regard des résultats, elles occasionneraient à la fois un codéveloppement professionnel : « La formation continue, on s’en fait nous-mêmes. On se tient à jour, on s’informe. » (E2). En effet, il appert que cette dyade collabore, ainsi qu’avec d’autres enseignantes, à résoudre des problèmes complexes et à réguler l’enseignement concerté aux trois paliers d’intervention.

Par ailleurs, ertains propos de l’O2 décrivent qu’avant d’atteindre une telle collaboration, elle ait dû, dans les années antérieures, recourir aux autres modalités d’accompagnement recensées :

Avant, j’allais beaucoup modéliser en classe. Maintenant c’est plus rare parce que les enseignantes sont rendues assez avancées dans leur pratique. Donc, j’ai juste besoin d’expliquer en profondeur ce qui doit être enseigné au moment où je le présente. Elles l’expérimentent, puis elles me reviennent avec des commentaires qui nous aider à nous ajuster. (O2)

4.3.3 Les pratiques de collaboration de la dyade 3

La dyade 3 en est à une deuxième année de mise en œuvre du modèle RàI. Celle-ci accorde une plus grande importance aux modalités consultation (n=33 et n=16) et soutien (n=27 et n=16). D’abord, les interventions de consultation, activité purement dialogique, sont le partage d’informations, le dialogue réflexif et la modélisation indirecte. Celles-ci sont associées à des pratiques collaboratives inscrites dans une relation d’entraide ponctuelle à sens unique de type surtout informel. En second lieu, les orthopédagogues soutiennent les enseignantes par des interventions plus dynamiques et interactives en proposant des outils pédagogiques (échange de matériel) et par la modélisation directe, dont le co-pilotage de l’enseignement. Ces interventions renvoient à des pratiques collaboratives caractérisées par une ouverture et une mise en commun des pratiques d’enseignement.

Par ailleurs, ayant montré des besoins plus grands d’appropriation des pratiques d’enseignement efficaces de la lecture, l’E3 semble bénéficier d’un accompagnement en alternance entre la consultation et le soutien, soit entre la théorie et la pratique. Cette appropriation de nouvelles pratiques d’enseignement semble générer une certaine insécurité comme le montre cette citation de l’E3 : « Si O3 était toujours à côté de moi quand je planifie, il me semble qu’elle pourrait répondre à toutes mes questions. Dans un monde idéal, elle serait à côté de moi, juste pour qu’elle me dise : ça, c’est correct. Ici, il faudrait faire autrement… » Elle mentionne aussi : « Si je pouvais faire du team teaching avec l’orthopédagogue, elle, elle saurait quoi dire et comment intervenir. Elle ciblerait vraiment les besoins spécifiques des élèves. » En regard à ces propos, il semble que de briser l’isolement aurait pour effet de rassurer les enseignantes lorsque vient le temps d’expérimenter de nouvelles pratiques d’enseignement.

En conclusion à cette rubrique, il semble qu’une relation entre le nombre d’années de collaboration à la mise en œuvre du modèle RàI et les pratiques de collaborations existe.

Enfin, un autre constat réside dans l’importance particulière apportée par les trois orthopédagogues à la coordination de l’enseignement que les trois enseignantes. En effet, cette modalité est nettement plus souvent citée par les orthopédagogues que par les enseignantes. Par ailleurs, les enseignantes mentionnent que les orthopédagogues sont

« un pilier » et « le pivot » de la mise en œuvre du modèle RàI dans leur école respective.