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Prévention et traitement des désordres osseux et minéraux associés à la MRC (CKD-MBD)

DIETETIQUES DE L’INSUFFISANCE

IV.1. Principes généraux

IV.2.2. Traitements adjuvants

IV.2.2.3. Prévention et traitement des désordres osseux et minéraux associés à la MRC (CKD-MBD)

Cette prévention doit aborder simultanément les trois paramètres que sont l’apport de calcium, celui de vitamine D et le contrôle de la phosphorémie.

IV.2.2.3.1. Equilibre phosphocalcique

Comme il a été développé précédemment, l’apport alimentaire en calcium est souvent insuffisant pour couvrir les besoins qui sont de l’ordre de 1000 mg/m²/j et un supplément doit être prescrit sous la forme d’un sel comme le carbonate ou l’acétate. Pour le contrôle de la phosphorémie, considéré impossible avec la seule prescription diététique dès que la clairance glomérulaire s’abaisse au-dessous de 20 à 30 ml/min, il est presque toujours nécessaire d’administrer un chélateur du phosphore. Les sels de calcium ont été longtemps les seuls disponibles dans ce but, administrés lors des repas, à dose croissante, pouvant atteindre plusieurs grammes par jour (Tableau XXIX), pour maintenir la phosphorémie autour des valeurs normales pour l’âge, en tout cas inférieure à 2 mmol/l. La difficulté souvent rencontrée dans la prescription des sels de calcium chez l’enfant est la lassitude et le dégoût, source d’une mauvaise observance. (188) (4)

IV.2.2.3.2. Supplémentation en vitamine D

Il est également nécessaire de prescrire de la vitamine D₃, notamment lorsque le taux plasmatique de la 25-hydroxy-vitamine D₃ est inférieur à 30 ng/mL (soit 75 nmol/L).

Tous les laits 1er âge pour nourrissons sont systématiquement enrichis en vitamine D à la dose de 1 à 2,5 µg pour 100 kcal (soit 0,25 à 0,75 µg pour 100 kJ). (132)

Pour l’enfant plus grand, la supplémentation peut se faire soit sous forme de 1,25 (OH)₂ D₃ (Rocaltrol®) ou de 1-alpha (OH) D₃ (Un-alpha®) ou encore de 25 (OH) D₃ (Dedrogyl®) (Tableau XXIX). Les doses doivent être adaptées aux valeurs plasmatiques du calcium (la fraction ionisée), du phosphore, des phosphatases alcalines et de la parathormone.

Tableau XXIX : Médicaments utilisables pour le traitement des anomalies minérales osseuses (138)

Le calcitriol et l’alfacalcidol sont largement utilisés chez la population pédiatrique et ont prouvé une grande efficacité dans le freinage de la sécrétion de la PTH, ainsi que dans l’amélioration de la croissance (189, 190) (61). Cependant, leur administration a été liée à une hypercalcémie, d’autant s’il y a

administration concomitante de chélateurs calciques de phosphore ; raison pour laquelle de nouvelles formes vitaminiques susceptibles de minimiser ce risque d’hypercalcémie avec la même efficacité sur le contrôle de l’hyperparathyroïdie sont à l’étude actuellement. Il s’agit là du 22-oxacalcitriol (en cours d’étude au Japon), du 19-nor-1,25-dihydroxy vitamine D₂ (paricalcitol) et du 1α-hydroxy vitamine D₂ (doxercalciferol) aux États-Unis. En effet, les formes orales de ces deux derniers analogues vitaminiques ont été déjà approuvées chez les adultes avec IRC stade 3 à 5, mais pas encore chez les enfants (191) (61).

Une nouvelle classe thérapeutique est utilisée dès à présent avec succès chez l’adulte pour contrôler l’hyperparathyroïdie : les calcimimétiques. Ces molécules prennent la place du calcium sur les récepteurs sensibles au calcium des cellules parathyroïdiennes, ce qui entraîne l’inhibition de la sécrétion de la PTH sans le risque d’hypercalcémie, mais il faudra encore d’autres études avant leur utilisation chez l’enfant. (192) (4)

Il reste à noter qu’une analyse post-hoc de l’essai clinique ESCAPE10 a montré qu’un taux de 25-OH vitamine D ≥ 50 nmol/l est associé à une meilleure préservation de la fonction rénale, une diminution de la protéinurie, et un meilleur contrôle de la pression artérielle chez des enfants avec une maladie rénale chronique (MRC) (193).

Une étude encore plus récente a également démontré cet effet néphroprotecteur de la vitamine D (194) et suggère de plus un lien entre vitamine D et système rénine angiotensine aldostérone (SRAA). En effet, il semble que la vitamine D pourrait inhiber la transcription du gène de la rénine et

10

Effet bénéfique sur la progression de l’insuffisance rénale d’un contrôle strict de la pression artérielle par inhibiteurs de l’enzyme de conversion.

que l’angiotensine II pourrait diminuer l’expression rénale de Klotho (corécepteur du FGF). Ces interactions entre le SRAA et les voies de l’axe vitamine D-FGF23-Klotho suggèrent que la modulation d’un de ces systèmes peut avoir des effets positifs sur l’autre. En particulier, l’activation du récepteur de la vitamine D (VDR) aurait un effet anti-protéinurique et anti-inflammatoire via la modulation du SRAA.

En conclusion, une supplémentation en vitamine D afin d’obtenir un taux minimum de 50 nmol/L (20 ng/ml) semble être une mesure simple et efficace pour ralentir la progression de la MRC en traitement adjuvant des bloqueurs du SRAA.

IV.2.2.3.3. Pour un contrôle optimal des désordres osseux et minéraux

En cas d’IRC modérée (DFG >30 ml/min/1.73 m²), un taux plasmatique normal de PTH est un indicateur d’une vitesse normale de renouvellement osseux. Chez les enfants dialysés, le taux de la PTH peut atteindre 2 à 5 fois la limite supérieure des valeurs normales sans pour autant être considéré nocif (59).

Quant aux phosphatases alcalines, leur dosage permet de surveiller la réponse au traitement par la vitamine D : une diminution progressive indique généralement une amélioration des lésions histologiques d’ostéite fibreuse (195) (61). Néanmoins, des taux anormalement bas seraient plutôt en rapport avec une ostéopathie adynamique, notamment chez les enfants au stade pré-dialytique recevant des doses importantes de vitamine D et des chélateurs calciques de phosphore. (196) (61)

Le produit phosphocalcique doit être maintenu en-dessous de 5.0 mmol²/l² (soit <60 mg²/dl²) (59). En effet, l’élévation de ce produit est corrélée avec une majoration du risque de formation des calcifications vasculaires (197). Dans ce cas, il faut arrêter l’administration de la vitamine D et remplacer les chélateurs calciques de phosphore par des alternatifs non calciques (59) (Figure 15), d’autant plus s’il existe une hypercalcémie.

Enfin, l’ensemble de ces prescriptions doit être attentivement suivi par un contrôle régulier tous les 15 jours puis tous les mois de la calcémie, de la phosphorémie et des phosphatases alcalines. Le dosage de la PTH intacte (1-84) et de ses fragments C-terminaux en utilisant plusieurs anticorps est également utile tous les 6 mois par exemple. Une radiographie annuelle de la main et d’un membre inférieur permet de vérifier l’absence de lésions osseuses de rachitisme et/ou d’hyperparathyroïdie. En cas de déformations importantes, une correction chirurgicale orthopédique peut être utile. Elle ne sera jamais effectuée avant d’avoir réglé le problème biologique par un traitement médical approprié.

Figure 10 : Clinical algorithm for treatment of elevated calcium phosphorus product in children with CRF (60)

Ca-cont : Calcium containing Ca-free : Calcium free

Phos-binder : phosphate binder Vit D : vitamine D

ADBD : adynamic bone disease