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Prévention et traitement de l’anémie rénale

DIETETIQUES DE L’INSUFFISANCE

IV.1. Principes généraux

IV.2.2. Traitements adjuvants

IV.2.2.1. Prévention et traitement de l’anémie rénale

Le dépistage de l’anémie se fait par la surveillance de l’hémogramme selon le rythme suivant (36, 163):

DFG > 60 mL/min/1,73 m2 : en cas de point d’appel clinique ;

DFG entre 30 et 59 mL/min/1,73 m2 : une fois par an ;

DFG < 30 mL/min/1,73 m2 : deux fois par an.

La prévention de l’anémie doit avoir lieu dès que le DFG est inférieur à 35 ml/min/1,73 m² (41) (2). Pour ce faire, il faut agir sur plusieurs axes : correction d’une éventuelle carence martiale, supplémentation en vitamine B12 et en folates, et surtout administration de l’érythropoïétine recombinante humaine (rHu-EPO)

IV.2.2.1.1. Correction de la carence martiale

En effet, un bilan martial doit être effectué avant de commencer le traitement par les agents stimulant l’érythropoïèse (ASE) puisqu’une carence en fer serait responsable d’une résistance au traitement par l’EPO. La carence en fer est évaluée par une baisse de la ferritinémie (< 100 μmol/l), une hypochromie et une saturation de la transferrine inférieure à 20 %. La ferritinémie peut toutefois être tout à fait normale dans un contexte inflammatoire. (37)

Au traitement causal éventuel d’une carence martiale, sera associée une supplémentation en fer habituellement per os à la dose de 5 à 10 mg/kg de fer élémentaire par jour en deux prises à distance des repas, ou par voie veineuse si la déplétion est sévère, en utilisant par exemple un complexe d’hydroxyde ferrique et saccharose à diluer et à administrer en perfusion lente strictement intraveineuse à la dose de 2 mg/kg par semaine pendant 4 à 12 semaines, une dose test devant précéder la première administration.

Une carence en acide folique, estimée par un dosage de folates érythrocytaires, et en vitamine B12 doivent aussi être corrigées. Ces corrections sont indispensables avant d’envisager un traitement par érythropoïétine. Il faut de toute façon poursuivre l’administration de fer pour assurer le maintien des stocks qu’il faut surveiller régulièrement. (4)

Quant à la supplémentation en carnitine, les données actuelles ne permettent pas d’en prouver un bénéfice thérapeutique chez ces patients. (155)

IV.2.2.1.2. Traitement par rHu-EPO

Lorsque le taux d’hémoglobine n’atteint pas les valeurs normales pour l’âge et le sexe (41) malgré ces mesures de correction, un traitement par les agents stimulants de l’érythropoïèse sera envisagé. Leur prescription initiale est réservée aux médecins hospitaliers. Les KDIGO recommandent des doses initiales de 20–50 UI/kg 3 fois par semaine pour les époïétine alpha (Eprex®) et beta (Neorecormon®), et 0,45 μg /kg une fois par semaine ou 0,75 μg /kg toutes les 2 semaines pour la darbepoïétine alpha (Aranesp®) chez l’enfant de plus de 11 ans. (36)

Le tableau XXVIII (164) précise les caractéristiques des principales érythropoïétines synthétiques utilisées dans la correction de l’anémie rénale.

Tableau XXVIII : Érythropoïétines synthétiques : demi-vie et fréquence d’administration thérapeutique (164)

DCI* Spécialité Lignée cellulaire Demi-vie Fréquence d’administration Epoiétine α Epoiétine β Epoiétine δ NESP = Darbépoiétine α CERA Eprex Binocrit Neorecormon Dynepo Aranesp Micera Ovaire d’hamster chinois = OHC OHC Cellules humaines (HT-1080) OHC OHC 6-9 h 6-9 h 5-13 h 25 h 130-140 h 3 fois/semaine 1 fois/semaine 1 fois/mois

*Dénomination commune internationale

L’objectif est d’augmenter le taux d’hémoglobine de 1 à 2 g/dL par période de 4 semaines jusqu’aux valeurs recommandées. Une augmentation insuffisante de l’hémoglobine fait augmenter la dose par palier de 75UI/kg/semaine jusqu’à atteindre la cible, les doses maximales étant de

450UI/kg/semaine mais pouvant atteindre 600 UI/kg/semaine chez certains patients. (138)

Une dose de l’ordre de 150 à 300 U/kg/semaine est ensuite nécessaire pour maintenir ce niveau. Cette dose est d’autant plus élevée exprimée par kg de poids que l’enfant est plus jeune car la demi-vie du médicament y est plus courte. (165)

Des cas d’érythroblastopénie ayant été rapportés sous époïétine alpha (Eprex®) administrée par voie sous-cutanée du fait de l’apparition d’anticorps neutralisants, ce dernier médicament ne peut être administré que par voie veineuse ; en revanche, on peut continuer à utiliser la voie sous-cutanée avec l’époïétine bêta (Neorecormon®) et la darbepoïétine alpha (Aranesp®). Quelle que soit la forme d’érythropoïétine utilisée, la voie veineuse est préférée chez l’enfant hémodialysé car moins douloureuse. (4)

Dans tous les cas, un traitement par érythropoïétine doit être accompagné d’une surveillance régulière du taux d’hémoglobine, de l’hématocrite et des paramètres martiaux de façon à ajuster les doses et à déceler une mauvaise réponse au traitement.

Il est à noter que la transfusion sanguine, sauf cas particulier, doit être évitée chez l’enfant insuffisant rénal dans la mesure où elle risque d’entraîner l’apparition d’anticorps cytotoxiques pouvant compromettre le pronostic d’une transplantation rénale ultérieure. Si toutefois une transfusion était administrée, il est impératif de rechercher systématiquement ces anticorps 15 jours plus tard. (166)

IV.2.2.1.3. Facteurs de mauvaise réponse au traitement

L'érythropoïétine recombinante humaine (rHu-EPO) a transformé la prise en charge des patients en insuffisance rénale chronique (IRC). Cependant, un nombre non négligeable de patients conservent une hémoglobine inférieure aux cibles thérapeutiques malgré l'utilisation de fortes doses d'agents stimulant l'érythropoïèse (ASE), et de nombreux facteurs de résistance au traitement ont été identifiés (167) :

 La carence en fer est la principale cause de résistance au traitement par ASE, et un traitement martial doit être systématiquement prescrit chez les patients en IRC qui reçoivent un traitement par rHu-EPO.  Au cours des maladies infectieuses et du syndrome inflammatoire, la

réponse au traitement est altérée du fait de la mauvaise disponibilité du fer et de la synthèse de cytokines inflammatoires qui régulent négativement l'érythropoïèse.

 Un état de dénutrition avec carences en carnitine, vitamines B9, B12 et C sont associés à une augmentation des besoins en ASE chez les patients en IRC traités en hémodialyse.

 L'utilisation de médicaments myélotoxiques, l'hyperparathyroïdie sévère et l'intoxication aluminique sont également des causes de résistance au traitement.

Figure 8 : Prise en charge de l’anémie rénale (36)

IRC : insuffisance rénale chronique Hb : hémoglobine

TSat : taux de saturation de la transferrine rHuEPO : érythropoïétine recombinante humaine